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31/01/2020 | FRANCE | N°17/19563

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 3, 31 janvier 2020, 17/19563


REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 3



ARRÊT DU 31 JANVIER 2020



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/19563 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4J5D



Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Août 2017 -Tribunal d'Instance de PARIS 8ème - RG n° 11-16-000255





APPELANTS



Madame [O] [I] épouse [V]

Née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 1] (93)>
[Adresse 1]

[Adresse 1]



Monsieur [Y] [V]

Né le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 2] (Algérie)

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par Me Elodie LEFEBVRE, avocat au barreau de PARIS, toqu...

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 3

ARRÊT DU 31 JANVIER 2020

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/19563 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4J5D

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Août 2017 -Tribunal d'Instance de PARIS 8ème - RG n° 11-16-000255

APPELANTS

Madame [O] [I] épouse [V]

Née le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 1] (93)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Monsieur [Y] [V]

Né le [Date naissance 2] 1947 à [Localité 2] (Algérie)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Elodie LEFEBVRE, avocat au barreau de PARIS, toque : G0424

Ayant pour avocat plaidant Me Pierre BOUAZIZ (SCP BOUAZIZ-BENAMAMA)avocat au barreau de PARIS, toque P 215

INTIMEE

SAS RUEIL DANTON

SIRET : 443 411 145 00065

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée et ayant pour avocat plaidant Me Leonardo BRIJALDO, avocat au barreau de PARIS, toque : A0179

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Décembre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Claude TERREAUX, Président de chambre

M. Philippe JAVELAS, Conseiller

Mme Pascale WOIRHAYE, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Claude Terreaux dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Viviane REA

Lors de la mise à disposition la Cour est composée de :

M. Claude TERREAUX, Président de chambre

M. Michel CHALACHIN , Président de chambre

Mme Pascale WOIRHAYE Conseillère

Greffier : Mme Viviane REA

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Claude TERREAUX, Président de chambre et par Viviane REA, Greffière présente lors de la mise à disposition.

****

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Les époux [V] sont locataires d'un logement appartenant à la société RUEIL DANTON situé dans un ensemble immobilier, sis à [Adresse 3] depuis le 25 juillet 1978, prenant effet au 1er octobre 1988. Ils occupent aujourd'hui un appartement au troisième étage de l'immeuble de 232,90m² (lot n°[Cadastre 1]), trois locaux au 6 ème étage correspondant à d'anciennes chambres de services qui sont ou ont été occupées par leurs enfants selon leurs écritures (lots n°[Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4]) ainsi que deux caves (lot n°[Cadastre 5]).

La Société RUEIL DANTON a acquis de la Société 55 MONTAIGNE venant aux droits de la compagnie GAN VIE, suivant acte reçu par Maître [P] [D], Notaire à [Localité 3], le 30 septembre 2003, cet ensemble immobilier en vue d'y effectuer une vente par lots.

La société RUEIL DANTON entendait procéder à la vente par lots des appartements composant cet ensemble selon les accords collectifs du 9 juin 1998 et du 16 mars 2005.

En septembre 2005, RUEIL DANTONN a commencé la procédure de vente par lots des appartements.

Les époux [V] se sont opposés à ces opérations et occupent toujours les lieux. Leur action s'inscrit dans une suite de procédures judiciaires, tendant principalement à contester la régularité des opérations et notamment des offres qui leur ont été faites.

Par assignation du 4 avril 2016, la société RUEIL DANTON a fait citer les époux [V] devant le Tribunal d'instance de Paris 8ème afin de voir constater la position contradictoire des époux [V] et faire valoir qu'ils abusaient de leur droit de préemption et d'obtenir la validité de leur congé. Elle n'a pas demandé leur expulsion de corps et de biens avec le concours de la force publique.

Par jugement entrepris du 31 août 2017, le Tribunal d'instance a ainsi statué:

«- REJETTE la fin de non recevoir tirée du non-respect du principe que nul ne peut se contredire au détriment d'autrui,

-CONSTATE qu'une situation d'abus de droit résultant de la prétendue absence de volonté d'acquérir de la part de Mme [O] [I] ép [V] et M [Y] [V], ou de la tardiveté de leur contestation de l'offre de vente et du congé pour vente qui leur ont été notifiés les 23 et 26 mars 2015 n'est pas caractérisée,

-DIT que les accords collectifs de location du 9 juin 1998 et du 16 mars 2005 sont applicables à l'offre de vente et au congé pour vente qui ont été notifiés à Mme [O] [I] ép [V] et M [Y] [V] les 23 et 26 mars 2015,

-DIT qu'en conséquence le bail liant Mme [O] [I] épouse [V] et M [Y] [V] à la société RUEIL DANTON pour l'appartement qu'ils occupent au [Adresse 1], se trouve ainsi de plein droit prorogé dans tous ses effets jusqu'au 30 mars 2018,

-CONSTATE que l'information relative aux travaux effectués au cours des 5 dernières années et des travaux à entreprendre à court ou moyen terme et remise à Mme [O] [I] ép [V] et M [Y] [V] lors des actes notifiés les 23 et 26 mars 2015, n'est pas conforme aux dispositions des accords collectifs de location précités,

-CONSTATE que l'information contenue dans le diagnostic technique réalisée le 24 février 2015 et remise à Mme [O] [I] ép [V] et M [Y] [V] lors des actes notifiés les 23 et 26 mars 2015 n'est pas conforme aux dispositions des accords collectifs de location précités,

-DIT qu'en conséquence l'offre de vente et le congé pour vente qui ont été notifiés à Mme [O] [I] ép [V] et M [Y] [V] le 23 et 26 mars 2015 sont nuls,

-DIT que si la société RUEIL DANTON entend poursuivre la vente du logement, elle devra procéder préalablement à une nouvelle notification de l'offre de vente conforme aux dispositions de l'accord collectif applicable, dans le délai de 6 mois avant l'expiration du présent bail se trouvant prorogé de plein droit jusqu'au 30 mars 2017 [SIC], et ce jusqu'au 30 septembre 2017,

-DIT que la société RUEIL DANTON sera libre de fixer comme elle l'entend le prix qu'elle entendra retenir dans cette nouvelle offre de vente,

-DIT que le nouveau délai de préemption courra à compter de la nouvelle notification de l'offre de vente,

-DEBOUTE Mme [O] [I] ép [V] et M [Y] [V] de leur demande de dommages et intérêts,

-DEBOUTE la société RUEIL DANTON de sa demande de dommages et intérêts,

-CONDAMNE la société RUEIL DANTON à payer à Mme [O] [I] ép [V] et M [Y] [V] la somme de 2000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-CONDAMNE la société RUEIL DANTON aux entiers dépens,

-DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif,

-ORDONNE l'exécution provisoire »

Par dernières conclusions du 12 novembre 2019, les époux [V], appelants, demandent à la Cour de:

-CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a:

Rejeté la fin de non recevoir tirée du principe du non-respect du principe que nul ne peut se contredire au détriment d'autrui,

Dit qu'il n'y avait pas d'abus de droit de la part des concluants ni tardiveté dans leurs contestations,

Débouté RUEIL DANTONN de sa demande de dommages et intérêts et d'indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

-REJETER la demande de rectification du jugement,

-INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a :

-dit que si la société RUEIL DANTON entend poursuivre la vente du logement, elle devra procéder préalablement une nouvelle notification d'offre de vente conforme aux dispositions de l'accord collectif applicable, dans le délai de six mois avant l'expiration du présent bail, se trouvant prorogé de plein droit jusqu'au 30 mars 2017 et ce jusqu'au 30 septembre 2017,

-dit que la société RUEIL DANTONN sera libre de fixer comme elle l'entend le prix qu'elle entendra retenir dans cette nouvelle offre de vente,

-débouté les concluants de leurs demandes de dommages et intérêts,

-limité le montant de l'indemnité qui leur a été allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 2000 euros.

-STATUANT à nouveau :

-Juger que le contrat de location des concluants est renouvelé aux clauses et conditions antérieures pour une durée de six années à compter du 30 mars 2018.

-Juger que l'offre de vente qui doit être notifiée aux concluants, suite à l'annulation de celle du 23 mars 2015, doit être identique à la première en ce qui concerne le prix de vente proposé, sous réserves de l'adapter aux lots dont les époux [V] restent locataires suites aux décisions rendues par le tribunal et la cour d'appel.

Subsidiairement

- condamner RUEIL DANTON à leur verser la somme de 1 816 260 € en réparation du préjudice subit du fait de la perte de chance de pouvoir acheter les lots dont ils sont locataires au prix d'origine.

-Condamner RUEIL DANTON à verser aux concluants la somme de 100 000 Euros à titre de dommages et intérêts pour les motifs ci-dessus indiqués,

-Condamner RUEIL DANTON à verser aux requérants une somme de 10 000 Euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour procédure de première instance et d'appel pour l'avocat plaidant ainsi que 1 000 Euros pour l'avocat postulant,

-Condamner RUEIL DANTON aux dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions du 23 octobre 2019, la société RUEIL DANTON, intimée, demande à la Cour de:

- DEBOUTE les époux [V] de la totalité de leurs demandes;

- INFIRMER le jugement du Tribunal d'instance du 8 ème arrondissement de Paris en date du 31 août 2017 en ce qu'il a:

-rejeté la fin de non-recevoir tirée du non-respect du principe que nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ;

-Constaté qu'une situation d'abus de droit résultant de la prétendue absence de volonté d'acquérir de la part de Mme [O] [I] ép [V] et M [Y] [V], ou de la tardiveté de leur contestation de l'offre de vente et du congé pour vente qui leur ont été notifiés les 23 et 26 mars 2015 n'est pas caractérisée ;

-Débouté la Société RUEIL DANTONN de sa demande de dommages et intérêts »;

- Condamné la Société RUEIL DANTON aux dépens et au paiement de 2.000 Euros aux époux [V] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- RECTIFIER le jugement du 31 août 2017 en ce qu'il a dit que le bail des époux [V] était prorogé jusqu'au 30 mars 2018 du fait des accords collectifs de location, alors que cette prorogation résulte d'un accord des parties constaté lors de la procédure de 1ère instance, et confirmé en audience ;

- DIRE ET JUGER que cet accord suppose toutefois pour être valable le droit pour la Société RUEIL DANTONN de délivrer une offre de vente et un congé aux époux [V] avant le 30 septembre 2017 en considération de l'échéance du Bail au 30 mars 2018 ;

- A titre subsidiaire, si le droit de la Société RUEIL DANTON de signifier une offre de vente et un congé avant le 30 septembre 2017 en vue de l'échéance du bail des époux [V] au 30 mars 2018, n'était pas confirmé et que la nullité de l'offre de vente et du congés délivrés en septembre 2015 était confirmée,

-CONFIRMER que le bail des époux [V] s'est renouvelé au 30 septembre 2015 aux conditions antérieures du fait de l'annulation du congé pour vente délivré le 26 mars 2015 ;

STATUANT à nouveau :

-CONSTATER les contradictions des époux [V] ;

-CONSTATER la contestation tardive et abusive des époux [V] de l'offre de vente et du congé notifiés par la Société RUEIL DANTON les 23 et 26 Mars 2015 ;

-JUGER irrecevables les demandes d'annulation des époux [V] alternativement en raison de la violation du principe de cohérence, de l'abus de droit dont ils se sont rendus coupables à l'égard de la Société RUEIL DANTONN ainsi que de leur défaut d'intérêt légitime à agir en contestation des actes notifiés par la Société RUEIL DANTON ;

-VALIDER l'offre de vente délivrée aux époux [V] le 23 Mars 2015 du fait de l'absence d'intention d'acquérir des époux [V] ;

- DIRE que le droit de préemption des époux [V] a été valablement purgé et que la Société RUEIL DANTON est autorisée à vendre les lots qu'ils occupent encore à des tiers ;

- JUGER irrecevables les contestations des époux [V] ;

- JUGER irrecevable la demande indemnitaire nouvelle des époux [V] visant à la condamnation de la société RUEIL DANTON à leur verser la somme de 1 816 260 € « en réparation du préjudice subit du fait de la perte de chance de pouvoir acheter les lots dont ils sont locataires au prix d'origine », à titre subsidiaire les en débouter ;

A titre subsidiaire :

-DIRE en cas d'annulation de l'offre de vente notifiée aux époux [V] et conformément à leur proposition que la date d'échéance de leur bail demeure prorogée au 30 mars 2018 à condition que la Société RUEIL DANTONN puisse éventuellement et valablement leur adresser une nouvelle offre de vente et un congé avant le 30 septembre 2017 ;

- A défaut, DIRE et JUGER que le bail des époux [V] s'est renouvelé le 30 septembre 2015 aux conditions antérieures ;

- CONFIRMER que la Société RUEIL DANTON a pu, et subsidiairement, peut et pourra librement déterminer le prix de ses biens immobiliers dans l'offre de vente qu'elle pourrait notifier aux époux [V] sans être liée par ses offres antérieures ;

En tout état de cause :

- DEBOUTER les époux [V] de l'intégralité de leurs demandes ;

- CONDAMNER les époux [V] à payer à la Société RUEIL DANTON la somme de 100.000 Euros à titre de dommages et intérêts en raison de leur comportement abusif et déloyal ;

- Condamner les époux [V] à verser à la Société RUEIL DANTON la somme de 15.000 Euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Interrogées sur ce point, les parties à l'audience n'ont fourni aucune information ni justificatif sur la réalité du versement des loyers.

SUR CE ;

Considérant que la législation sur les ventes par lots concernant l'exercice du droit de préemption des locataires en place a pour fin de voir ces derniers informés parfaitement de l'état de l'immeuble qu'ils habitent et des charges qui résulteront de leur achat et des travaux envisagés en vue de l'exercice de leur droit de préemption ; que l'offre définitive sera formulée dans l'acte notarié qu'ils leur sera proposé de signer s'ils décident d'acheter après avoir levé l'option ;

Considérant que ces dispositions sont destinées ainsi à protéger les locataires mal informés d'un achat mal calculé, inconsidéré ou mal compris ; que c'est à cette fin que doivent être fournis entre autres les diagnostics de l'immeuble ;

Considérant que la société RUEIL DANTON fait valoir que la position et les procédures judiciaires menées par les appelants ne tendent pour eux qu'à rester dans les lieux sans cependant exercer l'option d'achat et qu'elles présentent un caractère abusif ;

Considérant que pour rechercher la réalité de ce caractère abusif la Cour doit analyser l'historique du litige avant d'en étudier les éléments de fait et de droit ;

Sur l'historique du litige ;

Considérant que la Cour constate tout d'abord que les époux [V], qui sont pour l'un expert-comptable et pour l'autre pédiatre, et sont assistés d'un conseil, ne sauraient prétendre avoir mal compris la portée de la situation ; que de plus ils occupent l'immeuble depuis 1978 et le connaissent parfaitement ; qu'ils y occupent une superficie importante comportant un appartement et trois chambres de bonne outre deux caves dans ce quartier réputé ; que les parties n'ont pas fourni d'indication sur le montant des loyers versés, ni sur la réalité de leurs versements à ce jour malgré, ainsi qu'il l'a été rappelé plus haut, demande à l'audience ; qu'aucune information n'a été fournie sur ce point ;

Considérant qu'une réunion d'information a été tenue le 20 septembre 2005, tous les copropriétaires ayant été invités, conformément aux dispositions légales ;

Considérant que les locataires ont donc au plus tôt été informés de l'intention de procéder à une vente par lots par lettre recommandée le 9 septembre 2005 ; que les époux [V] ne peuvent prétendre ignorer la situation ; qu'ils sont restés silencieux ; que par courrier du 25 octobre 2005 la société a confirmé son intention ;

Considérant qu'une note informative très complète versée aux débats leur a été adressée; que leur lot est précisément décrit ainsi que le règlement de la copropriété et un diagnostic habituel de la SOCOTEC du 28 novembre 2003, également produit ; que l'offre de vente a été formulée le 21 mai 2008 ainsi qu'il l'a été indiqué, ainsi qu'un rapport du bureau Veritas du 7 mars 2008 ;

Par jugement du 4 mai 2012, le Tribunal d'instance, statuant à la demande des époux [V], a annulé l'offre de vente, mais constaté par ailleurs que ceux-ci occupaient un emplacement de stationnement qui ne leur avait pas été loué sur lequel ils prétendaient avoir des droits et que les 'chambres de bonnes' qu'ils occupaient ne faisaient pas partie du bail et ne donnaient pas lieu à versement d'un loyer ; que ce jugement a été confirmé par la Cour d'appel de PARIS le 4 octobre 2014 ;

Considérant que les époux [V] ont été parties à une ordonnance de référé préventif du Tribunal d'instance de PARIS du 7 octobre 2014 tendant à voir désigner un expert afin de faire refaire contradictoirement le diagnostic qu'ils avaient contesté ; qu'il a été fait droit à cette demande qui leur était favorable ;

Considérant que curieusement les époux [V] ont interjeté appel de cette décision qui leur permettait pourtant que soit effectué un diagnostic contradictoire pour s'y opposer ; que la Cour d'appel de Paris a curieusement fait droit à leur demande en retenant qu'il n'y avait pas lieu à référé par arrêt du 1er mars 2016 faute de litige ; que pourtant le lendemain de l'audience devant la Cour, ainsi qu'en justifie la société RUEIL DANTON, les époux [V] lui ont adressé un courrier dans lequel ils lui expliquaient contester l'expertise tout en n'en révélant pas les motifs ; que cette opposition systématique alors que cette expertise était destinée à les satisfaire pleinement est incompréhensible ;

Considérant que par courrier du 3 décembre 2015 il leur a été demandé de confirmer leur intention de quitter les lieux et d'indiquer la date de leur départ ;

Considérant qu'un congé pour vente leur a été signifié le 26 mars 2015 ;

Considérant que le 15 décembre 2015, les époux [V] ont indiqué par courrier qu'ils contestaient la validité de l'offre et qu'ils 'expliqueraient le moment venu les termes de leur opposition', et ajoutaient qu'ils 'ne saurait être question que RUEIL DANTON vende les lots dont ils sont locataires à un tiers' ; que cependant la Cour observe qu'aujourd'hui ils n'ont toujours pas eux-mêmes acheté ; qu'ils ont en revanche délivré une opposition à vendre à la société RUEIL DANTON le 6 novembre 2017 par huissier; qu'il convient de rappeler ici qu'un des éléments fondamentaux du droit de propriété et de pouvoir vendre son bien ; qu'un locataire qui bénéficie d'un droit de préemption ne peut par mauvaise foi en exerçant des manoeuvres dilatoires faire échec à ce droit en n'exerçant pas lui-même son droit de préemption ;

Considérant qu'une nouvelle offre a été signifiée aux époux [V] les 27 et 29 septembre 2017 par courrier ; par opposition à vente du 6 octobre 2017, les époux [V] se sont opposés à la vente ; que cette opposition n'est pas motivée et fait état d'une violation des 'accords collectifs de location' sans plus de précision et indique que 'les contestations seront développées dans le cadre d'une procédure ultérieure si celle-ci est initiée par RUEIL DANTON' ; qu'il convient de dire que cette opposition qui n'est appuyée sur aucun fait précis revient à imposer au propriétaire vendeur de bonne foi de justifier de cette dernière alors que les preneurs ne justifient pas du motif de leur opposition ;

Considérant qu' il convient d'en conclure qu'à ce moment les époux [V] se sont opposés à la vente au motif d'une violation des accords sans préciser lesquels ; qu'il convient d'en déduire soit qu'ils n'y avait pas de raison connue d'eux à cette opposition, soit qu'ils ne voulaient pas la révéler sans en préciser la raison ;

Considérant que la société RUEIL DANTON a demandé aux époux [V] de bien vouloir leur préciser en quoi ils manquaient d'informations et en quoi ces accords ne seraient pas respectés ; que les époux [V] n'ont pas répondu ;

Considérant que c'est pour ce motif que la société RUEIL DANTON a engagé la procédure qui a abouti au jugement entrepris du 31 août 2017 rappelé ci-dessus ;

Sur les éléments du litige ;

Considérant que la cour observe tout d'abord, ainsi que le fait valoir l'intimée, que les seules raisons de l'appel des époux [V] sont qu'il s demandent d'une part que l'offre dont ils demandent la confirmation de l'annulation soit faite au prix initial de la première offre du 23 mars 2015 et d'autre part que le bail dont ils bénéficient soit prolongé pour une durée de six années à compter de 2018, soir jusqu'en 2024 ;

Mais attendu, sur le premier point, que les époux [V] ne peuvent sans contradiction soutenir en même temps que la première offre dont ils ont obtenu la nullité et prétendu qu'elle n'était pas valable, inexistante et sans portée, et demander que le prix de cette dernière serve de référence pour une offre à formuler aujourd'hui ; que des éléments ont forcément changé au niveau du bâtiment, qui a connu de nombreux travaux de réfection, et du cours de celui-ci dans ce quartier et plus généralement du cours de l'immobilier en général, ainsi que la Cour en a connaissance ; que la société RUEIL DANTONN ne peut se trouver indéfiniment liée par cette offre qui a plus de 14 ans ; que la demande des appelants, qui ne peuvent à la fois se prévaloir de ce qu'ils n'ont pas accepté une offre faite il y a quatorze ans et vouloir l'exercer aujourd'hui au prix de l'époque, soutenir une position contradictoire au préjudice du propriétaire du bien ;

Considérant qu'il résulte au surplus de l'ensemble des échanges entre les parties que les époux [V] n'ont jamais formulé le désir d'acquérir le bien ; qu'il est clair, ainsi que le fait valoir le propriétaire, qu'ils entendent en réalité se maintenir dans cet immeuble prestigieux refait à neuf, ainsi que le démontrent les procès-verbaux d'assemblée générale, sans le payer ;

Considérant que, sur la date de prolongation du bail pour une durée de 6 années à compter du 30 mars 2018, soit jusqu'au 30 mars 2024, il résulte de l'examen des pièces échangées entre les parties que cette date du 30 mai 2018 avait été proposée dans le cadre d'une proposition amiable du propriétaire en vue d'une passation de la vente selon la dernière offre, que les époux [V] ont refusée ; que le maintien dans les lieux devait, compte-tenu des dispositions de la loi qui prévoient une durée maximale de 30 mois, prendre fin au 23 septembre 2017 ; que la date du 30 mars 2018 était une faveur ; que les époux [V] ayant refusé l'offre, cette date ne saurait être retenue ; qu'en outre elle ne constituait pas une date de renouvellement, mais une date limite de départ ; que la demande de prorogation au-delà, c'est-à-dire pour une durée de six années de plus à se maintenir dans les lieux sans exercer l'option, c'est-à-dire plus de 20 ans après la notification de l'intention de vendre, présente donc également un caractère non-fondé ; que c'est donc à tort que le Tribunal a retenu cette date ; qu'en réalité les époux [V] se maintiennent actuellement sans droit ni titre dans les lieux, leur droit de préemption étant purgé depuis longtemps, et il est loisible à la propriétaire de demander à tout moment leur expulsion de corps et de biens avec le concours de la force publique ;

Sur la demande d'indemnité des époux [V] ;

Considérant que les époux [V] ne caractérisent ni l'existence d'un préjudice, ni celle d'une faute commise par la société RUEIL DANTON ; que les époux [V] ont refusé de signer une offre ; qu'ils ont retardé par eux-mêmes la conclusion de la vente ; que leurs contestations sur la qualité des diagnostics est abusive, ce que révèle leur refus de participer à un diagnostic judiciaire contradictoire pourtant proposé et accepté en justice par le vendeur pour mettre fin à tout litige ; que cette situation a suffisamment duré ;

Sur la demande d'indemnité de la société REUIL DANTON ;

Considérant que si le caractère abusif et frauduleux de l'action des intéressés est établi, ainsi qu'il vient d'être vu, l'existence d'un préjudice subi par la société venderesse n'est pas clairement démontrée compte-tenu de l'évolution des prix et du fait qu'elle va pouvoir vendre le bien immobilier à un prix supérieur à ce qu'il était lors de l'offre initiale ; que la demande sera rejetée ;

Sur la demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant que la multiplicité des procédures engagées par les époux [V] dont le caractère mal fondé apparait aujourd'hui clairement justifie qu'ils soient condamnés à payer à la société RUEIL DANTON la somme de 2500€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement ;

-Infirmant pour partie le jugement entrepris,

et statuant à nouveau,

-Déboute les époux [V] de toutes leurs demandes ;

-Déboute la société RUEIL DANTON de sa demande de dommages intérêts ;

-Dit que la société RUEIL DANTON a valablement notifié ses offres de vente, et dit le droit d'option des époux [V] définitivement purgé ;

-Dit en conséquence que la société REUIL DANTON, propriétaire de son bien, peut librement le vendre à tout tiers au prix qu'elle offrira ;

-Rejette toutes autres ou plus amples demandes ;

-Condamne les époux [V] à payer à la société REUIL DANTON la somme de 2500€ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

-Les condamne aux dépens qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 17/19563
Date de la décision : 31/01/2020

Références :

Cour d'appel de Paris G3, arrêt n°17/19563 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-31;17.19563 ?
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