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22/01/2020 | FRANCE | N°18/01715

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 22 janvier 2020, 18/01715


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 22 JANVIER 2020



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/01715 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B43TX



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2017 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG n° 15/02013





APPELANTE



SC ROBINSON prise en la personne de sa gérante domiciliée en c

ette qualité audit siège

immatriculée au RCS d'EVRY sous le numéro 419 217 104

[Adresse 1]

[Localité 6]



Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 22 JANVIER 2020

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/01715 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B43TX

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2017 -Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG n° 15/02013

APPELANTE

SC ROBINSON prise en la personne de sa gérante domiciliée en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS d'EVRY sous le numéro 419 217 104

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER - BEQUET - MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050, avocat postulant

Assistée de Me Marie Lise TURPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L 230, avocat plaidant

INTIMÉES

SAS G.T.I prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 398 411 595

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Laure FLORENT de l'AARPI FLORENT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0549

SARL RÉVOLUTIONS PER MINUTE 77 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 538 263 112

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010, avocat postulant

Assistée de Me Lionel KOHN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1676, avocat plaidant

SARL HVR 77 (anciennement dénommée SARL DIRECT VO) agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 509 432 175

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par Me Marie-catherine VIGNES de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010, avocat postulant

Assistée de Me Lionel KOHN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1676, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Septembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et Madame Sandrine GIL, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Sandrine GIL, conseillère

Madame Marie-Odile DEVILLERS, conseillère

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

Les sociétés REVOLUTIONS PER MINUTE 77, ci-après RPM 77, et DIRECT VO exercent les activités de commerce de motocycles.

La société SC ROBINSON exerce l'activité de location de terrains et autres biens immobiliers.

La société LCI PIERRE, venant aux droits de la société LALLIER INTERNATIONAL, est locataire d'un terrain sis [Adresse 3] d'une superficie de 10 628m², parcelle C [Cadastre 8], depuis 1993.

Par acte sous seing privé du 13 décembre 2011, la société SC ROBINSON a donné à bail conjointement aux sociétés RPM 77 et DIRECT VO (devenue HVR 77) la parcelle de terrain de 3676 m² - dont elle est elle-même sous-locataire en vertu d'un bail commercial conclu avec la société LCI PIERRES - et les constructions à usage de bureaux, garages, ateliers, entrepôts et locaux annexes présentes sur le terrain et dont elle est propriétaire.

La transaction a été réalisée par l'intermédiaire de la société GTI anciennement dénommée ARTHUR LOYD, agent immobilier mandaté par la société SC ROBINSON.

Le loyer a été fixé à la somme annuelle de 100 000 euros HT payable trimestriellement.

Par lettre recommandée du 15 décembre 2014, la société SC ROBINSON a adressé aux sociétés RPM 77 et DIRECT VO une mise en demeure d'avoir à lui régler la somme de 42 401,76 euros correspondant à la taxe foncière sur les locaux pour les années 2012, 2013 et 2014.

Par acte d'huissier de justice du 3 avril 2015, la société SC ROBINSON a assigné les preneuses devant le juge des référés du tribunal de grande instance de MELUN aux fins de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire prévue au bail, ordonner l'expulsion des sociétés RPM 77 et DIRECT VO des lieux loués et faire condamner ces dernières à lui payer la somme de 42 401,76 euros.

Par ordonnance du 24 juillet 2015, le juge des référés a constaté l'existence d'une contestation sérieuse et dit n'y avoir lieu à référé.

Entre temps, par acte d'huissier de justice du 15 juin 2015, les sociétés RPM 77 et DIRECT VO ont fait assigner la société SC ROBINSON aux fins, à titre principal, de voir juger que la nouvelle taxe foncière exigée par le bailleur principal depuis le mois de juillet 2013 serait à la charge exclusive de cette dernière et à titre subsidiaire de la voir condamnée à leur rembourser le montant de cette taxe pendant toute la durée du bail.

Par acte d'huissier de justice du 17 mai 2016, les sociétés RPM 77 et DIRECT VO ont fait assigner la société G.T.I. aux fins de la voir condamnée à les garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à leur égard dans le cadre de l'instance les opposant à la société SC ROBINSON.

Les affaires ont fait l'objet d'une jonction par ordonnance du 13 septembre 2016.

Par jugement du 7 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Melun a :

- PRONONCE la nullité du 6° de la clause 'Charges et conditions' du bail du 13 décembre 2011 en ce qu'elle prévoit le remboursement par les sociétés preneuses à la société bailleresse d'une quote-part de la taxe foncière,

- DIT n'y avoir lieu à statuer sur les demandes des sociétés REVOLUTIONS PER MINUTE 77 et DIRECT VO à l'encontre de la société GTI,

- DEBOUTE la société ROBINSON de sa demande en paiement à l'encontre des sociétés REVOLUTIONS PER MINUTE 77 et DIRECT VO,

- DEBOUTE la société ROBINSON de sa demande de dommages et intérêts,

- CONDAMNE la société ROBINSON aux dépens,

- CONDAMNE la société ROBINSON à payer aux sociétés REVOLUTIONS PER MINUTE 77 et DIRECT VO la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- PRONONCE l'exécution provisoire de la décision.

Par déclaration du 15 janvier 2018, la société SC ROBINSON a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 14 juin 2019, la société SC ROBINSON demande à la Cour de :

Vu le contrat de bail,

Vu l'article 1134 ancien du Code Civil,

Vu l'article 1116 ancien du Code Civil,

Vu l'article L.145-60 du Code de Commerce,

- Recevoir la SC ROBINSON en ses conclusions d'appel et l'y déclarer bien fondée.

A titre principal

- Infirmer le Jugement rendu le 7 novembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de MELUN en ce qu'il a déclaré l'action des sociétés REVOLUTIONS PER MINUTE 77 (RPM 77) et HVR 77 (anciennement dénommée DIRECT VO) recevable.

Et statuant à nouveau,

- Dire et Juger que la demande de nullité de la clause afférente à la taxe foncière est prescrite par l'effet des dispositions de l'article L.145-60 du Code de Commerce, s'agissant d'une clause d'un bail commercial.

En conséquence,

- Déclarer prescrite la demande de nullité partielle formulée par les sociétés preneuses.

A titre subsidiaire

- Infirmer le Jugement ce qu'il a prononcé la nullité du paragraphe n°6°) de la clause « Charges et conditions » du bail du 13 décembre 2011 en ce qu'elle prévoit le remboursement par les sociétés preneuses à la société bailleresse d'une quote-part de la taxe foncière.

Statuant à nouveau

- Dire et Juger que la SC ROBINSON n'a pas commis de dol.

- Dire et Juger que le paragraphe n°6°) de la clause « Charges et conditions » du bail du 13 décembre 2011 en ce qu'elle prévoit le remboursement par les sociétés preneuses à la société bailleresse d'une quote-part de la taxe foncière doit recevoir pleine et entière application,

En tout état de cause

- Condamner solidairement la société REVOLUTIONS PER MINUTE 77 (RPM 77) et la société HVR 77 (anciennement dénommée DIRECT VO), au paiement de la somme de 87.580 € HT, soit 105.002,17 € TTC au titre du remboursement de la taxe foncière due pour les années 2012 à 2018.

- Condamner solidairement la société REVOLUTIONS PER MINUTE 77 (RPM 77) et la société HVR 77 (anciennement dénommée DIRECT VO) à la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts ;

- Débouter la société G.T.I de sa demande de condamnation de la SC ROBINSON à la relever et la garantir de toutes condamnations pouvant être prononcées à son encontre ;

- Condamner solidairement la société REVOLUTIONS PER MINUTE 77 (RPM 77) et la société HVR 77 (anciennement dénommée DIRECT VO) au paiement de la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance qui pourront être recouvrés par la SCP REGNIER BEQUET MOISAN, avocat au barreau de PARIS.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par le RPVA le 7 mai 2019, les sociétés RPM 77 et HVR 77, anciennement DIRECT VO, demandent à la Cour de :

Vu l'article 2224 du Code civil,

Vu les articles1116, 1134 et 1165 du Code civil (ancienne rédaction),

Vu les articles 1382 et suivants du Code civil (ancienne rédaction),

Vu le contrat de bail du 13 décembre 2011,

A titre principal

- Déclarer mal fondée la SC ROBINSON en son appel contre le jugement rendu le 7 novembre 2017 par le Tribunal de Grande Instance de Melun et l'en débouter,

- Débouter la SC ROBINSON de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l'encontre des sociétés REVOLUTIONS PER MINUTE 77 et HVR 77,

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris.

A titre subsidiaire

Si par extraordinaire la Cour condamnait les intimées à s'acquitter du montant de la taxe foncière sur les parties privatives pour toute ou partie de la durée du bail

- Débouter la SC ROBINSON de ses demandes de dommages et intérêts à l'encontre des sociétés RPM77 et HVR77,

- Condamner la société G.T.I à relever et garantir intégralement les sociétés RPM 77 et HVR77 de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre tant en principal, intérêts, frais qu'accessoires au titre des arriérés de taxes foncières sur les années 2012 à 2017,

- Condamner la société G.T.I. à garantir et rembourser aux sociétés RPM 77 et HVR77 toutes sommes qu'elles devraient acquitter au titre de la taxe foncière sur les parties privatives pendant toute la durée du bail et ses renouvellements éventuels, et ce au plus tard dans le délai de 15 jours suivant leur paiement par elles entre les mains de leur bailleur, dûment justifié, sous astreinte de 500 € par jour de retard.

EN TOUTES HYPOTHÈSES

- Dire que dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations

prononcées dans l'arrêt à intervenir, l'exécution forcée devrait être réalisée par l'office d'un Huissier, le montant des sommes retenues par l'Huissier en application de l'article 10 du Décret du 8 mars 2001 portant modification du Décret 96/1080 du 12 décembre 1996 (tarif des Huissiers) devra être supporté par le débiteur en sus des frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner solidairement les sociétés SC ROBINSON et G.T.I à payer à chacune des sociétés REVOLUTIONS PER MINUTE 77 et DIRECT VO la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour ses frais irrépétibles en cause d'appel,

- Condamner solidairement la SC ROBINSON et la société G.T.I aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 11 avril 2019, la société G.T.I. demande à la cour de :

- Dire et juger les sociétés RPM 77 et HVR 77 (ex DIRECT VO) et toute autre partie, mal fondées en leur appel en tant que dirigé contre les dispositions du jugement du Tribunal de Grande Instance de MELUN du 7 novembre 2017 relatives à la société G.T.I.,

EN CONSEQUENCE :

' Confirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de MELUN du 7 novembre 2017 en ses dispositions relatives à la société G.T.I.

' Débouter les sociétés RPM 77 et DIRET VO et toute autre partie mal fondées en leurs demandes contre la société G.T.I.,

' En conséquence, les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société G.T.I.

' A titre subsidiaire, condamner la société SC ROBINSON à relever et garantir la société G.T.I. de toutes condamnations qui pourraient prononcées à son encontre

' En tout état de cause, condamner solidairement les sociétés RPM 77 et HVR 77 (ex DIRECT VO) ou, à défaut, condamner toute autre partie succombante à payer à la société G.T.I. la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

' Les condamner solidairement ou, à défaut, condamner toute autre partie succombante en tous les dépens dont le montant pourra être recouvré par Maître Laure FLORENT, membre de l'AARPI FLORENT AVOCATS, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 27 juin 2019.

MOTIFS

Sur la prescription de l'action en nullité

L'appelante maintient en cause d'appel que l'action en nullité de la clause du bail afférente à la taxe foncière est prescrite au regard de la prescription biennale depuis le 13 décembre 2013 ce qui est contesté par les intimées qui rappellent qu'il s'agit d'une prescription quinquennale ; qu'en outre elles n'ont eu connaissance du dol qu'à la réception de la facture correspondant à la taxe foncière de l'année 2012, soit postérieurement au 13 septembre 2013.

La cour renvoie à la motivation du jugement entrepris qu'elle adopte et confirme le jugement qui n'a pas accueilli la demande de prescription.

Sur le dol

L'appelante fait valoir que les offres de location émanant de l'agence immobilière LOYD, devenue GTI, sont des descriptifs portant la mention 'non contractuel' ; que les montants y figurant au titre de 'l'impôt foncier' émanent de la société ACCESS INDUSTRIE précédente sous-locataire ; que le mandat non exclusif de recherche de locataire qu'elle a conclu avec l'agence immobilière n'est pas opposable aux sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 ; que le jugement entrepris ne pouvait retenir le dol en se fondant sur ces éléments. Elle précise n'avoir transmis à l'agence immobilière que les informations en sa possession, à savoir le montant de la cotisation foncière des entreprises qu'elle réglait ; que la confusion qu'elle a faite avec l'impôt foncier ne peut pas constituer l'élément matériel du dol. Elle précise que la taxe foncière de 603 euros évoquée par les intimées concernant une cour commune est une taxe appelée directement auprès des sous-sous locataires par la société LCI PIERRE. Elle ajoute qu'elle ne pouvait pas communiquer le montant de la taxe foncière puisque celle-ci ne lui avait jamais été facturée ; qu'elle ne disposait donc pas de l'information n'étant elle-même que sous-locataire des locaux ; que l'élément intentionnel du dol n'est pas démontré. La SC ROBINSON considère que les locaux n'ont pas été pris à bail par les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 en raison du montant de la taxe foncière qu'elles pensaient être de 589 euros mais parce que les locaux correspondaient aux besoins et aux exigences s'agissant d'une concession TRIUMPH, les locaux devant répondre à des critères précis ; que le seul fait que les intimées aient pu disposer d'une information incomplète ou que le montant de l'impôt foncier ait été dissimulé, ce qui est contesté, ne suffit pas à établir que cela aurait entraîné une erreur déterminante du consentement des sociétés preneuses lors de la conclusion du bail. Elle ajoute que la taxe foncière représente 10 % du montant global du loyer et une charge de 0,28% du chiffre d'affaires des sociétés preneuses. Enfin elle estime que les sociétés preneuses connaissaient la consistance du bien donné à bail de sorte qu'elles auraient pu se rendre compte que le montant affiché dans l'annonce ne pouvait pas correspondre à la taxe foncière.

Les intimées expliquent que les locaux loués font l'objet de deux taxes foncières, l'une correspondant à la taxe foncière sur les parties communes s'élevant à la somme de 589 euros/an, qui est celle figurant dans les annonces de location, et une seconde taxe foncière sur les parties privatives de l'ordre de 12 000 euros/an dont la SC ROBINSON n'a fait état que lorsqu'elle lui a été réclamée par le bailleur principal à l'été 2013 ; que la société SC ROBINSON n'a mentionné que la première lors de la négociation du bail. Elle rappelle que la SC ROBINSON est un professionnel qui a pour activité principale la location de terrain et d'autres biens immobiliers ; que le professionnel à qui il est opposé un dol par réticence doit établir qu'il a bien exécuté son obligation d'information. Elles exposent qu'elles ne reprochent pas à la SC ROBINSON de ne pas avoir eu connaissance lors de la conclusion du bail du montant exact de la taxe foncière mais de leur avoir communiqué un montant de taxe foncière sous-évalué les induisant ainsi volontairement en erreur sur la charge totale de loyers et accessoires qu'elles auraient à payer en leur laissant croire que le montant de la taxe était faible. Elles estiment que la SC ROBINSON ne pouvait ignorer que seule une partie de la taxe foncière était appelée alors qu'elle est dans les lieux depuis au moins 1998, ce dont elle aurait dû les informer et elle aurait dû également l'informer que la taxe foncière 'manquante' sur les parties privatives était susceptible d'être appelée ; qu'elle leur a intentionnellement dissimulé ces informations. Elles ajoutent qu'il n'est pas crédible que la SC ROBINSON ait pu confondre la contribution foncière des entreprises et la taxe foncière qui sont des impôts différents. Enfin elles soutiennent que le montant de la taxe foncière est un élément déterminant de leur consentement dès lors comme l'a relevé le jugement dont elles demandent la confirmation qu'il aggravait le coût total de la location; que les manoeuvres de la SC ROBINSON ont entraîné une erreur sur la valeur du prix du loyer et des accessoires au loyer qui a été déterminante de leur consentement en l'absence desquelles elles n'auraient pas contracté ; que si le montant de la taxe foncière ne représente qu'une faible proportion de leur chiffre d'affaires, son montant est significatif par rapport à leur résultat. Enfin elles soutiennent qu'elles ne sont pas spécialisées en matière immobilière et qu'elles ne pouvaient pas savoir que le montant de la taxe foncière annoncée par la SC ROBINSON ne correspondait qu'à la cour commune.

La cour rappelle qu'aux termes des dispositions de l'article 1116 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit se prouver.

Ainsi, le dol suppose :

- une manoeuvre, un mensonge ou une réticence dolosive,

- que l'auteur des manoeuvres, mensonge ou réticence doit avoir agir intentionnellement pour tromper le cocontractant,

- que la victime du dol doit avoir commis une erreur dans son consentement.

Les manoeuvres, les mensonges, ou la réticence doivent avoir été déterminants du consentement et doivent émaner du cocontractant.

En application de ces dispositions, il est de principe que le manquement à une obligation précontractuelle d'information ne peut suffire à caractériser le dol par réticence si ne s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante provoquée par celui-ci.

Le bail conclu entre les parties stipule en son article 'Charges et conditions' que 'les sociétés preneuses paieront également ou rembourseront à la société bailleresse, sur justifications, toutes les charges locatives afférentes à la parcelle et au bâtiment sous-loués, ainsi qu'une quote-part des charges inhérentes aux parties de terrain à I'usage commun des occupants, des taxes municipales et de la taxe foncière'.

Il est établi que la société LCI PIERRES n'a pas refacturé la taxe foncière à la SC ROBINSON avant l'année 2013 où elle a réclamé paiement de la taxe foncière 2012, ce qui ressort d'un échange de courriers entre la société LCI PIERRE et la SC ROBINSON ainsi que de l'interrogation de celle-ci du centre des impôts fonciers de [Localité 9] concernant les bases du calcul de la taxe foncière auquel il a été répondu par lettre du 3 juillet 2013 et des documents comptables produits par la SC ROBINSON.

Il ressort des deux annonces locatives non datées décrivant le bien objet du bail que le montant de 'l'impôt foncier à la charge du preneur' était indiqué à hauteur de 563 euros. Comme l'indique la SC ROBINSON, ce montant correspond à celui qui était mentionné par la société ACCESS INDUSTRIE, précédent locataire de la SC ROBINSON, dans le mandat de recherche de successeur conclu avec la société ARTHUR LOYD le 24 mai 2011.

Le mandat non exclusif de recherche de locataire confié par la SC ROBINSON à la société ARTHUR LOYD le 12 décembre 2011 fait mention d'un 'impôt foncier à la charge du preneur' de 589 euros.

Si le mandat conclu par la SC ROBINSON avec l'agence immobilière n'est pas opposable aux sociétés REVOLUTIONS PER MINUTE 77 et DIRECT VO qui n'y sont pas parties, il permet de déterminer quelles informations la société ROBINSON a pu transmettre aux futurs locataires, ce qui est corroboré par le courriel du 26 septembre 2013 dont il ressort que la SC ROBINSON leur a donné comme information au titre de 'l'impôt foncier' le montant de 589 euros 'suivi de la mention à réactualiser suivant impôt', ledit courriel indiquant que 'ce montant correspond au montant de la CFE (cotisation foncière des entreprises). Seul impôt que nous payions à l'époque'.

Il résulte des pièces versées aux débats par la SC ROBINSON que celle-ci a acquitté au titre de la cotisation foncière des entreprises la somme de 555 euros pour l'année 2010 et 568 euros au titre de l'année 2011.

Le montant de 589 euros visé dans le mandat au titre de 'l'impôt foncier' correspond manifestement à cette contribution foncière qui était effectivement le seul impôt réglé par la SC ROBINSON puisque la taxe foncière n'avait jamais été appelée par le locataire principal avant 2013.

En outre, la taxe foncière de 603 euros relative à une 'parcelle commune' est facturée directement par la société LCI PIERRES aux sous-sous locataires (à savoir les intimées), ce indépendamment de la taxe foncière désormais facturée à la SC ROBINSON, de sorte qu'il n'est pas établi que la SC ROBINSON réglait cette taxe et qu'elle aurait indiqué aux sociétés preneuses un montant partiel de la taxe foncière correspondant à la taxe 'parties communes' comme le soutiennent les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77.

Il s'ensuit que contrairement à ce qui a été retenu par le jugement entrepris, il ne peut être reproché à la SC ROBINSON d'avoir eu connaissance 'du caractère partiel du montant de la taxe foncière qu'elle a porté à la connaissance des preneuses'.

Au regard de ces éléments, si l'information transmise par la SC ROBINSON au titre de 'l'impôt foncier' ne correspond effectivement pas au montant de celui-ci, de l'ordre de 12 000 euros /an, elle n'avait pas connaissance de son montant lors de la conclusion du bail et l'information transmise correspondait à la seule taxe qu'elle réglait, improprement appelée 'impôt foncier'. Elle n'a pas par conséquent pas dissimulé une information dont en tout état de cause elle ne disposait pas.

Il ne saurait lui être reproché d'avoir 'intentionnellement' dissimulé ou 'intentionnellement' omis de faire état de ce que la taxe foncière n'était pas appelée par le locataire principal, alors que celle-ci n'a jamais été appelée avant l'année 2013 étant précisé que la SC ROBINSON est sous-locataire depuis au moins 1998 selon les baux qui lui ont été consentis, et qu'elle a communiqué les seuls éléments dont elle disposait.

Il n'est donc pas démontré qu'elle ait agi intentionnellement pour tromper son cocontractant en lui faisant croire à un montant peu élevé de la taxe foncière.

Par conséquent le dol n'est pas caractérisé de sorte qu'il convient d'infirmer le jugement qui a prononcé la nullité du 6° de la clause 'Charges et conditions' du bail en ce qu'il prévoit le remboursement par les sociétés preneuses à la SC ROBINSON d'une quote-part de la taxe foncière.

Sur la demande en paiement formée par la SC ROBINSON

La clause du bail relative au remboursement par les sociétés preneuses de la taxe foncière n'étant pas annulée, la SC ROBINSON est bien fondée à réclamer paiement de la somme totale de 105 002,17 euros TTC, correspondant aux taxes foncières pour les années 2012 à 2018 dont elle justifie par la production des factures afférentes et dont le montant n'est pas contesté par les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 dans leurs écritures.

Par conséquent le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de la SC ROBINSON et les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 seront condamnées solidairement à lui régler la somme totale de 105 002,17 euros TTC au titre des taxes foncières pour les années 2012 à 2018.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par la SC ROBINSON

Au vu des circonstances de l'espèce ci-dessus rappelées, la SC ROBINSON ne rapporte pas la preuve de la mauvaise foi des intimées dans leur action en contestation du paiement de la taxe foncière.

Sur la demande en garantie formée par les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77

Les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 soutiennent que la société GTI a manqué à son obligation d'information, de renseignement et de conseil aux motifs que celle-ci a repris à son compte les informations trompeuses concernant le montant de la taxe foncière alors qu'il lui appartenait de vérifier le montant de la taxe foncière portée sur les annonces et sur le mandat s'agissant d'un professionnel de l'immobilier contrairement à elles ; que le fait qu'elles aient été assistées d'un conseil lors de la rédaction du bail ne pouvait exonérer l'agent immobilier de sa responsabilité.

La société GTI réplique qu'il ne peut lui être reproché de ne pas s'être fait communiquer les justificatifs de la taxe foncière alors que son mandant n'en avait pas connaissance ; qu'elle ne pouvait mentionner que les informations qui lui était communiquées ; qu'elle n'a pas rédigé l'acte de location.

Il est établi que la société ARTHUR LOYD, aux droits de laquelle vient la société GTI,

n'est pas le rédacteur de l'acte de location conclu entre la SC ROBINSON et les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 qui étaient assistées de leur conseil respectif.

Il n'est pas démontré que les annonces locatives versées aux débats par les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 ont été rédigées sur la base du mandat de recherche de locataire établi par la SC ROBINSON et non sur la base du mandat de recherche d'un successeur confié à la même agence par le sous-locataire qui quittait les lieux, la société ACCESS INDUSTRIE. Quoiqu'il en soit ces annonces mentionnent au titre de 'l'impôt foncier' un montant de 563 euros proche de celui de 589 euros visé dans le mandat confié par la SC ROBINSON et la société GTI précise qu'elle a mis en relation la SC ROBINSON et les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 conformément au mandat confié par la SC ROBINSON, ce qui n'est pas discuté par les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77.

Au regard des développements qui précèdent, il ne saurait toutefois être reproché à la société GTI de manquements alors qu'elle n'a fait apparaître dans le descriptif des annonces que le montant qui lui avait été communiqué au titre de l'impôt foncier par ses mandants, que ce soit la société ACCESS INDUSTRIE ou la SC ROBINSON ; que les montants figurant sur les deux mandats étaient sensiblement similaires de sorte que son attention ne pouvait pas être particulièrement attirée sur leur caractère éventuellement erroné ; qu'il ne saurait lui être reproché dans ces circonstances de ne pas avoir demandé de précision à la SC ROBINSON, ni de ne pas lui avoir réclamé de justificatifs d'une taxe foncière qui n'était pas appelée à la date de son intervention par la société LCI PIERRES.

Par conséquent les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 seront déboutées de leur demande de garantie.

Il n'y pas lieu de statuer sur la demande de condamnation de la société SC ROBINSON à relever et garantir la société G.T.I. dès lors qu'aucune condamnation n'est prononcée à son encontre.

Sur les demandes accessoires

L'équité commande de ne pas prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile de sorte que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef ainsi que sur les dépens.

Les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 qui succombent seront condamnées in solidum aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il n'est pas nécessaire de dire que 'dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans l'arrêt à intervenir, l'exécution forcée devrait être réalisée par l'office d'un Huissier, le montant des sommes retenues par l'Huissier en application de l'article 10 du Décret du 8 mars 2001 portant modification du Décret 96/1080 du 12 décembre 1996 (tarif des Huissiers) devra être supporté par le débiteur en sus des frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile'.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription formée par la société SC ROBINSON et en ce qu'il a débouté la SC ROBINSON de sa demande de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau et y ajoutant

Dit que la demande en nullité formée par les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 est recevable,

Déboute les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 de leurs demandes de nullité du 6° de la clause 'Charges et conditions' du bail du 13 décembre 2011 en ce qu'elle prévoit le remboursement par les sociétés preneuses à la société bailleresse d'une quote-part de la taxe foncière,

Les déboute de leurs demandes de garantie par la société GTI,

Condamne solidairement les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 à régler à la SC ROBINSON la somme totale de 105 002,17 euros TTC au titre des taxes foncières pour les années 2012 à 2018,

Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande formée par la société GTI de condamnation de la société SC ROBINSON à la relever et garantir,

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette le surplus des demandes,

Condamne in solidum les sociétés REVOLUTION PER MINUTE et HVR 77 aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au bénéfice des avocats postulants qui en ont fait la demande.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 18/01715
Date de la décision : 22/01/2020

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°18/01715 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-22;18.01715 ?
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