Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 3
ARRÊT DU 16 MARS 2020
(n° 2020 / 49 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05738 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5JS2
Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Janvier 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/13190
APPELANT
Monsieur [D] [L] [X] [U]
[Adresse 2]
[Localité 7]
né le [Date naissance 3] 1970 à
représenté par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050
assisté de Me Marie-Eleonore AFONSO, avocat plaidant, avocat au barreau de PARIS, toque E 979
INTIMÉES
SA ALLIANZ IARD, venant aux droits de la société GAN EUROCOURTAGE, ayant son siège social au [Adresse 4], prise ne la personne de ses dirigeants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
TSA 21011
[Localité 5]
Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro : 542 11 0 2 91
représentée par Me Patrice GAUD de la SELARL GAUD MONTAGNE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0430
assistée de Me Hanalei GIMENEZ, avocat plaidant, avocat au barreau de PARIS, SCP GAUD MONTAGNE, toque : P0430, substituant Me Patrice GAUD.
CPAM DU VAL D'OISE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Janvier 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Clarisse GRILLON, Conseillère.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, Présidente
Mme Clarisse GRILLON, Conseillère
Mme Sophie BARDIAU, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Laure POUPET
ARRÊT : Réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par et par Laure POUPET, greffière présente lors du prononcé.
******
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 6 août 1986, M. [D] [X] [U], âgé de 15 ans, a été victime, alors qu'il circulait à bicyclette, d'un accident corporel de la circulation dans lequel a été impliqué un véhicule assuré par la société Gan Eurocourtages aux droits de laquelle vient la SA Allianz.
Par jugement du 12 septembre 2017, le tribunal de grande instance de Paris a liquidé le préjudice corporel de M. [X] [U] en condamnant notamment la société Allianz iard à lui payer la somme de 708 226,18 € en capital avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement, en réparation des préjudices suivants :
- frais divers : 3 600 €
- assistance par tierce personne : 100 305 €
- perte de gains professionnels futurs : 322 258,68 €
- incidence professionnelle : 50 000 €
- préjudice scolaire, universitaire ou de formation : 15 000 €
- déficit fonctionnel temporaire : 79 312,50 €
- souffrances endurées : 10 000 €
- déficit fonctionnel permanent : 106 750 €
- préjudice esthétique permanent : 1 000 €
- préjudice d'établissement : 20 000 €.
Par jugement du 23 janvier 2018 (instance n° 17/13190), le tribunal de grande instance de Paris, saisi par M. [X] [U], a :
rejeté la requête en rectification d'erreurs matérielles présentée par M. [X] [U],
débouté ce dernier de sa demande de condamnation de la société Allianz iard au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,
débouté la société Allianz de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
laissé les dépens à la charge du requérant.
Sur appel interjeté par déclaration du 16 mars 2018 et selon conclusions notifiées le 12 juin 2018, M. [D] [X] [U] demande à cour de :
infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
rectifier comme suit le jugement du 12 septembre 2017 :
Page 9 : « Sur la base d'un taux horaire de 20 €, il est dû :
- Au titre des arrérages échus du 26 mars 2004 au 26 mars 2017 :
20 € x 6 heures x 678 semaines : 81 360 € »
Page 14 : « Sur la base d'une indemnisation de 25 € par jour pour un déficit total, les troubles dans les conditions d'existence subis par M. [X] [U] à compter de sa sortie d'hospitalisation et jusqu'à la consolidation, justifient l'octroi de la somme de : 25 € x 50 % x 6 348 jours = 79 350 € »
Page 17 : «* la somme de 770 903,68 € (sept cent soixante-dix mille neuf cent trois euros et soixante-huit centimes) en capital avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, en réparation des préjudices suivants :
- frais divers : 3 600 €
- assistance par tierce personne : 162 945 €
- perte de gains professionnels futurs : 322 258,68 €
- incidence professionnelle : 50 000 €
- préjudice scolaire, universitaire ou de formation : 15 000 €
- déficit fonctionnel temporaire : 79 350 €
- souffrances endurées : 10 000 €
- déficit fonctionnel permanent : 106 750 €
- préjudice esthétique permanent : 1 000 €
- préjudice d'établissement : 20 000 € »
condamner la société Allianz iard au paiement de la somme 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la société Allianz iard aux dépens dont distraction au profit de la SCP Régnier Bequet Moisan, avocats aux offres de droit.
Selon conclusions notifiées le 7 septembre 2018, la SA Allianz iard demande à la cour de :
confirmer le jugement entrepris,
condamner M. [X] [U] au paiement de la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société Allianz iard,
condamner M. [X] [U] aux dépens de première instance et d'appel.
La caisse primaire d'assurance maladie du Val d'Oise, destinataire de la déclaration d'appel qui lui a été signifiée le 21 juin 2018 à sa personne habilitée, n'a pas constitué avocat.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 9 décembre 2019.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Le tribunal a rejeté la demande de rectification d'erreur matérielle au motif que les juges ont statué conformément aux demandes présentées par M. [X] [U], dont ils ne pouvaient pas modifier la teneur.
M. [X] [U] soutient :
- que l'erreur imputable à une partie peut être rectifiée dès lors qu'elle ne consiste pas en l'omission d'un acte de procédure incombant à celle-ci et qu'elle a été reprise par le juge,
- que l'erreur dont la rectification est sollicitée est purement matérielle puisqu'il s'agit d'une erreur dans le nombre de semaines séparant les deux dates de la période d'indemnisation,
- qu'il s'agit uniquement d'une erreur de dactylographie et non d'une erreur intellectuelle, que le tribunal était parfaitement légitime à rectifier puisque personne ne saurait remettre en question que plus de 600 semaines séparent les deux dates visées dans ses conclusions,
- que l'unité de temps retenue par l'expert pour fixer les besoins en aide humaine étant la semaine, la liquidation de ce poste devait tenir compte du nombre de semaines entre deux dates,
- que les juges pouvaient parfaitement trouver dans le dossier les éléments suffisants pour rectifier l'erreur matérielle qu'ils ont reprise, en se référant simplement au rapport homologué de l'expert, pièce centrale du dossier de liquidation qui fixe les besoins en aide humaine sur la semaine et que la raison leur commandait de corriger l'erreur de frappe entre 156 et 656 semaines.
La SA Allianz iard rétorque :
- que l'article 462 du code de procédure civile autorise la réparation des erreurs ou omissions matérielles affectant un jugement mais ne permet pas aux parties de revenir sur une omission qui leur est imputable,
- que l'erreur liée à l'omission d'un certain nombre de semaines entre deux dates n'est ni une erreur de plume ni une erreur de frappe,
- qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de rectifier les montants demandés à la hausse, sauf à statuer ultra petita et à violer les dispositions combinées des articles 5 et 464 du code de procédure civile,
- que la rectification requise contreviendrait à la règle selon laquelle une décision rectificative ne peut modifier les droits et obligations des parties, alors qu'en l'occurrence les rectifications sollicitées aboutiraient à majorer l'indemnisation des postes d'assistance par tierce personne après consolidation et de déficit fonctionnel temporaire,
- que la rectification demandée porterait atteinte à l'autorité de la chose jugée attachée à la décision rendue.
L'article 462 dispose que les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande.
Cette juridiction ne peut cependant pas modifier les droits et obligations reconnus aux parties par cette décision.
Il n'est pas contesté que, pour les deux postes de préjudice litigieux, le point de départ et le terme des périodes indemnisables sont déterminés et non contestés.
En revanche, le calcul, en nombre de semaines ou de jours, de la période comprise entre ces deux dates est erroné.
En effet, s'agissant du poste d'assistance par tierce personne future dont le besoin a été calculé par semaine par l'expert, les premiers juges ont, pour les arrérages échus du 25 mars 2004 jusqu'au 25 mars 2017, comptabilisé 156 semaines au lieu de 678 semaines, et s'agissant du déficit fonctionnel temporaire partiel (50 %), ils ont calculé le préjudice pour la période du 7 novembre 1986 au 25 mars 2004 sur 6 345 jours au lieu de 6 348 jours.
Il est établi que ces erreurs de calcul figuraient dans les dernières conclusions du demandeur et qu'elle ont été reprises, telles quelles, par le tribunal dans son jugement initial.
Mais, d'une part, si l'origine de l'erreur réside dans une mention erronée des conclusions du demandeur, cette circonstance, qui ne constitue pas l'omission d'un acte de procédure incombant à cette partie, ne fait pas obstacle à la demande de rectification matérielle qu'elle formule.
D'autre part, la rectification de l'erreur matérielle que constitue une simple erreur de calcul sur la base de données clairement déterminées entraîne une simple rectification des droits et obligations des parties fixés par la décision, et non leur modification, et ne porte pas atteinte à l'autorité de la chose jugée attachée à la décision rendue.
En conséquence, il sera fait droit à la demande de rectification des deux erreurs matérielles contenues dans le jugement du 12 septembre 2017, en infirmation du jugement déféré.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire en audience publique,
Ordonne la rectification du jugement du 12 septembre 2017 comme suit :
Page 9 : « Sur la base d'un taux horaire de 20 €, il est dû :
- Au titre des arrérages échus du 26 mars 2004 au 26 mars 2017 :
20 € x 6 heures x 678 semaines : 81 360 € » ,
Page 14 : « Sur la base d'une indemnisation de 25 € par jour pour un déficit total, les troubles dans les conditions d'existence subis par M. [X] [U] à compter de sa sortie d'hospitalisation et jusqu'à la consolidation, justifient l'octroi de la somme de :
25 € x 50 % x 6 348 jours = 79 350 € »,
Page 17 : «* la somme de 770 903,68 € (sept cent soixante-dix mille neuf cent trois euros et soixante-huit centimes) en capital avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, en réparation des préjudices suivants :
- frais divers : 3 600 €
- assistance par tierce personne : 162 945 €
- perte de gains professionnels futurs : 322 258,68 €
- incidence professionnelle : 50 000 €
- préjudice scolaire, universitaire ou de formation : 15 000 €
- déficit fonctionnel temporaire : 79 350 €
- souffrances endurées : 10 000 €
- déficit fonctionnel permanent : 106 750 €
- préjudice esthétique permanent : 1 000 €
- préjudice d'établissement : 20 000 € »,
Ordonne la mention de cette décision rectificative sur la minute et sur les expéditions jugement du tribunal de grande instance de Paris du 12 septembre 2017,
Laisse les dépens à la charge de l'Etat,
Rejette la demande de M. [D] [X] [U] sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE