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06/12/2019 | FRANCE | N°16/13463

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 06 décembre 2019, 16/13463


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 06 Décembre 2019



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/13463 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZ3HB



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Mars 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CRETEIL RG n° 13/00780





APPELANTE

CPAM du VAL DE MARNE

Division du contentieux

[Adresse

1]

[Localité 1]

représenté par Mme [W] en vertu d'un pouvoir général





INTIMEE

Madame [G] [Q]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Valérie SCHNEIDER MACOU, avocat au barreau de ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 06 Décembre 2019

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/13463 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZ3HB

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Mars 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de CRETEIL RG n° 13/00780

APPELANTE

CPAM du VAL DE MARNE

Division du contentieux

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Mme [W] en vertu d'un pouvoir général

INTIMEE

Madame [G] [Q]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Valérie SCHNEIDER MACOU, avocat au barreau de PARIS, toque : G0040

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 3]

[Localité 3]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Octobre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Michel CHALACHIN, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Michel CHALACHIN, président de chambre

Madame Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, conseillère

Monsieur Lionel LAFON, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Venusia DAMPIERRE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par monsieur Michel CHALACHIN, président de chambre et par Mme Venusia DAMPIERRE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.

Il suffit de rappeler que Mme [G] [Q] était employée en qualité de responsable du personnel pour le compte de la [Adresse 4].

Le 3 novembre 2011, elle a complété une déclaration d'accident du travail en ces termes : "Elle s'est sentie mal, a craqué dans nos locaux, suite à une accumulation d'évictions dû à des personnes de sa Direction (non conviée le 3/11 à une réunion dont elle gère le dossier, suivi d'échanges de mail retraçant l'altercation)", les lésions étant ainsi décrites : "Malaise, pleurs, douleurs abdominales, tremblements...".

Le certificat médical initial en date du 4 novembre 2011 faisait état d'un "malaise avec douleurs abdominales survenu à la suite d'un conflit professionnel sur les lieux du travail".

Après avoir diligenté une enquête, la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne (ci - après la caisse) a notifié à Mme [Q] la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident.

Le 18 janvier 2012, les lésions ont été considérées comme guéries.

Le 29 mars 2012, le docteur [X], médecin traitant de Mme [Q], a rédigé un certificat médical de rechute pour "stress et dépression réactionnelle à un conflit professionnel".

La caisse, au vu de l'avis de son médecin conseil, a refusé la prise en charge de cette rechute au titre de la législation professionnelle.

Mme [Q] a contesté cette décision d'ordre médical et sollicité une expertise sur le fondement de l'article L 141-1 du code de la sécurité sociale.

L'expert désigné, le docteur [S], a confirmé l'avis initial du médecin conseil, considérant qu'il n'existait pas de lien de causalité entre l'accident du travail et les lésions invoquées dans le certificat médical de rechute.

Mme [Q] a contesté ce refus de prise en charge devant la commission de recours amiable, laquelle, par décision du 21 mai 2013, a rejeté son recours au motif que l'avis de l'expert était net, précis et sans équivoque.

Mme [Q] a dès lors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil qui, par jugement du 12 février 2014, a ordonné une mesure d'expertise médicale confiée au docteur [V].

Celui-ci a déposé son rapport le 22 octobre 2015.

Par jugement du 17 mars 2016, le tribunal a homologué ce rapport, dit que les troubles et lésions invoquées le 29 mars 2012 constituaient une rechute de l'accident du travail du 3 novembre 2011, débouté la caisse de ses demandes et condamné celle-ci au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La caisse a interjeté appel de ce jugement.

Elle fait déposer et soutenir oralement à l'audience par son représentant des conclusions invitant la cour à infirmer le jugement déféré, écarter le rapport d'expertise du docteur [V], dire que c'est à bon droit qu'elle a refusé la prise en charge des troubles et lésions invoqués le 29 mars 2012 à titre de rechute de l'accident du travail, à titre subsidiaire ordonner la mise en oeuvre d'une contre-expertise médicale, à titre infiniment subsidiaire débouter Mme [Q] de sa demande en qualification d'accident du travail autonome pour les lésions décrites le 29 mars 2012, en tout état de cause, limiter le montant des frais d'expertise du docteur [V] au barème fixé par l'arrêté du 29 mai 2015, et débouter Mme [Q] de sa demande de dommages et intérêts et de celle fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [Q] fait déposer et soutenir oralement à l'audience par son conseil des conclusions invitant la cour à :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré et condamner la caisse au paiement de la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- à titre subsidiaire, débouter la caisse de sa demande de contre-expertise,

- à titre infiniment subsidiaire, reconnaître le caractère professionnel de l'accident survenu le 29 mars 2012 et le qualifier d'accident du travail autonome,

- en tout état de cause, confirmer la condamnation de la caisse au paiement de la somme de "2 000 euros" au titre l'article 700 du code de procédure civile "de première instance" et la condamner au paiement de la même somme sur le fondement du même texte, ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions .

MOTIFS

Pour être prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels, la rechute suppose la réunion de deux conditions : l'existence d'une aggravation de la lésion initiale et d'un lien de causalité entre les troubles et lésions invoqués et l'accident initial.

En l'espèce, le certificat médical initial décrivait "un malaise avec douleurs abdominales survenu à la suite d'un conflit professionnel sur les lieux du travail".

Le certificat médical de rechute décrit un "stress et dépression réactionnelle à un conflit professionnel".

Entre ces deux événements, Mme [Q] avait été considérée comme étant guérie le 18 janvier 2012, son médecin ayant constaté une "stabilisation émotionnelle", et elle avait repris son travail.

Le docteur [X], médecin généraliste qui a établi le certificat de rechute du 29 mars 2012, lui a prescrit du Lexomil et du Séroplex à compter de cette date ; le 11 avril 2012, elle a consulté un psychiatre, le docteur [C], qui a confirmé qu'elle présentait "un état de stress aigu qui pourrait être lié à l'environnement professionnel" ; le 29 mai 2012, ce même médecin a certifié qu'elle souffrait de "troubles anxieux et dépressifs ayant nécessité la prescription de psychotropes (antidépresseurs et anxiolytiques) et générant également un épuisement psychique...compatible avec la situation professionnelle décrite" ; le 1er juin 2012, elle a été reçue par le docteur [K], médecin du travail, en visite de pré-reprise, lequel a établi un certificat ainsi rédigé : "En fait, Mme [Q] me semble en situation de mal-être liée me semble-t-il à une surcharge de travail et à des problèmes organisationnels, qui expliquent sa pathologie actuelle".

Au vu de ces éléments, l'expert psychiatre a clairement indiqué dans son rapport que l'évolution de la symptomatologie de Mme [Q] s'inscrivait "dans la continuité de la situation engagée au décours de la procédure d'accident du travail du 3 novembre 2011".

Il a ainsi caractérisé l'aggravation des troubles psychiques de Mme [Q] qui, alors qu'elle n'avait ressenti qu'un simple malaise avec douleurs abdominales en novembre 2011, avait vécu un véritable stress en mars 2012, nécessitant la prescription d'un anxiolytique et d'un antidépresseur et la mise en place d'un suivi psychiatrique ; c'est donc à tort que la caisse soutient que l'expert n'aurait pas fait état d'une aggravation de la lésion initiale.

Le lien de causalité entre les troubles invoqués en mars 2012 et l'accident du travail du 3 novembre 2011 est caractérisé par le fait que, le 26 mars 2012, Mme [Q] a reçu un courriel de M. [Y], son supérieur hiérarchique, l'informant du recours exercé par son employeur contre la décision de la caisse de reconnaître le caractère professionnel de l'accident du 3 novembre 2011 ; à ce courriel était joint un mémoire de 14 pages dans lequel l'employeur critiquait ouvertement sa salariée, soutenant que les éléments décrits dans sa déclaration d'accident du travail étaient "confus, exagérés, voire mensongers", qu'elle n'avait subi aucun choc psychologique puisqu'elle avait adressé à son supérieur un courriel "réfléchi, construit, précis", qu'elle avait procédé à une "déclaration mensongère" et qu'elle avait "insidieusement provoqué les événements du 3 novembre 2011".

De tels propos étaient de nature à blesser la salariée et à aggraver les troubles psychiques qu'elle avait commencé à ressentir, dans une moindre mesure, en novembre 2011.

Dès lors, c'est à bon droit que le tribunal, homologuant le rapport d'expertise, a qualifié les troubles et lésions invoqués le 29 mars 2012 de rechute de l'accident du travail du 3 novembre 2011.

Le rapport d'expertise étant parfaitement clair et argumenté, il n'y pas lieu d'ordonner une contre-expertise.

Le jugement entrepris sera donc confirmé.

La caisse n'ayant fait qu'user de son droit d'exercer un recours contre le jugement, la demande indemnitaire formée par Mme [Q] doit être rejetée.

En revanche, il apparaît équitable de confirmer le jugement en ce qu'il a alloué à Mme [Q] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de lui allouer une nouvelle somme de 1 500 euros sur le fondement du même texte au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

La cour n'étant pas saisie d'un appel contre le jugement rectificatif du 15 décembre 2016 ayant condamné la caisse à régler les honoraires du docteur [V] à hauteur de 400 euros, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de la caisse visant à faire appliquer le barème fixé par l'arrêté du 29 mai 2015.

La caisse qui succombe sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne de toutes ses demandes formées devant la cour,

Déboute Mme [Q] de sa demande en paiement de dommages et intérêts,

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de du Val-de-Marne à payer à Mme [Q] la somme supplémentaire de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne aux dépens de la procédure d'appel.

La greffièreLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 16/13463
Date de la décision : 06/12/2019

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°16/13463 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-06;16.13463 ?
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