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03/06/2020 | FRANCE | N°18/10994

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 03 juin 2020, 18/10994


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 03 JUIN 2020

(n° 2020/ , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/10994 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6PFE



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Janvier 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL section RG n° 13/02619





APPELANT



M. [K] [Y]

[Adresse 1]

représenté par Me Philippe MERY, a

vocat au barreau de CHARTRES





INTIMEE



SARL LILY

[Adresse 2]

représentée par Me Cédrick DUVAL, avocat au barreau D'AIX EN PROVENCE







COMPOSITION DE LA COUR :



En appl...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 03 JUIN 2020

(n° 2020/ , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/10994 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6PFE

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Janvier 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL section RG n° 13/02619

APPELANT

M. [K] [Y]

[Adresse 1]

représenté par Me Philippe MERY, avocat au barreau de CHARTRES

INTIMEE

SARL LILY

[Adresse 2]

représentée par Me Cédrick DUVAL, avocat au barreau D'AIX EN PROVENCE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Février 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne BERARD, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Anne BERARD, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Pauline MAHEUX, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, le prononcé de l'arrêt, initialement fixé dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, ayant été modifié en raison de l'état d'urgence sanitaire,

- signé par Madame Anne BERARD, Présidente de chambre et par Madame Pauline MAHEUX, Greffière présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

M. [Y] a été engagé à compter du 21 août 1991 comme équipier polyvalent dans un restaurant à l'enseigne de Mac Donald. Il a exercé dans différents restaurants de cette enseigne et bénéficié de promotions successives.

Au 31 octobre 2011, il a signé un avenant à son contrat de travail avec la société Lily à effet du 4 octobre 2010, en qualité de directeur statut Cadre, Niveau IV, Echelon 4 de la Convention collective nationale de la Restauration rapide, son lieu de travail étant un restaurant à [Localité 3].

Il a signé un avenant à son contrat de travail le 1er janvier 2012.

La société emploie plus de dix salariés.

Un avertissement lui a été notifié le 2 octobre 2012, qu'il a contesté par courrier du 16 octobre 2012.

M. [Y] a été en arrêt de travail du 8 octobre au 13 novembre 2012, puis du 16 au 30 novembre 2012.

Il a été convoqué le 4 janvier 2013 à un entretien fixé le 16 janvier 2013 préalable à une mesure disciplinaire. Suite à sa carence, il a été de nouveau convoqué le 22 janvier à un entretien fixé le 4 février 2013 et l'employeur lui a notifié un deuxième avertissement le 21 février 2013.

Il a été en arrêt de travail à compter du 7 janvier 2013 jusqu'au 11 avril 2013.

Il a sollicité une visite de reprise en avril 2013.

Dans un avis du 12 avril 2013, le médecin du travail a conclu à son inaptitude définitive 'à tout poste avec ce franchisé' en une seule visite en considération d'un danger immédiat à la reprise du travail.

M. [Y] a été convoqué le 21 mai 2013 à un entretien préalable fixé le 29 mai 2013 en vue d'un éventuel licenciement.

Il a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre en date du 4 juin 2013.

Estimant son inaptitude consécutive à un harcèlement moral, M. [Y] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Créteil le 24 juillet 2013 aux fins notamment de voir juger son licenciement nul.

Par jugement du 15 janvier 2015, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et a débouté la société Lily de sa demande reconventionnelle.

Le 29 janvier 2015, M. [Y] a régulièrement interjeté appel.

Par conclusions visées par le greffe et développées oralement à l'audience du 17 février 2020, auxquelles il est expressément fait référence, M. [Y] demande à la Cour d'infirmer le jugement et de :

- annuler l'avertissement du 2 octobre 2012,

- annuler l'avertissement du 21 février 2013,

- prononcer la nullité du licenciement,

- condamner la SAS Lily à payer à M. [Y] les sommes suivantes :

- 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement.

- 10.295,51 euros à titre d'indemnité de préavis,

- 10.000 € au titre des frais non compris dans les dépens.

- Ordonner la délivrance, sous astreinte journalière de 100 € passé le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, d'un certificat de travail comportant les mentions suivantes :

- date d'entrée : 21.08.1991

- date de sortie : 04.06.2013

- emplois successivement occupés :

21 août 1991 : équipier polyvalent niveau III échelon 1

1er juin 1996 : assistant stagiaire niveau III échelon 2

1er décembre 1997 : assistant junior niveau III échelon 3

1er janvier 1999 : assistant de direction niveau IV échelon 1

23 novembre 2001 : directeur adjoint junior niveau IV échelon 2

1er mai 2005 : directeur adjoint junior niveau IV échelon 3

1er janvier 2012, directeur niveau IV échelon 4.

- débouter la société Lily de toutes ses demandes.

Par conclusions visées par le greffe et développées oralement à l'audience du 17 février 2020, auxquelles il est expressément fait référence, la société Lily demande de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [Y] de toutes ses demandes, de l'infirmer en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle et de condamner M. [Y] à lui verser une somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS :

Sur les avertissements

Aux termes des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail, il appartient au juge d'apprécier si les faits reprochés au salarié sont établis et s'ils sont de nature à justifier une sanction qui doit être proportionnée à la faute commise. Le juge forme sa conviction au vu des éléments retenus par l'employeur pour prendre la sanction et de ceux fournis par le salarié à l'appui de ses allégations. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

sur l'avertissement du 2 octobre 2012

Un avertissement a été notifié au salarié le 2 octobre 2012 pour avoir exercé une pression sur M. [T], homme de maintenance, l'ayant conduit à ne plus pouvoir supporter de travailler dans le restaurant et à abandonner son poste.

L'employeur lui faisait aussi grief d'avoir modifié le pointage du salarié, au prétexte de son manque d'efficacité dans l'exécution des tâches, et d'avoir été humiliant au lieu de lui appliquer un rappel à l'ordre ou une convocation disciplinaire.

M. [Y] a contesté cette sanction en l'expliquant par les liens de famille de M. [T] avec la directrice du restaurant de [Localité 7].

Il justifie par l'attestation de M. [I], délégué du personnel ( pièce salarié 73) que M. [T] n'exécutait pas toujours les tâches demandées et a même été retrouvé une fois en train de dormir.

Pour autant, les manquements de M. [T] ne sauraient justifier de la part de M. [Y], en sa qualité de directeur, un comportement autre que l'exercice adapté d'un pouvoir disciplinaire respectueux et conforme à la réglementation du travail.

Tel n'est pas le cas de propos dénigrants ou de dépointages, établis par les pièces produites aux débats.

Dans une lettre de 18 septembre 2012, la mère de M. [T] a fait grief à l'employeur des humiliations vécues par son fils de la part du sous-directeur et du directeur du restaurant, reprochant notamment à M. [Y] de le dénigrer par des propos calomnieux auprès de ses collègues de travail.

M. [T] (pièce employeur 34) fait quant à lui état dans une attestation des humiliations qu'il dit avoir subies de la part de M. [Y] devant ses collègues ( telle qu'ouvrir son sandwich et ses frites pour vérifier qu'il ne dissimulait rien, le faire suivre à la poste pour vérifier qu'il y allait bien...).

L'attestation de Mme [M], directrice du restaurant de [Localité 8], (pièce employeur 40), atteste pour sa part que M. [Y] est venue la voir pour s'excuser de son comportement envers M. [T] (neveu de Mme [M]), reconnaissant qu'il avait eu un comportement fautif à son égard.

Les faits reprochés à M. [Y] sont établis et la sanction proportionnée, un directeur de restaurant à qui est délégué un pouvoir disciplinaire devant l'exercer dans le respect de la réglementation.

sur l'avertissement du 21 février 2013

Un avertissement a été notifié à M. [Y] le 21 février 2013 pour avoir modifié le 15 décembre 2012 le pointage d'un salarié avec sa propre carte et l'avoir ainsi fait travailler sans interruption de 7h30 à 14h11, heure à laquelle la gérante est intervenue.

M. [Y] ne conteste pas son initiative et verse aux débats l'attestation de Mme FD (pièce 31 salarié) qui explique que M. [Y] a agi ainsi pour mettre fin à la sonnerie de la pointeuse qui les empêchait de travailler, cinq équipiers étant manquants ce jour-là.

Les faits de 'dépointage' reprochés au salarié sont établis.

Dans la lettre d'avertissement, l'employeur fait aussi grief au salarié du mécontentement de certains membres de son équipe relatif à son management.

Si l'employeur fait grief à M. [Y] d'un défaut d'organisation, d'un management inexistant et en appelle à un investisssement professionnel plus soutenu en se référant à un contrôle du 15 décembre 2012 opéré par un conseiller de l'enseigne ayant donné lieu à une mauvaise évaluation, M. [Y] est fondé à relever que cette évaluation n'est pas produite.

Pour autant, l'employeur se réfère aussi au compte-rendu de réunion d'une 'Rap session' du 12 septembre 2012 avec le personnel mettant en cause l'organisation et l'objectivité des plannings établis par M. [Y], que la communication est le point faible du restaurant, que les salariés ne se sentent pas entendus, que M. [Y] est toujours débordé et que les managers ne participent plus aux ouvertures.

C'est vainement que M. [Y] conteste la pertinence de la 'rap session', qui relève du pouvoir de direction de son employeur.

Dans un contexte de répétition de la pratique du dépointage, contraire à la réglementation du travail, alliée à de légitimes préoccupations de l'employeur quant au management de M. [Y], la sanction d'avertissement est proportionnée à la faute.

M. [Y] sera donc débouté de ses demandes d'annulation des avertissements des 2 octobre 2012 et 21 février 2013.

Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.

Sur la nullité du licenciement

M. [Y] demande de dire que son licenciement est nul en soutenant avoir été victime d'un harcèlement moral.

Aux termes de l'article L1152-1 du code du travail 'Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel'.

Aux termes de l'article Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul L1152-3 ''.

Aux termes de l'article L1154-1 du code du travail en sa version applicable à l'espèce, 'Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.

Au soutien de sa demande M. [Y] établit :

- qu'il a déménagé le 1er juillet 2012 de son appartement de [Localité 5] pour s'installer dans une maison à [Localité 6], près de [Localité 4],

- mais il ne justifie nullement que son employeur n'ait pas accepté son initiative et ait entrepris de l'en punir comme il l'allègue dans ses écritures,

- qu'il a fait l'objet de deux avertissements en octobre 2012 et février 2013,

- que des salariés de l'entreprise témoignent de son harcèlement moral. Il produit ainsi :

- une attestation de Mme FD (pièce salarié 31), équipière recrutée en août 2012, qui atteste en avril 2013 qu'elle avait remarqué que M. [Y] était harcelé et que son état se dégradait considérablement. Elle précise qu'il subissait une grande pression, par des 'rendez-vous à chaque rencontre restaurant avec la gérante'.

Mme FD a alerté le 9 avril 2014 M. [Y] par plusieurs SMS en lui demandant de retirer son témoignage craignant d'avoir des problèmes de la part de son employeur. Elle a été convoquée le 23 avril 2014 à un entretien préalable et a fait l'objet d'un avertissement pour un écart de caisse.

- une attestation de M. [W] (pièce salarié 32) qui affirme que Mme [Z] a dit ouvertement à M. [Y] qu'elle allait le virer et qu'elle lui a crié dessus devant les équipiers. L'auteur de l'attestation ne précise pas cependant avoir personnellement assisté à ces faits ni comment il a personnellement constaté que M. [Y] a été licencié abusivement et que ses problèmes ont commencé lorsqu'il a demandé une prime de transport .

- une attestation de Mme [X] (pièce salarié 52) indiquant avoir été témoin le 18 décembre 2012 de l'entretien de M. [Y] et de Mme [Z], que celle-ci l'aurait menacé de le licencier parce qu'il avait demandé le remboursement de ses frais de transport et contesté un avertissement et que le salarié a eu une crise d'angoisse après l'entretien.

Cependant, par une attestation en date du 6 août 2014 ( pièce 72 salarié- 36 employeur), Mme [X] est partiellement revenue sur son témoignage en précisant avoir vu M. [Y] pleurer à la suite de l'entretien avec Mme [Z], mais ne pas avoir été témoin de l'échange, ayant simplement consigné ce que M. [Y] lui en avait raconté. Elle avait, entre ces deux témoignages envoyé un sms le 13 juin 2014, pour lui indiquer croire tout ce qu'il lui avait dit.

- qu'il a été en arrêt de travail à compter du 8 octobre 2012 pour syndrome anxiodépressif,

- qu'il a consulté un psychiatre le 9 novembre 2012 pour des troubles du sommeil et de l'anxiété, liées selon M. [Y] à des relations conflictuelles avec sa hiérarchie et d'un harcèlement professionnel,

- qu'il s'est plaint du harcèlement moral de son employeur auprès de l'inspection du travail par courrier du 16 décembre 2012,

- mais que l'inspection du travail n'a pas donné suite à ce courrier,

- Qu'il a été orienté vers le médecin du travail par un médecin généraliste de [Localité 5] par un courrier du 3 avril 2013, en raison de son syndrome dépressif,

- que le même jour, un psychiatre de [Localité 4] l'a également orienté vers le médecin du travail, estimant que son état de santé le rendait inapte à travailler dans l'entreprise en raison d'un trouble dépressif et anxieux très sévère en rapport direct avec le traumatisme qu'a représenté pour lui le conflit professionnel,

- qu'un médecin exerçant dans la cellule d'appui à la prévention des risques psychosociaux d'un centre de santé de l'Union nationale des Mutuelles d'Ile de France a écrit le 11 avril 2013 au médecin du travail qui allait recevoir le salarié le lendemain pour lui signaler le vécu douloureux par M. [Y] des reproches et avertissements de la hiérarchie ressentis comme très injustes et le syndrome dépressif sévère du salarié,

- qu'il a fait l'objet, le 12 avril 2013, d'une visite de reprise du médecin du travail concluant à une inaptitude définitive au poste de directeur et à tout poste avec ce franchisé en une seule visite,

- qu'il a présenté un syndrome dépressif avec des effets somatiques ainsi qu'il résulte d'un certificat médical d'un médecin généraliste du 11 juin 2013

- qu'il était encore pris en charge pour état dépressif le 20 octobre 2014 par une psychologue de [Localité 4],

Pris dans leur ensemble, ces faits permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

L'employeur justifie cependant que les avertissements notifiés au salarié les 2 octobre 2012 et 21 février 2013 étaient justifiés.

Il justifie avoir aussi appelé l'attention de M. [Y] sur la nécessité d'améliorer la communication au sein de l'entreprise par des remontées négatives du personnel quant à son management.

A cet égard, le fait que la gérante rencontre le directeur du restaurant lors de ses déplacements sur site relève d'un fonctionnement institutionnel normal d'autant qu'il résulte des développements relatifs aux avertissements que le management de M. [Y] était devenu un point d'attention.

S'agissant de l'imputation de l'état de santé de M. [Y] au comportement de la gérante, celle-ci verse aux débats l'attestation circonstanciée de Mme I.L. (pièce employeur 35), affirmant que Mme [Z] était attentive au bien-être des salariés, y compris de celui de M. [Y].

De même, M. RG, délégué du personnel ( pièce employeur 37), atteste n'avoir jamais été témoin d'altercation ou d'attitude irrespectueuse de Mme [Z] envers le personnel, n'avoir jamais entendu le moindre propos rapporté à cet égard.

M. [R], assistant de direction au restaurant de Charenton, confirme les qualités managériales de Mme [Z] et qualifie ses relations professionnelles de respectueuses et courtoises (pièce employeur 38), ce que confirme l'attestation de Mme M.L-H ( pièce employeur 39), y compris dans ses relations avec M. [Y].

Il résulte par ailleurs du témoignage de Mme [M],(pièce employeur 40) que M. [Y] lui a confié que son arrêt de travail ne résultait pas de son avertissement mais de sa fatigue liée aux trajets domicile-travail et qu'il cherchait un emploi dans un autre franchisé à [Localité 4].

M. L.V., gérant d'un établissement franchisé à [Localité 4] (pièce employeur 30) atteste que M. [Y] a contacté sa responsable ressources humaines fin février 2013 à la recherche d'un poste de directeur de restaurant sur [Localité 4], qu'un rendez-vous a été fixé le 2 mars 2013, décommandé le matin-même par l'épouse de M. [Y] et jamais repris.

Le témoignage de M. [T] (pièce employeur 34 déjà citée) souligne que M. [Y] était dans un état d'énervement quotidien depuis son déménagement à [Localité 4] et disait souvent qu'il était fatigué et en avait assez des transports.

Enfin, il résulte du témoignage de Mme [X] ( pièce 72 salarié- 36 employeur) que M. [Y] lui avait demandé de lui faire une attestation pour l'aider à se faire licencier.

Il résulte de ces éléments que l'employeur justifie ses décisions à l'égard de M. [Y] par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et que le choix de M. [Y] de déménager, qui a engendré des conditions de travail plus fatigantes, a dégradé tout à la fois son humeur et son organisation et explique l'impossibilité dans laquelle il s'est trouvé de continuer à travailler sereinement sans que la responsabilité de cette dégradation puisse être imputée à l'employeur.

Outre qu'aucun harcèlement ne peut être imputé à l'employeur, la preuve de l'imputabilité de l'inaptitude du salarié à l'employeur n'est pas davantage rapportée dans ce contexte.

Dès lors, le licenciement de M. [Y] pour inaptitude n'est pas nul et M. [Y] sera débouté de ses demandes de dommages et intérêts et d'indemnité compensatrice de préavis pour nullité du licenciement

Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.

Sur le certificat de travail

Il résulte des fiches de paie et avenants successifs à son contrat de travail que M. [Y] justifiait d'une ancienneté au 21 août 1991 lorsqu'il était salarié en juin 1996 dans un restaurant Mac Donald à [Localité 5], qu'il a été promu assistant junior à effet du 1er décembre 1997 dans ce restaurant, son employeur étant la société Poulton, qu'il a été promu assistant de direction à effet du 1er janvier 1999 par son employeur d'alors, la société Highfield , puis directeur adjoint junior au Mac Donald de [Localité 7] à effet du 23 novembre 2001, son employeur étant alors la société Manda.

Un bulletin de paie de mai 2005 délivré par la société Manda, où il occupe un emploi de directeur adjoint junior, agent de maîtrise, fait toujours mention d'une ancienneté au 21 août 1991.

Le dernier bulletin de paie émis par la société Manda est du 3.10.2010 et les bulletins de paie délivrés par la société Lily, exploitant un restaurant Mac Donald à [Localité 3] font mention d'une entrée au 4 octobre 2010, avec mention d'une ancienneté au 21 août 1991.

Mme [Z] est la gérante des sociétés Manda et Lily.

Au 31 octobre 2011, il a signé un avenant à son contrat de travail avec la société Lily à effet du 4 octobre 2010, en qualité de directeur statut Cadre, Niveau IV, Echelon 4

M. [Y] est dès lors fondé à revendiquer une ancienneté au 21 août 1991 et non au 4 octobre 2010 date à laquelle son contrat a été conventionnellement transféré de la société Manda à la société Lily, ainsi que le déroulement de carrière dont il justifie.

Il sera fait droit à sa demande de délivrance d'un certificat de travail reprenant son ancienneté et les postes successivement occupés dans les termes du dispositif dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt, sans qu'il soit justifié de l'ordonner sous astreinte.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens, outre la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

INFIRME le jugement uniquement en ce qu'il a débouté M. [Y] de sa demande de certificat de travail reprenant son ancienneté au 21 août 1991.

LE CONFIRME pour le surplus,

Et statuant à nouveau du chef infirmé

ORDONNE la remise par la société Lily d'un certificat de travail rectifié dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt comportant les mentions suivantes :

- date d'entrée : 21.08.1991

- date de sortie : 04.06.2013

- emplois successivement occupés :

- 21 août 1991 : équipier polyvalent - niveau III échelon 1

- 1er juin 1996 : assistant stagiaire - niveau III échelon 2

- 1er décembre 1997 : assistant junior - niveau III échelon 3

- 1er janvier 1999 : assistant de direction - niveau IV échelon 1

- 23 novembre 2001 : directeur adjoint junior - niveau IV échelon 2

- 1er mai 2005 : directeur adjoint junior - niveau IV échelon 3

- 4 octobre 2010 : directeur niveau IV échelon 4.

Y ajoutant

DIT que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes présentées au titre des frais irrépétibles.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 18/10994
Date de la décision : 03/06/2020

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°18/10994 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-06-03;18.10994 ?
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