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13/01/2020 | FRANCE | N°18/03094

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 13 janvier 2020, 18/03094


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 13 JANVIER 2020



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/03094 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5AJN



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Septembre 2017 -Tribunal de Commerce d'AUXERRE - RG n° 2015002082





APPELANTE



SARL REMORQUES LOUAULT

Ayant son siège social [Adre

sse 2]

[Adresse 2]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Roger DENOULET, avocat au barreau de PARIS, toque ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 13 JANVIER 2020

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/03094 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5AJN

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Septembre 2017 -Tribunal de Commerce d'AUXERRE - RG n° 2015002082

APPELANTE

SARL REMORQUES LOUAULT

Ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Roger DENOULET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0285, substitué par Me Pauline ROUSSEAU, avocate au barreau de PARIS

INTIMEE

SARL FRANCES

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 478 825 250

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Valérie PICHON, avocat au barreau de PARIS, toque : R284

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Novembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Stanislas de CHERGÉ, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

Monsieur Stanislas de CHERGÉ, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La Sarl Frances est une société spécialisée dans les travaux publics.

La Sarl Remorques Louault fabrique et vend des remorques pour le transport d'engins de travaux publics.

Le 09 septembre 2014, la société Frances a commandé à la société Remorques Louault une remorque « essieux centraux porte engins neuve ». La remorque a été livrée le 13 février 2015 et mise en circulation le 19 février 2015. Le prix a été réglé entre les mains du vendeur le 24 février 2015.

Le 16 avril 2015 est survenue une rupture de soudure de l'attelage. A la suite d'une mise en demeure de la société Frances le 20 avril 2015, l'assureur de cette dernière a conclu à l'absence de responsabilité de l'entreprise utilisatrice et à l'existence d'un défaut de qualité des soudures.

La société Remorques Louault a transmis à la société Frances un rapport d'expertise concluant à la « mise en portefeuille » de la remorque lors d'une man'uvre ayant abouti à la rupture finale puis a fait intervenir les 4 mai et 19 novembre 2015 un technicien aux fins de procéder à la reprise des soudures ainsi qu'à des retouches de peinture, sans qu'elles soient facturées.

Le 17 mars 2016, la remorque a été interdite de circulation. La société ABVI, chargée des réparations à la suite du contrôle technique, a diagnostiqué un défaut d'étanchéité du moyeu droit 2ème avec présence de graisse sur les garnitures et des fissures sur la structure du châssis. Le 23 octobre 2017, la société Frances a revendu la remorque au prix de 18 000 euros TTC.

Par exploit d'huissier du 29 octobre 2015, la société Frances a assigné la société Remorques Louault devant le tribunal de commerce d'Auxerre.

Par jugement du 18 septembre 2017, le tribunal de commerce d'Auxerre a :

- débouté la société Remorques Louault de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles ;

- condamné la société Remorques Louault à procéder au remplacement à l'identique de la remorque présentant le défaut la rendant impropre à l'usage ;

- jugé qu'il n'y avait pas lieu à une extension de garantie de six mois, car la nouvelle remorque disposait d'une garantie contractuelle ;

- condamné la société Remorques Louault au remboursement de la facture du 30 avril 2015 de la société LOCA MAT 11 de 3 927 euros, de la société ABVI du 31 mars 2016 de 1 891,80 euros et du cabinet SOURNIA de 697,62 euros ;

- condamné la société Remorques Louault à payer à la société Frances la somme de 1 500 euros du fait de l'immobilisation de la remorque et des opérations d'expertises ;

- condamné la société Remorques Louault à payer à la société Frances la somme de 1 500 euros au titre d l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Remorques Louault aux entiers dépens ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- liquidé les frais de greffe à la somme de 70,20 euros.

Par déclaration du 18 septembre 2017, la société Remorques Louault a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 16 avril 2019, la société Remorques Louault demande à la cour de :

Vu les articles 1641 et suivants du code civil,

- infirmer le jugement du tribunal de commerce ;

- déclarer irrecevable et infondée la société Frances de l'ensemble de ses conclusions ;

- condamner la société Frances à verser à la société Remorques Louault la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Frances aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Roger Denoulet, dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 27 février 2019, la société Frances demande à la cour de :

Vu les articles 1641 et suivants du code civil, les articles 1146 et suivants anciens du code civil,

- rejeter toutes fins, prétentions ou moyens de la société Remorques Louault ;

A titre principal, confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a condamné la société Remorques Louault à procéder au remplacement à l'identique de la remorque qui présente le défaut la rendant impropre à son usage ; infirmer la décision entreprise sur ce point,

- déclarer recevable et bien-fondé l'appel incident sur ce point et, statuant à nouveau ;

- condamner la société Remorques Louault à payer à la société Frances, sauf à la diminuer pour juste motif, la somme de 10 000 euros en diminution du prix de vente de la remorque ;

A titre subsidiaire, condamner, notamment sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil ou des articles 1146 et suivants anciens dudit code, la société Remorques Louault à payer à la société Frances, sauf à en diminuer le montant pour justes motifs, les sommes de :

- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les défauts présentés par la remorque ;

- 3 927 euros à titre de dommages et intérêts pour les frais engagés pour le règlement de la facture n° 201500100 du 30 avril 2015 de la Sarl Loca Mat 11 ;

- 697,62 euros à titre de dommages et intérêts pour les frais engagés pour le règlement de la facture du 2 septembre 2015 du cabinet Sournia ;

- 1 891,80 euros à titre de dommages et intérêts pour les frais engagés pour le règlement de la facture n°3000370 du 31 mars 2016 de la société ABVI, sauf à réduire ce montant à la somme de 1 194,77 euros ;

-1 500 euros à titre de dommages et intérêts du fait de l'immobilisation de la remorque et des opérations d'expertise ;

- ajoutant à la décision entreprise, dire et juger que les condamnations financières prononcées seront productives d'intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 avril 2015 ou à défaut de l'assignation du 19 octobre 2015 ;

- donner acte à la société Frances qu'elle ne s'oppose pas à toute mesure d'instruction que la cour pourrait considérer nécessaire, aux frais avancés de la société Remorques Louault ;

- condamner la société Remorques Louault à payer à la société Frances la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Remorques Louault aux entiers dépens de première instance et d'appel.

SUR CE,

Sur l'existence de vices cachés et ses conséquences

La société Remorques Louault soutient, au visa de l'article 1641 du code civil, que les conditions nécessaires à la garantie des vices cachés ne sont pas remplies. Le défaut de soudure de l'attelage n'est pas rédhibitoire en ce que la société Frances aurait continué à utiliser la remorque après ses interventions des 4 mai et 19 novembre 2015. Elle ajoute que ce défaut n'est pas inhérent à la remorque dont elle affirme qu'elle a subi une mise en portefeuille ainsi que des chocs anormaux et répétés à droite comme à gauche. Elle avance que le désordre allégué n'est pas antérieur à la vente en ce qu'il serait la conséquence d'une utilisation anormale de la remorque, et qu'au demeurant l'intimée ne parviendrait pas à démontrer une telle antériorité. Elle fait valoir que, si le vice ne pouvait pas être connu de la société Frances lors de la livraison, c'est parce qu'il est apparu postérieurement à cet événement.

La société Frances fait valoir, sur le fondement de l'article 1641 du code civil, que la garantie des vices cachés s'applique en raison de défauts de qualité des soudures, de défauts d'étanchéité du moyeu droit 2ème et de fissures dans la structure du châssis. Ces défauts, inhérents à la remorque, relèvent de la qualité de la fabrication et d'une zone inaccessible en l'absence de démontage et la rendaient impropre à l'usage dès lors que ladite remorque ne pouvait passer avec succès le contrôle technique obligatoire un an après l'achat. Elle affirme que rien ne peut laisser penser que la remorque a été mal utilisée et que les éléments produits par l'appelante ont été constitués par elle. Elle relève que l'appelante est intervenue à deux reprises sans facturer ses interventions, ce qui démontre qu'elle reconnaissait à l'époque que les désordres lui étaient imputables. Elle soutient que le vice est bien rédhibitoire au regard des périodes d'utilisation de la remorque et de leur correspondance avec les interventions des techniciens de la société Remorques Louault.

Elle souligne que le vice était bien antérieur à la vente s'agissant de problématiques d'oxydation interne dues à la qualité des soudures et relevées seulement deux mois après la livraison.

Ceci étant exposé,

Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

Le bon de commande signé le 9 septembre 2014 a pour objet l'achat d'une remorque « essieux centraux » de 6,5 tonnes sur 12 roues, en contrepartie du paiement du prix de 33 360 euros Ttc. Les conditions générales de vente stipulent que les matériels sont garantis un an contre tout vice de construction, « pour toutes les conséquences des vices cachés suivant les termes des articles 1641 et suivants du code civil. La garantie est conditionnée par le respect des préconisations d'entretien du constructeur» (article 7) et la responsabilité de Remorques Louault n'est pas engagée en cas de dommages indirects ou dus à une non-conformité aux besoins du client ou à une cause indépendante de sa volonté.

Il en résulte que les défectuosités relevées sont de nature à rendre l'utilisation de la remorque dangereuse ou impossible et constituent des vices rédhibitoires au jour de la vente. L'intervention a posteriori des techniciens de Remorques Louault à deux reprises sur le site de livraison confirme l'existence de défectuosités persistantes, mais sans remplacement des choses viciées.

En conséquence, c'est par de justes motifs, que la cour adopte, que les premiers juges ont débouté la société Remorques Louault de toutes ses demandes concernant la garantie des vices cachés et que le jugement déféré doit être confirmé sur ce chef.

Sur les demandes de la société Frances

La société Remorques Louault s'oppose aux demandes de l'intimée. Elle est intervenue dans le cadre de l'entretien régulier de la remorque.

La société Frances fait valoir qu'elle a revendu la remorque à un sous-acquéreur le 23 novembre 2017 pour un prix de 18 000 euros TTC, soit 54% de la valeur initiale, ce qui constitue un préjudice de 10 000 euros en tenant compte de la dépréciation de l'engin. Elle demande également d'être indemnisée de la location d'une autre remorque, des frais de réparation et d'expertise, outre une indemnité de 1 500 euros au titre de l'immobilisation de la remorque.

Ceci étant exposé,

Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Le remplacement à l'identique de la remorque ne peut être maintenu au constat de la revente opérée en 2017.

Le jugement déféré sera réformé sur ce chef.

En ce qui concerne le préjudice lié à la différence entre le prix de revente de 18 000 euros et le prix d'acquisition de 33 360 euros, il y a lieu de donner droit à la demande de lsociété Frances pour des dommages et intérêts d'un montant de 10 000 euros.

En ce qui concerne l'indemnisation des frais engagés pour la location d'une autre remorque, des frais de réparation et d'expertise, outre l'indemnité de 1 500 euros au titre de l'immobilisation de la remorque, la cour relève qu'ils sont justifiés et correspondent aux conséquences des vices cachés. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont condamné la société Remorques Louault à leur paiement.

Le jugement déféré sera confirmé sur ces chefs, outre qu'il sera modifié pour y ajouter les intérêts au taux légal à compter de la date de la dernière intervention sur la remorque par la société Remorques Louault, soit le 19 novembre 2015.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

INFIRME le jugement déféré ;

Statuant de nouveau :

CONDAMNE la société Remorques Louault à payer à la société Frances la somme de 10 000 euros ;

CONDAMNE la société Remorques Louault à payer à la société Frances les sommes de 3 927 euros, 697,62 euros, 1 891,80 euros et 1 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2015 ;

REJETTE toute autre demande ;

CONDAMNE la société Remorques Louault à payer à la société Frances la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Remorques Louault aux dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 18/03094
Date de la décision : 13/01/2020

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°18/03094 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-13;18.03094 ?
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