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17/01/2020 | FRANCE | N°16/14113

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 17 janvier 2020, 16/14113


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 17 Janvier 2020



(n° , 4 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/14113 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZ64A



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 Juillet 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de [Localité 1] RG n° 16/00133





APPELANTE

SARL L'HOTELIERE DE MENAGE

[Adresse 1]

[Locali

té 2]

non représentée à l'audience



INTIMEE

CPAM DE [Localité 1]

DIRECTION DU CONTENTIEUX ET DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE

POLE CONTENTIEUX GENERAL

[Localité 1]

représenté par Me Florenc...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 17 Janvier 2020

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/14113 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZ64A

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 27 Juillet 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de [Localité 1] RG n° 16/00133

APPELANTE

SARL L'HOTELIERE DE MENAGE

[Adresse 1]

[Localité 2]

non représentée à l'audience

INTIMEE

CPAM DE [Localité 1]

DIRECTION DU CONTENTIEUX ET DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE

POLE CONTENTIEUX GENERAL

[Localité 1]

représenté par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 2]

[Localité 1]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Octobre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Michel CHALACHIN, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Michel CHALACHIN, président de chambre

Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, conseillère,

M. Lionel LAFON, conseiller

Greffier : Mme Venusia DAMPIERRE, lors des débats

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. L'arrêt mis à disposition initialement le 10 janvier 2020 a été prorogé au 17 janvier 2020.

-signé par Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, conseillère (présidente empêchée) et par Mme Typhaine RIQUET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la société L'Hôtelière de Ménage d'un jugement rendu le 27 juillet 2016 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de [Localité 1], dans un litige l'opposant à l'Assurance maladie de [Localité 1], ci-après la CPAM.

Faits, procédure, prétentions et moyens des parties :

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.

Il suffit de rappeler que Mme [Q] [O], employée par la société L'Hôtelière de Ménage, a déclaré avoir été victime d'un accident du travail, le 21 juin 2015 à 13h30, ses horaires de travail le jour de l'accident s'étalant de 8h00 à 12h00 et de13h00 à 15h00.

Le 23 juin 2015, l'employeur a rempli une déclaration d'accident du travail en indiquant :

- Lieu de l'accident : lieu de travail habituel ( hôtel du collectionneur, [Adresse 3]) ;

- Activité de la victime lors de l'accident : la salariée déclare passer l'aspirateur;

- Nature de l'accident : la salariée déclare avoir glissé ;

- Objet dont le contact a blessé la victime : la salariée déclare que l'aspirateur serait tombé sur elle ;

- Siège des lésions : la salariée déclare le pied droit ;

- Nature des lésions : inconnue ;

- Accident connu le 21 juin 2015 à 13h30 par un préposé de l'employeur, tel que décrit par la victime ;

- La première personne avisée : [P] [G].

Il était précisé qu'un courrier de réserve serait envoyé en complément de la déclaration d'accident du travail.

Le certificat médical initial du 22 juin 2015, constatait : ' Traumatisme - Douleur hanche gauche et genou droit '.

Le 23 juin 2015, l'employeur a adressé une lettre de réserves à la caisse.

L'accident a été pris en charge d'emblée par la CPAM le 30 juin 2015.

Estimant avoir émis des réserves motivées nécessitant une enquête ou l'envoi d'un questionnaire, la société L'Hôtelière de Ménage a contesté l'opposabilité de cette prise en charge devant la commission de recours amiable, puis devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de [Localité 1], lequel, par jugement du 27 juillet 2016, a déclaré régulière et opposable à la société L'Hôtelière de Ménage la procédure de reconnaissance du caractère professionnel de l'accident survenu le 21 juin 2015 au préjudice de Mme [Q] [O] et débouté la société L'Hôtelière de Ménage de sa demande tendant à lui voir déclarer inopposable la décision de prise en charge par la CPAM de cet accident. C'est la décision dont la société L'Hôtelière de Ménage a interjeté appel.

Elle fait déposer et soutenir oralement par sa représentante des écritures aux termes desquelles elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de lui déclarer inopposable la décision de prise en charge par la CPAM de l'accident du 21 juin 2015.

Elle reproche à la CPAM :

* de ne pas avoir attendu 10 jours avant de lui notifier sa décision de prise en charge, alors qu'une lettre de réserves était annoncée dans la déclaration d'accident du travail du 23 juin 2015,

* de n'avoir pas diligenté d'enquête et de ne pas lui avoir adressé de questionnaire, malgré les réserves motivées qu'elle avait émises,

* de n'avoir donc pas respecté le principe du contradictoire,

* de ne pas lui avoir permis de consulter le dossier de l'accident invoqué par sa salariée avant la décision de prise en charge.

Selon elle, les réserves exprimées dans sa lettre du 23 juin 2015 étaient motivées, remettant en cause le fait que l'accident déclaré par Mme [O] se soit produit au temps et au lieu du travail.

Elle soutient que, dés lors, la CPAM devait mener une instruction contradictoire.

La CPAM fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions aux termes desquelles elle demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner la société L'Hôtelière de Ménage en tous les dépens.

Elle soutient que les réserves émises par l'employeur n'étaient pas motivées au sens où l'entend l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale.

Après avoir rappelé que, pour être prises en compte, les réserves devaient porter sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident ou sur l'existence d'une cause étrangère au travail, elle fait observer que, dans sa lettre du 23 juin 2015, la société L'Hôtelière de Ménage se bornait à invoquer l'absence de témoin et l'absence de lésion, plaie ou trace de choc.

Elle fait observer que l'accident dont a été victime la salariée à son travail a été signalé immédiatement à l'employeur et que la constatation médicale des lésions concorde avec la déclaration d'accident.

Elle ajoute que Mme [G], la responsable hiérarchique de Mme [O], avisée immédiatement, n'a mentionné dans son rapport aucun élément particulier susceptible de faire émettre un doute quant à la survenance de l'accident.

Elle souligne que l'absence de témoin ne suffit pas à exclure la prise en charge, d'autant que l'emploi de Mme [O], dans le domaine du nettoyage d'hôtels, s'exerce isolément.

Elle indique que le courrier de réserves était formulé de manière stéréotypée sans corrélation avec les faits.

Elle déduit de l'ensemble de ces éléments qu'en l'absence de réserves motivées et en présence de présomptions sérieuses, graves et concordantes sur l'origine professionnelle de l'accident, elle n'avait aucune obligation d'instruire le dossier et d'informer l'employeur avant la prise de décision.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

Motifs :

Aux termes de l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale, en cas de réserves motivées de la part de l'employeur, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou procède à une enquête auprès des intéressés.

Dans ce cas, préalablement à sa décision de reconnaître ou d'écarter le caractère professionnel de l'accident déclaré, la caisse doit aviser l'employeur des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief ainsi que de la fin de la procédure d'instruction, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle entend prendre sa décision.

Les réserves ne sont opérantes que si elles remettent en cause les circonstances de temps et/ou de lieu de l'accident ou si elles évoquent l'existence d'une cause étrangère au travail.

En l'espèce, dans sa lettre du 23 juin 2015, la société L'Hôtelière de Ménage faisait valoir que le prétendu accident de Mme [O] n'était générateur d'aucune plaie, lésion, gonflement ou trace de choc visible. Elle soulignait que Mme [O] ne précisait pas où elle se trouvait lors du prétendu accident. En cela, elle disait contester le fait qu'un accident concernant Mme [O] se soit produit au temps et au lieu du travail et en tout état de cause, selon elle, l'hypothétique lésion au pied droit de Mme [O] avait nécessairement une cause totalement étrangère au travail.

Elle invitait donc la CPAM à lui fournir tout élément afin que soit respecté le principe du contradictoire et pour lui permettre de renverser la présomption d'imputabilité dans l'hypothèse où les éléments qui seraient portés à sa connaissance démontreraient que la cause ne trouvait pas son origine dans le travail.

Enfin elle indiquait souhaiter pouvoir consulter le dossier constitué, une fois l'instruction terminée.

La société L'Hôtelière de Ménage remettait donc en cause l'existence même d'un accident survenu selon les conditions décrites par l'intéressée et attribuait la lésion constatée à une cause totalement étrangère au travail.

L'employeur avait donc formulé en temps utile des réserves quant aux circonstances de temps et de lieu de l'accident ainsi que sur la matérialité même du fait accidentel en émettant un doute sérieux sur les circonstances de l'accident et l'origine professionnelle des lésions.

Ainsi, en présence de réserves motivées, la CPAM ne pouvait prendre sa décision sans procéder à une instruction préalable.

La prise en charge de l'accident ne pouvait intervenir d'emblée, il appartenait à la CPAM de procéder à des investigations complémentaires, même si elle estimait être suffisamment éclairée sur les circonstances de l'accident, et elle était tenue d'informer l'employeur avant de prendre sa décision.

En l'absence d'instruction permettant à l'employeur de présenter des observations préalablement à la prise en charge de l'accident, cette décision ne lui est pas opposable.

Le jugement sera donc infirmé et la décision de prise en charge de l'accident du 21 juin 2015 sera déclaré inopposable à la société L'Hôtelière de Ménage.

Par ces motifs :

La cour ,

Déclare la société L'Hôtelière de Ménage recevable et bien fondée en son appel ;

Infirme le jugement ;

Statuant à nouveau :

Déclare inopposable à la société L'Hôtelière de Ménage la décision de prise en charge par l'Assurance maladie de [Localité 1] de l'accident survenu le 21 juin 2015 au préjudice de Mme [Q] [O] ;

Laisse les dépens d'appel à la charge de l'Assurance maladie de [Localité 1].

La greffièrePour le président empêché,

La conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 16/14113
Date de la décision : 17/01/2020

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°16/14113 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-17;16.14113 ?
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