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06/12/2019 | FRANCE | N°17/22193

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 11, 06 décembre 2019, 17/22193


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 11



ARRÊT DU 06 DECEMBRE 2019



(n° , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/22193 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4SNB



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Novembre 2017 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2013F00629





APPELANTE



SA GENERALE DE TELEPHONE

prise en

la personne de ses représentants légaux



[Adresse 2]

[Localité 1]

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Bobigny sous le numéro 437 723 844



représentée par Me Matthieu BO...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRÊT DU 06 DECEMBRE 2019

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/22193 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4SNB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Novembre 2017 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2013F00629

APPELANTE

SA GENERALE DE TELEPHONE

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 1]

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Bobigny sous le numéro 437 723 844

représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat postulant au barreau de PARIS, toque : C2477

assistée de Me Eric DEUBEL, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : T06

INTIMEE

SAS DNP PHOTO IMAGING EUROPE anciennement dénommée KONICA MINOLTA PHOTO IMAGING FRANCE

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 3]

[Localité 2]

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Bobigny sous le numéro 312 273 550

représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

assistée de Me Augustin NICOLE, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : T01

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Octobre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Françoise BEL, Présidente de chambre

Mme Agnès COCHET-MARCADE, Conseillère

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Mme Françoise BEL, Présidente et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

Faits et procédure

Le 19 avril 2004, la société Konica Minolta Photo Imaging France devenue DNP Photo Imaging Europe (la société DNP) et la société par actions simplifiées Photo Station, aujourd'hui Générale de Téléphone (la société GDT) ont conclu un contrat de mise à disposition de mini laboratoires développeurs de photos et divers services en lien avec l'activité de photographie (formation, maintenance, mise à jour de la technologie, assistance technique et fourniture des consommables) pour une durée de 4 ans. La date d'expiration du contrat était donc fixée au 31 août 2008.

Par jugement du 2 novembre 2005, le tribunal de commerce de Nancy a ouvert à l'encontre de la société GDT une procédure de redressement judiciaire, désignant la SCP Pierre Bruart aux fonctions de représentant des créanciers et Me [Z] à celles d'administrateur judiciaire.

Par lettre du 9 novembre 2005, en réponse à l'interrogation de la société DNP, l'administrateur judiciaire confirmait la continuation du contrat en cours 'jusqu'à nouvel ordre'.

A l'issue de la période d'observation, une audience se tenait devant le tribunal de commerce de Nancy le 18 avril 2006 au cours de laquelle l'administrateur présentait un plan de continuation.

Le 24 avril 2006, l'administrateur judiciaire de la société GDT faisait connaître sa décision de mettre un terme au contrat du 19 avril 2004 en raison de l'annonce par la société Konica de l'arrêt de son activité de vente d'appareils et d'imagerie photographiques.

La décision du tribunal mise en délibéré le 25 avril 2006 et validant le plan de continuation n'a pas pris en compte cette rupture du contrat.

Le 23 mai 2006, la société DNP a régularisé une déclaration de créances pour les sommes de :

- 11.004.420 € HT correspondant au solde des redevances dues jusqu'à la 'n du contrat, à savoir le 31 août 2008 ;

- 5.000.000 € HT couvrant notamment les dommages survenus aux équipements, les redevances excédant les minima, l'atteinte à la réputation, les coûts des licenciements prononcés, les coûts des emplois perdus, etc... ;

- 1.149.767,48 € HT ventilée comme suit : 242.867 € HT au titre des ajustements des volumes et tarifs calculés sur la 2ème année et arrêtés au 25 avril 2006, conformément à l'article 6 du contrat ; 618.334, 48 € HT au titre de factures pour prestations effectuées restant à régler au 25 avril 2006, en ce compris l'écart d'inventaire à fin février 2006 demeurant à parfaire ; 288.566 € HT au titre des stocks détenus par la société GDT et facturés par la société DNP au 25 avril 2006.

Ces déclarations de créances out été contestées et par deux ordonnances du 10 décembre 2007, le juge commissaire a fait droit aux contestations de la procédure collective, et a rejeté les deux créances de 11.004.420 € HT, et de 5.000.000 € HT.

De plus, le juge commissaire a considéré que l'administrateur judiciaire avait régulièrement rompu le contrat sur le fondement d'une faute contractuelle commise par la société DNP.

Par arrêts en date du 17 juin 2009, la cour d'appel de Nancy a confirmé les décisions du juge commissaire du 10 décembre 2007 tout en substituant les motifs de la décision, déclarant notamment irrecevable comme nouvelle la demande tendant à la condamnation de la société DNP au paiement de dommages et intérêts pour rupture anticipée abusive du contrat.

Le 14 mai 2012, la société DNP a notifié à la société GDT une demande d'arbitrage fondée sur l'article 11 du contrat. Par décision du 14 janvier 2013, l'arbitre s'est déclaré compétent pour connaître du litige et a rendu une sentence.

Par arrêt du 6 mai 2014, la cour d'appel de Paris réformant la sentence du 14 janvier 2013 a constaté l'incompétence de la juridiction arbitrale. Le pourvoi en cassation formé contre cette décision a été rejeté par arrêt du 17 novembre 2015.

Afin de sauvegarder ses droits atteints par la prescription le 19 juin 2013, la société DNP a par acte du 29 mai 2013, assigné la société GDT devant le tribunal de commerce de Bobigny. Elle sollicitait du tribunal de constater la poursuite en tout état de cause jusqu'au 9 février 2009 de l'exécution du contrat du 19 avril 2004, sans mise en 'uvre d'aucune décision de résiliation, ni d'incidence de la procédure collective ouverte en 2005 ; de dire et juger qu'à défaut d'un nouvel accord de volonté, cette exécution ne pouvait être régie, dans son ensemble, que par les dispositions contractuelles initialement convenues ; de condamner la société GDT à lui payer la somme en principal de 9.563.105 € outre les intérêts légaux à compter de la sommation du 9 février 2009, la somme de 25.000 € à titre des dommages et intérêts et la somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société GDT soulevait quant à elle principalement des fins de non-recevoir tirées de l'autorité de la chose jugée et de la contradiction des prétentions de la société DNP. A titre subsidiaire, elle concluait au débouté de la société DNP. A titre reconventionnel, elle sollicitait la condamnation de la société DNP à lui payer la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et la somme de 50.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Après avoir ordonné un sursis à statuer dans l'attente de la décision statuant dans le cadre de la procédure d'arbitrage, le tribunal de commerce de Bobigny a, par jugement assorti de l'exécution provisoire en date du 28 novembre 2017, constaté la poursuite d'activité entre les sociétés DNP et GDT dans l'exécution du contrat du 19 avril 2004 et a dit que cette poursuite d'activité s'était faite aux conditions et obligations du contrat initial ; a condamné la société GDT à payer à la société DNP la somme de 9.563.105 € avec intérêts au taux légal à compter du 9 février 2009 ; a condamné la société GDT à payer la somme de 10.000€ de dommages et intérêts ; a débouté la société GDT de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; a condamné la société GDT au paiement de la somme de 20.000 € à la société DNP au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la continuation du contrat initial, le tribunal a retenu qu'il était « patent et prouvé » que la société GDT a continué à utiliser les services de la société DNP après sa lettre de rupture du 24 avril 2006, sans avertir cette dernière de sa volonté de continuer à utiliser les minilabs sous les termes d'un nouveau contrat. Il relève qu'aucune modification du contrat par écrit n'a été démontrée et que la société GDT n'a pas informé la société DNP de sa volonté de restituer le parc de matériel loué, ce qu'elle aurait dû faire dans le cadre de la résiliation tel que prévu à l'article 9 du contrat. Il en déduit la démonstration de sa volonté de continuation d'activité avec ce matériel, la société DNP ayant parfaitement rempli sa part du contrat initial.

Sur la facturation, le tribunal a relevé que selon les dispositions du contrat les parties convenaient d'une rémunération calculée sur la base d'une partie fixe de 300 € HT par mois et par unité de minilabs mis a disposition, et d'une partie variable permettant un prix dégressif en fonction du niveau d'utilisation des matériels. Il a estimé que la société GDT a, de son propre chef et unilatéralement, sans en avertir la société DNP cherché à changer les tarifs initiaux à son profit. Il en déduit que la qualité de service n'ayant jamais fait l'objet d'une contestation quelconque de la part de la société GDT, les seules réclamations effectuées par elle l'ayant été sur la facturation de la partie variable du prix concernant le total des 'clicks' annuel, c'est à ses torts que la société GDT a refusé d'accepter de payer l'ensemble de la facturation, basée sur les termes du contrat initial, que lui avait envoyée la société DNP et l'a condamnée à payer la totalité de la somme réclamée par cette dernière.

Sur la demande de dommages et intérêts, le tribunal a estimé que la société DNP prouvait la faute de la société GDT et le lien de causalité entre la non exécution du paiement et le préjudice invoqué, sans pour autant justifier du quantum du préjudice allégué.

Par déclaration au greffe en date du 4 décembre 2017, la société GDT a interjeté appel dudit jugement.

Moyens et prétentions des parties :

Par conclusions notifiées et déposées le 9 septembre 2019, la société GDT demande à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bobigny le 28 novembre 2017 ;

En conséquence,

A titre principal,;

- faire droit à la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ;

- faire droit à la fin de non-recevoir tirée de la contradiction des prétentions soutenues par la société DNP ;

En conséquence, déclarer la société DNP irrecevable en toutes ses prétentions et demandes;

A titre subsidiaire,

- juger que le contrat du 19 avril 2004 a été résilié ;

- juger qu'un nouveau contrat a été conclu à de nouvelles conditions ;

- déclarer la société DNP mal fondée en toutes ses prétentions et demandes ;

En conséquence, débouter la société DNP de l'ensemble de ses demandes ;

A titre infiniment subsidiaire, si la cour considérait que le contrat de 2004 s'est poursuivi aux mêmes termes et conditions, juger que les sommes réclamées par la société DNP au titre des régularisations d'inventaire, des coûts de stockage, des loyers impayés et du coût de démontage ne sont pas dues et que les sommes réclamées au titre des minimum garantis ne sauraient excéder un total de 1.125.892 € ;

A titre reconventionnel, condamner la société DNP à lui payer la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

En tout état de cause,

- débouter la société DNP de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la société DNP à lui payer la somme de 50.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société DNP aux entiers dépens dont distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'appelante relève tout d'abord que le tribunal de commerce de Bobigny n'a examiné aucun de ses moyens d'irrecevabilité. Elle ajoute que le tribunal a statué en se fondant sur un moyen de droit visiblement relevé d'office, sans avoir invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, en relevant que l'article 12.5 du contrat qui stipule que : 'la composition de l'actionnariat n'est pas la cause de leur engagement aux présentes. En conséquence, la modification de cette composition n'est pas un motif valable de résiliation', ce qui est contraire aux dispositions de l'article 16 du code de procédure civile.

La société GDT invoque une fin de non-recevoir fondée sur l'autorité de la chose jugée.

Elle considère que la cour d'appel de Nancy ayant confirmé par deux arrêts en date du 17 juin 2009, les ordonnances du 10 décembre 2007 du juge commissaire ayant rejeté, dans un cas, la créance d'indemnités et de pénalités déclarée pour 11.004.420 €, dans l'autre cas, la créance de dommages et intérêts déclarée pour 5.000.000 €, par la société DNP au passif de la procédure collective, les créances indemnitaires litigieuses sont définitivement éteintes et que la société DNP ne peut, sous couvert d'une demande de condamnation pécuniaire, solliciter les indemnités nées de la résiliation du contrat, la seule voie qui lui était ouverte était celle de la déclaration de créances et de l'admission au passif, aujourd'hui fermée.

La société GDT fonde également l'irrecevabilité des demandes de la société DNP sur la contradiction des prétentions de celle-ci.

Elle soutient qu'après avoir contesté la légitimité de la résiliation du contrat par l'administrateur judiciaire afin de se voir allouer des indemnités de rupture, déclarant ces sommes au passif de la procédure collective, la société DNP n'hésite pas à faire valoir que le contrat se serait en réalité poursuivi aux mêmes termes et conditions et que la résiliation n'aurait jamais pris effet, sollicitant le paiement des mêmes sommes à ce titre. Elle estime qu'un tel comportement procédural se heurte au principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui. Elle considère qu'il existe une contradiction manifeste entre une demande judiciaire initiale sollicitant l'octroi d'indemnités sur le fondement d'une résiliation prétendument fautive du contrat, et celle exposée dans le cadre de la présente instance qui tend au paiement de ces mêmes sommes, mais en se fondant sur la poursuite du contrat non résilié.

A titre subsidiaire, sur le fond du litige, elle soutient que le contrat conclu entre elle et la société DNP a été valablement résilié par lettre du 24 avril 2006 à la suite de l'annonce par la société DNP (ex Konica) d'interrompre définitivement le service objet des prestations contractuelles (minilabs). Elle considère que cette résiliation volontaire fait obstacle à la reconnaissance d'une quelconque tacite reconduction, que le contrat ne s'est pas poursuivi avec la société DNP ' ce dont celle-ci ne disconvient d'ailleurs pas - et n'a pas davantage été transmis à la société RKM Solutions dès lors qu'elle s'y était expressément opposée. Elle considère la résiliation parfaite et acquise du seul fait de l'envoi de la lettre du 24 avril 2006, peu important, dès lors, les actes réciproques postérieurs à cette résiliation tels qu'ils sont allégués par la société DNP.


Elle fait valoir que le contrat de 2004 résilié, elle est entrée dans une nouvelle relation commerciale avec la société RKM Solutions, personne morale distincte de la société DNP, à compter de mai 2006 avec laquelle elle était convenue de nouvelles conditions d'exploitation, la société RKM lui ayant adressé des factures correspondant aux prestations fournies et ayant été réglée desdites prestations. Elle conteste l'absence de démarches de sa part pour retourner les minilabs à la société DNP, faisant valoir une lettre recommandée adressée à cette dernière dès le 5 mai 2006 aux termes de laquelle elle s'est enquise des modalités de restitution des minilabs, sans qu'aucune réponse ne lui soit apportée. Par ailleurs, elle dit avoir rendu progressivement les minilabs et ce dès le début de l'année 2007.

Elle réfute la parfaite exécution par la société DNP de ses obligations lors de la prétendue poursuite du contrat, rappelant que l'obligation de formation n'a pas été assurée après la résiliation du mois d'avril 2006 ce qui n'est pas contesté, le nouveau contrat conclu avec la société RKM Solutions ne mettant pas à la charge de celle-ci une quelconque obligation de formation.

Elle soutient que la transmission universelle du patrimoine en mars 2007 de la société RKM Solutions à la société RKM (anciennement Konica) dont la dénomination est ensuite devenue RKM Solutions puis DNP est indifférente à l'effectivité de la résiliation du contrat de 2004 conclu entre elle et la société Konica et à l'existence d'une nouvelle relation commerciale débutée à la fin avril 2006 avec une personne morale différente de la société Konica, la société RKM Solutions.

Elle considère que la société DNP ne peut prétendre au minimum garanti et aux loyers impayés qu'elle réclame au titre de l'exécution du contrat de 2004.

L'appelante estime que dès lors qu'elle avait l'obligation de restituer au fur et à mesure les minilabs à la suite de la résiliation du contrat, le minimum garanti ne pouvait avoir vocation à s'appliquer. Elle ajoute que le nouveau contractant, la société RKM Solutions, avait parfaitement connaissance de cette situation et les nouvelles conditions d'exploitation des minilabs mises en place après la résiliation du contrat ne prévoyant pas l'existence de ces minimums garantis mais uniquement le paiement des clicks réellement comptabilisés.

Elle soutient qu'elle a, comme convenu, restitué au fur et à mesure les machines, et a donc réglé les loyers relatifs aux machines qu'elle a continué à utiliser jusqu'à complète restitution.

Sur les sommes prétendument dues au titre des coûts de stockage, l'appelante soutient qu'outre le fait que la société DNP ne démontre pas à quel titre elle devrait s'acquitter d'une telle somme, elle n'a jamais donné son accord sur le principe de la facturation des coûts de stockage qui ne sont que la conséquence de sa résiliation du contrat.

Elle fait valoir qu'elle n'a jamais donné son accord pour une telle facturation des frais de démontage et que l'article 9 du contrat dont l'intimée se prévaut stipule : 'KONICA MINOLTA (DNP) assumera les frais consécutifs au démontage ainsi qu'au rapatriement dudit matériel' et que son absence d'accord est également valable pour les sommes prétendument dues au titre des écarts d'inventaire.

A titre infiniment subsidiaire, si la cour devait considérer que le contrat de 2004 s'est poursuivi aux mêmes termes et aux mêmes conditions, elle fait valoir :

- au titre du minimum garanti réclamé, qu'aucune explication n'est fournie sur l'une des 4 factures avancées par l'intimée, n'ayant jamais reçu celle du 31 mai 2008, ajoutant que ces factures sont établies sur la base de 197 machines encore installées alors que celles-ci étaient progressivement restituées,

- qu'il est nécessaire de prendre compte l'état réel du parc des machines, que dès le début de l'année 2007, elle a progressivement restitué les machines, l'article 6.1.2 du contrat stipulant que les éléments de facturation variable s'entendent par 'volume annuel de tirage, par unité de matériel installée',

- que seules les machines installées et le nombre de clicks effectivement réalisés pourront être pris en compte pour calculer les régularisations dont les montants seraient alors les suivants:

- Année 2 : 278.607 €, soit le montant réclamé pour cette période par DNP ;

- Année 3 : 443.041 €, et non 1.938.121 € comme le réclame DNP ;

- Année 4 : 404.244 €, et non 4.915.112 € comme le réclame DNP ;

soit un montant total dû au titre des régularisations, en application du contrat de 2004 de 1.125.892,27 € TTC et non de 7.131.841 € TTC,

- que la société DNP ne justifie d'aucune facture au titre des coûts de stockage, étant relevé qu'aucune stipulation du contrat de 2004 ne le prévoyait,

- que les frais de démontage ne sont pas dus, le contrat de 2004 stipulant dans son article 9 alinéa 3 que 'KONICA MINOLTA (DNP) assumera les frais consécutifs au démontage ainsi qu'au rapatriement dudit matériel »,

- que les cinq factures émises par la société DNP au titre des écarts d'inventaire ne sont pas détaillées et ne permettent pas de vérifier le quantum facturé étant précisé que l'annexe 4.3.1 est relative au mode de calcul de ces écarts,

- que la société DNP ne justifie pas avoir souffert d'un quelconque préjudice autre que le non paiement des factures dont elle sollicitait le règlement assorti des intérêts de retard et que les demandes de dommages et intérêts ne sont pas fondées.

A titre reconventionnel, elle soutient le caractère manifestement abusif de la procédure, en raison des man'uvres auxquelles la société DNP a eu recours pour tenter de donner une apparence de consistance à sa réclamation qui illustrent la mauvaise foi de celle-ci.

Par conclusions notifiées et déposées le 24 septembre 2019, la société DNP demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bobigny le 28 novembre 2017 en ce qu'il a constaté la poursuite d'activité entre elle et la société GDT dans l'exécution du contrat du 19 avril 2004 et dit que cette poursuite d'activité s'est faite aux conditions et obligations du contrat initial ; condamné la société GDT à lui payer la somme de 9.563.105 € avec intérêts au taux légal à compter du 9 février 2009 ; débouté la société GDT de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; ordonné l'exécution provisoire nonobstant appel et sans constitution de garantie ; condamné la société GDT à lui payer la somme de 20.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ; condamné la société GDT aux entiers dépens.

Subsidiairement, en cas d'infirmation,

- constater que le contrat a été poursuivi par la société GDT et revoir le détail dudit quantum selon les chiffres communiqués par la société GDT pour :

- condamner la société GDT au paiement des sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter du 9 février 2009 :

- au titre des minimums garantis prévus à l'article 6.2 du contrat, et sur la base des nombres de clicks communiqués par la société GDT : 6.144.888,04 € HT décomposés comme suit : 232.949 € HT (déjà incontestés) au titre de l'année 2 ; 1.860.340,19 € HT et 472.763 € HT (facture du 31 mai 2018) au titre de l'année 3 ; 3.578.835,85 € HT au titre de l'année 4.

- au titre de l'article 6.1.2 du contrat et de l'annexe 6.1.2 du contrat : 376.870 € HT décomposés comme suit : 318.838 € HT pour l'année 3 ; 58.032 € HT pour l'année 4,

- au titre des loyers impayés prévus à l'article 6.1.1 du contrat : 626.700 € HT ;

- au titre des régularisations d'inventaires prévus à l'article 4.3 du Contrat : 309.186 € HT ;

- au titre des coûts de stockage : 1.031.826,86 € HT ;

- au titre des frais de démontage et frais divers : 34.167,77 € HT ;

- au titre des frais de tirages et de la maintenance (demande incontestée par la société GDT) : 39.948,88 € HT ;

Et, y ajoutant en tout état de cause,

- condamner la société GDT au règlement d'une somme de 25.000 € de dommages et intérêts ;

- condamner la société GDT à lui payer la somme de 50.000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'intimée conteste les fins de non-recevoir opposées par l'appelante, en répliquant à la prétendue irrecevabilité fondée sur l'autorité de la chose jugée, que la cour d'appel de Nancy n'a aucunement tranché la question concernant les demandes formées dans le cadre de la présente instance par lesquelles elle réclame le règlement des sommes dues par la société GDT en exécution du contrat que cette dernière a poursuivi et dont elle a pleinement bénéficié (mise à disposition, de la maintenance et de l'alimentation en consommables d'un parc de 197 minilabs pendant 3 ans) et non pas la réparation du préjudice né de la résiliation d'un contrat en cours notifiée pendant la période d'observation.

Elle oppose à l'irrecevabilité fondée sur une contradiction de ses prétentions, qu'elle a toujours fait preuve de cohérence en contestant le bien-fondé de la résiliation notifiée le 24 mai 2006, en contestant la remise en cause des créances qu'elle avait régulièrement déclarées à la procédure collective de la société GDT sur le fondement de cette résiliation, et aujourd'hui en sollicitant de celle-ci qu'elle assume un comportement, postérieur à la résiliation théorique qu'elle avait notifiée, et qui en définitive n'a plus rien à voir avec cette résiliation, consistant à poursuivre la relation contractuelle dans des conditions unilatéralement revues par elle seule.

Au fond, elle fait valoir qu'elle a parfaitement exécuté ses obligations nées du contrat, qu'il appartenait à la société GDT, prétendument auteur de la résiliation, de restituer les machines, ce qu'elle a commencé à faire sans terminer le processus. Elle ajoute que le grief tiré de l'inexécution de son obligation de formation est nouveau après 10 années sans contestation des parties à ce sujet.

Elle considère que la société GDT a continué d'exploiter le parc de « minilabs » décrit au contrat, tout en le réduisant progressivement au fur et à mesure de ses besoins, limitant par ailleurs ses règlements à la seule partie du prix correspondant aux clicks déclarés, et a ignoré la partie correspondant aux minimums garantis.

Elle conteste le changement de co-contractant invoqué par l'appelante en suite de sa lettre de résiliation, faisant valoir qu'elle a seulement changé de dénomination, les sociétés Konica Minolta Photo Imaging France devenue RKM SAS, puis RKM solutions SAS et enfin DNP Photo Imaging Europe, ayant le même numéro de registre du commerce et des sociétés (RCS 312 273 550). Elle précise qu'elle a mis en oeuvre les mesures nécessaires pour que les prestations qu'elle avait promises puissent toujours être fournies, aucune disposition du contrat n'interdisant la mise en place d'un dispositif de sous-traitance avec la société RKM Solutions (RCS 490 222 742) auquel l'appelante ne s'est pas opposée et que c'est dans le cadre de cette sous-traitance que les services prévus au contrat ont ainsi pu continuer à être fournis au quotidien, pour son compte et dans des conditions strictement conformes au contrat. Elle relève que les factures lui ont été payées directement par la société GDT.

Elle soutient alors que la société GDT est débitrice à son égard d'une somme de 9.563.105€ ventilée comme suit :

- 309.186 € au titre des écarts d'inventaire convenus aux termes de l'article 4.3 du contrat;

- 5.963.078 € au titre des minimums garantis selon les termes de l'article 6.2 du contrat ;

- 1.031.826,86 € au titre du stockage du matériel, au fur et à mesure de la fermeture des magasins jusqu'au 31 août 2008 ;

- 39.948,88 € au titre des frais de tirage et de la maintenance ;

- 626.700 € au titre du solde des loyers impayés ;

- 39.059 € TTC au titre des frais de démontage qu'elle a assumés.

La société DNP sollicite la condamnation de la société GDT à lui payer des intérêts au taux légal sur ces sommes à compter du 9 février 2009, date de la sommation.

Elle réplique à l'argumentation de l'appelante qui sollicite l'adaptation du prix du contrat au nombre de machines effectivement utilisé après la restitution progressive unilatéralement décidée, que le prix consenti tenait compte du parc important mis à sa disposition et ne peut en conséquence être modulé.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux dernières conclusions signifiées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

- Sur la recevabilité des demandes de la société DNP

Selon l'article 122 du code de procédure civile, 'Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit à agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.

La société GDT reproche aux premiers juges de ne pas avoir examiné les fins de non-recevoir fondées sur l'autorité de la chose jugée et la contradiction des prétentions de la société DNP qu'elle avait pourtant soulevées et que les premiers juges ont relevé d'office, sans appeler les observations des parties, un moyen tiré des dispositions de l'article 12 du contrat en cause pour considérer l'action de la société DNP recevable.

Il apparaît de éléments fournis que les premiers juges étaient bien saisis des fins de non-recevoir suscitées et qu'ils ont motivé la recevabilité de l'action de la société DNP sur le fondement des dispositions de l'article 12-5 du contrat selon lesquelles 'la composition de l'actionnariat des parties n'est pas la cause de leur engagement aux présentes. En conséquence la modification de cette composition n'est pas un motif valable de résiliation du présent contrat'.

Si cette motivation n'apparaît pas répondre directement aux fins de non-recevoir fondées sur l'autorité de la chose jugée et le principe de l'estoppel, aucun élément ne vient confirmer que la question de la composition de l'actionnariat de la société Konica n'était pas dans le débat ce que conteste l'intimée.

S'il convient en outre de relever que le tribunal n'a pas tranché dans son dispositif ces fins de non-recevoir, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, tous les points du litige soumis au tribunal sont déférés à la connaissance de la cour à laquelle il revient de statuer à nouveau.

- Sur l'autorité de la chose jugée

L'article 1355 du code civil prévoit que : 'l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité'.

Selon les dispositions de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche. Le principal s'entend de l'objet du litige tel que déterminé par l'article 4.

Il ressort des déclarations des parties et des éléments communiqués qu'en suite de l'ouverture de la procédure collective de la société GDT par jugement du tribunal de commerce de Nancy en date du 2 novembre 2005, le contrat du 19 avril 2004 s'est poursuivi pendant la période d'observation et qu'à la suite de l'annonce le 27 janvier 2006 par la société Konica de son retrait de l'activité d'imagerie photographique, l'administrateur judiciaire la société GDT a par lettre du 24 avril 2006, mis fin audit contrat avec effet à la fin de la période d'observation, soit le 25 avril 2006. Il apparaît également que la société DNP contestant la pertinence des motifs de cette résiliation, a alors déclaré une créance de 11.004.420 € au titre du solde des redevances restant dues jusqu'au 31 août 2008, date de la fin du contrat, une créance de dommages et intérêts déclarée pour 5.000.000 € et une créance de 1.144.767,48 € HT représentant les créances impayées au cours de la période d'observation.

Par ordonnances du 10 décembre 2007, le juge commissaire saisi d'une contestation de ces créances, les a rejetées aux motifs, pour les deux premières, que la rupture contractuelle est fondée sur une faute de la société DNP et ne peut être assimilée à une demande de résiliation de contrat en cours, qu'il n'y a dès lors pas lieu à indemnité de résiliation, ni à créance de dommages et intérêt et, pour la troisième, au motif qu'il ne s'agit pas d'une créance née antérieurement à l'ouverture de la procédure collective. La cour d'appel de Nancy saisie d'appels de deux de ces ordonnances, dans deux arrêts en date du 17 juin 2009 concernant le rejet des créances de 11.004.420 € au titre du solde des redevances restant dues jusqu'au 31 août 2008, et de 5.000.000 € au titre de dommages et intérêts, après avoir relevé que la société DNP renonçait à l'admission de ces créances, a déclaré irrecevables comme nouvelles les demandes de celle-ci tendant à voir condamner la société GDT au paiement de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat sur le fondement des dispositions de l'article L.621-32 du code de commerce, et a confirmé les ordonnances déférées.

Il s'infère de ce qui précède, que le litige porté devant le juge commissaire puis devant la cour d'appel de Nancy portait sur l'admission des créances déclarées par la société DNP au passif de la procédure collective de la société GDT sur le fondement de l'article L.621-28 du code de commerce dans sa version applicable à ladite procédure et concernant la résiliation du contrat du 19 avril 2004.

S'il est exact, ce que ne conteste d'ailleurs pas la société DNP, que les indemnités et pénalités subséquentes à la résiliation d'un contrat régulièrement poursuivi sont soumises à déclaration au passif de la procédure collective, comme les créances antérieures au jugement d'ouverture, le litige dont est saisi la cour sur appel du jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 28 novembre 2017 concerne non pas l'allocation de dommages et intérêts en raison de la rupture fautive ou anticipée du contrat mais le paiement des sommes que la société DNP estime lui être dues par la société GDT en raison de la continuation du contrat du 19 avril 2004 postérieurement à sa lettre de résiliation du 24 avril 2006, ce en application notamment des dispositions des articles 4.3 (consommables) et 6.2 (partie variable du prix et minimums garantis) du contrat.

En conséquence, ni les ordonnances du juge commissaire en date du 10 décembre 2007, ni les arrêts confirmatifs de la cour d'appel de Nancy du 17 juin 2009 n'ont tranché l'objet du litige soumis à la cour.

La fin de non-recevoir fondée sur l'autorité de la chose jugée est rejetée.

- Sur la contradiction des prétentions de la société DNP

Le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui suppose que les prétentions de la partie à laquelle la fin de non-recevoir est opposée induisent l'adversaire en erreur sur les intentions de son auteur.

La seule circonstance qu'une partie se contredise au détriment d'autrui n'emporte pas nécessairement fin de non-recevoir, en particulier lorsque les actions engagées ne sont ni de même nature, ni fondées sur les mêmes conventions et n'opposent pas les mêmes parties.

La société GDT reproche à la société DNP de n'avoir de cesse de modifier son argumentaire au gré des procédures engagées à son encontre, contestant d'abord la légitimité de la résiliation du contrat, puis faisant valoir que le contrat se serait en réalité poursuivi aux mêmes termes et conditions et que la résiliation n'aurait pas pris effet.

Néanmoins, ainsi que le fait valoir la société DNP, en déclarant d'une part au passif de la procédure collective des créances liées aux indemnités et pénalités subséquentes à la résiliation d'un contrat régulièrement poursuivi, puis en sollicitant le paiement des services qu'elle considère lui être dus en raison de la continuation du contrat par la société GDT postérieurement à la résiliation, il ne peut être considéré qu'elle s'est contredite au détriment de la société GDT qui n'a pu se méprendre sur ses intentions, les actions n'étant pas de même nature.

La fin de non-recevoir fondée sur le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui est rejetée.

- Sur le contrat du 19 avril 2004

Le contrat du 19 avril 2004 conclu entre les sociétés Photo Station, devenue GDT, et Konica Minolta Photo Imaging France, devenue DNP, avait pour objet la mise à disposition de la société Photo Station par la société Konica Minolta de 190 unités de matériels (minilabs), la maintenance et l'assistance technique du matériel et la fourniture des consommables. Ce contrat était conclu pour une durée de 4 années et expirait le 31 août 2008 sauf si les parties parvenaient à un accord sur la poursuite éventuelle de leur collaboration.

Par lettre du 27 janvier 2006, la société Konica Minolta Photo Imaging France (devenue DNP) annonce à la société Photo Station (devenue GDT), comme à ses autres clients, le retrait du groupe de l'activité de vente d'appareils photo et des ses activités d'imagerie photographique en précisant que 'cette interruption de nos activités ci-dessus s'effectue dans le respect des usages et en prenant en compte les intérêts de chacun....tant s'agissant des appareils photos que des autres activités d'imagerie photographique, la cessation annoncée à terme de l'activité vente s'effectuera dans des conditions qui préservent la poursuite de la fourniture des produits et services pendant un délai raisonnable' et que 'nous allons mettre en place les conditions de la poursuite de nos opérations de service pour les minilabs et pour les appareils photos'.

En suite de cette annonce, par lettre du 24 avril 2006, l'administrateur judiciaire de la société Photo Station (GDT) rappelle à la société Konica (NDP) que suite à sa demande il l'a informée par courrier en date du 9 novembre 2005, de sa décision, ès qualités, de maintenir ce contrat 'jusqu'à nouvel ordre' pendant la période d'observation, et que 's'agissant plus spécialement du contrat relatif aux opérations de service pour les 'minilabs', bien que vous ayez indiqué que vous envisagiez de le faire poursuivre, il apparaît d'ores et déjà qu'il ne pourra, à l'avenir, être exécuté par la société Konica Minolta Photo Imaging France SAS elle même. Or, compte tenu de la nature de ce contrat, et notamment des obligations de formation et de mises à jour de la technologie qu'il met à la charge de Konica Minolta Photo Imaging Franco SAS, Photo Station ne saurait se voir imposer un autre cocontractant que la société Konica Minolta Photo Imaging France SAS ... Dans ces conditions, le contrat ne peut être poursuivi et il prendra fin à l'issue de la période d'observation'.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 mai 2006 adressée à la société Konica (DNP), la société Photo Station (GDT) indique que 'conformément à l'article 9 du contrat de fourniture d'une solution de tirages rapides traités sur place au click, et suite à la résiliation dudit contrat par lettre en date du 24 avril dernier, Photo Station a l'obligation de restituer l'intégralité du parc du matériel à [X] [R]', précise qu'elle tient l'ensemble des machines à sa disposition et lui demande de lui faire part de sa décision sur ce point afin de convenir des modalités pratiques.

Selon les dispositions de l'article 9 du contrat du 19 avril 2004, 'quelles que soit les causes de l'expiration ou de la cessation du contrat, Photo Station devra restituer l'intégralité du parc de matériel à Konica Minolta en bon état compte tenu de l'usure normale. [X] [R] assumera les frais consécutifs au démontage ainsi qu'au rapatriement dudit matériel'.

Le 24 mai 2006, la société Konica Minolta répond en mentionnant qu'elle est en désaccord avec le modalités de résiliation du contrat par la société GDT, précisant 'le fait est que l'exécution du contrat se poursuit au quotidien, et que nous avons même accepté les demandes de développement complémentaire de logiciel qui nous ont été faites' et demande à son partenaire de se fixer rapidement sur les propositions opérationnelles quant à l'enlèvement des machines.

Les minilabs ont été restitués progressivement à la société DNP ainsi qu'elle le reconnaît dans ses écritures et qu'en témoignent l'acceptation par la société GDT des devis de la société DNP concernant le démontage, l'enlèvement et le stockage de minilabs, le 30 mai 2006 pour les sites de [Localité 11], [Localité 6], [Localité 9] Rome 1,[Localité 12] Alsace, [Localité 8], [Localité 7] et [Localité 4], le 31 juillet 2006 pour le site de [Localité 13], le 21 août 2006 pour le site d'[Localité 5], le 26 septembre 2006 pour le site d' [Localité 3] et le 3 octobre 2006 pour le site de [Localité 10].

Cette restitution a été effectuée selon la société GDT entre mai 2006 et février 2009.

Il ressort de ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la société DNP, la société GDT n'a pas poursuivi l'exécution du contrat du 19 avril 2004 en continuant d'exploiter un parc disponible de minilabs qu'elle a réduit progressivement sur trois ans, en en sollicitant la maintenance, et en continuant d'acquérir auprès de la société DNP les consommables nécessaires à cette exploitation.

La société GDT a en effet par lettre du 24 avril 2006 résilié le contrat du 19 avril 2004 en mentionnant clairement qu'elle refusait tout autre cocontractant que la société Konica pour poursuivre l'exécution dudit contrat et a offert de restituer les minilabs dès la résiliation de celui-ci. Si cette restitution s'est opérée sur trois années, elle s'est déroulée en accord avec son ex cocontractant qui ne démontre nullement avoir exigé la restitution immédiate du matériel en suite de la résiliation du contrat.

Or, selon les écritures de la société DNP, celle-ci a fait 'constituer dès le mois de mai une structure ad-hoc susceptible de l'aider à répondre aux besoins de ses clients : la société RKM Solutions SAS (RCS 490 222 742)'. Cette constitution d'une personne morale nouvelle témoigne de l'arrêt par la société Konica Minolta Photo Imaging France des prestations de maintenance et de fourniture de consommables qu'elle offrait à la société Photo Station devenue GDT dans le cadre du contrat du 19 avril 2004.

Cette société RKM Solutions SAS immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 23 mai 2006 sous le numéro 490 222 742 et ayant notamment pour objet 'la prestation de tous services, notamment tous services de maintenance de matériels et de solutions liés en particulier à l'industrie photographique et à la téléphonie' est indépendante de la société Konica Minolta Photo Imaging France.

La circonstance que la société RKM Solutions SAS (490 222 742) a fait l'objet, comme la société Konica Minolta Photo Imaging France devenue entre temps RKM, d'un rachat total de son capital et droits de vote le 19 février 2017 par la société RH Holding, puis par la société RKM SAS, et a été ensuite absorbée le 22 février 2017 dans le cadre d'une transmission universelle du patrimoine (TUP) par la société RKM dont la dénomination sociale a alors été modifiée en RKM Solutions SAS devenue DNP Photo Imaging Europe en suite de l'entrée au capital de RH Holding de la société japonaise Dai Nippon Printing, est en l'espèce inopérante.

Ainsi que le fait valoir la société GDT, celle-ci a noué une nouvelle relation commerciale avec la société RKM Solutions SAS, personne morale distincte de la société Konica Minolta Photo Imaging France, à compter du mois de mai 2006 s'agissant notamment de la fourniture des consommables et de la maintenance du matériel, cette relation nouvelle qui s'est poursuivie au-delà de la date de fin du contrat à durée déterminée prévue le 31 août 2008 ainsi que le reconnaît la société DNP dans la sommation délivrée le 9 février 2009, ne pouvant être considérée comme une continuation du contrat du 19 avril 2004 résilié à compter du 25 avril 2006 par la société GDT et dont le transfert à un tiers a été expressément refusé, la société DNP ne pouvant utilement soutenir qu'aucune disposition du contrat n'interdisait la mise en place d'un dispositif de sous-traitance auquel la société GDT ne se serait pas opposée.

A cet égard, l'attestation de Mme [F] [P] établie le 29 mai 2018 dont se prévaut l'intimée, par laquelle celle-ci témoigne qu'en qualité de responsable du groupe opérations (gestion services clients achats et logistiques) en 2008, sans toutefois préciser le nom de son employeur, elle a été en charge du client Photo Station (GDT) et des relations suivies avec ce dernier s'agissant des fournitures de consommables et de maintenance des matériels, si elle prouve que la société GDT a continué d'exploiter des minilabs, à s'approvisionner en consommables et à recourir aux services de maintenance, celle-ci s'acquittant des factures en lien avec ces services, ne démontre nullement la poursuite du contrat du 19 avril 2006.

Il convient d'ailleurs de relever avec la société GDT que celle-ci n'a eu de cesse de contester les factures adressées par la société Konica Minolta puis la société DNP (courriers des 8 décembre 2006, 4 octobre 2007, 30 juin et 17 décembre 2008, 7 janvier, 2 et 20 juillet 2009) rappelant que le contrat du 19 avril 2004 était résilié et que les factures ayant notamment trait à des régularisations de 'clicks', des forfaits 'stockages' ou 'inventaires' n'étaient pas fondées.

Aussi, la réunion dans une même personne morale le 22 février 2007, la société RKM Solutions (RCS 312 273 550), d'une entité partie à un contrat résilié, la société Konica Minolta Photo Imaging France devenue RKM (RCS 312 273 550), et d'une société tiers à ce contrat, la société RKM Solutions SAS (RCS 490 223 742), dont les dispositions de celui-ci ne lui ont pas été transférées, n'est pas constitutive d'une poursuite de ce contrat.

La société DNP ne peut donc tirer aucune conséquence quant à la poursuite du contrat du 19 avril 2004 des termes de la lettre du 4 octobre 2007 de la société GDT adressée à la société RKM Solutions issue de la TUP et devenue DNP pour contester la facturation des minimum garantis, selon lesquels : 'le contrat nous liant a été résilié en date du 24 avril 2006'. Il en va de même du règlement des factures et de l'achat de 'clicks' à la société DNP par la société GDT, la société DNP ayant repris l'activité de la société RKM Solutions (RCS 490 223 742) avec laquelle la société GDT a noué de nouvelles relations suite à la résiliation du contrat, ces relations se matérialisant par la fourniture de services et le paiement des factures y afférent comprenant une partie fixe constituée par le loyer de 300 € par machine conservée et une partie variable constituée du coût par clicks.

Le contrat du 19 avril 2004 étant résilié, la société DNP n'est pas fondée à solliciter l'application des dispositions de celui-ci pour réclamer pour une période postérieure à la résiliation, le paiement de minimums garantis prévus à l'article 6.2 du contrat aux termes duquel 'dans l'hypothèse où le volume total annuel de clicks serait inférieur à 110.000 clicks', la partie variable sera calculée selon des formules ensuite détaillées, en invoquant l'équilibre économique de la relation basé sur la mise à disposition de 190 minilabs, alors que du fait de la résiliation du contrat la société GDT restituait les minilabs, étant relevé que la société DNP ne conteste pas que la société GDT s'est bien acquittée des factures qui correspondaient à l'utilisation réelle des matériels.

La société DNP ne peut valablement invoquer les dispositions de l'article 8-2 du contrat relatives aux indemnités dues en cas de résiliation du contrat par la société GDT (Photo Station) pendant les trois premières années contractuelles, s'agissant d'indemnités et pénalités subséquentes à la résiliation d'un contrat régulièrement poursuivi qui sont soumises à déclaration au passif de la procédure collective, créances qui ont été, ainsi qu'il a été ci-avant relevé, rejetées par ordonnances du juge commissaire confirmées par la cour d'appel de Nancy.

Il en est de même des loyers de 300 € par mois et par machine facturés pour des machines restituées, le contrat étant résilié, la société DNP ne pouvant valablement soutenir que la société GDT s'est engagée à maintenir le parc de minilabs jusqu'au 31 août 2008.

S'agissant de la somme de 1.031.826,86 € HT réclamée au titre des coûts de stockage, la société DNP fait inutilement valoir qu'elle a été contrainte de stocker le matériel restitué jusqu'à la fin du contrat, cette restitution n'étant que la conséquence de la résiliation de la convention par l'administrateur judiciaire de la société GDT (Photo Station). Cette demande sera également rejetée.

La société DNP sollicite également la somme de 309.186 € HT au titre des écarts d'inventaire convenus aux termes de l'article 4.3 de la convention. Néanmoins, le contrat étant résilié ces dispositions ne sont plus applicables et les factures adressées au titre des écarts d'inventaire après la notification de la résiliation ont été contestées par la société GDT ainsi qu'en témoigne le courrier adressé le 8 décembre 2006 à la société DNP. Cette demande ne sera pas accueillie.

La société DNP réclame également le paiement des frais de démontage des matériels à la suite de la restitution des minilabs par la société GDT. Il ressort des éléments fournis aux débats que la société GDT a accepté de payer à la suite de la résiliation du contrat les factures d'enlèvement et de démontage des minilabs restitués notamment entre le 30 mai et le 3 octobre 2006. Il convient en conséquence de considérer que la société GDT a accepté de prendre en charge ces frais en exécution des nouvelles conditions acceptées par elle, et ne peut à son tour invoquer les dispositions du contrat du 19 avril 2004 pour considérer que ces frais sont à la charge de la société DNP.

De même, les frais de tirages et de maintenance réclamés par la société DNP pour la somme de 39.948,88 € et qui ne sont pas contestés par la société GDT sont dus au titre de la nouvelle convention.

La société GDT sera en conséquence condamnée à payer à la société DNP les sommes de 34.167,77 € HT € au titre des frais de démontage des matériels et de 39.948,88 € HT au titre des frais de tirages et de maintenance avec intérêt au taux légal à compter du 9 février 2009, date de délivrance de la sommation de payer.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société DNP

Au vu de ce qui précède, la plupart des sommes sollicitées par la société DNP ne sont pas justifiées. La demande de cette dernière d'allocation de la somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts en raison de la mauvaise volonté de la société GDT à payer les sommes réclamées sera rejetée.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société GDT pour procédure abusive

L'exercice d'une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à des dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d'erreur grossière équipollente au dol ou de légèreté blâmable.

Les demandes de la société DNP formées contre la société GDT ayant partiellement prospéré, cette dernière est déboutée de ses prétentions au titre de la procédure abusive ce d'autant qu'elle ne rapporte pas la preuve d'un faute de la société DNP dont l'évolution des demandes et des moyens ne témoigne que de l'exercice de ses droits et ne caractérise par sa mauvaise foi.

- Sur les autres demandes

Partie perdante, la société DNP sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et à payer à la société GDT en application de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité qui sera, en équité, fixée à la somme de 20.000 €.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Rejette les fins de non-recevoir soulevées par la société Générale de Téléphone,

Condamne la société Générale de Téléphone à payer à la société DNP Photo Imaging Europe les sommes de de 34.167,77 € HT au titre des frais de démontage des matériels et de 39.948,88 € HT au titre des frais de tirages et de maintenance, avec intérêt au taux légal à compter du 9 février 2009, date de délivrance de la sommation de payer ;

Déboute la société DNP Photo Imaging Europe du surplus de ses demandes ;

Déboute la société Générale de Téléphone de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société DNP Photo Imaging Europe à payer à la société Générale de Téléphone la somme de 20.000 € ;

Condamne la société DNP Photo Imaging Europe aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant recouvrés selon les modalités prévues à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 17/22193
Date de la décision : 06/12/2019

Références :

Cour d'appel de Paris J2, arrêt n°17/22193 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-06;17.22193 ?
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