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23/01/2020 | FRANCE | N°18/14319

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 23 janvier 2020, 18/14319


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 23 JANVIER 2020



(n° 4 , 20 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/14319 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5Y43



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Février 2018 - Juge de l'expropriation de MELUN - RG n° 17/00023





APPELANTE



Société d'Economie Mixte LA SOCIETE AMENAGEMENT 77
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[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Frédéric-pierre VOS de la SELARL L.V.I AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant au barreau de PARIS, toque : P0205
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Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 23 JANVIER 2020

(n° 4 , 20 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/14319 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5Y43

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Février 2018 - Juge de l'expropriation de MELUN - RG n° 17/00023

APPELANTE

Société d'Economie Mixte LA SOCIETE AMENAGEMENT 77

SIRET : 304 099 732 00048

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Frédéric-pierre VOS de la SELARL L.V.I AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant au barreau de PARIS, toque : P0205

Ayant pour avocat plaidant Me de DIEVLEVEULT Arthur de la SELARL L.V.I AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0205

INTIMES

Monsieur [N] [N]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté et ayant pour avocat Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941

Monsieur [M] [N]

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représenté et ayant pour avocat Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941

Monsieur [F] [N]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté et ayant pour avocat Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941

Madame [R] [N]

[Adresse 4]

[Localité 4]

Représentée et ayant pour avocat Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941

Monsieur [L] [N]

[Adresse 5]

[Localité 5]

Représenté et ayant pour avocat Me Claudine SCOTTO D'APOLLONIA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1941

DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES TRESORERIE GENERALE DE SEINE ET MARNE-COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

France Domaine

[Adresse 6]

[Localité 6]

Représentée par Madame [X] [M] munie d'un pouvoir.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Novembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Hervé LOCU, président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Hervé LOCU, Président de chambre

M. Gilles MALFRE, Conseiller

Mme Marie MONGIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Viviane REA

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, et par Sixtine ROPARS, greffier présent lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ

Par arrêté du 28 juillet 2011, le préfet de la Seine-et-Marne a déclaré d'utilité publique les acquisitions foncières au profit de la société d'économie mixte (SEM) aménagement 77 (concessionnaire de la Commune Saint Thibault des Vignes) nécessaires à la réalisation de la zone d'aménagement concertée (ZAC) Centre [Localité 7]. La légalité de cette opération a été confirmée par un arrêt du Conseil d'Etat du 11 juillet 2016.

Sont notamment concernés par l'opération les consorts [N] (ayants droits du propriétaire [N] [N], décédé le [Date décès 1] 2017), propriétaires des parcelles cadastrées C [Cadastre 1], C [Cadastre 2], BE [Cadastre 3], C [Cadastre 4], C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5].

Il s'agit :

- concernant la parcelle C [Cadastre 1], sise au lieu-dit 'les Frênes', au sud de la commune : d'un terrain nu, en nature de bois taillis, libre de toute occupation, d'une superficie de 870 m², en forme de Laplati, enclavé, entouré de parcelles boisées et non desservi par les réseaux ;

- concernant la parcelle C [Cadastre 2], sise au lieu-dit '[Localité 8]', à l'ouest du centre bourg : d'un terrain nu, en nature de bois taillis, libre de toute occupation, d'une superficie de 495 m², en forme de quasi-rectangle, entouré de zones boisées et desservi, sur sa façade nord de 15 mètres par le sentier des Badrons, non desservi par les réseaux ;

- concernant la parcelle BE [Cadastre 3], sise au lieu-dit '[Localité 9]' : d'un terrain nu en nature de bois taillis, libre de toute occupation, d'une superficie de 201 m², en forme de trapèze, entouré de parcelles boisées et desservi, sur sa façade de 15 mètres, par le sentier de Gouvernes, asphalté et carrossable, le long duquel courent divers réseaux ;

- concernant la parcelle C [Cadastre 4], sise au lieu-dit 'le champ des poules', à l'ouest du centre bourg : d'un terrain nu en nature de bois taillis, libre de toute occupation, d'une superficie de 560 m², en forme de quasi rectangle large d'environ 10 mètres, desservi sur sa 4ème façade de 10 mètres par le sentier du champ des poules, chemin anciennement carrossable par des engins agricoles ;

- concernant les parcelles C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5] sise au lieu-dit 'les Rédars', à l'Ouest du centre bourg : d'une unité foncière, d'une surface de 3 423 m², libre de toute occupation, en nature de bois taillis, de forme rectangulaire très allongée, desservie sur une de ses façades par la rue de [Localité 10], carrossable et rejoignant la zone urbanisée distant d'environ 30 mètres et donc à proximité des réseaux divers.

Aux termes du plan local d'urbanisme de [Localité 11], modifié le 07 janvier 2015, les parcelles sont en zone 1AUa (C [Cadastre 3], C [Cadastre 5], C64, C121) et 1AUb (BE [Cadastre 3], C726).

Faute d'accord sur l'indemnisation, la SEM aménagement 77 a, par mémoire visé au greffe le 18 mai 2017, saisi le juge de l'expropriation de Seine-et-Marne.

Par jugement du 15 février 2018, après transport sur les lieux le 04 octobre 2017, celui-ci a :

- fixé l'indemnité due par la SEM aménagement 77 aux consorts [N] à la somme de 328 823 euros, soit :

- 10 255 euros pour la parcelle C [Cadastre 1] :

- 8 700 euros au titre de l'indemnité principale ;

[870 m² x 10 euros]

- 1 555 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- 5 940 euros pour la parcelle C [Cadastre 2] :

- 4 950 euros au titre de l'indemnité principale ;

[495 m² x 10 euros]

- 990 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- 23 [Cadastre 3] euros pour la parcelle BE [Cadastre 3] :

- 20 100 euros au titre de l'indemnité principale ;

[201 m² x 100 euros]

- 3 010 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- 62 600 euros pour la parcelle C [Cadastre 4] :

- 56 000 euros au titre de l'indemnité principale ;

[560 m² x 100 euros]

- 6 600 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- 226 918 euros pour les parcelles C [Cadastre 3] et C 1 541 :

- 205 380 euros au titre de l'indemnité principale ;

[(590 m² + 2 833 m²) x 60 euros]([Cadastre 4] euros dans les motifs, mais avec un calcul de 60 euros)

- 21 538 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- condamné la SEM aménagement 77 à verser aux consorts [N] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que les dépens seront laissés à la charge de l'autorité expropriante, en application des dispositions de l'article L 312-1 du code de l'expropriation.

La SEM aménagement 77 a interjeté appel le 28 mai 2018.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

- déposées au greffe, par la SEM aménagement 77, le 27 août 2018, notifiées le 03 septembre 2018 (AR des 15, 17 et 18 septembre 2018 ; retour courrier adressé à [N] [N]), aux termes desquelles elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement du 15 février 2018, en ce qu'il a fixé l'indemnité de dépossession à la somme de 328 823 euros ;

- en conséquence :

- à titre principal : si la Cour considère que les termes de comparaison produits sont pertinents :

- et que la situation privilégiée est déjà prise en compte par les termes de comparaison, de fixer l'indemnité de dépossession à la somme de [Cadastre 4] 040 euros se décomposant comme suit :

- 55 580 euros au titre de l'indemnité principale, soit :

- 2 100 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3] ;

[201 m² x 10 euros]

- 5 600 euros pour la parcelle C [Cadastre 4] ;

[560 m² x 10 euros]

- 4 950 euros pour la parcelle C [Cadastre 2] ;

[495 m² x 10 euros]

- 8 700 euros pour la parcelle C [Cadastre 1] ;

[870 m² x 10 euros]

- 5 900 euros pour la parcelle C [Cadastre 3] ;

[590 m² x 10 euros]

- 28 330 euros pour la parcelle C 1 541 ;

[2 833 m² x 10 euros]

- 8 460 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- et que la situation n'est pas déjà prise en compte par les termes de comparaison, de fixer l'indemnité de dépossession à la somme de 76 393 euros se décomposant comme suit :

- 66 588 euros au titre de l'indemnité principale, soit :

- 2 412 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3] ;

[201 m² x 12 euros]

- 6 720 euros pour la parcelle C [Cadastre 4] ;

[560 m² x 12 euros]

- 5 940 euros pour la parcelle C [Cadastre 2] ;

[495 m² x 12 euros]

- 10 440 euros pour la parcelle C [Cadastre 1] ;

[870 m² x 12 euros]

- 7 080 euros pour la parcelle C [Cadastre 3] ;

[590 m² x 12 euros]

- 33 996 euros pour la parcelle C 1 541 ;

[2 833 m² x 12 euros]

- 9 805 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- à titre subsidiaire : si la cour considère que les termes de comparaison produits ne sont pas pertinents et que le prix unitaire de la parcelle expropriée correspondrait à 10% du prix unitaire d'un terrain à bâtir, de fixer l'indemnité de dépossession à la somme de 163 084,20 euros se décomposant comme suit :

- 144 274 euros au titre de l'indemnité principale, soit :

- 5 226 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3] ;

[201 m² x 26 euros]

- 14 560 euros pour la parcelle C [Cadastre 4] ;

[560 m² x 26 euros]

- 12 870 euros pour la parcelle C [Cadastre 2] ;

[495 m² x 26 euros]

- 22 620 euros pour la parcelle C [Cadastre 1] ;

[870 m² x 26 euros]

- 15 340 euros pour la parcelle C [Cadastre 3] ;

[590 m² x 26 euros]

- 73 658 euros pour la parcelle C 1 541 ;

[2 833 m² x 26 euros]

- 18 810,20 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- adressées au greffe, par les consorts [N], le 11 décembre 2018, notifiées le 14 décembre 2018 (AR du 19 décembre 2018), aux termes desquelles ils demandent à la cour :

- de confirmer le jugement du 15 février 2018 ;

- de rectifier l'erreur matérielle incluse dans ledit jugement concernant le calcul des indemnités pour les parcelles C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5] ;

- de fixer le montant de l'indemnité de dépossession due par la SEM aménagement 77 à la somme totale de 347 649,50 euros, se décomposant comme suit :

- 312 245 euros au titre de l'indemnité principale, soit :

- 8 700 euros pour la parcelle C [Cadastre 1] ;

[870 m² x 10 euros]

- 4 950 euros pour la parcelle C [Cadastre 2] ;

[495 m² x 10 euros]

- 20 100 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3] ;

[201 m² x 100 euros]

- 56 000 euros pour la parcelles C [Cadastre 4] ;

[560 m² x 100 euros]

- 222 495 euros pour les parcelles C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5] ;

[(590 m² + 2 833 m²) x [Cadastre 4] euros] ;

rectification erreur matérielle : 260 euros x 25% = [Cadastre 4] euros/m²

(590m² + 2 833 euros) x [Cadastre 4] euros = 222 495 euros

soit un total de 312 495 euros

- 35 404, 50 euros au titre de l'indemnité de remploi, soit :

- 1 555 euros pour la parcelle C [Cadastre 1] ;

- 990 euros pour la parcelle C [Cadastre 2] ;

- 3 010 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3] ;

- 6 600 euros pour la parcelle C [Cadastre 4] ;

- 23 249, 50 euros pour les parcelles C 1 541 et C [Cadastre 3] ;

soit un montant total de 347 649,50 euros

- de condamner la SEM aménagement 77 à leur verser la somme de 3 000 euros, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- adressées au greffe, par le commissaire du gouvernement appelant incident, respectivement le 05 novembre 2018, notifiées le 09 novembre 2018 (AR des 10 et 12 novembre 2018 ; retour des courriers adressés à [N] et [M] [N]), et le 28 mai 2019, notifiées le 04 juin 2019 (AR du 06 juin 2019), aux termes desquelles il demande à la cour :

- de déclarer recevable et non déchue en son appel la SEM aménagement 77 ;

- d'infirmer le jugement du 15 février 2018, de fixer l'indemnité totale de dépossession à la somme de 67 798 euros, se décomposant comme suit :

- 61 538 euros pour les parcelles C [Cadastre 3], C 1 541, C [Cadastre 4], C [Cadastre 2], C [Cadastre 1] :

- 53 480 euros au titre de l'indemnité principale ;

[(590 m² + 2 833 m² x 560 m² + 495 m² x 870 m²) x 10 euros]

- 8 058 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- 6 260 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3], soit :

- 5 226 euros au titre de l'indemnité principale ;

[201 m² x 26 euros]

- 1 034 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

MOTIFS DE L'ARRÊT

La SEM aménagement 77 fait valoir que :

- la consistance du bien exproprié, la méthode retenue d'évaluation par comparaison, et la date de référence fixée au 07 janvier 2015 ne sont pas contestées ;

- lorsque la situation privilégiée du terrain est reconnue, cela entraîne une évaluation supérieure à l'usage effectif du terrain ; pour autant, le juge de l'expropriation doit évaluer la plus-value du terrain en se référant aux prix de transactions portant sur des terrains de même nature, aux caractéristiques similaires ; en outre, le potentiel constructif du terrain exproprié, réservé à l'évaluation des terrains à bâtir, ne peut être pris en compte pour calculer la plus-value de situation privilégiée ; par ailleurs, rien ne s'oppose à ce que la situation privilégiée soit évaluée à partir des termes de comparaison relatifs à des terrains qui sont situés dans le périmètre de l'opération d'expropriation ;

En l'espèce :

- les parcelles cadastrées C [Cadastre 3], C 1 541, C [Cadastre 4] ne bénéficient pas d'une situation privilégiée : en effet, les parcelles ne sont desservies ni par une voie carrossable, ni par divers réseaux ; à cet égard, la parcelle C [Cadastre 4] n'est desservie que par le sentier du champ des poules, qui n'est pas carrossable ; quant aux parcelles C [Cadastre 3] et C 1 541, celles-ci sont desservies par le sentier des Badrons, non carrossable, et par le sentier de [Localité 10], lequel est situé à proximité mais non pas en contiguïté de la rue de [Localité 10], qui est elle carrossable ;

- la parcelle BE [Cadastre 3] bénéficie d'une situation privilégiée, car elle se situe en bordure du sentier de [Localité 12] ;

- le jugement doit être infirmé en ce qu'il a rejeté les termes de comparaison produits ;

- en effets, les termes de comparaison portent sur des terrains situés dans le périmètre de la ZAC Centre-Bourg de [Localité 11], sur des terrains aux caractéristiques similaires à ceux expropriés, c'est-à-dire des terrains nus en nature de friche et bois taillis, classés dans la même zone du PLU, à proximité ou en limite de zones urbaines, ne comportant pas de réseaux suffisants pour desservir l'ensemble de la ZAC ; en outre, il convient de souligner que même si les conditions de l'article L 322-8 du code de l'expropriation ne sont pas remplies, il est nécessaire de considérer les accords comme des références à prendre en compte dans l'évaluation de la valeur de la parcelle expropriée ;

- par ailleurs, les termes de comparaison ne sauraient être écartés du fait d'un prétendu défaut de 'potentiel' des terrains, compte tenu de leur faible largeur ; en effet, la notion de potentiel d'un terrain renvoie à une possibilité future, or celle-ci ne saurait être prise en considération pour fixer la valeur d'un bien qui n'est pas qualifié de terrain à bâtir et dont seul l'usage effectif peut être retenu ; ce critère est donc sans incidence sur la valorisation du terrain et doit donc être écarté ; si toutefois la Cour considérait que la largeur des terrains des termes de comparaison était un élément d'importance, il convient de souligner que les termes de comparaison produits portent sur des terrains dont la largeur est supérieure à 5 mètres, et présentant des caractéristiques similaires aux parcelles expropriées ; enfin, le blocage de la déclaration d'utilité publique ne saurait avoir eu une incidence sur les termes de comparaison, ni signifier que les références sont issues d'un marché bloqué ;

- par conséquent :

- à titre principal :

- si la Cour considère que les termes de comparaison produits tiennent compte de la situation privilégiée de la parcelle, il convient de retenir la valeur unitaire de 10 euros/m² ; ainsi, de fixer l'indemnité de dépossession à la somme de [Cadastre 4] 040 euros, se décomposant comme suit :

- 55 580 euros au titre de l'indemnité principale, soit :

- 2 100 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3] ;

[201 m² x 10 euros]

- 5 600 euros pour la parcelle C [Cadastre 4] ;

[560 m² x 10 euros]

- 4 950 euros pour la parcelle C [Cadastre 2] ;

[495 m² x 10 euros]

- 8 700 euros pour la parcelle C [Cadastre 1] ;

[870 m² x 10 euros]

- 5 900 euros pour la parcelle C [Cadastre 3] ;

[590 m² x 10 euros]

- 28 330 euros pour la parcelle C 1 541 ;

[2 833 m² x 10 euros]

- 8 460 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- si la Cour considère que les termes de comparaison produits ne reflètent pas la situation privilégiée de la parcelle, il convient d'appliquer une plus-value de 20% au prix unitaire de 10 euros/m² et donc de retenir une valeur de 12 euros/m² ; ainsi, de fixer l'indemnité de dépossession à la somme de 76 393 euros, se décomposant comme suit :

- 66 588 euros au titre de l'indemnité principale, soit :

- 2 412 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3] ;

[201 m² x 12 euros]

- 6 720 euros pour la parcelle C [Cadastre 4] ;

[560 m² x 12 euros]

- 5 940 euros pour la parcelle C [Cadastre 2] ;

[495 m² x 12 euros]

- 10 440 euros pour la parcelle C [Cadastre 1] ;

[870 m² x 12 euros]

- 7 080 euros pour la parcelle C [Cadastre 3] ;

[590 m² x 12 euros]

- 33 996 euros pour la parcelle C 1 541 ;

[2 833 m² x 12 euros]

- 9 805 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- à titre subsidiaire : si la cour considère que les termes de comparaison ne sauraient être retenus pour tenir compte de la situation privilégiée de la parcelle expropriée, il convient d'évaluer la parcelle expropriée à partir de ventes de terrains à bâtir et de pratiquer un abattement de 90% car il ne s'agit pas d'un terrain à bâtir et que son urbanisation nécessite une opération d'aménagement d'ensemble, portant sur la totalité du secteur concerné ; il convient alors de retenir la valeur unitaire de 26 euros/m² et de fixer l'indemnité de dépossession à la somme de 163 084,20 euros, se décomposant comme suit :

- 144 274 euros au titre de l'indemnité principale, soit :

- 5 226 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3] ;

[201 m² x 26 euros]

- 14 560 euros pour la parcelle C [Cadastre 4] ;

[560 m² x 26 euros]

- 12 870 euros pour la parcelle C [Cadastre 2] ;

[495 m² x 26 euros]

- 22 620 euros pour la parcelle C [Cadastre 1] ;

[870 m² x 26 euros]

- 15 340 euros pour la parcelle C [Cadastre 3] ;

[590 m² x 26 euros]

- 73 658 euros pour la parcelle C 1 541 ;

[2 833 m² x 26 euros]

- 18 810,20 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

Les consorts [N] répondent que :

- les parcelles expropriées se trouvent en zone 1AUa et 1AUb, aux termes de la dernière modification du PLU, intervenue le 07 janvier 2015 ; il s'agit d'une zone constructible ;

- la SEM aménagement 77 bénéficie d'un marché captif depuis plus de 12 ans ; ainsi, le prix des accords amiables, au demeurant passés avec des personnes âgées, ne saurait refléter le prix d'un marché libre ;

- le jugement doit être confirmé en ce qu'il a appliqué la méthode par décote sur le prix du terrain à bâtir afin d'indemniser les parcelles expropriées ; en effet, contrairement à ce que soutient la SEM aménagement 77, il n'existe aucune contrainte sur le juge de l'expropriation dans le choix d'une des méthodes d'évaluation des terrains en situation privilégiée , dès lors que sa décision d'écarter les termes de comparaison que les parties lui ont présentés est parfaitement motivée ; en l'espèce, tous les termes de comparaison ont été écartés car ils portaient sur des ventes anciennes, des terrains enclavés, de configuration irrégulière ou de trop grande superficie ; il en ressort que le juge de l'expropriation, qui a parfaitement motivé sa décision, a utilisé souverainement la méthode d'évaluation par abattement sur le prix du terrain à bâtir pour les parcelles qu'il a considérées en situation privilégiée ;

- le jugement doit être confirmé en ce qu'il a reconnu la situation privilégiée des parcelles C [Cadastre 3], C [Cadastre 3], C [Cadastre 5] et C [Cadastre 4] ; en effet, celles-ci sont desservies par des voies d'accès et sont inclues dans une zone urbaine en plein développement socio-économique et démographique ; outre la situation géographique privilégiée des parcelles, celles-ci se situent à proximité des réseaux ; ainsi, elles bénéficient d'une situation hautement privilégiée contrairement à ce qu'allègue la SEM aménagement 77 ; plus précisément :

- concernant la parcelle C [Cadastre 4], il convient d'écarter la thèse de l'expropriant sur le prétendu 'chemin non carrossable' desservant la parcelle et de constater que celle-ci est desservie par le chemin rural dit 'du sentier du champ des poules', d'une largeur de 4 mètres ;

- concernant les parcelles C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5], il convient d'écarter la thèse de l'expropriant suivant laquelle l'unité foncière n'est desservie que par un prétendu sentier qui serpente à travers les parcelles ; en effet, l'unité foncière est desservie, au sud, par le chemin de [Localité 10], lequel mène à la rue de [Localité 10], desservant une zone pavillonnaire dense ; dès lors, l'unité foncière est bien desservie par les réseaux et une voie carrossable ;

- les termes de comparaison produits par la SEM aménagement 77 doivent être écartés; en effet, ils ne sont pas comparables à la parcelle expropriée ; en effet, ils se trouvent à l'écart de tout bâti, sont enclavés et n'ont ni la même configuration, ni la même superficie ; par conséquent, le jugement doit être confirmé en ce sens et la demande de fixation de l'indemnité de dépossession à hauteur de 10 euros/m² doit être rejetée ;

- le jugement doit être confirmé dans son quantum concernant les parcelles C [Cadastre 1], C [Cadastre 2], BE [Cadastre 3] et C [Cadastre 4] ; toutefois, il convient de rectifier le montant de l'indemnité de dépossession pour les parcelles C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5], dans la mesure où le juge de l'expropriation indiquait indemniser ces parcelles à hauteur de [Cadastre 4] euros/m² dans sa motivation, mais ne les a en réalité indemnisées qu'à hauteur de 60 euros/m² dans les calculs ; dès lors, l'indemnité de dépossession pour ces parcelles doit s'élever à la somme totale de 246 544,5 euros se décomposant comme suit :

- 222 495 euros au titre de l'indemnité principale ;

[(590 m² + 2 833 m²) x [Cadastre 4] euros]

- 23 749, 50 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- il convient de condamner la SEM aménagement 77 à leur verser la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le commissaire du gouvernement soutient que :

- l'appel de la SEM aménagement 77 n'encourt aucune déchéance ;

- la qualification de terrain à bâtir ne peut être reconnue à aucune des parcelles (point non-contesté par les expropriés) ; en effet, les parcelles C [Cadastre 3], C [Cadastre 5], C [Cadastre 4], C [Cadastre 2] et C [Cadastre 1] ne sont desservies ni par des réseaux, ni par des voies carrossables ; en outre, si la parcelle BE [Cadastre 3] est desservie par une voie carrossable (sentier des [Localité 12]), elle ne dispose pas des réseaux énumérés à l'article L 322-3 du code de l'expropriation ; en tout état de cause, quand bien même les parcelles en cause seraient desservies par les divers réseaux, il conviendrait d'examiner leur correct dimensionnement par rapport à l'ensemble de la zone, ce qui n'est pas le cas aux termes du dossier technique de réalisation de la ZAC Centre-Bourg ;

- concernant la situation privilégiée des parcelles :

- il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a estimé que les parcelles C [Cadastre 1] et C [Cadastre 2] ne bénéficiaient pas d'une situation privilégiée ; en effet :

- la parcelle C [Cadastre 1] est enclavée ;

- la parcelle C [Cadastre 2] est uniquement desservie par le sentier des Badrons, non carrossable, recouvert de végétation dense et situé à l'écart des zones d'habitation (distante des premières constructions en zone urbaine de plus de 100 mètres) ;

- il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a estimé que les parcelles C [Cadastre 3], C [Cadastre 5], C [Cadastre 4] bénéficiaient d'une situation privilégiée ; en effet, il apparaît que :

- l'unité foncière constituée des parcelles C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5] est desservie par deux sentiers non carrossables et se situant encore plus en retrait que la parcelle C [Cadastre 2] des zones d'habitation ;

- la parcelle C [Cadastre 4] est desservie par un sentier non carrossable, recouvert de végétation dense et distante de près de 90 mètres de toute construction ;

- il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a estimé que la parcelle BE [Cadastre 3] bénéficiait d'une situation privilégiée ; en effet, elle est desservie par une voie carrossable et entourée dans son environnement immédiat par des immeubles bâtis ;

- les termes de comparaison produits ne sauraient être écartés compte tenu de l'âge ou de la qualité des vendeurs ; par ailleurs, les ventes consenties pendant la période de blocage de la procédure d'expropriation du fait des recours contre l'arrêté de la DUP constituent des références valables ;

- il ressort des termes de comparaison produits une valeur unitaire moyenne de 10 euros/m² ; par conséquent, l'indemnité due par la SEM aménagement 77 doit s'élever à la somme totale de 67 798 euros se décomposant comme suit ;

- 61 538 euros pour les parcelles C112, C [Cadastre 5], C [Cadastre 4], C [Cadastre 2] et C [Cadastre 1], soit :

- 53 480 euros au titre de l'indemnité principale ;

[(590 m² + 2 833 m² + 560 m² + 495 m² + 870 m²) x 10 euros]

- 8 058 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

- 6 260 euros pour la parcelle BE [Cadastre 3], soit :

- 5 226 euros au titre de l'indemnité principale ;

[201 m² x 26 euros]

- 1 034 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

SUR CE

Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l'article R311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017 article 41 en vigueur au 1 septembre 2017, l'appel étant du 28 mai 2018, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l'espèce, les conclusions de la SEM aménagement 77 du 27 août 2018, des consorts [N] du 14 décembre 2018 et du commissaire du gouvernement du 5 novembre 2018 déposées dans les délais légaux, sont recevables.

Les conclusions responsives du commissaire du gouvernement du 28 mai 2019, déposées hors délai ne formulent pas de demandes nouvelles ou de moyens nouveaux, sont donc recevables au delà des délais initiaux.

Les documents produits viennent uniquement au soutien des mémoires complémentaires.

Au fond

Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.

L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété , si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l'article L321-1 du code de l'expropriation, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.

Conformément aux dispositions de l'article L322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L322-3 à L322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L'appel porte sur la qualification juridique des parcelles, à savoir sur la qualification de situation privilégiée, les parties s'accordant à écarter la qualification de terrain à bâtir pour toutes les parcelles, et sur les valeurs unitaires à retenir pour fixer l'indemnité principale.

S'agissant de la date de référence, les parties s'accordent toutes à la situer au 7 janvier 2015, conformément aux articles L322-2 du code de l'expropriation, L213-6 et L213-4 du code de l'urbanisme, correspondant à la dernière modification du PLU de la commune de Saint Thibault des [Localité 13].

S'agissant des données d'urbanisme, il n'est pas contesté que les parcelles se trouvent en zone AU du PLU, à savoir 1AUa (C [Cadastre 3], C [Cadastre 5],C [Cadastre 4],C [Cadastre 2]) et 1AUb (BE [Cadastre 3], C [Cadastre 1]).

Le jugement sera donc confirmé sur ces points.

Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s'agit de 6 parcelles déjà décrites dans l'exposé des faits.

S'agissant de la date à laquelle le bien exproprié doit être estimé, il s'agit de celle du jugement de première instance, soit le 15 février 2018.

Sur l'indemnité principale

1. Sur la qualification juridique des parcelles

Le premier juge a écarté la qualification de terrain à bâtir, les parcelles n'étant pas à la date de référence desservies par une voie adaptée à la circulation automobile et les réseaux existants n'étant pas à leur proximité immédiate à l'exception de la parcelle BE [Cadastre 3], et les parties et le commissaire du gouvernement s'accordant pour dénier à ces parcelles la qualification de terrain à bâtir, y compris pour la parcelle BE [Cadastre 3].

Cette disposition n'est pas critiquée en appel.

Le premier juge a ensuite recherché si ces parcelles pouvaient être considérées comme bénéficiant d'une situation privilégiée ; il a indiqué qu'elles sont facilement accessibles par leur proximité des axes routiers importants que sont l'A 4, la Francilienne et les RD 934 et 418, qu'elles sont situées dans un secteur à forte progression économique et démographique, à proximité de la zone urbaine de l'ancien bourg de Saint Thibault des [Localité 13] et d'une importante zone d'activités.

- La parcelle C [Cadastre 1]

Le premier juge a indiqué que cette parcelle est enclavée, qu'elle n'est desservie que par un sentier inaccessible et ne peut être considérée comme bénéficiant d'une situation privilégiée.

La SEM demande la confirmation ainsi que les consorts [N] et le commissaire du gouvernement.

Cette parcelle de 870m² présente une largeur de 20 mètres et une profondeur de 60 mètres, et si elle rejoint à 13 mètres diverses parcelles urbanisées, elle est cependant complètement enclavée (pièce N°3).

Le premier juge a donc exactement écarté la situation privilégiée.

- La parcelle C [Cadastre 2]

Le premier juge a indiqué que cette parcelle n'est desservie que par un sentier inaccessible et ne peut être considérée comme une situation privilégiée.

La SEM demande la confirmation, ainsi que les consorts [N] et le commissaire du gouvernement.

La parcelle C [Cadastre 2] est desservie par le sentier des Badrons non carrossable et se situe à plus de 100 mètres des premières constructions en zone urbaine.

Le premier juge a donc exactement écarté la situation privilégiée.

- Les parcelles C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5]

Le premier juge a indiqué que cette unité foncière dispose d'une importante surface et d'un accès sud à quelques mètres de la voie carrossable et des réseaux et qu'elle peut être considérée comme bénéficiant d'une situation privilégiée.

La SEM 77 demande l'infirmation ainsi que le commissaire du gouvernement.

Les parcelles C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5] se jouxtent et forment une unité foncière, elles longent un chemin carrossable dit 'sentier de [Localité 10]', qui mène à l'est au centre ville situé à [Cadastre 3] mètres et à l'ouest à la zone commerciale communale située à 120 mètres, et au nord avec un accès sur un sentier carrossable dit 'sentier du champ des poules', lequel mène directement à l'est au centre ville communal situé à 80 mètres et à l'ouest à la zone commerciale située à 180 mètres.

En conséquence, le premier juge a exactement retenu la situation privilégiée.

- La parcelle C [Cadastre 4]

Le premier juge a indiqué que c'est de plus fort le cas de cette parcelle qui est desservie par un large chemin anciennement carrossable, qu'elle est située à 20 mètres de la zone urbanisée et est d'une superficie et configuration qui correspond aux exigences du PLU.

La SEM 77 conteste cette situation privilégiée en indiquant que cette parcelle est desservie par 'le sentier du champ des poules' qui n'est pas carrossable, elle n'est pas desservie par les réseaux et en est d'ailleurs éloignée.

Le commissaire du gouvernement demande également l'infirmation en indiquant que cette parcelle est desservie par 'le sentier du champ des poules', non carrossable, recouvert de végétation dense et distante de près de 90 mètres de toute construction.

Cette parcelle est desservie par un chemin certes non carrossable mais anciennement carrossable et est située, certes non à 20 mètres comme indiqué par le premier juge, mais à 90 mètre selon le commissaire du gouvernement et à 80 mètres selon Mme [N], du centre ville communal, en tout cas à proximité à l'est, et à 180 mètres à l'ouest de la zone commerciale communale.

Le premier juge a donc exactement retenu une situation privilégiée.

- La parcelle BE [Cadastre 3]

Le premier juge a indiqué que c'est encore plus fort le cas de cette parcelle qui est desservie par une voie carrossable et par les réseaux.

Cette situation privilégiée n'est contestée par aucune des parties.

2. Sur la méthode d'évaluation

La méthode par comparaison utilisée par le premier juge n'est pas contestée par les parties.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

3. Sur la fixation de l'indemnité

Le juge de l'expropriation dispose du pouvoir souverain d'adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.

Aux termes de l'article L322-8 du code de l'expropriation, sous réserve de l'article L322-9, le juge tient compte des accords intervenus entre l'expropriant et les divers titulaires de droits à l'intérieur du périmètre des opérations faisant l'objet d'une déclaration publique et les prend pour base lorsqu'ils ont été conclus avec au moins la moitié des propriétaires intéressés et portent sur les deux tiers au moins des superficies concernées ou lorsqu'ils ont été conclus avec les deux tiers au moins des propriétaires et portent sur la moitié au moins des superficies concernées.

Il convient en conséquence d'examiner les références des parties:

1° Les références de la Société d'Économie Mixte AMÉNAGEMENT 77

a) pour la somme de 10 € ou 12 € par mètre carré à titre principal :

- Les parcelles cadastrées C [Cadastre 6] et C [Cadastre 7], en zonage PLU 1 AUa dont la cession définitive est intervenue le 04/07/2013, d'une superficie de 2054 m2 pour un prix de 10€/m2.

- La parcelle cadastrée C [Cadastre 4] en zonage PLU1 AUa dont la cession définitive est intervenue le 26/03/2014, d'une superficie de 575 m2 pour un prix de 10€/m2.

- Les parcelles cadastrées BH 78 et BH 170, en zonage PLU 1 AUb dont la cession définitive est intervenue le 22/04/2015, d'une superficie de 3371 m2 pour un prix de 9,24€/m2.
- Les parcelles cadastrées BE 109, BE 111 et BA 18, en zonage PLU 1AUa, 1 AUb BA 18 dont la cession définitive est intervenue le 07/12/2016, d'une superficie de 4826 m2 pour un prix de 9,88€/m2.
- Les parcelles cadastrées C [Cadastre 8], C [Cadastre 4], C [Cadastre 2], C [Cadastre 2] et C [Cadastre 5], en zonage PLU 1 AUa, dont la cession définitive est intervenue le 29/05/2017, d'une superficie de 3071 m2 pour un prix de 9,66€/m2.
- Les parcelles cadastrées C 1831, BE 102 et BH 75, en zonage PLU 1 1AUb, 1 AUa, dont la cession définitive est intervenue le 04/10/2017, d'une superficie de 1094 m2 pour un prix de 9,50€/m2.

Il convient de retenir ces références qui sont comparables uniquement pour les parcelles qui ne sont pas en situation privilégiée C 76, C [Cadastre 2].

b) pour les 26 € par mètre carré à titre subsidiaire :

Par extraordinaire, la SEM 77 propose de retenir sur la base de valorisation de terrains à bâtir les ventes du :

- 05/09/2013 n° 2013P08133 cadastrées BB [Cadastre 9] et BB [Cadastre 9] au [Adresse 7] dont le prix au m2 est de 232,56€ en Zone PLU UD.

- 31/01/2012 n° 2012P02250 cadastrées BC [Cadastre 10] au Sentier de Bouillons de 571 m2 dont le prix au m2 est de 297,72€ en Zone PLU UD.

- 03/06/2015 n° 2015P06453 cadastrées BC [Cadastre 11] au [Adresse 8] dont le prix au m2 est de [Cadastre 9],88€ en Zone PLU UD.

La moyenne de l'ensemble de ces trois termes de comparaison s'élève à la valeur unitaire de 265,72 € par mètre carré.

Nonobstant, le fait que cette moyenne s'applique aux terrains qui ont reçu la qualification de 'terrain a' bâtir' donc constructibles et, que le second des deux premiers termes de comparaison de plus de cinq ans doit être écarté.

La moyenne est donc de 232,56 euros + [Cadastre 9],88 + 499,44/2 = 249, 72 euros, mais il convient de retenir la moyenne plus favorable de 260 euros, avec un abattement usuel de 90% de la valeur pour fixer la valeur des parcelles dites 'en situation privilégiées' C [Cadastre 3], C [Cadastre 5], C [Cadastre 4] et BE [Cadastre 3], soit 26 € par m2.

2° Les références des Consorts [N]

Ils ne produisent aucune référence. En revanche, ils soulignent certains points relatifs aux réseaux, à la desserte et la situation géographique des parcelles.

Ainsi, l'unité foncière se situe au milieu de la ZAC. Celle-ci est desservie par les réseaux d'eau potable, de téléphone et d'assainissement d'eaux usées et pluviales, tous de capacité suffisante et de proximité immédiate à environ 40 mètres.

Le chemin rural n° 21 dit « Sentier du Champ des Poules », permet de rejoindre à, environ 40 mètres, une vaste étendue asphaltée constituée de parking, de zone industrielle, commerciale, artisanale centrale de la commune de SAINT-THIBAULT-VIGNES et de voies les reliant, dont la sortie débouche quelques dizaines de mètres plus loin en plein centre-ville sur la Route Départementale n° 418.

La commune de SAINT-THIBAULT-VIGNES, a connu un essor démographique considérable en 25 ans, passant de 1400 habitants en 1980 à 6500 en 2005.

La desserte immédiate par des voies de circulation constitue donc, pour ces terrains, un atout considérable qui lui confère une plus-value importante en raison des facilités d'accès pour les transports et la main-d''uvre.

3° Les références du commissaire du gouvernement

Le commissaire du gouvernement propose de retenir pour le calcul de l'indemnité principale de la déterminer par comparaison avec des parcelles récemment acquises par l'expropriant dans le cadre de l'opération, pour toutes les parcelles, exceptée la BE [Cadastre 3] (26 euros) :

- Les parcelles cadastrées C [Cadastre 6] et C [Cadastre 7] en zonage PLU 1AUa dont la cession définitive est intervenue le 04/07/2013, ayant pour date d'acquisition le 10/06/2013 et d'une superficie de 2054 m2 pour un prix de 10€/m2.

- Les parcelles cadastrées BH 78 et BH 170, en zonage PLU 1AUb dont la cession définitive est intervenue le 22/04/2015, ayant pour date d'acquisition le 27/03/2015 d'une superficie de 3371 m2 pour un prix de 9,24€/m2.
- Les parcelles cadastrées BE 109, BE 111 et BA 18, en zonage PLU 1AUa, 1 AUb, dont la cession définitive est intervenue le 07/12/2016, ayant pour date d'acquisition le 15/11/2016 d'une superficie de 4826 m2 pour un prix de 9,88€/m2, arrondi à 10 € /m2.
- Les parcelles cadastrées C [Cadastre 8], C [Cadastre 4], C [Cadastre 2], C [Cadastre 2] et C [Cadastre 5], en zonage PLU 1 AUa, dont la cession définitive est intervenue le 29/05/2017, ayant pour date d'acquisition le 28/04/2017 d'une superficie de 3071 m2 pour un prix de 9,66€/m2.

Le prix moyen de ces quatre références est de 10 €/m2 sans décote.

Il convient de retenir ces références comparables uniquement pour les parcelles qui sont non privilégiées (En excluant donc la BEN°[Cadastre 3]).

Pour la parcelle BE [Cadastre 3], le commissaire du gouvernement cite des mutations récentes de terrains à bâtir dans le secteur :

- 6 janvier 2015 : 2 T rue du bas [Localité 14] à [Localité 12], 800m², 220 000 euros, 275 euros/m²

-16 septembre 2016 :5 B rue du Bas [Localité 14], à [Localité 12], 830m², 205 000 euros, 247 euros/m²

- 29 septembre 2016 :12 T rue du Bas [Localité 14], à [Localité 12], 900m², 250 000 euros, 278 euros/m²

- 6 juin 2016 : 39 rue saint Germain à [Localité 12],1099 m², 252 000 euros, 229 euros/m²

- 3 juin 2015 : 41 B rue de [Localité 15], à Saint Thibault des [Localité 13], 637m², 170 000 euros, 267 euros/m²

Soit une moyenne de 259 euros/m².

Le commissaire du gouvernement propose de retenir une valeur de 10 % de celle des terrains à bâtir, qui correspond usuellement à la valeur d'un terrain en nature de jardin.

Il a recherché des cessions en nature de jardin dans le périmètre de la commune de Saint Thibault des [Localité 13] et des communes avoisinantes :

- 23 juin2016 : Le Village à [Localité 16] Saint Georges, 20m², 124 m², 2 480 euros, 20 euros/m², jardin

- 22 mai 2017 : Les Patis à Dampart, 325m², 1 630 euros, 5,02 euros/m², jardin potager

- 28 septembre 2017 : Le Fort Mardi à [Localité 17], 205 m², 8 000 euros, 39,02 euros /m², jardin nu à usage de jardin d'agrément

- 31 juillet 2017 : Le [Localité 18] à [Localité 19] sur Marne, 134 m², 4 000 euros, 29,85 euros/m², terrain nu à usage d'agrément.

Le commissaire du gouvernement indique que la moyenne est de 23, 47 euros/m² (29,62 euros/m² si on exclut la mutation sur Dampart située en fourchette basse), à comparer aux 26 euros/m² issue de la méthode terrain à bâtir (259 euros x 10%).

Ces références comparables seront retenues pour les parcelles en situation privilégiée, soit une valeur de 26 euros/m².

En conséquence, au regard des références retenues, la valeur unitaire sera fixée à 10 euros/m² pour les parcelles non privilégiées et à 26 euros/m² soit:

- parcelle C [Cadastre 3] et [Cadastre 5]: 590 m² + 2 833 m² = 3423 x 26 euros = 88 998 euros

- parcelle C [Cadastre 4] : 560m² x 26 euros = 14 560 euros

- parcelle C [Cadastre 2] : 495m² x10 euros = 4 950 euros

- parcelle C [Cadastre 1] : 870m² x 10 euros = 8 700 euros

- parcelle BE [Cadastre 3] : 201 x 26 euros = 5 226 euros

Soit un total de 122 434 euros

Le jugement sera donc infirmé en ce sens.

Sur l'indemnité de remploi

20% jusqu'à 5000 euros = 1000 euros

15% de 5000 à 15000 euros = 1500 euros

10% au delà de 15000 euros.

- Pour les parcelle C [Cadastre 3] et [Cadastre 5]

5 000 x 20% = 1000 euros

10 000 x 15% = 1500 euros

88 998 - 15 000 = 73 998 x 10% = 7 399,8 euros

Soit un total de 9 899,8 euros

- Pour la parcelle C[Cadastre 4]

5 000 x 20% = 1 000 euros

14 560 - 1 000 = 13 560 x 15% = 2 184 euros

Soit un total de 3184 euros

- Pour la parcelle C121

4 950 x 20% = 990 euros

- Pour la parcelle C [Cadastre 1]

5 000 x 20% = 1 000 euros

8 700 - 1 000 = 7 700 x 15% = 1 155 euros

Soit un total de 2155 euros

- Pour la parcelle BE [Cadastre 3]

5 000 x 20% = 1 000 euros

5 226 - 1 000 = 4 226 x 15% = 633, 9 euros

Soit un total de 1633, 9 euros

Soit un total de :9 899,8 + 3 184 + 990 + 2 155 + 1 633,9 = 17 862,7 euros.

Le jugement sera donc infirmé en ce sens.

L'indemnité totale de dépossession est donc de :

122 434euros (indemnité principale) + 17 862,7euros (indemnité de remploi) =.140 296,7 euros arrondi à 140 297 euros.

Le jugement sera donc infirmé en ce sens.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné la SEM 77 à verser aux consorts [N] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de débouter les consorts [N] de leur demande sur ce fondement en cause d'appel.

Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance, qui sont à la charge de l'expropriant conformément à l'article L312-1 du code de l'expropriation.

Les consorts [N] perdant le procès seront condamnés aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

infirme partiellement le jugement entrepris

Statuant à nouveau

Fixe à la somme totale arrondie de 140 297 euros l'indemnité à verser par la société d'économie mixte aménagement 77 aux consorts [N] pour la dépossession des parcelle situées sur la commune de Saint Thibault des [Localité 13] cadastrées C [Cadastre 1], C [Cadastre 2], BE [Cadastre 3], C [Cadastre 4], C [Cadastre 3] et C [Cadastre 5] se décomposant comme suit :

- Indemnité principale :122 434 euros

- Indemnité de remploi:17 862,7 euros

Confirme le jugement en ses autres dispositions

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires

Déboute les consorts [N] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne les Consorts [N] aux dépens.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 18/14319
Date de la décision : 23/01/2020

Références :

Cour d'appel de Paris G7, arrêt n°18/14319 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-23;18.14319 ?
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