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05/02/2020 | FRANCE | N°19/14568

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 05 février 2020, 19/14568


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRÊT DU 05 FÉVRIER 2020



(n° 15 /2020, 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/14568

N° Portalis 35L7-V-B7D-CALXH



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 juin 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/03760



APPELANTES



SA PRIMONIAL REAL ESTATE INVESTMENT MANAGEMENT
>prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]

SIRET n°531 231 124 00045



Représentée par Me Matthieu BOCCON ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRÊT DU 05 FÉVRIER 2020

(n° 15 /2020, 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/14568

N° Portalis 35L7-V-B7D-CALXH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 juin 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/03760

APPELANTES

SA PRIMONIAL REAL ESTATE INVESTMENT MANAGEMENT

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]

SIRET n°531 231 124 00045

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Xavier CLEDA de la SELAS LPA-CGR- avocat au barreau de Paris, toque : P238

Société civile de placement immobilier UFIFRANCE IMMOBILIER

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]

SIRET n°348 2010 097 00054

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

ayant pour avocat plaidant Me Xavier CLEDAT, SELAS LPA-CGR- avocat au barreau de Paris, toque : P238

INTIMÉE

SCI CITIZENM PARIS OPERA PROPERTIES

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 7]

SIRET n°814 339 032 00025

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Ayant pour avocat plaidant Me Octave HOCHER,SCP LACOURTE RAQUIN TATAR, avocat au barreau de PARIS, toque : R176

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Janvier 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Marie-Agnès CHAUMAZ, Présidente de chambre

Valérie MORLET, Conseillère

Marc BAILLY, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame [L] [G] dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière lors des débats : Juliette JARRY

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Agnès CHAUMAZ, Présidente de chambre et par Roxanne THERASSE, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

**

La société de placement immobilier (dite SCPI) Ufifrance Immobilier dont le gérant est la société Primonial Real Estate Investment Management, dénommée ci-après société Primonial, est propriétaire d'une parcelle de terrain située [Adresse 3] dans le deuxième arrondissement de [Localité 8] sur laquelle est édifié un immeuble de 6 étages et de 5 sous-sols à usage de parking donné à bail le 15 juillet 1999 à l'Etat et occupé par un commissariat de police.

Par acte authentique du 22 juin 2015, signé devant Maître [N] [P] notaire, la SCPI Ufifrance Immobilier et la société civile immobilière Citizenm Financial Holding 2 BV ont signé une promesse de bail à construction sur cette parcelle sise [Adresse 3].

Le projet de la SCI Citizenm Financial Holding 2 BV consistait en la démolition de l'immeuble et la construction d'un nouvel ensemble immobilier à vocation hôtelière.

La promesse stipulait que le bail à construction était consenti et accepté pour une durée de 50 ans à compter de la signature dudit acte moyennant le règlement d'un loyer annuel de 900.000 € toutes taxes comprises (article 10 de la Promesse).

La Promesse était soumise à huit conditions suspensives détaillées à son article 11 :

- l'obtention d'une confirmation écrite de l'AMF relative à la capacité pour le Promettant, en sa qualité de société de placement immobilier (SCPI) et au regard de la réglementation financière et boursière, de conclure un bail à construction (article 11.1.), étant précisé que cette première condition suspensive est stipulée au bénéfice des deux parties,

- la libération du Bâtiment existant par le Locataire existant au plus tard le 30 avril 2017 (article 11.2.1),

- la situation hypothécaire (article 11.2.2),

- l'obtention d'un permis de construire (article 11.2.3),

- l'obtention du caractère définitif du permis de construire (article 11.2.4),

- l'absence de prescription au titre de la réglementation relative à l'archéologie préventive (article 11.2.5),

- la justification de la compatibilité du terrain avec le projet hôtelier au regard de la réglementation environnementale (article 11.2.6),

- l'absence de carrières et de nécessité d'injections liées aux carrières ou autres éléments de géologie (article 11.2.7).

La promesse précise que ces sept conditions suspensives sont stipulées au seul bénéfice du Bénéficiaire, à savoir la SCI Citizenm Financial Holding 2 BV qui pourra toujours y renoncer à condition d'en avoir avisé le Promettant (article 11).

Les parties se sont obligées à régulariser l'acte de bail à construction 'dans les quinze (15) jours de la réalisation de la dernière des conditions suspensives et en tout état de cause au plus tard le 30 avril 2018" (article 7).

Sollicitée par la société Ufifrance Immobilier, l'AFM a indiqué par courrier du 10 novembre 2015 'qu'en l'état actuel des textes la SCPI [c'est à dire la société Ufifrance Immobilier] ne pouvait être bailleur d'un bail à construction.'

Par courrier du 4 août 2016, la société Citizenm Financial Holding 2 BV a informé la société Primonial que la condition suspensive de la promesse ne pourrait être considérée comme défaillie qu'après la date butoir du 30 avril 2018 et qu'en conséquence les parties devaient continuer à discuter du sujet avec l'AFM.

La société Citizenm Financial Holding 2 BV a fait intervenir son conseil auprès de l'AFM qui a admis la possibilité pour une SCI de conclure un bail à construction à charge pour la société Primonial de soumettre une demande d'autorisation de modification de sa documentation interne pour pouvoir être autorisée à conclure un tel bail.

Par lettre du 22 septembre 2017, la société Primonial a indiqué à la société Citizenm Financial Holding 2 BV que la condition suspensive relative à l'absence d'opposition de l'AFM à la conclusion d'un bail à construction par la société Ufifrance Immobilier était levée.

La réitération de la promesse était également soumise à la libération du bâtiment par le locataire (commissariat de police) à l'échéance du bail, soit au plus tard le 30 avril 2017, condition suspensive stipulée à l'article 11.2.1 de la promesse.

La société Ufifrance Immobilier a signifié un congé au locataire par acte d'huissier du 23 septembre 2016 pour le 30 avril 2017.

Le locataire ayant manifesté son impossibilité matérielle à quitter les lieux dans le délai, la société Citizenm Financial Holding 2 BV a proposé de conclure un avenant à la promesse afin que le délai d'expiration de la condition suspensive soit prorogé au 30 avril 2018, puis par courrier du 25 avril 2017 a signifié à la société Ufifrance Immobilier représentée par la société Primonial, sa renonciation au bénéfice de la condition suspensive relative à la libération des lieux par le locataire.

Par courrier du 26 avril 2017, la société Primonial a informé la société Citizenm Financial Holding 2 BV de son refus de proroger la date butoir de la réalisation de la condition suspensive. La société Citizenm a alors soutenu que ce courrier était sans effet puisqu'elle avait renoncé au bénéfice de la condition suspensive alors que de son côté la société Primordial a prétendu que la présence du locataire dans les locaux empêchait la réitération de la promesse.

Par acte du 10 janvier 2018, la SCI Citizenm Paris Opéra Properties s'est substituée à la société Citizenm Financial Holding 2 BV. La substitution a été notifiée à la société Ufifrance Immobilier par courrier du 25 janvier 2018 et ne suscite aucune contestation.

Par courrier du 29 janvier 2018, la SCI Citizenm Paris Opéra Properties a fait savoir à la société Ufifrance Immobilier et à Maître [N] [P] que soit les conditions suspensives auxquelles était subordonnée la promesse étaient désormais levées soit elle y renonçait, en joignant notamment copie de sa lettre du 25 avril 2017 contenant sa renonciation au bénéfice de la condition suspensive relative à la libération des lieux par le locataire et sa garantie d'achèvement. Elle a demandé la fixation d'une date de réitération dans les 15 jours de la notification de ce courrier en proposant à cet effet les dates du 13 ou 14 février 2018.

La société Primonial a réitéré que la promesse était caduque depuis le 1er mai 2017 et a renouvelé son opposition le 13 février 2018 lors du rendez-vous à l'étude du notaire.

Le 14 février 2018 la SCI Citizenm Paris Opéra Properties a mis en demeure la société Ufifrance Immobilier de signer l'acte de bail à construction le 22 février 2018 en l'étude de Maître [N] [P].

Le 22 février 2018, la société Ufifrance Immobilier s'est présentée à l'étude du notaire mais a fait part de son refus de signer la réitération de la promesse. Le notaire a dressé un procès-verbal de difficultés.

Sur l'assignation délivrée le 6 mars 2018 par la SCI Citizenm Paris Opéra Properties à l'encontre de la société Ufifrance Immobilier et de la société Primonial, le tribunal de grande instance de Paris a, par jugement du 24 juin 2019 statué en ces termes :

- déboute la société Ufifrance Immobilier et la société Primonial Real Estate Investment Management de leur demande visant à voir déclarer non écrite la condition suspensive de libération des lieux ;

- déboute la société Ufifrance Immobilier et la société Primonial Real Estate Investment Management de sa (sic) demande visant à voir dire que la condition suspensive de libération des lieux a été stipulée dans l'intérêt des deux parties ;

- condamne la société Ufifrance Immobilier à se présenter devant Maître [N] [P] et à signer l'acte authentique de bail à construction du terrain sis [Adresse 1]) sur la parcelle cadastrée section AI n°[Cadastre 5] établi selon les termes de la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 figurant en pièce n°1, le jour fixé par la sommation qui lui sera notifiée d'avoir à comparaître par devant Maître [N] [P], et ce sous astreinte provisoire de 10.000 € par jour de retard à compter du jour fixé pour comparaître et signer l'acte authentique de bail à construction par la dite sommation à comparaître et ce pendant une durée d'un mois ;

- rejette la demande tendant à voir dire et juger qu'à défaut de signature de l'acte de bail à construction le jugement à intervenir vaudra bail à construction selon les termes de la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 ainsi que la demande subséquente relative à la publication du jugement ;

- condamne à payer à la société Citizenm Paris Opéra Properties la somme de 20.000 € chacune au titre des frais irrépétibles ;

- dit que Maître [F] [M] pourra recouvrer directement ceux des dépens dont il a fait l'avance dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- déboute la société Citizenm Paris Opéra Properties de sa demande visant à voir ordonner l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration du 15 juillet 2019, enrôlée sous le RG 19/14568, la SA Primonial Real Estate Investment Management et la société Ufifrance Immobilier ont interjeté appel de ce jugement en demandant son annulation ou, à tout le moins, sa réformation en ce qu'il :

- déboute la société Ufifrance Immobilier et la société Primonial Real Estate Investment Management de leur demande visant à voir déclarer non écrite la condition suspensive de libération des lieux ;

- déboute la société Ufifrance immobilier et la société Primonial Real Estate Investment Management de sa (sic) demande visant à voir dire que la condition suspensive de libération des lieux a été stipulée dans l'intérêt des deux parties ;

- condamne la société Ufifrance Immobilier à se présenter devant Maître [N] [P] et à signer l'acte authentique de bail à construction du terrain sis [Adresse 1]) sur la parcelle cadastrée section AI n°[Cadastre 5] établi selon les termes de la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 figurant en pièce n°1, le jour fixé par la sommation qui lui sera notifiée d'avoir à comparaître par devant Maître [N] [P], et ce sous astreinte provisoire de 10.000 € par jour de retard à compter du jour fixé pour comparaître et signer l'acte authentique de bail à construction par la dite sommation à comparaître et ce pendant une durée d'un mois ;

-condamne à payer (sic) à la société Citizenm Paris Opéra Properties la somme de 20.000 € chacune au titre des frais irrépétibles ;

- dit que Maître [F] [M] pourra recouvrer directement ceux des dépens dont il a fait l'avance dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,

- et lorsqu'il déboute la société Ufifrance Immobilier et la société Primonial Real Estate Investment Management de leurs demandes tendant à voir débouter la société Citizenm de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, condamner la société Citizenm à régler aux sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management une somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, condamner la société Citizenm aux entiers dépens de l'instance.

Elles ont ajouté que 'plus généralement, l'appel porte sur toutes dispositions non visées au dispositif et faisant grief aux appelantes, selon les moyens qui seront développés dans leur conclusions'.

Par ordonnance sur requête du 18 septembre 2019, la SCI Citizenm Paris Opéra Properties a obtenu l'autorisation d'assigner à jour fixe la société Ufifrance Immobilier et la société Primonial Real Estate Investment Management à l'audience de plaidoirie de la cour d'appel du 7 janvier 2020 aux fins qu'il soit statué sur l'appel formé par ces dernières à la première date utile après avoir annexé ses conclusions à sa requête.

Elle a expliqué qu'elle a obtenu un permis de construire le 13 octobre 2016 autorisant la démolition du bâtiment existant sur le terrain objet de la promesse et la construction d'un hôtel de tourisme de 84 chambres, que la modification du Plan Local d'Urbanisme de la ville de [Localité 8] votée le 4 juillet 2016 par le conseil municipal de [Localité 8] rend impossible l'octroi d'un nouveau permis de construire identique au premier car dans certaines zones, les bâtiments à destination d'habitation, de service public ou d'intérêt collectif ne peuvent pas être remplacés par des bâtiments à destination d'activités économiques, parmi lesquelles se trouve l'hébergement hôtelier. Elle a ajouté que le permis de construire qui lui a été accordé et notifié le 13 octobre 2016 devrait expirer le 13 octobre 2019 et qu'étant dans l'impossibilité de commencer les travaux en raison du refus persistant du Promettant de signer le bail à construction, ce permis risque de se périmer.

Par acte d'huissier du 23 septembre 2019, la SCI Citizenm Paris Opéra Properties a assigné à jour fixe la société Ufifrance Immobilier et la société Primonial Real Estate Investment Management pour l'audience de plaidoirie du 7 janvier 2020.

Elle demande à la Cour, au visa des articles 1709 et suivants du code civil, des anciens articles 1134, 1147 et 1184 du code civil applicables au présent litige et des articles L.251-1 à L.251-9 et R.251-1 à R.251-3 du code de la construction et de l'habitation de :

A titre principal

- dire et juger que toutes les conditions suspensives auxquelles était subordonnée la réitération de la promesse synallagmatique de bail à construction du 22 juin 2015 ont été levées ou ont fait l'objet d'une renonciation valable ;

- constater la défaillance de la société Ufifrance Immobilier dans ses obligations au regard de la promesse synallagmatique de bail à construction en date du 22 juin 2015 ;

A titre subsidiaire

- dire et juger que la clause 11.2.1 de la promesse synallagmatique de bail à construction du 22 juin 2015 est réputée non-écrite ;

- dire et juger que toutes les conditions suspensives auxquelles était subordonnée la réitération de la promesse synallagmatique de bail à construction du 22 juin 2015 ont été levées ;

- constater la défaillance de la société Ufifrance Immobilier dans ses obligations au regard de la promesse synallagmatique de bail à construction en date du 22 juin 2015 ;

En conséquence et en tout état de cause

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société Ufifrance Immobilier, sous astreinte de 10.000 € par jour de retard à compter du jour fixé par la sommation à comparaître qui lui sera notifiée, par-devant Maître [N] [P], ou à défaut par-devant tel notaire que la Cour désignera, à signer l'acte authentique de bail à construction du terrain sis [Adresse 1]) sur la parcelle cadastrée section AI n°[Cadastre 5] établi selon les termes et conditions de la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 figurant en pièce n°1 et du projet de bail à construction figurant en pièce 2 ;

- infirmer le jugement dont appel pour le surplus,

Statuant à nouveau

- dire et juger qu'à défaut de signature de l'acte de bail à construction devant notaire par la société Ufifrance Immobilier dans le délai de huit jours à compter du jour fixé par la sommation à comparaître qui leur sera notifiée en cas de confirmation par la société Citizenm PARIS Opéra PROPERTIES SCI de sa volonté de devenir preneur de l'acte de bail à construction, l'arrêt à intervenir vaudra bail à construction selon les termes et conditions de la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 figurant en pièce n°1 et du projet de bail à construction figurant en pièce n°2, avec transfert simultané du droit réel immobilier ;

- dire qu'au vu d'une expédition délivrée par le greffe sur formulaire hypothécaire, le comptable public du service de la publicité foncière de [Localité 9], procédera à la publication de l'arrêt valant bail à construction dont s'agit ;

- donner acte à la société Citizenm PARIS Opéra PROPERTIES SCI de ce qu'elle se réserve le droit de demander la réparation de l'intégralité du préjudice qu'elle subit du fait des sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management, dans le cadre d'une autre procédure judiciaire ;

- débouter les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- condamner les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management au paiement d'une somme de 75.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens avec distraction au profit de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU.

Par conclusions du 14 octobre 2019, la SCPI Ufifrance Immobilier et la SA Primonial Real Estate Investment Management demandent à la Cour au visa des articles 1709 et suivants du code civil, des anciens articles 1134, 1147 et 1184 du code civil applicables au présent litige et des articles L.251-1 à L.251-9 du code de la construction et de l'habitation, en ces termes, de :

- recevoir les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial en leur appel ;

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel et, statuant à nouveau :

A titre principal :

- dire et juger que la condition suspensive de libération des lieux par le Locataire actuel avant le 30 avril 2017 porte sur l'objet même du contrat de bail à construction ;

- dire et juger que Citizenm ne pouvait renoncer à la condition suspensive de libération des lieux par le Locataire actuel avant le 30 avril 2017 ;

- juger que la promesse de bail à construction signé entre les parties le 22 juin 2015 est caduque ;

A titre subsidiaire :

- juger que la condition suspensive de libération des lieux était stipulée dans l'intérêt commun des parties ;

- juger que Citizenm ne pouvait renoncer au bénéfice de la condition suspensive de libération lieux que d'un commun accord avec Ufifrance.

En conséquence,

- débouter la société Citizenm de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause :

- condamner la société Citizenm à régler aux sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management une somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Citizenm aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la SELARL Lexavoué Paris-Versailles conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'affaire a été plaidée à l'audience du 7 janvier 2020.

La Cour se réfère pour plus ample exposé des demandes aux conclusions ainsi visées.

MOTIFS

Considérant qu'il convient de préciser qu'en vertu de l'article 9 de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, les dispositions de cette ordonnance qui sont entrées en vigueur le 1er octobre 2016 ne sont pas applicables en l'espèce puisque la promesse de bail à construction litigieuse a été conclue avant cette date, le 22 juin 2015 ;

Considérant qu'en l'état de la procédure, les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management ne contestent plus que la condition suspensive d'absence d'opposition de l'AMF à la conclusion du bail à construction est réalisée ainsi que cela résulte de l'échange de courriers entre la société Primonial et la société Citizenm (lettres des 4 et 22 décembre 2017) et des conclusions des sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management (cf § 36 P 10) ;

Considérant que pour s'opposer à la réitération de la promesse par acte authentique les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management demandent à titre principal à la Cour de dire que la condition suspensive de libération des lieux par le 'Locataire actuel' (c'est à dire un commissariat de police) avant le 30 avril 2017 porte sur un élément de validité du contrat de bail à construction de sorte que la société Citizenm ne pouvait pas y renoncer et que pour ce motif, cette condition suspensive doit être réputée non écrite ; qu'elles en déduisent que la promesse de bail à construction signée entre les parties le 22 juin 2015 est caduque puisque les locaux n'ont pas été libérés à la date fixée par la promesse ; qu'elle a en ce sens fait établir le 2 mai 2017 un procès-verbal de constat d'huissier pour démontrer que l'immeuble était occupé par le commissariat central de proximité urbaine ;

Que subsidiairement, elles ajoutent que la condition suspensive de libération des lieux était stipulée dans l'intérêt commun des deux parties et que Citizenm ne pouvait y renoncer que d'un commun accord avec Ufifrance ;

Qu'en réplique, la société Citizenm fait valoir que cette condition suspensive a été stipulée à son bénéfice exclusif et qu'elle y a valablement renoncé par courrier du 25 avril 2017 ; qu'elle soutient que le maintien de l'occupant actuel (un commissariat de police) dans les locaux n'empêche pas la formation du bail à construction mais son exécution ;

Sur ce,

Considérant tout d'abord qu'il convient d'observer que seules les pages 1 et 3 du procès-verbal de constat d'huissier du 2 mai 2017 sont produites aux débats et qu'elles ne contiennent pas les constatations de l'huissier ; que cependant, la société Citizenm ne conteste pas que les locaux ont été libérés postérieurement au 30 avril 2017 ;

Considérant que la promesse de bail à construction litigieuse indique expressément qu'elle se réfère aux articles L251-1 à L251-9 du code de la construction et de l'habitation et des décrets pris pour son application ;

Que selon l'article L251-1 du code de la construction et de l'habitation, 'Constitue un bail à construction le bail par lequel le preneur s'engage, à titre principal, à édifier des constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver en bon état d'entretien pendant toute la durée du bail';

Que c'est donc l'engagement de construire qui est l'obligation essentielle et déterminante du preneur ; que pour la remplir il dispose d'un délai stipulé dans le bail à construction annexé à la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 ;

Que pour garantir au bailleur l'exécution par le preneur de son obligation de construire, le bail à construction impartit en effet au preneur un délai d'exécution des travaux en son article 11.2 dans les termes suivants :

'Le Preneur s'oblige à commencer les Travaux dans les six (6) mois de ce jour et à les poursuivre de façon continue, sans aucune interruption, de manière qu'ils soient achevés au plus tard le (48 mois après date de signature) sauf survenance d'un Cas de Force Majeure et/ou d'une ou plusieurs Causes Légitimes de Suspension de Délai telle que définie ci-après' ;

Que le maintien du commissariat de police dans les lieux donnés à bail à construction n'empêche pas la formation du contrat mais son exécution,

Qu'il convient de souligner que tant la promesse que le bail à construction lui-même apportent au promettant futur bailleur toutes les garanties nécessaires pour obtenir l'exécution des travaux prévus par le bail et en cas de défaillance du preneur, pour se libérer de ses engagements contractuels ;

Que l'article 10 du Projet d'Acte de Bail à Construction annexé à la promesse et intitulé 'Garantie d'achèvement' oblige en outre le preneur à fournir, le jour de la réitération de la promesse, un acte de cautionnement solidaire au sens des articles 2288 et suivants du code civil pour le cas où le Bénéficiaire ne parviendrait pas à achever les travaux dans le délai de 48 mois prévus en son article 11.2 ; que cette garantie d'achèvement est d'ailleurs reprise dans la promesse de bail à construction conclue le 22 juin 2015 en son article 17 (cf P 26) ;

Que par lettre du 29 janvier 2018 ayant pour objet la réalisation des conditions suspensives et la signature du bail à construction objet de la promesse du 23 juin 2015, la SCI Citizenm Paris Opéra Properties a ainsi envoyé à la société Ufifrance Immobilier sa garantie financière d'achèvement, délivrée par la société de droit hollandais Citizenm Financial Holding 2 B V ;

Qu'en outre, le projet d'Acte de Bail à Construction annexé à la promesse contient une clause résolutoire rédigée en ces termes : 'Sans préjudice des droits du Preneur, il est expressément prévu qu'en cas d'inexécution par le Preneur de l'une quelconque de ses obligations essentielles au titre du bail à Construction, notamment en cas de défaut d'Achèvement du Projet Hôtelier ou de non-paiement, à leur date d'exigibilité, de l'un quelconque des termes du Loyer ou de toute autre somme due au titre du Bail à Construction, le Bailleur aura la faculté de résilier le Bail à Construction';

Qu'en renonçant à se prévaloir de la condition suspensive de libération des lieux par le commissariat de police avant le 30 avril 2017, le preneur s'est simplement borné à prendre le risque économique représenté par le retard dans la libération des lieux et d'en assumer les conséquences financières en s'exposant le cas échéant à un recours du bailleur à son encontre pour faute ; qu'il n'est pas contesté que le commissariat de police a finalement quitté les lieux le 1er octobre 2019 de sorte que cet obstacle est désormais levé, avant même la signature du bail à construction ;

Considérant que la condition suspensive de libération des lieux avant le 30 avril 2017 par l'occupant des lieux à la date de la promesse ne portait donc pas sur un élément de validité du contrat de bail à construction comme le soutiennent les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management, mais sur sa mise en 'uvre ; qu'en conséquence, la société Citizenm a pu valablement y renoncer comme elle en a fait part à la société Ufifrance Immobilier par courrier du 25 avril 2017 ;

Considérant enfin que si la libération du terrain par l'occupant devait, comme le soutiennent les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management, être déclarée par la Cour 'réputée non écrite', l'occupation du terrain n'aurait alors plus aucune importance de sorte que le fait qu'elle ne soit pas accomplie dans le délai imparti par la promesse ne serait pas davantage un obstacle à la signature de la promesse de bail à construction ;

Considérant que subsidiairement, les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management soutiennent qu'une partie ne peut pas renoncer unilatéralement à une condition stipulée dans l'intérêt commun des parties, que ce soit tant que la condition n'est pas défaillie ou une fois la condition défaillie ; qu'elles font valoir que dans la mesure où la société Ufifrance Immobilier n'a jamais accepté de renoncer au bénéfice de cette condition suspensive et que bien au contraire, elle a fait part à la société Citizenm de son refus de proroger au 30 avril 2018 la date de réalisation de cette condition suspensive, la renonciation à la condition suspensive de libération des lieux formulée par la société Citizenm n'est pas valable, qu'il y a dès lors lieu de constater que la promesse est caduque depuis le 30 avril 2017 et d'infirmer le jugement dont appel ;

Mais considérant que la promesse mentionne expressément que cette condition suspensive était stipulée au bénéfice exclusif du Bénéficiaire 'qui pourra toujours y renoncer à condition d'en avoir avisé le Promettant' ; qu'en conséquence, la renonciation au bénéfice de la condition suspensive de libération des lieux transmise par la société Citizenm à la société Ufifrance Immobilier par courrier du 25 avril 2017 est valide en dépit du refus de la société Ufifrance Immobilier ;

Qu'il résulte finalement des pièces produites aux débats que toutes les conditions suspensives auxquelles était subordonnée la réitération de la promesse synallagmatique de bail à construction du 22 juin 2015 ont été levées ou ont fait l'objet d'une renonciation valable ; qu'en définitive, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a :

- débouté la société Ufifrance Immobilier et la société Primonial Real Estate Investment Management de leur demande visant à voir dire que la condition suspensive de libération des lieux a été stipulée dans l'intérêt des deux parties ;

- condamné la société Ufifrance Immobilier à se présenter devant Maître [N] [P] et à signer l'acte authentique de bail à construction du terrain sis [Adresse 1]) sur la parcelle cadastrée section AI n°[Cadastre 5] établi selon les termes de la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 figurant en pièce n°1, le jour fixé par la sommation qui lui sera notifiée d'avoir à comparaître par devant Maître [N] [P], et ce sous astreinte provisoire de 10.000 € par jour de retard à compter du jour fixé pour comparaître et signer l'acte authentique de bail à construction par la dite sommation à comparaître et ce pendant une durée d'un mois ;

Considérant qu'à défaut de signature volontaire de la part du Promettant, le présent arrêt vaudra bail à construction dans les termes du dispositif, le jugement étant infirmé en ce sens ;

Considérant que les prétentions des parties tendant à leur voir donner acte ne constituant pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile, il convient de rejeter la demande de la société Citizenm tendant à se voir donner acte de ce qu'elle se réserve le droit de réclamer la réparation de l'intégralité du préjudice qu'elle subit du fait des sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management dans le cadre d'une autre procédure judiciaire, le jugement étant également confirmé sur ce point ;

Considérant que les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management qui succombent à l'instance en supporteront les dépens ;

Considérant qu'en complément de l'indemnité allouée par le jugement, il paraît conforme à l'équité d'allouer à la société Citizenm Paris Opéra Properties contrainte d'agir en justice pour faire valoir ses droits, la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme intégralement le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté la demande de la société Citizenm Paris Opéra Properties tendant à voir dire qu'à défaut de signature de l'acte de bail à construction le jugement vaudra bail à construction selon les termes de la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 ainsi que la demande subséquente relative à la publication du jugement ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Condamne la société Ufifrance Immobilier à se présenter devant Maître [N] [P] et à signer l'acte authentique de bail à construction du terrain sis [Adresse 1]) sur la parcelle cadastrée section AI n°[Cadastre 5] établi selon les termes de la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 figurant en pièce n°1, le jour fixé par la sommation qui lui sera notifiée au moins 15 jours à l'avance d'avoir à comparaître par devant Maître [N] [P], et ce sous astreinte provisoire de 10.000 € par jour de retard à compter du jour fixé pour comparaître et signer l'acte authentique de bail à construction par la dite sommation à comparaître et ce pendant une durée d'un mois ;

- Dit qu'à défaut de signature de l'acte de bail à construction devant notaire par la société Ufifrance Immobilier dans le délai de huit jours à compter du jour fixé par la sommation à comparaître qui leur sera notifiée en cas de confirmation par la société Citizenm Paris Opéra Properties de sa volonté de devenir preneur de l'acte de bail à construction, le présent arrêt vaudra bail à construction selon les termes et conditions de la promesse synallagmatique de bail à construction conclue le 22 juin 2015 figurant en pièce n°1 et du projet de bail à construction figurant en pièce n°2, avec transfert simultané du droit réel immobilier ;

- Dit qu'au vu d'une expédition délivrée par le greffe sur formulaire hypothécaire, le comptable public du service de la publicité foncière de [Localité 9], procédera à la publication de l'arrêt valant bail à construction dont s'agit ;

- Condamne les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management à payer à la société Citizenm Paris Opéra Properties la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne les sociétés Ufifrance Immobilier et Primonial Real Estate Investment Management à payer à la société Citizenm Paris Opéra Properties aux entiers dépens ;

- Autorise le recouvrement des dépens par les avocats de la cause dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 19/14568
Date de la décision : 05/02/2020

Références :

Cour d'appel de Paris G5, arrêt n°19/14568 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-05;19.14568 ?
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