REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 12
SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT
ORDONNANCE DU 26 FEVRIER 2020
(n°60 , 4 pages)
N° du répertoire général : N° RG 20/00067 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBOWT
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Février 2020 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 20/00311
L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 24 Février 2020
Décision réputée contradictoire
COMPOSITION
Sylvain LALLEMENT, conseiller à la cour d'appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,
assisté de Céline PERIER, greffier lors des débats et du prononcé de la décision
APPELANT
M. [A] [J] (personne faisant l'objet des soins)
né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1] - MAROC
demeurant [Adresse 1]
actuellement en programme de soins au centre hospitalier Intercommunal [Établissement 1]
comparant en personne, assisté de Maître CHARLOPIN Alexandra, substituant Me Raphaël MAYET, avocat choisi au barreau de Versailles
INTIMÉ
M. LE PREFET DU VAL DE MARNE
[Adresse 2]
non comparant, non représenté
ETABLISSEMENT D'HOSPITALISATION
LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE VILLENEUVE ST GEORGES
[Adresse 3]
non comparant, non représenté
MINISTÈRE PUBLIC
Représentée par Mme Sylvie SCHLANGER, avocate générale,
DÉCISION
Par arrêté du 29 mars 2018,le Préfet du Val de Marne a ordonné l'admission en soins psychiatriques de Monsieur [A] [J] sous la forme d'une hospitalisation complète sur le fondement notamment de l' article L. 3213-1 du code de la santé publique.
A compter du 27 avril 2018, la mesure de soins sans consentement a été modifiée en la forme d'un programme de soins .
A compter du 7 décembre 2018 et jusq'au 28 décembre 2018, Monsieur [A] [J] a de nouveau été pris en charge sous forme d'hospitalisation complète.
Depuis cette date, cette mesure sous forme de programme de soins a été maintenue, le dernier arrêté préfectoral figurant au dossier et maintenant cette mesure pour 6 mois au maximun étant en date du 27 janvier 2020 (valable du 28 janvier 2020 au 28 juillet 2020).
Par requête motivée en date du 31 janvier 2020, enregistrée au Tribunal judiciaire de Créteil le 4 février 2020, le conseil de Monsieur [A] [J] a saisi le Juge des libertés et de la détention du TGI de Créteil en mainlevée de la mesure.
Par ordonnance du 13 février 2020 à laquelle il convient de se référer pour un exposé plus ample des faits, prétentions des parties , et motifs qu'elle contient, le juge des libertés et de la détention du TGI de Paris a , en bref :
-Sur les moyens de procédure soulevés par le requérant ,constaté que les certificats médicaux mensuels des 29 août et 28 novembre 2018 étaient irréguliers car tardifs mais a considéré qu'il n'est résulté de ces irrégularités aucune atteinte aux droits de Monsieur [A] [J] .
-Sur le fond, a dit n'y avoir lieu d'ordonner mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète « prise le 7 décembre 2018 ».
Par déclaration d'appel motivée datée du 18 février 2020 et enregistrée au greffe de la Cour d'appel de Paris le lendemain, le conseil de Monsieur [A] [J] a interjeté appel de la dite ordonnance au nom de son client aux fins d'infirmation de cette décision et mainlevée de la mesure de soins sans consentement..
L'affaire a été appelée à l'audience du 24 février 2020 au siège de la juridiction, et s'est tenue à cette date en audience publique avec l'accord de Monsieur [A] [J], présent et assisté par son conseil.
*Sur les moyens de procédure:
-Le Conseil de Monsieur [A] [J] a développé d'abord oralement les moyens de procédure exposés dans sa déclaration d'appel ,à laquelle il convient de se référer pour exposé plus ample.Il est substantiellement fait valoir comme en première instance le caractère tardif des certificats médicaux mensuels susmentionnés et le fait qu'il en est résulté,contrairement à ce qu'a indiqué le premier juge, une atteinte aux droits de Monsieur [A] [J] qui s'est trouvé privé de la garantie essentielle de réexamen de la mesure de soins sans consentement dans les conditions de périodicité prévues par la loi .
-Le représentant de l'État a maintenu par courrier ses observations écrites rappelées par le premier juge selon lesquelles les dispositions littérales de l'article L3213-3 du code de la santé publique ont été respectées et qu'en tout état de cause aucun grief n'est établi par l'intéressé.
-Madame l'avocat général indique que si deux certificats médicaux mensuels ont été pris avec quelques jours de retard,il faut relativiser la gravité de ces retards car Monsieur [J] se trouvait avec une certaine liberté de mouvement en programme de soins et ne se présentait pas de manière ponctuelle à tous les rendez-vous. Elle requiert en conséquence le rejet de la demande de mainlevée de la mesure pour ces moyens de procédure.
*Sur le fond :
-Le Conseil de Monsieur [A] [J], ainsi que ce dernier, ont demandé la mainlevée de toute mesure sans consentement faisant valoir que les soins psychiatriques pourraient continuer à s'exécuter de manière libre d'autant que l'intéressé souhaiterait pouvoir se rendre au Maroc.
-L'avocate générale se réfère sur le fond aux différents certificats médicaux figurant à la procédure et notamment au dernier certificat de situation du 21 février 2020, qui permettent d'apprécier le bien fondé de la mesure en cours,et requiert la confirmation de l'ordonnance querellée, une mainlevée apparaissant prématurée.
-Monsieur [A] [J] a eu la parole en dernier et a réitéré sa demande de mainlevée de la mesure en cours.
MOTIFS
Sur les moyens de procédure
Vu les dispositions du code de la santé publique et en particulier celles de l'article L 3213-3 dudit code, telles qu' éclairées par la Cour de cassation,
Il est constant ainsi que l'a relevé l'ordonnance querellée que les certificats mensuels des
des 29 août et 28 novembre 2018 étaient tardifs car pris un peu plus de 30 jours après les certificats mensuels précédents (respectivement les 24 juillet et 25 octobre 2018).
Cependant, ces certificats médicaux n'ont été pris qu'avec quelques jours de retard au regard des dispositions susmentionnés et n'ont fait que prévoir la poursuite de la mesure en cours (programme de soins) sans aggraver la contrainte exercée sur Monsieur [A] [J] qui n'a fait l'objet d'une hospitalisation complète qu'à compter du 7 décembre 2018 (et jusqu'au 28 décembre 2018) sur le fondement d'autres éléments que ces certificats. Il n'est ainsi pas établi que les irrégularités soulevées ont véritablement fait grief à l'intéressé en l'ayant empêché de faire valoir utilement ses droits.
En outre, ces certificats médicaux tardifs ne sont pas le support nécessaire de la mesure de programme de soins en cours, qui s'exerce en vertu de l'arrêté préfectoral susmentionné en date du 27 janvier 2020 .
Pour ces raisons, les irrégularités liées à la tardiveté des certificats médicaux susvisés ne sont pas de nature à entraîner mainlevée de la mesure de soins sans consentement actuellement en cours.
En conséquence, par substitution des présents motifs à ceux que l'ordonnance querellée contient à cet égard, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a rejeté les moyens de procédure soulevés par le Conseil du requérant.
Sur le fond
Vu les dispositions du code de la santé publique et notamment celles de l'article L.3213-1 de ce code .
En l'espèce, il résulte des pièces médicales figurant au dossier, notamment en dernier lieu de l'avis motivé en date du 21 février 2020 émanant du docteur [H], praticien hospitalier, que le maintien de la mesure est nécessaire pour 'contenir ses symptômes ' et pour 'limiter une rupture de traitement et du suivi ..'. A cet égard ce certificat rappelle notamment que le patient souffre de schizophrénie et 'présente toujours des éléments délirants enkystés à thème mégalomaniaque et persécutif , son fonctionnement social reste plus ou moins adapté ..'
Eu égard à ces éléments, la poursuite de la mesure sous forme de programme de soins laquelle n'apparaît pas apporter une atteinte disproportionnée aux droits de l'intéressé au regard des objectifs poursuivis, reste nécessaire et doit être maintenue .
En conséquence, ajoutant à l'ordonnance querellée, la présente juridiction d'appel rejette la demande de mainlevée de la mesure de programme de soins en cours.
PAR CES MOTIFS
Le délégué du Premier Président de la Cour d'appel, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par décision réputée contradictoire,
Confirmons l'ordonnance querellée en ce qu'elle a rejeté les moyens de procédure soulevés ;
Et, ajoutant à l'ordonnance querellée,
Rejetons la demande de mainlevée de la mesure de soins sans consentement actuellement en cours.
Laissons les dépens à la charge de l'État.
Ordonnance rendue le 26 FEVRIER 2020 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE
Une copie certifiée conforme notifiée le par fax à :
X patient à l'hôpital
et X par LRAR à son domicile
X avocat du patient
X directeur de l'hôpital
' tiers par LRAR
X préfet du Val de Marne
' avocat du préfet
X tuteur / curateur par LRAR
X Parquet près la cour d'appel de Paris