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18/12/2019 | FRANCE | N°19/04652

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 18 décembre 2019, 19/04652


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/04652 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7XZV



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Novembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL RG n° 14/01236





APPELANT



Monsieur [C] [U]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par Me Ghislain DADI, avocat au barreau

de PARIS, toque : A0257







INTIMEE



SNC AMBULANCE [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 1]

non comparante et non représentée







COMPOSITION DE LA COUR :



En application...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/04652 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7XZV

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Novembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL RG n° 14/01236

APPELANT

Monsieur [C] [U]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par Me Ghislain DADI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0257

INTIMEE

SNC AMBULANCE [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 1]

non comparante et non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Octobre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Roselyne NEMOZ - BENILAN , Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

Madame Roselyne NEMOZ - BENILAN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Nasra SAMSOUDINE

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Daniel FONTANAUD, Président de chambre et par Nasra SAMSOUDINE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [C] [U] a été embauché par la société AMBULANCES [Localité 3] SN le 6 janvier 2013, en qualité d'ambulancier.

Le 19 mai 2014, monsieur [U] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Créteil pour solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail et en paiement de diverses sommes.

Le 30 mai 2014, monsieur [U] a adressé à son employeur une lettre de démission demandant à être dispensé de son préavis en raison de 'harcèlement moral et psychique et discrimination sur salaires'.

La convention collective applicable à a relation de travail est celle des transports routiers et activités auxiliaires de transports. A la date de la rupture, la société AMBULANCES [Localité 3] SN occupait habituellement plus de 10 salariés. Monsieur [U] percevait un salaire brut de base de 1.600 Euros auquel s'ajoutaient diverses primes et heures supplémentaires.

Par jugement du 26 novembre 2015, monsieur [U] a été débouté de l'ensemble de ses demandes.

Le 21 décembre 2015, il a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions visées par le greffe le 29 octobre 2019 au soutien de ses observations orales, auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, monsieur [U] demande à la cour de requalifier sa démission en prise d'acte de la rupture, de dire qu'elle a les effets d'un licenciement nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société AMBULANCES [Localité 3] SN à lui payer les sommes suivantes :

- 20.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement, subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 11.481,03 Euros pour violation du statut protecteur ;

- subsidiairement 10.000 Euros pour harcèlement moral ;

- très subsidiairement 2.701,42 Euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et s congés payés suite au licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 1.855 Euros à titre de rappel de primes ;

- 5.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la durée légale de travail;

- 4.000 Euros pour le retard de mauvaise foi dans le paiement des salaires ;

- 2.845,71 Euros et les congés payés afférents à titre de rappel de salaires pour retenues injustifiées ;

- 131,99 Euros au titre de l'indemnité de dépassement de l'amplitude journalière ;

Il sollicite l'annulation des avertissements des 28 mars, 3 et 8 avril 2014, 5.000 Euros de dommages et intérêts pour avertissements injustifiés et utilisation d'un système de géolocalisation illégal, 2.000 Euros pour retard dans l'établissement d'une attestation Pole emploi, 5.000 Euros pour dénigrement, 2.000 Euros pour absence d'IRP, enfin 2.000 Euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La société AMBULANCES [Localité 3] SN régulièrement convoquée, n'était ni présente ni représentée.

MOTIFS

En application des dispositions de l'article 472 du Code de Procédure Civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à a demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondé

Sur le rappel de primes

En application du principe 'à travail égal, salaire égal', énoncé par les articles L. 2261-22-II-4, L. 2771-1-8 et L. 3221-2 du code du travail, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés pour autant que ceux-ci soient placés dans une situation identique ; il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs et matériellement vérifiables justifiant cette différence ;

Monsieur [U] verse aux débats le bulletin de salaire de son collègue de travail, monsieur [N], exerçant également des fonctions d'ambulancier, faisant apparaître des primes de conduite et primes d'entretien de 60 Euros et ses propres bulletins de salaires faisant apparaître ces mêmes primes à hauteur de 20 Euros ; en l'absence de démonstration d'éléments objectifs pour justifier cette différence, il convient de faire droit à la demande à hauteur, au vu des bulletins de paie, de 530 Euros, outre les congés payés afférents ;

Sur le non respect de la durée maximale de travail

Monsieur [U] se prévaut d'un accord cadre sur les limites minimales de travail effectif, alors que les pièces qu'il verse aux débats, à l'appui de sa demande, mentionnent seulement les amplitudes, à savoir le temps séparant la prise de poste de sa fin et qui ne sont pas soumises aux mêmes limitations ; il ne produit aucun décompte précis sur son temps de travail effectif si bien qu'il convient de confirmer le jugement qui l'a débouté de la demande qu'il a formée de ce chef ;

Sur le retard dans le paiement des salaires

Monsieur [U] fait valoir que des heures supplémentaires lui ont été payées avec retard, parfois plus d'un an comme cela apparaît certains mois sur ses bulletins de paie et prétend que la société AMBULANCES [Localité 3] SN a ainsi tenté de dissimuler les importantes heures de travail qu'il effectuait ; toutefois, cette volonté de dissimulation n'est établie par aucune pièce ; monsieur [U] ne justifie pas avoir formulé de réclamation avant sa prise d'acte ni d'un préjudice indépendant du retard de paiement qu'il fait valoir;

Le jugement sera également confirmé sur ce point ;

Sur les retenues injustifiées et l'indemnité d'amplitude

Monsieur [U] sollicite un rappel de salaires au titre de retenues effectués par l'employeur pour régularisation de primes de rendement, heures supplémentaires, indemnités d'amplitude et absences maladie ; s'agissant de cette dernière retenue, il verse aux débats un arrêt maladie de 7 jours au cours du mois d'avril alors qu'a été opérée une retenue de 17 jours, et en l'absence de pièces permettant d'établir que les sommes ainsi retenues n'étaient pas dues, il sera fait droit à la demande du salarié sur ce point ;

Il sera également fait droit à la demande du salarié au titre des indemnités d'amplitude, compte tenu des dépassements correspondants, mentionnés sur les feuilles de route ;

Sur l'annulation des avertissements et la géolocalisation

Monsieur [U] verse aux débats 3 avertissements qui lui ont été notifiés par l'employeur les 28 mars, 3 et 8 avril 2014, qu'il a contestés et au sujet desquels il donne à la cour des explications sur leur caractère injustifié ; il fait en outre valoir que l'employeur, dans la lettre d'avertissement du 8 avril, lui indique avoir suivi ses déplacements par géolocalisation, alors qu'il ne justifie pas avoir fait une déclaration à la CNIL, en dépit d'une sommation de communiquer ; à défaut d'éléments permettant d'établir le caractère bien fondé des sanctions, ces avertissements seront annulés ; le préjudice causé au salarié, qui a été arrêté à la fin du mois d'avril pendant 7 jours pour stress professionnel, sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 1.000 Euros ;

Sur la démission

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ;

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture ;

Si le salarié a la qualité du salarié protégé, et qu'il prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur quand les faits invoqués le justifiaient;

Monsieur [U] verse aux débats un courrier du syndicat anti précarité, du 7 avril 2014 reçu par la société le 9 avril, qui sollicite la mise en place d'élections professionnelles au sein de l'entreprise et fait part de la candidature de monsieur [U] à ces élections; celui-ci avait donc la qualité de salarié protégé pendant une durée de 6 mois, conformément aux dispositions de l'article 2411-7 du code du travail ;

Compte tenu des graves manquements retenus par la cour - inégalité de traitement, privation de l'indemnité d'amplitude, retard dans le paiement des heures supplémentaires, avertissements injustifiés, - la prise d'acte du 9 mai 2014 a les effets d'un licenciement nul; monsieur [U] a donc droit à une indemnité pour méconnaissance du statut protecteur correspondant à la rémunération qu'il aurait perçue jusqu'à l'expiration de la période de protection en cours ; sur la base de son salaire brut mensuel moyen, soit 2.701.42 Euros, il lui sera alloué, conformément à sa demande, une somme de 11.481,03 Euros ;

Compte tenu de l'effectif de l'entreprise, de l'ancienneté de monsieur [U], du montant de sa rémunération et des conséquences de la rupture, telles qu'elles ressortent des pièces produites, il convient de lui allouer, conformément aux dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail alors applicable, une somme de 16.500 Euros en réparation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail ;

Sur les dommages et intérêts pour dénigrement

Monsieur [U] prétend que la société AMBULANCES [Localité 3] SN l'a dénigré lors de l'audience de conciliation auprès de son nouvel employeur, ce qui lui aurait coûté son nouvel emploi, mais ne verse aux débats aucune autre pièce que son propre courrier pour étayer ses dires : le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef de demande

Sur le retard dans la remise des documents de fin de contrat

Monsieur [U] affirme que la société AMBULANCES [Localité 3] SN lui a remis les documents de fin de contrat avec retard mais ne justifie pas du préjudice que lui aurait causé ce retard ; il convient de confirmer le jugement qui l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts;

Sur les dommages et intérêts pour absence d'IRP

En l'absence d'élément permettant de caractériser son préjudice, le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté monsieur [U] de sa demande de dommages et intérêts pour absence d'IRP ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire ;

Confirme le jugement du Conseil de Prud'hommes en ce qu'il a débouté monsieur [U] de ses demandes de dommages et intérêts pour non respect de la durée maximale de travail, retard dans le paiement du salaire, retard dans l'établissement des documents de fin de contrat, dénigrement et absence d'IRP ;

L'infirme sur le surplus et statuant à nouveau ;

Dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail a les effets d'un licenciement nul et annule les avertissements notifiés les 28 mars, 3 et 8 avril 2014 ;

Condamne la société AMBULANCES [Localité 3] SN à payer à monsieur [U] les sommes suivantes :

- 530 Euros à titre de rappel de primes et 53 Euros pour les congés payés afférents ;

- 2.845,71 Euros à titre de rappel de salaires pour retenues injustifiées et 284,57 Euros pour les congés payés afférents ;

- 131,99 Euros au titre de l'indemnité d'amplitude et 13,19 Euros pour les congés payés afférents ;

- 1.000 Euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par les sanctions injustifiées ;

- 11.481,03 Euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur ;

- 16.500 Euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la rupture abusive du contrat de travail ;

Déboute monsieur [U] de ses autres demandes plus amples ou contraires ;

Condamne la société AMBULANCES [Localité 3] SN à payer à monsieur [U] 2.000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Met les dépens à la charge de la société AMBULANCES [Localité 3] SN.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 19/04652
Date de la décision : 18/12/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°19/04652 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-18;19.04652 ?
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