RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 10
ARRÊT DU 29 Janvier 2020
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/07840 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3O2P
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 21 Avril 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de BOBIGNY RG n° F12/03573
APPELANT
Monsieur [K] [Z]
[Adresse 3]
[Localité 2]
né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 5] (93)
représenté par Me Katia BITTON, avocat au barreau de PARIS, toque : E1543
INTIMEE
SARL AEROPISTE
Angle [Adresse 7] et [Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 4]
N° SIRET : B 3 88 254 310
représentée par Me Arnaud BLANC DE LA NAULTE de l'AARPI NMCG AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : L0007 substituée par Me Roman GUICHARD, avocat au barreau de PARIS, toque : L0007
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Novembre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Antoinette COLAS, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Antoinette COLAS, Présidente de Chambre
Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère
Madame Florence OLLIVIER, Vice Présidente placée faisant fonction de Conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 19 juillet 2019
Greffier : M. Julian LAUNAY, lors des débats
ARRET :
- Contradictoire
- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Antoinette COLAS, Présidente de Chambre et par Monsieur Julian LAUNAY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [Z] a initialement été embauché par la société Aéropiste suivant plusieurs contrats de travail temporaire en qualité de chauffeur poids lourds sur la période du 6 mai 2002 au 30 avril 2006, puis suivant un contrat à durée déterminée à compter du 21 novembre 2006, en qualité d'agent de liaison, qui a débouché sur un contrat à durée indéterminée par avenant du 18 mai 2007. Il occupe actuellement les fonctions de responsable de mouvement depuis le 21 février 2012.
La société compte plus de 11 salariés et la convention collective applicable à la relation contractuelle est celle des transports routiers.
Monsieur [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny par requête du 15 octobre 2012 afin d'obtenir le paiement de rappels de salaires et de primes.
Monsieur [Z] a été arrêté de septembre 2015 à avril 2017 à la suite d'un accident de travail. Puis, il a fait l'objet d'un mi-temps thérapeutique du mois d'avril 2017 à octobre 2017.
Par jugement en date du 21 avril 2017, le conseil de prud'hommes de Bobigny a condamné la société Aéropiste à verser à Monsieur [Z] les sommes de :
- 4.500 € à titre de reliquat de prime de compensation pour heures de nuit, outre 450 € au titre des congés payés y afférents;
- 6.000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des temps de pause,
- 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Néanmoins, le conseil de prud'hommes a débouté Monsieur [Z] du surplus de ses demandes.
Monsieur [Z], ayant constitué avocat, a interjeté appel du jugement par une déclaration transmise au greffe de la cour d'appel de Paris par le RPVA le 1er juin 2017.
Par des écritures transmises le 1er octobre 2019, par le réseau privé virtuel des avocats auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens invoqués le 1 octobre 2019, Monsieur [Z] conclut la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Aeropiste au paiement de certaines sommes et à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté pour le surplus. Monsieur [Z] sollicite la condamnation de la société Aeropiste au versement des sommes suivantes :
-5.000 € au titre de la requalification des contrats d'intérim et des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée;
-12.740,30 € au titre du rappel de la prime d'ancienneté et 1.274,03 € au titre des congés payés afférents;
-402,66 € au titre de rappel de salaire fixé pour la période d'octobre 2010 à juin 2011, et 40,27 € au titre des congés payés afférents;
-2.000 € de dommages-intérêts au titre du retard et de la résistance abusive quant au paiement des heures de nuit;
-16.785 € au titre de rappel de primes du dimanche d'octobre 2007 à septembre 2019, et 1.678,50 € de congés payés afférents;
-3.185 € au titre du rappel des primes de jours fériés d'octobre 2007 à août 2019, et 318, 50 € au titre des congés payés afférents;
-3.847,50 € au titre ded primed du soir d'octobre 2007 à décembre 2014 et 384,75 € de congés payés afférents;
-Réintégration de 40 jours de congés payés pour la période 2012 à 2019 et application des 25 jours de congés payés au lieu de 20 sur les bulletins de paie à venir
-Réintégration de 10 jours de congés exceptionnels pour les années 2009 et 2010
-14.867,46 € au titre de rappel de salaire pour non respect des temps de pause et 1.486,50€ au titre des congés payés afférents; subsidiairement 9.911,64 € et 991,16 € de congés payés afférents;
subsidiairement
-10.354,21 € en sus de la somme de 6000€ accordée par le conseil de prud'hommes au titre des dommages-intérêts pour absence de temps de pause;
-25.000 € de dommages-intérêts au titre du préjudice financier et exécution déloyale du contrat, et différence de traitement
-18.200 € au titre de la prime de remplacement pour la période de 2013 à juin 2019;
-40.000 € de dommages-intérêts pour discrimination et violation du droit de grève;
-6.360,84 € au titre du rappel de 13ème mois sur les demandes indemnitaires formulées et -636,08 € au titre des congés payés afférents;
-3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par des écritures transmises le 1er octobre 2019 par le réseau privé virtuel des avocats auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens invoqués, la société Aeropiste sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] de ses demandes salariales et indemnitaires et l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée au paiement d'un reliquat de prime de compensation pour les heures de nuit et de dommages-intérêts pour non respect du temps de pause.
Elle demande à la cour, statuant de nouveau, de déclarer irrecevables les demandes nouvelles présentées pour la première fois en cause d'appel, de débouter Monsieur [Z] de l'ensemble de ses prétentions et de le condamner au paiement de la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Afin de justifier ses prétentions, Monsieur [Z] fait valoir que:
- la règle de l'unicité d'instance s'applique au litige, subsidiairement que les demandes nouvelles soulevées devant la cour se rattachent par un lien suffisant aux prétentions originaires;
- ses contrats précaires et à durée déterminée doivent être requalifiés en contrat à durée indéterminée avec reprise d'ancienneté au 6 mai 2002 dès lors que son poste correspondait à un emploi lié à l'activité normale et permanente de la société Aeropiste;
- en conséquence il doit percevoir une prime d'ancienneté conforme à sa date d'entrée effective, prime d'ancienneté qu'il n'a perçue qu'à compter de 2010;
- il est fondé à demander un rappel de salaires sur les heures de nuit, jours fériés et prime de dimanche ;
- 40 jours de congés payés pour la période de 2012 à 2019 (5 jours x 8 ans) doivent être réintégrés sur son bulletin de paie dès lors qu'il n'a jamais accepté un changement de décompte de 25 jours à 20 jours de congés;
- la société ne lui a pas versé l'intégralité de sa prime de compensation 2012;
- il n'a pas pu bénéficier de pause pendant ses vacations du matin;
- il a subi un préjudice financier lié à sa situation initiale d'intérimaire et à son accident de travail;
- son contrat de travail a été exécuté de manière déloyale et il a subi une différence de traitement;
- la société a violé son droit de grève par la mise en place d'une prime de remplacement attribuée seulement à certains salariés;
- un rappel de prime de treizième mois doit être appliqué sur chacun des rappels de salaire sollicités.
En réponse et au regard de ses dernières conclusions, la société Aeropiste soulève que :
- les demandes salariales de Monsieur [Z] [Z] antérieures au 16 octobre 2007 sont prescrites;
- les demandes nouvelles de Monsieur [Z] [Z] formées en appel sont irrecevables;
- Monsieur [Z] n'apporte pas la preuve que le recours à des contrats de mission avait pour finalité de pourvoir un emploi permanent dans l'entreprise;
- le salarié n'est pas fondé à solliciter la requalification de ses contrats;
- elle n'avait aucune obligation légale de prendre en compte l'ancienneté de Monsieur [Z] à compter du 6 mai 2002;
- Monsieur [Z] a toujours perçu une prime d'ancienneté conformément aux accords en vigueur au sein de la société;
- elle a respecté ses obligations et n'est pas redevable d'un reliquat de prime de compensation pour les heures de nuit;
- les primes du dimanche, de jours fériés et du soir sont uniquement versées aux chauffeurs PL et VL, or Monsieur [Z] n'exerce pas ces fonctions ;
- le salarié a intégralement été rempli de ses droits en matière de congés payés et de congés exceptionnels;
- Monsieur [Z] a toujours pu bénéficier d'un temps de pause au cours de sa journée de travail, et que ce temps de travail était rémunéré comme du temps de travail effectif;
- Monsieur [Z] ne produit aucun élément probant justifiant ses prétentions de sorte qu'elle n'est pas redevable d'un rappel de prime de fin d'année appliqué à chaque demande salariale;
- Monsieur [Z] n'a subi aucune discrimination et ne produit aucun élément de nature à justifier son préjudice financier;
- la différence de traitement soulevée est infondée dès lors que Monsieur [Z] n'apporte aucun élément probant laissant supposer l'existence d'une inégalité de traitement;
- Monsieur [Z] n'est pas dans une situation comparable à celles des salariés ayant reçu une prime de remplacement;
- le droit de grève de Monsieur [Z] n'a pas été violé, et le salarié n'apporte pas d'élément de preuve permettant d'établir l'existence d'une discrimination à l'égard des salariés grévistes;
- la prime de remplacement a été attribué à certains salariés dans le seul but de répondre aux exigences de continuité de l'activité de la société.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 octobre 2019.
SUR CE,
Sur le moyen tiré de la prescription des créances salariales antérieures au 16 octobre 2007 ;
Avant la loi du 14 juin 2013, le délai de prescription des actions en paiement des salaires se prescrivait par 5 ans.
Il est avéré que Monsieur [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny, le 15 octobre 2012.
C'est vainement que la SARL Aéro-piste soutient que les demandes effectuées au titre du rappel de salaire pour la période du 1er au 16 octobre 2007 sont prescrites.
En effet, c'est par de justes motifs que le conseil de prud'hommes a fait observer que le délai de prescription court à compter de la date d'exigibilité du salaire, que le salaire mensuellement payé n'est exigible, sauf accord contraire qu'aux termes de la période considérée de sorte que dans le cas présent, les bulletins de paie couvrent des périodes allant du 21 d'un mois au 20 du mois suivant, que le salaire de Monsieur [Z] à compter du 1er octobre 2007 était exigible le 20 octobre 2007.
En conséquence, compte tenu de la date de la saisine du conseil de prud'hommes le 15 octobre 2007 la créance salariale pour la période du 1er au 16 octobre 2007 n'a commencé à courir que le 20 octobre 2007.
Le moyen tiré de la prescription pour la période du 1er au 16 octobre 2007 est inopérant.
Sur les demande nouvelles en appel et le principe de l'unicité de l'instance ;
Compte tenu du principe de l'unicité de l'instance, applicable lors de l'introduction du contentieux devant le conseil de prud'hommes, Monsieur [Z] est recevable à former des demandes nouvelles en cause d'appel, telles celle ayant trait à la requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée. En effet, selon les dispositions nouvelles, le principe de l'unicité de l'instance ne pourra plus être invoqué pour les affaires engagées devant les conseils de prud'hommes à compter du 1er août 2016.
Sur la requalification des contrats intérimaires ;
Sur la prescription de la demande de requalification
La SARL Aéro-piste soutient que Monsieur [Z] ne peut plus solliciter la requalification des contrats de travail à durée déterminée antérieurs au 16 octobre 2007, l'ensemble des contrats précaires ayant été signés entre le 21 novembre 2006 et le 20 juin 2007, en sorte que l'action en requalification est prescrite, la saisine du conseil de prud'hommes remontant au 15 octobre 2012.
L'examen des documents communiqués montre que Monsieur [Z] a été engagé suivant des contrats intérimaires depuis le 6 mai 2002, qu'une interruption a eu lieu au cours de l'année 2006 puisqu'il n'a pas été engagé dans le cadre de tels contrats entre le 30 avril 2006 et le 21 novembre 2006.
Il a été de nouveau engagé suivant un contrat à durée déterminée à temps complet le 21 novembre 2006 afin de faire face à un accroissement temporaire d'activité à la demande du client Air France, et ce, pour une durée de sept mois. Quelques jours avant le terme de ce contrat de travail à durée déterminée et suivant un avenant du 18 mai 2007, les parties sont convenues que le contrat de travail à durée déterminée se poursuivrait à compter du 21 juin 2007 pour une durée indéterminée, la poursuite des liens contractuels se faisant aux mêmes conditions de rémunération et d'emploi que prévu dans le contrat de travail à durée déterminée initial, sans période d'essai.
Lorsque le salarié invoque le caractère pérenne et durable de l'emploi pour lequel il a été recruté dans le cadre d'un contrat temporaire, le point de départ du délai est le terme du dernier contrat.
En l'espèce, l'avenant du 18 mai 2007 a prévu la poursuite de la relation contractuelle dans le cadre d'une relation à durée indéterminée toujours en cours en sorte que le délai de prescription s'agissant du contrat de travail du 21 novembre 2006 n'a pas commencé à courir.
En revanche, compte tenu de la longue interruption entre les deux séries de contrats, le salarié ne peut solliciter la requalification des contrats antérieurs. Sa demande est à cet égard prescrite.
Par ailleurs, il résulte des articles L. 1251-1 et L. 1251-6 que la possibilité donnée à l'entreprise utilisatrice de recourir à des contrats de mission successifs avec le même salarié intérimaire pour faire face à un accroissement temporaire d'activité ne peut avoir pour effet ni pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à son activité normale et permanente. L'entreprise utilisatrice ne peut recourir de façon systématique aux missions d'intérim pour faire face à un besoin structurel de main-d''uvre.
Dans la mesure où le salarié a travaillé sans discontinuer notamment depuis le 21 novembre 2006 , que des termes de l'avenant du 18 mai 2007, le salarié a occupé le même emploi au delà du 21 juin 2007, il s'en déduit qu'il a, dès le 21 novembre 2006, occupé un emploi correspondant à l'activité normale et permanente de l'entreprise.
Toutefois, le salarié ne peut prétendre à une indemnité de requalification lorsque le contrat de travail à durée déterminée devient un contrat à durée indéterminée au terme du contrat de travail à durée déterminée comme en l'espèce.
Monsieur [Z] sera débouté de sa prétention à ce titre.
Sur la reprise de l'ancienneté ;
Monsieur [Z] soutient que son ancienneté doit remonter au premier contrat intérimaire souscrit, soit au 6 mai 2002 avec toutes conséquences afférentes notamment pour le calcul de la prime d'ancienneté.
Dans le cas d'espèce, il a été relevé que la succession des contrats intérimaires a été interrompue pendant 7 mois.
L'absence d'interruption entre les deux séquences contractuelles est une condition impérative à l'application de la reprise d'ancienneté.
Dans ces conditions, c'est à juste titre que le premier juge a retenu que l'ancienneté du salarié remonte au 21 novembre 2006.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la majoration sur l'ancienneté;
En application d'un accord collectif d'entreprise et de ses avenants, il est versé aux salariés depuis le 21 mai 2001 une prime dite d'ancienneté d'un montant variable allant de 2,5% du salaire brut pour deux ans de présence aux effectifs à 12,5% après 22 ans.
Monsieur [Z] soutient qu'il n'a pas perçu les primes d'ancienneté lui revenant dans la mesure où l'employeur n'a pas tenu compte de son ancienneté réelle remontant 6 mai 2002
Il fait par ailleurs valoir que l'employeur lui a réglé une prime d'ancienneté pour la première fois en novembre 2010 mais a parallèlement procédé à une diminution du taux horaire et ce, sans son accord explicite.
Il allègue aussi d'une différence de traitement au motif que d'autres salariés dans une situation similaire ont vu leur ancienneté être reprise.
En réponse aux prétentions et affirmations du salarié, l'employeur rappelle les dispositions de l'article L. 1251-38 du code du travail, selon lesquelles l'employeur qui embauche après une mission un salarié mis à disposition par une entreprise de travail temporaire doit prendre en compte la durée des missions accomplies au sein de cette entreprise au cours des trois derniers mois précédant le recrutement, qu'en l'espèce aucune mission n'a été assumée par le salarié dans les trois mois précédant le 21 novembre 2006, date de l'embauche en contrat de travail à durée déterminée avant son recrutement en contrat de travail à durée indéterminée.
S'agissant de la demande de rappel de prime d'ancienneté à hauteur de 652,69 euros bruts outre les congés payés afférents, la société soutient qu'il s'agit d'une demande nouvelle formulée en cause d'appel et par suite, irrecevable.
La société expose, enfin, avoir fait une stricte et juste application des accords collectifs s'agissant du versement de la prime d'ancienneté.
Elle explique avoir jusqu'en octobre 2010 fait apparaître sur les bulletins de salaire, le taux horaire global sans détailler de manière précise la prime d'ancienneté, et avoir, à compter d'octobre 2010 fait mention, de manière distincte, du salaire de base sans ancienneté et la prime d'ancienneté.
Elle explicite les divers taux appliqués au cours de la période considérée et en déduit que Monsieur [Z] a été intégralement rempli de ses droits.
S'agissant de la reprise d'ancienneté au 6 mai 2002 pour calculer le montant de la prime d'ancienneté, il a été précédemment relevé que l'absence d'interruption entre les deux séquences contractuelles est une condition impérative à l'application de la reprise d'ancienneté au premier jour du premier contrat de travail de la première séquence contractuelle.
Par ailleurs, en l'absence de contrat intérimaire liant Monsieur [Z] et la société entre le 21 août et le 21 novembre 2006, soit au cours de trois mois ayant précédé le recrutement du 21 novembre 2006, et conformément aux dispositions de l'article 1251-38 du code du travail, l'employeur revendique à bon droit que la date marquant le départ de l'ancienneté à prendre en compte pour évaluer la prime d'ancienneté est celle du 21 novembre 2006.
La cour observe par ailleurs, que Monsieur [Z] communique aux débats plusieurs documents tels que les procès-verbaux des réunions du comité d'entreprise du 28 décembre 2000, du 26 juillet 2001, du 24 avril 2003, 26 juin 2003, du 24 mai 2006, du 26 mai 2011 dans lesquels ont été évoquées les questions relatives à l'évolution de l'emploi ainsi qu'à l'ancienneté de plusieurs salariés.
Il y est fait mention de la « rectification », du « rattrapage », de la « titularisation » de tel ou tel salarié.
Toutefois, à défaut de toute précision sur les situations exactes des salariés en cause, sur les antécédents contractuels de ceux-ci avec la société, Monsieur [Z] n'apporte pas les éléments de nature à étayer sa demande au titre de l'inégalité de traitement.
Enfin, c ontrairement à ce que soutient Monsieur [Z], et comme le démontre l'intimée, celui-ci a été intégralement rempli de ses droits.
En effet, jusqu'en octobre 2010 figuraient sur les bulletins de salaire le taux horaire de 15,36 % incluant in fine le « salaire horaire » de base et la somme de 0,375 euros, représentant 2,5 % du salaire de base pour le calcul prime d'ancienneté
A partir du mois d'octobre-novembre 2010 et prenant en compte la revalorisation du taux de base à la suite de l'accord NAO 2010, il était fait mention sur les bulletins de salaire de manière distincte du taux horaire de base, sans ancienneté, soit 15,067 euros et 0,375 euros représentant les 2,5 % du salaire de base.
A partir du mois de juillet 2011 en tenant compte de la promotion de Monsieur [Z] en tant que responsable des mouvements, les bulletins de salaire font apparaître le taux de base de 15,412 euros + 0,385 correspondant à 2,5 % du salaire de base pour l'ancienneté.
Il en résulte que Monsieur [Z] a été rempli de ses droit et qu'il affirme ainsi à tort que l'employeur a procédé à une modification unilatérale du mode de calcul de sa rémunération et par suite, à une modification unilatérale de sa rémunération.
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] de cette même demande.
Pour les mêmes motifs, il ne sera pas fait droit aux prétentions relatives au rappel ou « rattrapage » de salaire tout aussi infondées, observation étant faite que le moyen tiré de l'irrecevabilité de toute demande nouvelle devant la cour est inopérant au regard du principe de l'unicité de l'instance, ainsi que cela a été analysé précédemment.
Sur les majorations salariales pour heures de nuit, jours fériés et prime de dimanche ;
pour les heures de nuit ;
À l'appui de cette réclamation, Monsieur [Z] précise n'avoir bénéficié du régime légal des majorations pour heures de nuit qu'à compter d'octobre 2012 sans régularisation pour la période antérieure, ce que conteste l'intimée qui invoque sur ce point un accord collectif d'entreprise conclu le 26 juillet 2012.
Cet accord collectif a pour objet le « versement exceptionnel d'une prime de compensation des majorations des heures de nuit » d'un montant variable et payable sur les salaires de septembre 2012, lequel est d'application rétroactive « pour les périodes d'application des roulements de grilles de travail depuis le 01 juillet 2007 » et, comme tel, doit être retenu comme une opération négociée par les partenaires sociaux de régularisation de la situation passée.
Il est admis que Monsieur [Z] a perçu à ce titre la somme de 1000 € sur son bulletin de paie d'août/septembre 2012.
Or, il a été désigné comme responsable de mouvement à compter du mois de juillet 2012.
Dans la mesure où les partenaires signataires de l'accord ont prévu le versement exceptionnel d'une prime pour régulariser la situation passée et compenser les majorations des heures de nuit, qui n' avaient pas été appliquées, c'est à juste titre que l'employeur soutient que la prime de compensation doit être allouée au prorata du temps passé par le salarié comme agent de liaison, d'une part et comme responsable de mouvement, d'autre part.
Le jugement entrepris sera réformé et la société sera condamnée au paiement de la somme de 450 euros outre celle de 45 euros outre les congés payés afférents ainsi qu'elle le propose compte tenu de la somme déjà perçue par le salarié.
Sur la demande de dommages-intérêts à raison du retard pris et de la résistance abusive de l'employeur ;
Le préjudice lié au retard pris pour la perception de ces sommes sera réparé par les intérêts moratoires de droit dans le cadre de l'exécution du présent arrêt.
Sur les primes pour travail le dimanche, les jours fériés et le soir
En dépit de ce que prétend Monsieur [Z], et comme le soutient à juste titre la SARL Aéro Piste, la grille salariale en vigueur au sein de l'entreprise ne prévoit le paiement de ces primes qu'au seul profit des salariés occupant des fonctions de chauffeurs de poids-lourds (PL) ou de véhicule léger (VL), ce qui ne concerne pas l'appelant dans la mesure où il a été engagé comme « agent de liaison » puis a été promu comme « responsable de mouvement », catégorie pour laquelle de tels avantages n'ont pas été conventionnellement prévus.
Il sera relevé que, tant aux termes des documents contractuels des 21 novembre 2006 et du 18 mai 2007 que sur les bulletins de salaire, jusqu'en juillet 2012, il est fait mention de l'emploi de Monsieur [Z] comme « agent de liaison ». Il est inopérant pour le salarié de renvoyer à la lettre de l'inspection du travail qui fait état du fait que les bulletins de salaire faisaient mention de son emploi de chauffeur poids lourds, ce constat ainsi opéré étant à l'évidence erroné.
Au surplus, le premier juge a, à bon escient, écarté les deux attestations communiquées par le salarié pour démontrer qu'il exerçait les fonctions de chauffeur poids lourds, ces deux attestations n'étant pas conformes aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile et par suite, ne présentant pas de garanties suffisantes pour que leur soit reconnue une valeur probante.
Par ailleurs, les NAO font mention de la fixation des montants des primes allouées sans remettre en cause la grille salariale et par suite, sans modifier la liste des bénéficiaires concernés par l'attribution de ces primes.
Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il n'a pas fait droit aux demandes à ce titre.
Sur les congés payés et congés exceptionnels ;
L'appelant demande la « réintégration » de 40 jours (5 jours x 7 années) de congés payés sur la période 2012/ 2019 et de 10 jours de congés exceptionnels sur 2009/2010 au motif que depuis juin 2012, il ne bénéficie que de 20 jours de congés payés
Il rappelle les dispositions légales selon lesquelles, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur,
Il fait aussi observer que l'assiette de calcul des congés payés est différente selon les jours de congés, que l'assiette doit prendre en compte tous les éléments de salaire, que par suite, le mode de calcul retenu par l'employeur sans aucune référence à un quelconque accord collectif lui est défavorable.
Comme l'expose la SARL AÉRO-PISTE, il a été mis en oeuvre au sein de l'entreprise un système de décompte des congés payés permettant une prise de repos égalitaire entre les salariés travaillant à temps plein cinq jours par semaine et ceux comme Monsieur [Z], occupés par roulement durant trois jours sur la période considérée.
Pour cette dernière catégorie, il est attribué à chacun « un compteur de 20 jours correspondant à des jours de travail planifiés ».
Ainsi, lorsqu'ils souhaitent partir en congés une semaine complète durant laquelle ils ne travaillent que trois jours, ne posent-ils que trois jours de congés payés ce qui leur permet de bénéficier d'un nombre de jours de congés identique à celui attribué aux salariés en équivalent temps plein.
L'examen des tableaux récapitulatifs produits montre que Monsieur [Z] a, entre juin 2012 et 2014, « posé 18 jours de congés payés sur les jours planifiés qu'il devait travailler, ce qui correspond à au moins 23 jours de congés payés ouvrés sur un compteur de 25 jours »).
Il en résulte que cette forme de décompte est plus favorable aux salariés concernés et que dans le cas présent, Monsieur [Z] est susceptible de disposer chaque année d'un nombre de jours de congés sur des jours ouvrables supérieur à celui qui est imposé par les dispositions légales précédemment évoquées.
Monsieur [Z] invoque un accord collectif du 24 juillet 1997 mettant un place ce dispositif de 5 jours de congés exceptionnels et soulève l'inopposabilité d'un accord du 6 mai 2009 gelant le bénéfice de ces jours exceptionnels durant deux années à compter du 1er juin 2009, dont se prévaut l'employeur, du fait qu'il a été signé par le seul représentant de la CGT.
Il relève aussi qu'il n'est pas établi que l'accord a fait l'objet du dépôt obligatoire.
Or, c'est le principe majoritaire qui gouverne la validité d'une convention ou d'un accord collectif de travail. Il n'est pas justifié, dans le cas présent, que l'accord collectif du 6 mai 2009 signé par le seul syndicat CGT a été avalisé conformément à ce principe majoritaire.
Dans ces conditions et nonobstant le fait que ce gel n'ait pas été remis en cause aux termes du texte conventionnel du 27 octobre 2010, signé par plusieurs représentants syndicaux ( FO, CFTC, CFE-CGC, FNCR, CFDT, STAAAP UNSA) au titre « des NAO » et dont la régularité n'est pas contestée, l'accord du 6 mai 2009 ne peut être opposé au salarié.
Il sera fait droit à sa demande au titre des congés exceptionnels pour les deux années 2009 et 2010.
Le jugement dont appel sera donc infirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] de ses demandes à ces titres.
Sur les temps de pause ;
Selon l'article L. 3121-33 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, dès que le temps de travail quotidien atteint 6 heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de 20 minutes.
Des dispositions conventionnelles plus favorables peuvent fixer un temps de pause supérieur.
A cet égard, Monsieur [Z] se prévaut de l'ordonnance du 12 novembre 2004 relative à l'aménagement du temps de travail dans le secteur du transport, qui apporte une dérogation aux dispositions de l'article L. 3121-33 du code du travail en portant à 30 minutes au moins le temps de pause .
C'est vainement que faisant référence à l'accord ARTT du 18 avrvil 2002, l'intimée soutient que le champ d'application de son activité ne relevant pas de la prise en charge des voyageurs, mais du frêt ce dispositif ne s'impose pas à elle. En effet, la directive 2002/15/CE du 11 mars 2002 transposée par l'ordonnance n° 2004-1197 du 12 novembre 2004 s'applique à toutes les personnes effectuant des transports routiers de marchandises ou de voyageurs
Pour s'opposer à la prétention de Monsieur [Z] qui indique n'avoir pas pu prendre ses temps de pause au vu de ses plannings de travail particulièrement chargés, en reprochant ainsi à l'intimée de ne pas l'avoir mis en situation d'en bénéficier, et alors qu'une alerte à propos de l'absence de pause dans l'entreprise avait été adressée à l'employeur lors de la réunion du comité d'entreprise du 26 janvier 2012, la SARL Aéro-piste se limite à exposer que Monsieur [Z] « a toujours pu bénéficier d'un temps de pause durant sa journée de travail en fonction des impératifs liés au frêt» et que « ce temps de pause lui a été rémunéré comme du temps de travail effectif ». Il fait valoir que le salarié peut vaquer à ses occupations personnelles ( déjeuner, pause café...)
Alors qu'il incombe à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié a pu bénéficier des pauses légalement exigées et alors qu'il ne peut être retenu comme fait justificatif la pratique consistant à rémunérer ce temps théorique de pause « comme temps de travail effectif », le salarié qui n'a pas bénéficié de tout ou partie de ses temps de pause est fondé à solliciter des dommages-intérêts pour réparer le préjudice subi.
Confirmant le jugement entrepris sur ce point, la SARL AÉRO-PISTE versera à Monsieur [Z] la somme de 6000 euros à titre de dommages-intérêts correspondant à la juste réparation du préjudice subi consécutivement au non-respect de ses temps de pause.
Sur le rappel de prime de fin d'année ou de 13ème mois
Invoquant un accord d'entreprise auquel il a été fait référence aux termes de l'ordre du jour et du procès verbal de la réunion du comité d'entreprise du jeudi 28 décembre 2000, mentionnant en point 3 la prime de 13 ème mois, Monsieur [Z] sollicite à ce titre la somme de 6360,84 euros outre les congés payés afférents sur les rappels de salaire qu'il a sollicités.
Or, aucun rappel de salaire calculé en fonction des rémunérations perçues n' a été accordé au salarié, en sorte que le jugement querellé ayant rejeté sa réclamation afférente sera confirmé.
Sur le préjudice financier
Le salarié ne produit aucun élément pour justifier du préjudice financier allégué du fait de sa situation d'intérimaire, observation étant faite qu'il n'était plus recevable à l'obtention de la requalification des contrats intérimaires de la première séquence de collaboration et mal fondé en sa demande de reprise de son ancienneté au 6 mai 2002.
Il n'est pas recevable à solliciter des dommages-intérêts pour réparer le préjudice subi à la suite de son accident du travail à défaut de mise en cause des organismes sociaux.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a conclu que la demande du salarié ne pouvait pas prospérer de ce chef.
Sur la prime de remplacement :
Se fondant notamment sur une inégalité de traitement, Monsieur [Z] sollicite le paiement d'une prime dite de remplacement à hauteur de 18 200 euros.
Il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence.
Monsieur [Z] verse aux débats plusieurs éléments révélant le versement d'une prime trimestrielle de 700 euros à quelques salariés de l'entreprise.
Monsieur [N] expose que: « Monsieur [T] lui a précisé que, lors d'un échange avec Monsieur [H] [A], directeur des sociétés Aéropiste/Interpistes, à l'époque, ce dernier lui avait demandé s'il voulait bénéficier comme certains salariés de l'entreprise d'une prime trimstrielle de 700 euros. Monsieur [T] lui a alors demandé en quoi consistait cette prime, ce dernier a répondu qu'elle avait été mise en place afin de prévenir les mouvements sociaux au sein de l'entreprise et ainsi avoir des salariés dont il serait sûr qu'il travaillerait lors des grèves. Dès lors que le salarié acceptait cette prime, il devait impérativement se présenter au travail lorsque l'on faisait appel à lui, même s'il était en repos. Monsieur [T] a répondu qu'il lui était impossible d'accepter cette proposition en tant qu'élu du comité d'entreprise et qu'il ne souhaitait plus qu'on lui parle de cela. Je relate cette discussion avec Monsieur [Z] [T] car ce dernier en sa qualité d'élu du comité d'entreprise aurait dû et aurait pu mettre un terme à cette pratique interdite par la loi. »
Toutefois, ce témoignage est tout à fait indirect et ne présente, par conséquent, aucune valeur probante dans le présent débat et sera écarté.
Messieurs [I], [S] et [W] rapportent avoir entendu Monsieur [C] [E] directeur des filiales Aéropiste/Interpistes énoncer au cours d'une assemblée générale du 9 mai 2017 qu' « une prime était octroyée à certains salariés », qu' « il ne trouvait pas ça normal », qu'il « ignorait l'objectif de cette prime ».
Monsieur [Y] expose que Monsieur [O] [K] a souhaité s'entretenir en tête à tête avec lui le dimanche 4 juin 2017(...) des salariés avaient été mis à disposition par la société Alysia (...) les salariés étant détachés dans le cadre d'une mesure anti-grève, (...) les salariés présents étaient très en colère et ne voulaient pas entendre les explications de Monsieur [O].
Monsieur [Y] poursuit en indiquant avoir expliqué à Monsieur [O] que cela allait être très compliqué pour lui de se faire respecter par les salariés qui ne comprennent pas qu'il touchait une prime trimestrielle de 700 euros pour accepter de venir travailler lorsqu'ils se battent pour garder leurs emplois. Il précise que Monsieur [O] n'a pas contesté ses accusations et s'est contenté de lui dire que la direction lui avait formellement interdit de parler de la prime avec les réprésentants du personnel (...).
Monsieur [D] a, quant à lui, reconnu avoir perçu une prime de 700 euros tous les trois mois depuis 2013 jusqu'à son départ en retraite en avril 2016, pour travailler en cas de grève. Un bulletin de salaire faisant apparaître l'existence de cette prime trimestrielle est annexée à l'attestation. Il y est fait mention qu'il était chauffeur PL SEM
Il ressort par ailleurs du procès verbal d'une réunion du comité d'entreprise du 26 juin 2017 qu'à la question posée à la direction à savoir « pourquoi avoir octroyé des primes de 700 euros à des chauffeurs, des régulateurs, R.E...' » le représentant de la direction et Madame [B] RRH ont répondu « qu'ils ne savaient pas ». A une nouvelle question sur la raison de leur suppression, il a été répondu par la direction qu'elles « n'avaient pas d'utilité »; il a été confirmé qu'elles avaient été versées depuis mars 2013. Enfin, Madame [V] a confirmé, le 13 juin 2017, qu'il « existait une prime dite de remplacement , celle-ci n'a plus cours aujourd'hui ».
Ce faisant, Monsieur [Z] apporte des éléments de nature à établir l'inégalité de traitement.
La SARL Aéro-piste répond que;
- Monsieur [Z] ne fournit aucun élément établissant quels salariés ont perçu cette prime ni ne démontre qu'il se trouvait dans une situation identique à celle des salariés qui l'ont reçue;
- plusieurs attestations ont été rédigées par des personnels la demandant dans le cadre d'une instance contentieuse, ce qui fait douter de leur objectivité d'autant qu'il n'est présenté aucun élément pour corroborer la similitude des situations des uns et des autres,
- la production d'un bulletin de salaire d'un unique salarié ayant reçu la prime litigieuse ne permet pas de vérifier l'existence d'une situation comparable avec celle de Monsieur [Z],
- l'allégation de Monsieur [D] selon laquelle ladite prime lui a été attribuée pour qu'il travaille en cas de grève est mensongère, alors qu'il a, in fine, été grèviste lors de la grève du 26 février 2013 et a reçu ladite prime pour la période de janvier à mars 2013,
- elle peut, en cas de grève faire appel à la soutraitance, et le constat de Monsieur [Y] n'a aucune valeur probante dans ce débat,
- Monsieur [Z] ne peut s'appuyer sur les réponses de la direction lors des réunions des 30 mai et 26 juin 2017, en ce qu'il tente ainsi d'inverser la charge de la preuve.
- ladite prime est un élément individuel de salaire de sorte qu'elle n'avait aucune obligation de fournir des éléments d'information à cet égard aux représentants du personnel,
- l'absence de mention de cette prime sur la grille des salaires du 21 mai 2017 résulte du fait qu'elle n'était plus versée depuis mars 2017, soit avant l'édition de cette grille.
Elle précise avoir proposé par référendum une augmentation de la prime de vacances pour mettre fin aux différentes journées de grève perlées ayant eu lieu en mai 2017 à l'origine d'une paralysie de l'activité et d'une mise en demeure de la SA Air France menaçant de résilier le contrat de prestation.
Elle renvoie au procès verbal de la réunion du comité d'entreprise en date du 30 mai 2017 au cours de laquelle il a été précisé que la prime avait pour contrepartie la possibilité de remplacement de dernière minute justifié par le fort taux d'absentéisme et la saisonnalité de l'activité.
Elle explique, dans ses conclusions, que la prime a été attribuée à certains salariés dans le seul et unique but de répondre aux exigences de continuité de l'activité de la société pour satisfaire au cahier des charges des principaux clients et assurer les prestations malgré les aléas liés aux périodes de congés, d'arrêts maladie multiples, d'insuffisance de ressources humaines en raison des plannings de roulement mis en place...
Elle fait état de la mise en place d'un plan de secours consistant à avoir prévu un effectif minimum de ressources humaines pour assurer la continuité des activités. La prime litigieuse a été versée en rétribution de la sujétion à laquelle certains salariés ont accepté d'être soumis.
Elle fait enfin observer que certains salariés ayant travaillé des jours de grève ont saisi le conseil de prud'hommes ce qui tend à corroborer le fait que le versement de la prime n'est pas corrélé au travail fourni pendant ces jours de grève.
Elle conclut qu'elle a eu recours, à compter de mai 2017, à la suite de plusieurs mouvements de grève à la sous traitance pour faire face aux exigences de continuité de l'activité.
Il ressort des éléments précédemment évoqués de part et d'autre et spécialement de certaines des réponses apportées par la direction aux questions précises posées au cours de la réunion du 30 mai 2017 que la prime litigieuse a été versée à « 16 salariés toutes catégories professionnelles confondues ( chauffeurs, régulateurs, ADL, RE, REA, cadres) », que les critères d'attribution selon les salariés ne pouvaient pas être définis, que ladite prime n'avait plus de finalité.
La cour observe que la société soutient qu'elle a eu besoin de mettre en place un plan de secours pour assurer la continuité des activités, que cette prime avait pour objet de rétribuer la sujétion des salariés acceptant d'être appelés à tout moment même lorsqu'ils étaient en repos, qu'elle n'explicite, toutefois, ni ne démontre selon quels critères certains salariés, issus de toutes les catégories professionnelles, ont été retenus comme étant éligibles à cette prime en sorte que l'employeur n'apporte pas les éléments suffisants pour établir que la différence de traitement entre les salariés résultant du versement à certains d'entre eux, issus de toutes les catégories professionnelles, d'une prime trimestrielle dite de remplacement au cours de la période de mars 2013 à mars 2017 repose sur des éléments objectifs pertinents.
Monsieur [Z] est fondé en sa demande d'allocation d'une somme de 18 200 euros outre les congés payés afférents.
Sur la discrimination et la violation du droit de grève et la demande de dommages et intérêts;
Selon l'article 2511-1 du code du travail, l'exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié.
Son exercice ne peut donner lieu à aucune mesure discriminatoire telle que mentionnée à l'article L. 1132-2, notamment en matière de rémunérations et d'avantages sociaux.
Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français.
Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Comme faits présentés et laissant supposer l'existence d'une discrimination et d'une entrave au droit de grève, Monsieur [Z] allègue du versement d'une prime dite de remplacement à certains salariés ne participant pas aux mouvements de grève.
Il reprend les éléments produits pour établir l'inégalité de traitement et communique en sus le témoignage de Monsieur [F] qui explique que « le 6 juin 2017, Monsieur [L] [P] lui a confirmé qu'il touchait la prime trimestrielle de 700 euros depuis plusieurs années déjà et qu'il en était fier car d'après ses propres mots, il était contre les grèves, mais qu'en outre, il était quand même soulagé que la direction la lui ait retirée. »
Ces éléments en ce compris les témoignages et procès verbaux évoqués lors de l'analyse de la prétention émise au titre de l'inégalité de traitement, pris dans leur ensemble, laissent supposer une mesure discriminatoire tendant à contourner le droit de grève ainsi que son exercice.
La SARL Aéro-piste conteste les éléments ainsi repris par Monsieur [Z], insiste sur le fait que Monsieur [D] qui a reçu la prime litigieuse en mars 2013 a fait grève le 26 février 2013, ainsi que le montre la retenue opérée sur le bulletin de salaire de février 2013 et que de façon générale, il n'a pas travaillé pendant les jours de grève au cours de toute la période de janvier 2010 à mars 2017.
La cour observe que la pièce 27 comportant 10 feuillets communiquée par la société au soutien de cette dernière allégation est illisible et par suite n'en justifie pas la réalité.
L'employeur expose enfin que Monsieur [Z] ne justifie pas avoir participé aux quelques journées de grève ayant eu lieu pendant la période considérée ce qui est sans objet dans ce débat .
Il résulte des éléments et explications fournies précédemment repris et analysés que la société a pris une mesure discriminatoire en décidant, après des grèves survenues en février 2013, de créer une prime trimestrielle versée à quelques salariés issus de toutes les catégories professionnelles contre l'engagement de leur part de travailler y compris pendant leurs jours de repos, pour remplacer des salariés absents, tels que des salariés absents en raison d'une grève. Il sera observé que le versement de la prime à Monsieur [D] en mars 2013 alors qu'il avait participé à la grève du 26 février 2013 corrobore la volonté de mettre en place à cette époque un dispositif pour assurer la continuité du service par la mise en place d'une prime de remplacement proposée à certains salariés en échange de leur engagement à ne plus se mettre en grève.
Le préjudice résultant de cette mesure discriminatoire sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 3500 euros.
Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
La SARL Aéro-piste qui succombe dans la présente instance sera débouté de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné aux entiers dépens.
L'équité commande de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à Monsieur [Z] une indemnité de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de lui accorder une nouvelle indemnité de 2000 euros pour les frais engagés dans le cadre de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a alloué des dommages et intérêts pour non respect des temps de pause et accordé un reliquat de prime pour les heures de nuit, outre une indemnité pour les frais engagés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] de ses demandes pour l'ancienneté, pour les primes pour le travail de dimanche, des jours fériés et du soir, pour la réintégration de 40 jours de congés pour la période de 2012 à 2019, le réforme pour le montant de la prime pour les heures de nuit et l'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau sur ces points et y ajoutant,
Condamne la SARL Aéro-piste à verser à Monsieur [Z] les sommes suivantes;
- 450 euros pour la prime de nuit outre 45 euros pour les congés payés afférents,
- 18 200 euros au titre du rappel de primes trimestrielles outre les congés payés afférents soit 1820 euros,
- 3500 euros au titre des dommages et intérêts pour la mesure discriminatoire et la violation du droit de grève,
- 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Ordonne la réintégration de 10 jours de congés exceptionnels pour la période 2009-2010,
Déboute Monsieur [Z] du surplus de ses réclamations,
Déboute la SARL Aéro-Piste de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL Aéro-Piste aux entiers dépens.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE