La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/01/2020 | FRANCE | N°16/06225

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 31 janvier 2020, 16/06225


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 31 Janvier 2020



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/06225 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYWFD



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Mars 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 15-00411





APPELANTE

SAS TOUNETT LA CLARTE

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentÃ

©e par Me Xavier BONTOUX, avocat au barreau de LYON, toque : 1134 substitué par Me Yann BOUGENAUX, avocat au barreau de LYON



INTIMEE

CPAM [Localité 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 31 Janvier 2020

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/06225 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYWFD

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Mars 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 15-00411

APPELANTE

SAS TOUNETT LA CLARTE

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Xavier BONTOUX, avocat au barreau de LYON, toque : 1134 substitué par Me Yann BOUGENAUX, avocat au barreau de LYON

INTIMEE

CPAM [Localité 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 3]

[Localité 4]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Novembre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Pascal PEDRON, Présidente de chambre

M. Lionel LAFON, Conseiller

Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Venusia DAMPIERRE, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Pascal PEDRON, Président de chambre et Mme Venusia DAMPIERRE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la CPAM [Localité 2] d'un jugement rendu le 02 mars 2016 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun dans un litige l'opposant à la société Tounett.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Mme [M] [J], salariée de la société Tounett (la société), a complété le 24 août 2005 une déclaration de maladie professionnelle prise en charge le 26 avril 2006, après instruction, par la CPAM [Localité 2] (la caisse) au titre de la législation professionnelle.

Le 30 avril 2013, la société a saisi la commission de recours amiable avant de porter le litige le 13 mai 2015 devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun qui, par jugement en date du 02 mars 2016, a « constaté la forclusion de la saisie du tribunal »

La Société a interjeté appel le 19 avril 2016 de ce jugement qui lui avait été notifié le 15 avril 2016.

Par ses conclusions « récapitulatives » écrites soutenues oralement et déposées à l'audience par son avocat, la société demande à la cour, par voie d'infirmation du jugement déféré, de:

-déclarer son recours recevable,

-constater que la caisse ne l'a pas invitée à consulter le dossier après mise en 'uvre d'un délai complémentaire d'instruction,

-constater que la caisse a manqué à son obligation d'information, violant ainsi le principe du contradictoire tiré de l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale,

-juger inopposable à son égard la décision de prise en charge de l'accident du 24 aout 2005 de Mme [J].

La société fait valoir pour l'essentiel que :

-la caisse ne rapporte pas la preuve que la société avait ou aurait dû avoir connaissance des faits lui permettant d'exercer l'action litigieuse de sorte que le point de départ du délai n'est pas déterminé et qu'aucune forclusion ne peut donc lui être opposée ; en effet, la caisse ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la date exacte à laquelle la société aurait eu connaissance de la prise en charge, et aucune prise en charge implicite faisant courir le délai de contestation ne peut être retenue.

-à supposer que la prescription quinquennale aurait commencé à courir, elle a saisi la commission dans les délais puisque sa saisine, interruptive de prescription, a été réceptionnée le 03 mai 2013, de sorte que son recours est recevable comme ayant été exercé avant le 19 juin 2013, date évoquée par la caisse comme marquant la fin du délai de prescription.

-la cour de cassation, par 4 arrêts de mai 2019, a jugé sans ambiguïté que le délai de prescription de 05 ans de l'article 2224 du code civil n'était pas applicable au regard d'une procédure antérieure au 01er janvier 2010.

-la caisse qui l'a informée de la clôture de l'instruction, lui a indiquée par la suite recourir au délai complémentaire, pour en définitive prendre en charge la maladie déclarée sans préalablement lui notifier à nouveau un courrier de fin de l'instruction, de sorte que la prise en charge lui est inopposable pour non respect du contradictoire et défaut d'information.

-le délai d'archivage invoquée par la caisse ne constitue pas un délai de prescription et ne saurait lui être opposé.

Par ses conclusions « d'intimée» écrites soutenues oralement et déposées à l'audience par son avocat, la caisse demande à la cour, de:

-au principal et au visa de la loi du 17 juin 2008 et de l'article 2224 du Code civil, confirmer le jugement déféré ayant jugé l'action en inopposabilité engagée par la société irrecevable pour cause de prescription.

-au subsidiaire et au visa des « articles 6 de la CESDH et D 253-44 et suivants du Code de la sécurité sociale », débouter la société de ses demandes.

La caisse fait valoir en substance que :

-ce n'est que plus de neuf ans après la décision de prise en charge que la société a saisi le tribunal, la demande de l'appelante étant prescrite comme n'ayant pas été engagée devant le tribunal avant le 19 juin 2013, comme l'a déjà retenu à plusieurs reprises la cour d'appel de Paris ; la saisine de la commission de recours amiable le 30 avril 2013 n'a pas vocation à interrompre la prescription applicable à l'action en inopposabilité, puisque s'agissant d'un accident du travail survenu avant l'entrée en vigueur de la réforme issue du décret de 2009, la saisine de la commission n'était pas un préalable obligatoire à la saisine du tribunal par l'employeur (Cass. Civ. 2ème 20/12/2012, n°11-26621) et ne pouvait donc interrompre la prescription.

-si récemment la Cour de cassation a rejeté l'application de la prescription de droit commun aux actions en inopposabilité, la cour d'appel ne pourra, en application de sa propre jurisprudence en matière de prescription des actions en inopposabilité, que résister à cette position dissidente de la 2ème Chambre civile prise en formation restreinte et allant à l'encontre de la jurisprudence des autres chambres de la « Juridiction Suprême »; en effet, il est de jurisprudence constante que la prescription quinquennale de l'article 2224 du Code civil constitue la prescription de droit commun applicable à toutes les actions qui ne sont pas soumises à un délai de prescription spécial, prévu par une loi spéciale.

-l'action personnelle portant sur un droit personnel, a contrario de l'action réelle portant sur un droit issu d'une chose, est donc considérée comme l'action de droit commun à laquelle doit s'appliquer la prescription quinquennale de droit commun, si aucun autre texte spécial ne fixe un délai particulier, l'article 2224 du code civil s'appliquant ainsi à la contestation par l'employeur d'une expertise décidée par le CHSCT ou encore l'action paulienne qui ne portent pourtant pas sur un droit de créance.

-considérer que la procédure en inopposabilité intentée par l'employeur n'est pas une action au sens de l'article 2224 du code civil peut revenir à considérer qu'il ne s'agit pas d'une action personnelle ou mobilière, analyse pour le moins contestable, pour ne pas dire erronée.

-la conséquence de cette nouvelle jurisprudence tendrait à considérer que les actions en inopposabilité intentées par les employeurs en matière d'AT/MP seraient des actions réelles ou immobilières, ce qui n'est incontestablement pas le cas.

-si l'action paulienne est une action personnelle au sens de l'article 2224, rien ne justifie donc que ce ne soit pas le cas de l'action en inopposabilité intentée par l'employeur alors qu'elles entrainent les mêmes conséquences juridiques car l'acte en question perdure et contraint celui qui l'a accompli, mais le rend sans portée à l'égard de celui qui aura intenté l'action en inopposabilité, comme l'avait précisé l'avocat général à la Cour de cassation dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts des 9 et 29 mai dernier.

-la première interprétation de l'arrêt du 9 mai 2019 n'est donc manifestement pas satisfaisante et ne peut dès lors être retenue.

-la seconde interprétation de l'affirmation de principe résultant de cet arrêt reviendrait à faire abstraction de la dichotomie doctrinale mobilier/immobilier et personnel/réel et à considérer que la 2ème Chambre civile n'assimile pas les demandes d'inopposabilité à des actions ; s'il ne s'agit pas d'une action, de quoi s'agit-il '; question à laquelle la Cour de cassation a omis de répondre.

-La procédure en inopposabilité répond bien à la définition de l'article 30 du code de procédure civile définissant l'action ; la demande d'inopposabilité formulée par l'employeur constitue bien une action, à défaut de quoi la société serait dépourvue du droit de saisir un juge.

-si l'article 2224 du code civil n'est pas applicable, il sera indispensable d'expliquer pourquoi et ce notamment au regard du principe constitutionnel de sécurité juridique duquel découle la notion même de prescription, question à laquelle la cour de cassation n'a pas donné de réponse.

-subsidiairement, si la cour considérait que l'action de la société n'est pas prescrite, il ne pourra qu'être constaté que celle-ci est tardive : ce n'est que plus de neuf ans après la prise en charge que la société a entendu remettre en cause le respect du contradictoire et l'opposabilité à son égard de la maladie dont Mme [J] a été victime. Or, en vertu des dispositions de l'article D.253-44 du code de la sécurité sociale, la caisse n'est soumise qu'à un délai d'archivage de deux ans, ne disposant déjà plus des pièces du dossier lors de la saisine de la commission.

-alors que le délai de prescription en matière de droit de la sécurité sociale pour obtenir des prestations ou recouvrer des prestations indues est de deux ans pour toutes les autres parties (article L.431-2 du code de la sécurité sociale), expliquant le délai d'archivage prévu par le code, les employeurs bénéficient de la prescription quinquennale de droit commun, voire d'une imprescriptibilité de leur action si l'on adhère aux dernières positions de la cour de cassation ; cette contestation tardive crée une rupture de l'égalité des armes car lorsque les employeurs tardent, comme en l'espèce, à faire valoir leurs contestations, la caisse ne dispose plus des pièces nécessaires à sa défense. C'est le cas en l'espèce et ce d'autant plus que l'accident remonte à 2005, époque à laquelle la dématérialisation des pièces n'était pas encore d'actualité.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions visées par le greffe à l'audience du 14 novembre 2019 qu'elles ont soutenues oralement.

SUR CE, LA COUR

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription de droit commun

L'article 2224 du code civil dispose : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l'exercer ».

L'article R.441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, à savoir celle antérieure à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2010, du décret n°2009-938 du 29 juillet 2009, dispose en ses alinéa 3 et 4: « La décision motivée de la caisse est notifiée à la victime ou à ses ayants droit sous pli recommandé avec demande d'avis de réception. En cas de refus, le double de la notification est envoyé pour information à l'employeur.

Si le caractère professionnel de l'accident, de la maladie, ou de la rechute n'est pas reconnu par la caisse, celle-ci indique à la victime dans la notification les voies de recours et les délais de recevabilité de sa contestation. »

L'article R.441-18 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, disposait : « Le tribunal des affaires de sécurité sociale est saisi, après l'accomplissement, le cas échéant, de la procédure prévue à la section 2 du présent chapitre, par simple requête déposée au secrétariat ou adressée au secrétaire par lettre recommandée dans un délai de deux mois à compter soit de la date de la notification de la décision, soit de l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article R. 142-6.

La forclusion ne peut être opposée toutes les fois que le recours a été introduit dans les délais soit auprès d'une autorité administrative, soit auprès d'un organisme de sécurité sociale ou de mutualité sociale agricole. »

Il résulte des dispositions combinées de ces textes que si la décision de la caisse primaire qui reconnaît le caractère professionnel de l'accident, de la maladie ou de la rechute fait grief à l'employeur qui est recevable à en contester l'opposabilité ou le bien-fondé dans les conditions fixées par les articles R 142-18 et R 441-14 du code de la sécurité sociale applicables, le recours de l'employeur ne revêt pas le caractère d'une action au sens de l'article 2224 du code civil, comme l'a précisé la cour de cassation (Cass. Civ.2ème : 09 mai 2019 n°18-10909 ; 29 mai 2019 n° 18-11961 , n°18-13696 , n°18-12087; et 10 octobre 2019 n°18-20555.

La circonstance que la prescription de droit commun ne soit pas applicable au recours en inopposabilité de l'employeur ne porte pas par elle-même atteinte au principe de sécurité juridique.

Par ailleurs, sous l'empire de la rédaction de l'article R 441-14 du code de la sécurité sociale antérieure au décret n°2009-938 du 29 juillet 2009, la décision concernant la prise en charge qui n'était adressée que « pour information » à l'employeur, n'acquérait pas de caractère définitif à son égard ou à son profit, et ce quand bien même cette décision aurait été notifiée par lettre recommandée avec mention des délais et voies de recours (Soc., 14 décembre 1989, Bull. n°715 ; Civ. 2ème, 22 septembre 2011, n°10-22.898).

En conséquence, jusqu'au 1er janvier 2010 , l'information donnée à l'employeur par une caisse de sécurité sociale sur sa décision de prise en charge d'un accident ou d'une maladie au titre de la législation professionnelle, de caractère administratif, ne constituait pas une notification, ou plus généralement un fait faisant courir contre l'employeur les délais de recours spécifiques (devant la commission ou le tribunal) de l'article R 441-18 du code de la sécurité sociale, ou d'une quelconque prescription de droit commun.

Ainsi, au regard des dispositions spécifiques du code de la sécurité sociale, le recours en inopposabilité de la décision de prise en charge du 26 avril 2006n'est donc pas soumis à la prescription de droit commun, étant précisé qu'en tout état de cause la décision de prise en charge par la caisse en 2006, n'a en l'espèce fait courir à l'encontre de celle-ci aucun délai de recours, que ce soit celui de l'article R 441-18 du code de la sécurité sociale, ou un délai de prescription de droit commun.

Le jugement sera donc infirmé et la société déclaré recevable en son recours en inopposabilité.

Sur le caractère tardif du recours de la société

La caisse fait également valoir le caractère tardif de l'action de la société qui n'a remis en cause le respect du contradictoire et l'opposabilité à son égard de la prise en charge que plus de neuf ans après cette dernière alors qu'en vertu des dispositions de l'article D 253-44 du code de la sécurité sociale, elle n'est soumise qu'à un délai d'archivage de deux ans, ne disposant déjà plus des pièces du dossier lors de la saisine de la commission.

L'article D253-44 du code de la sécurité sociale applicable dispose:

«Pour les gestions techniques, le délai de conservation des pièces justificatives papier est le suivant:

-six mois après le délai de prescription visé par l'article L. 244-3 pour l'encaissement des cotisations et majorations de retard,

-six mois après le délai de prescription pour les prestations visées aux articles L. 332-1 et L. 361-1. Pour les prestations accordées au titre des accidents du travail, le délai de conservation est fixé à six mois après le délai de prescription visé à l'article L. 431-2 sous réserve des dispositions relatives à la conservation de certaines pièces du dossier du bénéficiaire qui seront précisées dans une instruction particulière,

-six mois après le délai de prescription pour les prestations familiales visées à l'article L. 553-1 et les prestations gérées pour le compte de tiers,'

-cinq ans après le décès du titulaire ou de son conjoint pour les prestations d'assurance vieillesse et invalidité.

Une instruction particulière précisera les modalités de conservation des pièces originales ainsi que la nature des supports à utiliser et notamment les microformes et l'archivage électronique, compte tenu de la nature des documents à archiver. Les titres de propriété ne peuvent être détruits ».

Cependant la caisse ne saurait se prévaloir de ce texte de gestion technique interne lui donnant la possibilité de ne pas conserver des pièces justificatives papier au delà d'un certain délai pour échapper de ce simple fait aux obligations probatoires auxquelles elle peut être soumise dès lors que, comme en l'espèce, les délais de recours contre ses décisions ne sont pas expirés ; il appartenait en conséquence à la caisse, en considération d'un recours encore possible, de conserver, en tout état de cause sous une forme ou une autre et au besoin papier, les pièces justificatives pouvant devoir être fournies en cas de contestation demeurant légalement possible.

Si la caisse vise également des délais de conservation différents selon les délais de prescription variant en fonction de ses interlocuteurs ou selon le type de prestations, elle n'articule, ni n'établit en quoi, notamment au regard de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ces différents délais résultant des textes et justifiés par des considérations objectives institueraient tant de manière générale qu'au cas d'espèce une rupture d'égalité, notamment à son encontre.

Si elle se prévaut enfin d'une « rupture de l'égalité des armes face à des employeurs tardant, comme en l'espèce, à faire valoir leurs contestations à une époque où elle ne dispose plus des pièces nécessaires à sa défense », il apparaît cependant que la caisse ne saurait invoquer sa propre carence en la matière alors qu'il lui appartenait de prendre toute mesure utile pour conserver, les pièces justificatives pouvant devoir être fournies en cas de contestation demeurant légalement possible.

Dès lors, en présence d'une contestation d'une prise en charge de 2006, mise en 'uvre au plus tard en 2015 dans un délai qui n'apparait pas déraisonnable au regard des pièces produites, le caractère tardif du recours en inopposabilité de cette dernière n'est pas établi en l'espèce.

La demande de la société ne saurait donc au cas d'espèce être rejetée comme tardive.

Sur l'obligation d'information de la caisse

La société avance que la caisse l'a informée de la clôture de l'instruction, lui a indiquée par la suite recourir au délai complémentaire, avant en définitive de prendre en charge la maladie déclarée sans préalablement lui notifier à nouveau un courrier de fin de l'instruction.

Faute pour la caisse, qui ne produit aucun élément et notamment aucun nouveau courrier de clôture, ni accusé de réception de celui-ci, de prouver qu'elle a procédé une nouvelle fois à l'information de la société sur la clôture de l'instruction après avoir informé celle-ci le 15 février 2006 du recours au délai complémentaire (pièce n°2 de l'appelante), la caisse n'a pas respecté l'obligation d'information mise à la charge.

Dès lors, la décision de prise en charge par la caisse de la maladie professionnelle déclarée par Mme [J] le 24 aout 2005, doit être déclarée inopposable à l'employeur.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Declare l'appel recevable ;

Infirme le jugement déféré ;

Et statuant à nouveau:

Déclare la société Tounett recevable en son recours en inopposabilité.

Juge inopposable à l'égard de la société Tounett la décision de prise en charge par la CPAM [Localité 2] de la maladie professionnelle déclarée par Mme [J] le 24 aout 2005.

Condamne la CPAM [Localité 2] aux dépens d'appel.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 16/06225
Date de la décision : 31/01/2020

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°16/06225 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-31;16.06225 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award