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21/02/2020 | FRANCE | N°18/03193

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 21 février 2020, 18/03193


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 21 Février 2020



(n° , 2 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/03193 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5FZF



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 Février 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'AUXERRE RG n° 15/00435



APPELANTE

SAS RANDSTAD

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée pa

r Me Bertrand PATRIGEON, avocat au barreau de PARIS, toque : G0728



INTIMÉE

CPAM [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D19...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 21 Février 2020

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/03193 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5FZF

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 Février 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'AUXERRE RG n° 15/00435

APPELANTE

SAS RANDSTAD

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Bertrand PATRIGEON, avocat au barreau de PARIS, toque : G0728

INTIMÉE

CPAM [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 3]

[Adresse 3]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Décembre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Lionel LAFON, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre

Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Conseillère

M. Lionel LAFON, Conseiller

Greffier : Mme Typhaine RIQUET, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre et par Mme Typhaine RIQUET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la société Randstad à l'encontre du jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Auxerre le 23 février 2018 dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 1], ci après ' la caisse'.

L'affaire est enregistrée sous le numéro RG 18/03193, les parties ont comparu à l'audience du 2 décembre 2019 et la décision est mise à disposition à la date du 21 février 2020.

EXPOSE DU LITIGE

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.

Il suffit de rappeler que M. [S] [O], exerçant la profession d'ouvrier au sein de la société Randstad, a déclaré le 1er août 2012 une maladie professionnelle, pour une 'neurolyse du nerf médian droit'. Cette déclaration était accompagnée d'un certificat médical dressé le 9 juillet 2012 faisant état d'un'canal carpien droit opéré le 27 juin 2012".

Après instruction du dossier, la caisse a notifié à l'employeur le 27 novembre 2012 la prise en charge de cette pathologie au titre de la législation professionnelle, par référence au tableau n°57 des maladies professionnelles, relatif aux 'affections périarticulaires provoquées par certaines gestes et postures de travail'.

Le salarié a bénéficié d'arrêts de travail du 9 juillet 2012 au 31 janvier 2013, date à laquelle son état a été déclaré consolidé avec séquelles indemnisables et sans incapacité permanente partielle.

La société Randstad a sollicité l'inopposabilité à son égard de la décision de la caisse, d'une part pour non respect de la condition tenant au délai de prise en charge de la maladie et d'autre part en contestant l'imputabilité à la maladie de l'intégralité des arrêts et soins, par lettre datée du 13 octobre 2015.

En l'état d'un rejet implicite de son recours, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Auxerre suivant requête du 14 décembre 2015.

Le 26 janvier 2016 la commission a explicitement rejeté le recours de la société.

Par jugement du 23 février 2018, le tribunal a :

- déclaré recevable le recours de la société Randstad,

- débouté la société Randstad de l'intégralité de ses demandes,

- confirmé la décision de la commission de recours amiable du 26 janvier 2016,

- condamné la société Randstad à verser à la caisse la somme de 1.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Randstad a relevé appel de ce jugement par lettre datée du 28 février 2018.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, la société Randstad demande à la cour :

- d'infirmer le jugement rendu,

- à titre principal de lui déclarer inopposables les arrêts de travail et leurs conséquences à compter du 8 août 2012, faisant valoir qu'il existe à cette date une rupture dans la continuité des arrêts et soins,

- à titre subsidiaire, d'ordonner avant dire droit une expertise médicale judiciaire,

faisant valoir que :

- M. [O] a bénéficié d'une prise en charge de 181jours d'arrêts de travail, ce qui paraît excessif,

- dans son mémoire, son médecin conseil le docteur [W] conclut : 'dans le cas présent, les documents produits n'attestent pas d'une évolution post opératoire défavorable ou de la survenue de complication secondaire. On relève l'absence de consultation chirurgicale au-delà de celle notifiée par le certificat du 28/09/2012, lequel attestait déjà du caractère séquellaire des douleurs résiduelles présentées à la main droite. Il n'a également été procédé à aucun examen complémentaire, notamment électromiographique. De facto, il n'est pas objectivé de lésion organique avérée de nature à caractériser une souffrance neurologique incapacitante ou invalidante.

L'orientation en centre de la douleur confirme le caractère séquellaire de la symptomatologie algique exprimée, dès lors qu'il s'agit d'une prise en charge symptomatique qui n'est pas de nature à modifier l'état séquellaire propre à caractériser une incapacité permanente.

En somme, il n'y a pas d'explication médicale à cette prescription d'arrêt de travail prolongée bien au-delà des périodes d'incapacité habituelles, en l'absence de toute complication ou lésion neurologique objective'.

- la note de son médecin conseil justifie pour le moins de prononcer une expertise.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues par son conseil, la caisse demande à la cour :

- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- de débouter la société Randstad de l'ensemble de ses demandes, et de la condamner à lui verser la somme de 1.500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

soutenant que la tarification des accidents du travail et maladies professionnelles ne se fait plus selon leur coût réel, mais par application de coûts moyens forfaitaires, selon 6 catégories dont la 6ème prévoit les arrêts de plus de 150 jours quelle que soit la durée réelle de l'arrêt, et que l'indemnisation de l'arrêt de travail au-delà de 150 jours est sans conséquence financière pour l'employeur,

soutenant également qu'elle justifie d'arrêts et de soins continus, que la présomption d'imputabilité prévue à l'article L. 441-1 du code de la sécurité sociale jour et que l'employeur ne rapporte pas un commencement de preuve de l'existence d'une affection pathologique sans lien avec le travail, et qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

SUR CE,

Des dispositions des articles L 411-1, L 433-1 et L 443-1 du code de la sécurité sociale, il résulte que la présomption d'imputabilité de l'accident au travail ou de la maladie professionnelle couvre non seulement la qualification de l'accident mais également l'ensemble des prestations en lien avec cet accident, jusqu'à la guérison complète ou la consolidation de la victime dès lors qu'il y a continuité de symptômes et de soins.

Il incombe ainsi à l'employeur, qui ne remet pas en cause les conditions de temps et de lieu de l'accident ou le caractère professionnel de la maladie, de faire la preuve que les arrêts de travail et les soins prescrits en conséquence de l'accident ou de la maladie résultent d'une cause totalement étrangère au travail, cause étrangère caractérisée par la démonstration que la longueur des soins et arrêts est la conséquence d'un état pathologique antérieur évoluant pour son propre compte.

En l'espèce, la caisse a produit des certificats médicaux de M. [O], qui sont les suivants :

- certificat médical initial du 9 juillet 2012 du docteur [H], qui indique : 'canal carpien opéré le 27/06/2012", et qui prescrit un arrêt jusqu'au 8 août 2012,

- certificat médical de prolongation du 4 septembre 2012, du même praticien, qui indique: 'canal carpien dt opéré - adhérences et douleur de la main droite', et prescrit un arrêt jusqu'au 30 septembre 2012,

- certificat médical de prolongation du 28 septembre 2012, du même praticien, qui indique: 'canal carpien dt opéré le 27/06 séquelles douleur - consultation chirurgien spécialiste à faire', et prescrit un arrêt jusqu'au 31 octobre 2012,

- certificat médical de prolongation du 1er novembre 2012, du même praticien, qui indique: 'douleur résiduelle post op(ératoire) canal carpien droit consultation centre antidouleur', et prescrit un arrêt jusqu'au 26 novembre 2012,

- certificat médical de prolongation du 26 novembre 2012, du même praticien, qui indique: 'douleur résiduelle post op canal carpien droit', et prescrit un arrêt jusqu'au 3 janvier 2013,

- certificat médical de prolongation du 2 janvier 2013 du docteur [C], qui indique: 'douleurs persistantes après neurolyse nerf median droit', et prescrit un arrêt jusqu'au

31 janvier 2013, date à laquelle l'état de l'assuré a été déclaré consolidé.

La société Randstad ne conteste plus devant la cour le caractère professionnel de la maladie, mais souligne le fait que la caisse ne verse pas aux débats de certificat médical de prolongation sur la période allant du 8 août au 4 septembre 2012.

Elle considère donc que la caisse ne justifie pas de la continuité des symptômes et des soins, et que la présomption posée par l'article L. 441-1 ne joue pas.

Mais les certificats médicaux versés aux débats montrent que la pathologie de M. [O] a été suivie régulièrement par le docteur [H], dont le certificat en date du 4 septembre 2012 reprend exactement la pathologie que ce même médecin avait constatée par son certificat médical initial du 9 juillet 2012.

Ce médecin constate aussi le 4 septembre 2012 l'existence d'un élément de complication de la maladie, constitué par des adhérences et douleur de la main droite.

Les certificats médicaux de prolongation s'enchaînent ensuite de façon continue, tout à fait cohérente, et il s'agit bien d'une seule et unique pathologie.

M. [O] n'a pas consulté son médecin traitant entre le 8 août 2012 et le 4 septembre 2012 mais cette période est celle des congés d'été.

Le médecin conseil de la caisse atteste le 13 novembre 2017 qu'il a examiné M. [O] le 30 juillet 2012 et constaté que ce patient droitier disait ressentir une douleur au niveau du site opératoire, que les symptômes étaient persistants et invalidants et que la poursuite des soins était justifiée. Le médecin conseil a aussi examiné l'assuré le 5 décembre 2012.

Tous ces éléments, parfaitement cohérents, démontrent qu'il y a bien eu continuité de symptômes et de soins.

La présomption simple d'imputabilité a son plein effet, et il appartient à l'employeur de la renverser.

La société Randstad se fonde sur l'avis de son médecin conseil, le docteur [W], et considère que la durée de travail de son salarié était excessive, un syndrôme du canal carpien opéré nécessitant normalement un arrêt de 30 à 45 jours.

Cependant, le docteur [W] n'identifie pas dans son avis une pathologie étrangère au travail qui pourrait partiellement expliquer le durée de l'arrêt de travail de M. [O].

Son analyse n'est qu'une contestation de la date de consolidation retenue par le service médical de la caisse, qui ne permet pas à l'employeur de renverser la présomption d'imputabilité.

De surcroît, la durée de 30 à 45 jours d'arrêt de travail invoquée par la société appelante n'est qu'indicative.

Il ne s'agissait pas d'une pathologie bénigne puisque l'opération du canal carpien de

M. [O] avait été suivie d'adhérences douloureuses, le recours à une consultation chirurgicale spécialisée avait été prescrit le 28 septembre 2012 par le médecin traitant de l'assuré et ce dernier avait aussi prescrit le 1er novembre 2012 une consultation au centre antidouleur.

M. [O], étant un ouvrier droitier, ne pouvait pas reprendre son activité professionnelle avec des douleurs persistantes à la main droite.

Il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise, qui ne peut se substituer à l'absence de commencement de preuve par l'appelant.

Il convient de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et de débouter la société Randstad de l'ensemble de ses demandes.

L'équité commande de condamner la société Randstad à verser à la caisse la somme de 1.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Randstad sera également condamnée aux dépens d'appel, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Déboute la société Randstad de l'ensemble de ses demandes,

Condamne la société Randstad à verser à la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 1] la somme de 1.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Randstad aux dépens d'appel.

La Greffière,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 18/03193
Date de la décision : 21/02/2020

Références :

Cour d'appel de Paris L4, arrêt n°18/03193 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-21;18.03193 ?
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