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29/01/2020 | FRANCE | N°17/08880

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 29 janvier 2020, 17/08880


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 29 Janvier 2020

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/08880 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3UYG



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Mai 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU RG n° 16/00274





APPELANT



Monsieur [M] [L]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

né le [Date naissance 1

] 1975 à [Localité 6]



représenté par Me Nathalie LEHOT, avocat au barreau d'ESSONNE substitué par Me Blandine ALEXANDRE, avocat au barreau d'ESSONNE







INTIMEES



SASU CHANTIERS ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 29 Janvier 2020

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/08880 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3UYG

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Mai 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU RG n° 16/00274

APPELANT

Monsieur [M] [L]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 6]

représenté par Me Nathalie LEHOT, avocat au barreau d'ESSONNE substitué par Me Blandine ALEXANDRE, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIMEES

SASU CHANTIERS MODERNES CONSTRUCTION

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Philippe ROZEC, avocat au barreau de PARIS, toque : R045 substitué par Me Sandrine AZOU, avocat au barreau de PARIS, toque : R045

SAS SOVITRAT 14

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 517 715 637

représentée par Me Nathalie RORET, avocat au barreau de PARIS, toque : R130 substitué par Me Thierry DUMOULIN, avocat au barreau de LYON, toque : 261

SAS SOVITRAT 14SAS SOVITRAT 14 Etablissement principal de la SAS SOVITRAT 14

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée par Me Nathalie RORET, avocat au barreau de PARIS, toque : R130 substitué par Me Thierry DUMOULIN, avocat au barreau de LYON, toque : 261

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Novembre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Florence OLLIVIER, vice Présidente placée faisant fonction de conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Antoinette COLAS, Présidente de Chambre

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère

Madame Florence OLLIVIER, Vice Présidente placée faisant fonction de Conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 19 juillet 2019

Greffier : M. Julian LAUNAY, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Antoinette COLAS, Présidente de Chambre et par Monsieur Julian LAUNAY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [M] [L] a été engagé en qualité de coffreur polyvalent, suivant des contrats de mission, du 26 novembre au 30 décembre 2012 par la société Planet Inter, du 2 janvier au 31 août 2013 par la société Sovitrat 15, et à compter du 2 septembre 2013 par la société Sovitrat 14, au profit de l'entreprise utilisatrice la société SOGEA IDF Génie Civil.

Il a bénéficié de plusieurs missions auprès de la société SOGEA IDF Génie Civil jusqu'au mois de janvier 2015.

Le dernier contrat en date du 5 janvier 2015 a été régularisé pour une mission du 5 au 31 janvier 2015 inclus.

La convention collective applicable est celle des entreprises de travail temporaire.

L'entreprise compte plus de dix salariés.

Monsieur [M] [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Longjumeau le 23 mars 2016 afin que ses contrats d'intérim soient requalifiés en contrat à durée indéterminée depuis le 26 novembre 2012 et pour obtenir le paiement de diverses indemnités et la régularisation de sa situation contractuelle, ainsi que la remise d'une attestation Pôle Emploi.

Par jugement en date du 16 mai 2017, le conseil de prud'hommes de Longjumeau l'a débouté de ses demandes, débouté la société Sovitrat 14 et la société SOGEA IDF Génie Civil de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et mis les entiers dépens à la charge du salarié.

Le salarié a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe en date du 27 juin 2017.

La clôture a été fixée au 18 avril 2019 et l'audience de plaidoirie s'est tenue le 28 mai 2019.

Par arrêt du 11 septembre 2019, la cour a o rdonné la réouverture des débats et invité les parties à conclure sur la recevabilité des demandes formulées à l'encontre de la société Groupe Sovitrat.

Dans ses dernières conclusions, déposées et notifiées par voie électronique 25 octobre 2019, le salarié abandonne les demandes formulées à l'encontre de la société Groupe Sovitrat et demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré,

- requalifier les contrats d'intérim en contrat à durée indéterminée depuis le 26 novembre 2012 ou le 2 septembre 2013,

- condamner la société Chantiers Modernes Construction, venant aux droits de la société IDF Génie Civil, à lui verser une indemnité de requalification de 2 464,86 euros,

- condamner solidairement la société Sovitrat 14 et la société Chantiers Modernes Construction, et subsidiairement l'une ou l'autre de ces sociétés, à lui verser les sommes suivantes :

-19 720 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-4 929,72 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

-492,97 euros au titre des congés payés afférents,

-1 109,18 euros au titre d'indemnité de licenciement,

-4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code procédure civile,

- ordonner à la société Chantiers Modernes Construction la régularisation de sa situation contractuelle: fiches de paie, salaires, primes, intéressement, participation, le tout équivalent aux avantages des salariés de la société Chantiers Modernes Construction en contrat à durée indéterminée exerçant les mêmes fonctions,

- ordonner également à la société fautive de lui remettre une attestation Pôle Emploi, un certificat de travail conformes au jugement à intervenir,

- condamner solidairement la société Sovitrat 14 et la société Chantiers Modernes Construction et, subsidiairement, l'une ou l'autre de ces sociétés, aux dépens.

Dans ses dernières conclusions, déposées et notifiées par voie électronique le 29 octobre 2019, la société Sovitrat 14 demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris,

- déclarer irrecevables la demande et l'appel de Monsieur [M] [L] à son encontre,

- en tout état de cause, débouter le salarié de ses demandes,

- le condamner à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions, déposées et notifiées par voie électronique le 5 novembre 2019, la société Chantiers Modernes Construction, venant aux droits de la société SOGEA IDF Génie Civil, demande à la cour de confirmer le jugement déféré et de condamner le salarié à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Monsieur [M] [L] fait valoir que :

- pendant vingt-six mois, ses missions se sont succédé sans interruption, exception faite de quelques jours de vacances,

- il n'a signé aucun des contrats de mission,

- aucun délai de carence n'a été respecté,

- les contrats de mission ne font pas apparaître la mention de l'indemnité de fin de mission,

- les dispositions légales relatives au motif du recours n'ont pas été respectées,

- il était employé dans le cadre d'un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise,

- les deux sociétés ont agi de concert.

La société Sovitrat 14 fait valoir que :

- l'appel formé à son encontre par Monsieur [M] [L] est irrecevable faute pour lui d'avoir conclu dans le délai de trois mois à son encontre,

- il verse aux débats les contrats qu'il a conservés et qu'il n'a pas retournés signés alors qu'il en avait l'obligation,

- le conseil de prud'hommes a validé à bon droit les motifs de recours à des emplois temporaires et l'éventuel non-respect des dispositions de l'article L. 1251-5 du code du travail par la société SOGEA IDF Génie Civil ne peut justifier la requalification qu'à l'égard de l'entreprise utilisatrice,

- la société de travail temporaire n'a pas l'obligation de vérifier le bien-fondé des motifs de recours au travail temporaire,

- la durée des missions n'a pas excédé 18 mois,

- le salarié ne peut agir contre l'entreprise de travail temporaire que lorsque les conditions, à défaut desquelles toute opération de prêt de main d''uvre est interdite, n'ont pas été respectées, et un tel manquement n'est nullement invoqué,

- seule la société SOGEA IDF Génie Civil peut régulariser la situation contractuelle de Monsieur [M] [L].

La société Chantiers Modernes Construction fait valoir que :

- les contrats de mission étaient réguliers et justifiés,

- ils ont été conclus pour pallier un accroissement exceptionnel d'activité de la société SOGEA IDF Génie Civil, provenant notamment des demandes additionnelles du client et des multiples incidents survenus sur le chantier impliquant la réalisation de très nombreux travaux complémentaires et urgents,

- le recours aux contrats de mission ne traduit pas le besoin d'un poste permanent,

- les contrats ne se sont pas succédé sans interruption,

- elle ne saurait être condamnée solidairement avec la société Sovitrat 14 en cas de condamnation de cette dernière en raison de manquements aux dispositions gouvernant l'intérim,

- la demande relative à la régularisation de la situation contractuelle du salarié n'est pas prévue en cas de requalification et est indéterminée.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties.

La clôture a été fixée au 6 novembre 2019 et l'audience de plaidoirie s'est tenue le 14 novembre 2019.

MOTIFS

Sur les demandes formées à l'encontre de la société Sovitrat 14

La cour rappelle que les dispositions de l'article 908 du code de procédure civile ne sont pas applicables lorsqu'il a été fait application de la procédure prévue à l'article 905 du code de procédure civile.

Il résulte, en outre, de l'article R. 1452-7 du code du travail, applicable aux instances introduites devant le conseil de prud'hommes avant le 1er août 2016, que les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables en tout état de cause, même en appel, jusqu'à la clôture définitive des débats sur l'instance primitive.

La cour observe qu'en l'espèce, les dispositions de l'article 905 du code de procédure civile ont été appliquées et que l'instance devant le conseil de prud'hommes ayant été introduite avant le 1er août 2016, les dispositions de l'article R. 1452-7 du code du travail sont applicables.

En conséquence, l'appel formé par Monsieur [M] [L] n'est pas caduc et les demandes qu'il a formées à l'encontre de la société SOVITRAT 14 dans ses dernières conclusions sont recevables.

Sur la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée à l'égard de l'entreprise utilisatrice

Aux termes de l'article L. 1251-40 du code du travail, dans sa rédaction applicable, lorsqu'un utilisateur a recours à un salarié d'une entreprise de travail temporaire en violation caractérisée des dispositions des articles L. 1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l'utilisateur des droits afférents à un contrat à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission.

Par ailleurs, l'article L. 1251-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable, dispose que le contrat de travail temporaire, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice.

L'article L. 1251-6 du même code, dans sa rédaction applicable, prévoit qu'il ne peut être fait appel à un salarié temporaire que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire dénommée "mission" et seulement dans les cas prévus par la loi, notamment en cas d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.

Le recours à des salariés intérimaires ne peut être autorisé que pour les besoins d'une ou plusieurs tâches résultant du seul accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, notamment en cas de variations cycliques de production, sans qu'il soit nécessaire ni que cet accroissement présente un caractère exceptionnel, ni que le salarié recruté soit affecté à la réalisation même de ces tâches.

En cas de litige sur le motif du recours à un contrat à durée déterminée, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat.

En l'espèce, le motif du recours aux contrats de mission de Monsieur [M] [L] était l'accroissement temporaire d'activité.

La cour observe, toutefois, que les pièces versées aux débats ne permettent pas de procéder à une comparaison avec l'activité normale de l'entreprise et d'établir que le chantier sur lequel Monsieur [M] [L] intervenait entraînait une augmentation temporaire de l'activité de l'entreprise et de la charge de travail de ses salariés. Il n'est également pas démontré que la société SOGEA IDF Génie Civil ait dû accomplir des travaux urgents, que le client lui ait demandé d'effectuer des travaux supplémentaires, ou que le chantier ait pris du retard.

Il apparaît, en outre, que les contrats de mission se sont succédé du 26 novembre 2012 au 31 janvier 2015, sans interruption à l'exception de deux courtes périodes ( du 18 décembre 2013 au 5 janvier 2014 et du 27 octobre 2014 au 2 novembre 2014), au profit du même salarié pour pourvoir le même poste de coffreur polyvalent, au motif d'un accroissement temporaire d'activité dont la réalité n'est pas démontrée.

La cour relève, en conséquence, que le recours au travail temporaire avait pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice.

Ainsi, les contrats de mission seront requalifiés en contrat à durée indéterminée à compter du 26 novembre 2012, date du début de la première mission du salarié au profit de l'entreprise utilisatrice.

Sur la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée à l'égard de l'entreprise de travail temporaire

Les dispositions de l'article L. 1251-40 du code du travail sanctionnant l'inobservation par l'entreprise utilisatrice des dispositions des articles L. 1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35 n'excluent pas la possibilité pour le salarié d'agir contre l'entreprise de travail temporaire lorsque les conditions, à défaut desquelles toute opération de prêt de main-d''uvre est interdite, n'ont pas été respectées.

Les deux actions en requalification exercées, l'une contre l'entreprise de travail temporaire sur le fondement des articles L. 1251-5, L. 1251-6, L. 1251-16 et L. 1251-17 du code de travail, l'autre contre l'entreprise utilisatrice sur le fondement de l'article L. 1251-40 du même code, ont des fondements différents et elles peuvent être exercées concurremment.

Aux termes de l'article L. 1251-16 du code du travail, dans sa rédaction applicable, le contrat de mission est établi par écrit.

Faute de comporter la signature de l'intéressé, un contrat de mission ne peut être considéré comme ayant été établi par écrit et l'employeur, qui ne respecte pas les dispositions de cet article, se place hors du champ d'application du contrat de travail temporaire et se trouve lié au salarié par un contrat de droit commun à durée indéterminée.

La cour observe que les contrats de mission temporaire établis par la société Sovitrat 14 à compter du 2 septembre 2013 et versés aux débats ne sont pas signés.

La société Sovitrat 14 invoque la mauvaise foi du salarié, sans apporter aucun élément permettant d'établir qu'il a délibérément refusé de signer les contrats de mission dans une intention frauduleuse.

La cour observe, de surcroît, que l'entreprise de travail temporaire a agi de concert avec la société SOGEA IDF Génie Civil dès lors qu'à compter du 2 septembre 2013 jusqu'au 31 décembre 2015, elle n'a jamais proposé à Monsieur [M] [L] d'autres missions que celles qu'elle lui présentait au sein de la société SOGEA IDF Génie Civil, réservant ainsi ce salarié à l'usage exclusif et régulier de l'utilisateur.

Dès lors, les contrats de mission temporaire conclus à compter du 2 septembre 2013 doivent également être requalifiés en contrat à durée indéterminée à l'égard de la société Sovitrat 14.

Sur l'indemnité de requalification

Aux termes de l'article L. 1251-41 du code du travail, si le conseil de prud'hommes fait droit à la demande de requalification du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'entreprise utilisatrice, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.

La société Chantiers Modernes Construction sera, en conséquence, condamnée à payer à Monsieur [M] [L] la somme de 2 464,86 euros.

Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Sur les conséquences de la rupture du contrat de travail

La requalification des contrats de mission de Monsieur [M] [L] en contrat de travail à durée indéterminée et la rupture de ce dernier lui ouvrent droit aux indemnités consécutives à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Selon l'article L.1234-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.

Monsieur [M] [L] est ainsi bien fondé à solliciter le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 4 929,72 euros, correspondant à deux mois de salaire, outre la somme de 492,97 euros au titre des congés payés y afférents.

La société Chantiers Modernes Construction sera condamnée au paiement de cette somme et le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

Aux termes de l'article L.1234-9 du code du travail, dans sa rédaction applicable, le salarié titulaire d'un contrat à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement calculée en fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait avant la rupture du contrat de travail.

L'article R. 1234-4 du même code prévoit que le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié : soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédent le licenciement, soit le tiers des trois derniers mois.

Monsieur [M] [L] est ainsi bien fondé à solliciter le paiement de la somme de 1 109,18 euros d'indemnité de licenciement et la société Chantiers Modernes Construction sera condamnée au paiement de cette somme, le jugement étant également infirmé sur ce point.

A la date du licenciement, Monsieur [M] [L] percevait une rémunération mensuelle brute de 2 464 euros, avait 39 ans et bénéficiait d'une ancienneté de deux ans et deux mois au sein de l'établissement.

Il ne justifie pas de sa situation professionnelle et économique actuelle.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, du montant de la rémunération versée à Monsieur [M] [L], de son âge et de son ancienneté, il y a lieu de lui allouer, en application de l'article L.1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable, une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La requalification du contrat de travail à l'égard de la société Sovitrat 14 à compter du 2 septembre 2013 intervenant plus tardivement que la requalification du contrat à l'égard de la société Chantiers Modernes Construction, l'entreprise de travail temporaire sera condamnée in solidum avec la société Chantiers Modernes Construction, à due concurrence, au paiement des sommes suivantes :

- 2 464,86 euros d'indemnité compensatrice de préavis,

- 246,48 euros au titre des congés payés y afférents,

- 725,23 euros d'indemnité de licenciement,

- 9 807,69 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.

L'application de l'article L.1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable, appelle celle de l'article L.1235-4 concernant le remboursement par l'employeur fautif à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées au salarié, que la cour ordonnera dans le cas d'espèce dans la limite de trois mois.

Sur la demande de régularisation de sa situation contractuelle et de remise des documents sociaux

Compte tenu des développements qui précèdent, il convient de faire droit à la demande de remise par la société Chantiers Modernes Construction de fiches de paie, d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail conformes, dans les termes du dispositif sans qu'il n'y ait lieu d'assortir cette remise d'une astreinte.

En revanche, la demande de régularisation des salaires, primes, intéressement et participation, qui n'est ni chiffrée ni motivée et dont l'objet n'est pas déterminé, ni déterminable en l'état des pièces communiquées, sera rejetée.

Sur les frais de procédure

La société Chantiers Modernes Construction et la société Sovitrat 14, succombant à l'instance, seront condamnées in solidum aux dépens.

Elles seront, en outre, condamnées in solidum à payer à Monsieur [M] [L] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Longjumeau le 16 mai 2017,

Et, statuant à nouveau,

Déclare l'appel recevable,

Déclare recevables les demandes formées par Monsieur [M] [L] à l'encontre de la SAS Sovitrat 14,

Requalifie les contrats de mission de Monsieur [M] [L] en contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 26 novembre 2012 à l'égard de la SASU Chantiers Modernes Construction, et à compter du 2 septembre 2013 à l'égard de la SAS Sovitrat 14,

Condamne la SASU Chantiers Modernes Construction à payer à Monsieur [M] [L] la somme de 2 464,86 euros d'indemnité de requalification,

Condamne la SASU Chantiers Modernes Construction à payer à Monsieur [M] [L] les sommes suivantes :

- 4 929,72 euros d'indemnité compensatrice de préavis,

- 492,97 euros au titre des congés payés y afférents,

- 1 109,18 euros d'indemnité légale de licenciement,

- 15 000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la SAS Sovitrat 14 à payer à Monsieur [M] [L], in solidum avec la SASU Chantiers Modernes Construction, à due concurrence, les sommes suivantes :

- 2 464,86 euros d'indemnité compensatrice de préavis,

- 246,48 euros au titre des congés payés y afférents,

- 725,23 euros d'indemnité de licenciement,

- 9 807,69 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne la remise par la SASU Chantiers Modernes Construction à Monsieur [M] [L] de fiches de paie, d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail conformes à la présente décision dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt,

Ordonne le remboursement in solidum par la SASU Chantiers Modernes Construction et la SAS Sovitrat 14 à Pôle Emploi des indemnités de chômage payées à Monsieur [M] [L] à la suite de la rupture du contrat de travail, dans la limite de trois mois,

Déboute Monsieur [M] [L] de sa demande d'astreinte, de régularisation de salaires, primes, intéressement et participation,

Condamne in solidum la SASU Chantiers Modernes Construction et la SAS Sovitrat 14 à payer à Monsieur [M] [L] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la SASU Chantiers Modernes Construction et la SAS Sovitrat 14 aux dépens de l'entière procédure.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 17/08880
Date de la décision : 29/01/2020

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°17/08880 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-29;17.08880 ?
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