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04/12/2019 | FRANCE | N°17/06105

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 04 décembre 2019, 17/06105


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRET DU 04 DECEMBRE 2019



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/06105 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3GH3



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Mars 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 13/18273





APPELANT



Monsieur [V] [D]

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Bruno COURTINE, avocat au barreau de PARIS, toque : J094





INTIMÉS



MINISTÈRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI, DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET DU DIALOGUE SOCIAL

[Adre...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRET DU 04 DECEMBRE 2019

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/06105 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3GH3

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Mars 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 13/18273

APPELANT

Monsieur [V] [D]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Bruno COURTINE, avocat au barreau de PARIS, toque : J094

INTIMÉS

MINISTÈRE DU TRAVAIL, DE L'EMPLOI, DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET DU DIALOGUE SOCIAL

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Guillaume CHAMPENOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0294

EPIC L'AGENCE NATIONALE POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES ADULTES venant aux droits de L'AGENCE NATIONALE POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE DES ADULTES

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Florence GUARY de l'ASSOCIATION LEANDRI ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R271

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Octobre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laurence SINQUIN, conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Fabienne ROUGE, président de Chambre

Madame Roselyne NEMOZ-BENILAN, conseillère

Madame Laurence SINQUIN, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Nasra SAMSOUDINE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Mme Fabienne ROUGE, présidente de chambre et par Mme Anouk ESTAVIANNE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [V] [D] a été engagé par l'Agence pour la Formation Professionnelle des Adultes (ci-après désignée l'ANFPA) en qualité de chargé de mission à compter du 10 juin 2002.

Par une convention du 5 août 2002, il est mis à disposition du Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social et plus spécifiquement à la Direction de l'animation et de la recherche, des études et des statistiques du ministère. Par arrêté du 31 mai 2005, il est nommé Chef du département Synthèses de la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle à compter du 3 janvier 2005. Le 23 avril 2008, il va accéder aux fonctions de président du Comité de l'emploi de l'Union européenne et sera nommé par décision du Délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle le 1er juin 2009, comme Conseiller auprès du Délégué Général.

Monsieur [D] estime qu'à partir de fin 2012 son poste de conseiller va être vidé de sa substance suite à l'arrivée de la nouvelle déléguée générale et le 23 décembre 2013, il va saisir le conseil des prud'hommes de Paris de plusieurs demandes salariales et indemnitaires et invoquer une situation de harcèlement moral.

Il demeure toujours en exercice auprès du ministère.

Par jugement du 7 mars 2017, le conseil de prud'hommes de Paris après avoir ordonné la jonction des deux dossiers engagés par Monsieur [D], a joint l'incident d'incompétence au fond, a déclaré les demandes au titre du harcèlement irrecevables à l'encontre de l'ANFPA et du Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social invitant Monsieur [D] à mieux se pourvoir. Il a débouté le salarié de l'intégralité de ses demandes, l'ANFPA de sa demande reconventionnelle fondée sur l'article 32 ' 1 du code de procédure civile et celles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Il a enfin condamné Monsieur [D] aux dépens.

Monsieur [D] a relevé appel de cette décision.

Dans le cadre de la procédure d'appel, le conseiller de la mise en état statuant par voie d'ordonnance sur incident a rendu une décision le 10 avril 2018. Il a déclaré recevable l'appel incident de l'ANFPA tendant à la mise en cause du ministère aux fins de déclaration de jugement commun, a déclaré recevable la constitution d'avocat du Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social et a condamné Monsieur [D] aux dépens de l'incident.

Par ses dernières conclusions récapitulatives auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [D] demande à la Cour l'infirmation du jugement et l'irrecevabilité des prétentions du Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social sauf celles tendant à la mise hors de cause à la suite de l'intervention forcée de l'ANFPA et celle ayant pour objet de témoigner à décharge au profit de l'ANFPA. Il réclame la condamnation de l'ANFPA au paiement de :

' 366'501 euros bruts de rappel de salaire du 1er janvier 2009 au 22 octobre 2019 et les congés payés afférents,

' 248'269 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du harcèlement moral et de la discrimination,

' 15'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les intérêts et les dépens.

Il sollicite en outre la fixation de son salaire à la somme de 181104 euros à partir du 1er janvier 2019 et en conséquence, le versement d'un salaire mensuel de 4722 euros par mois outre les congés payés pendant la période entre la date de l'audience et la date du jugement à intervenir.

Il demande enfin à être classé au niveau 16 et à voir régulariser l'ensemble de ses bulletins de salaire sous astreinte.

Par ses dernières conclusions récapitulatives auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, l'ANFPA sollicite la confirmation du jugement, le rejet de l'ensemble des prétentions de Monsieur [D] et sa condamnation à 20'000 euros en application des dispositions des articles 32 ' 1 du code de procédure civile et 1242 du Code civil et 15'000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens. Elle demande également que l'arrêt à intervenir soit déclaré commun au Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social.

Par ses dernières conclusions récapitulatives auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, le Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social soulève in limine litis l'incompétence de la Cour d'appel de Paris pour connaître des demandes de Monsieur [D] fondées sur sa responsabilité et conclut en conséquence à la confirmation du jugement qui a déclaré les demandes du salarié irrecevables à son encontre et l'a invité à mieux se pourvoir au profit du tribunal administratif de Paris compétent pour apprécier la faute de l'administration. À titre subsidiaire, il demande que les allégations de harcèlement moral soient déclarées mal fondées et les demandes indemnitaires conséquentes rejetées. En tout état de cause, il réclame la condamnation de Monsieur [D] à lui payer 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

MOTIFS

Sur la mise en cause du Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social

Il convient de constater que Monsieur [D], appelant, ne forme aucune demande à l'encontre du Ministère.

Le Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social n'est dans la cause que sur le fondement de l'article 331 du code de procédure civile afin que l'arrêt lui soit rendu commun.

La demande formée in limine litis par le ministère tenant à l'incompétence de la Cour au profit du tribunal administratif est donc sans objet à ce stade du contentieux.

Sur les demandes de revalorisations salariales et de changement de classification.

En application du principe 'à travail égal, salaire égal', énoncé par les articles L. 2261-22-II-4, L. 2771-1-8 et L. 3221-2 du code du travail, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés pour autant que ceux-ci sont placés dans une situation identique.

Il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs et matériellement vérifiables justifiant cette différence.

La Cour se doit au vu de ces éléments de procéder à une analyse comparée de la situation, des fonctions et des responsabilités de l'intéressé avec celles des autres salariés mis à disposition auxquels le salarié se compare et rechercher si les fonctions respectivement exercées par les uns et les autres étaient de valeur égale.

En l'espèce, Monsieur [D] qui déclare avoir été en 2008, un des 10 salariés les mieux payés de l'ANFPA se plaint de n'avoir pas vu sa rémunération et sa carrière évoluée de la même manière.

Il prétend que les demandes adressées par le ministère à l'ANFPA entre le 2010 et 2012 de le faire progresser et de majorer son salaire n'ont jamais été entendues alors que jusqu'à cette date les recommandations du ministère avaient toujours été suivies.

Il estime que ses compétences professionnelles, ses fonctions et son évolution dans plusieurs postes prestigieux le place à un niveau supérieur à la classe 15 ; qu'à ce titre et en tant que membre siégeant au comité de direction de la délégation générale, il aurait du bénéficier d'une classification 16/17 et d'une majoration de son salaire à 181 104 euros pour 2019 et conforme à l'évolution repérée entre 2008 et 2015 sur les salaires, soit 4,4 % par an et à partir de 2016 de 2,8%.

Il convient de rappeler que les dispositions applicables en matière de mise à disposition résultent d'une convention cadre du 4 juillet 1996, d'une convention relative à la mise à disposition d'agent de l'AFPA auprès des services du Ministère du travail du 19 juillet 2013, du décret numéro 85 ' 986 du 16 septembre 1985 modifié par décret du 26 octobre 2007. Dans le cadre des débats, il est produit par les différentes parties les conventions, avenants, contrat de travail et notes qui témoignent de l'évolution de la situation professionnelle de Monsieur [D]. Les bulletins de salaire et les schémas comparatifs qui sont communiqués permettent aussi à la Cour d'analyser la demande.

Il résulte clairement de cette analyse qu'une première difficulté se pose dans le cadre du débat sur l'égalité de traitement engagé par le salarié puisqu'aucune des parties ne parvient à s'entendre sur la catégorie de salariés à laquelle doit être comparée la situation de Monsieur [D].

Ce dernier entend poser le débat sur la catégorie des 10 meilleurs salaires des personnes au sein de l'ANFPA prétextant qu'en 2008, il faisait partie des 10 plus hauts salaires de l'association.

Toutefois, aucun élément ne permet de vérifier cette allégation, l'identité de situation de ces personnes dont on ignore s'ils sont salariés, la nature des fonctions qu'elles occupent, leur niveau de hiérarchie et leur statut. La seule référence salariale ne saurait suffire à caractériser une catégorie à laquelle peut se comparer un salarié dans le débat sur l'égalité de traitement.

Dans le cadre des conventions relatives au statut de mise à disposition, il existe une procédure de remboursement des éléments de salaire entre l'ANFPA et l'administration. La catégorie à laquelle doit être comparée la situation de Monsieur [D] doit donc nécessairement intégrer le statut de mise à disposition. Par ailleurs étant donné la diversité de fonctions exercés par ces agents mis à disposition, il y a lieu d'opérer une comparaison avec des salariés de même niveau statutaire que Monsieur [D]. C'est donc à juste titre que l'ANFPA retient comme catégorie de comparaison les seuls salariés de classe 15, bénéficiant du statut de mise à disposition.

Dans le panel de cette catégorie, il apparaît que Monsieur [D] dispose du plus haut salaire avec une rémunération supérieure de 13,49 % à 22,85 % de plus que la moyenne des rémunérations de ses collègues. Au sein de la DGEFP , il est également parmi les rémunérations les plus élevées puisqu'il atteint à 18 euros près le salaire moyen d'un administrateur civil Hors Classe.

Il y a lieu de relever que les différents textes applicables aux agents mis à disposition précités prévoient une garantie de maintien de salaire au profit des agents mis à disposition et l'application à leur profit des dispositions conventionnelles collectives applicables aux salariés de l'AFPA.

Monsieur [D] fait valoir que son salaire a été gelé à compter de 2008. Sans le contester l'ANFPA démontre que Monsieur [D] a eu auparavant une progression de salaire exceptionnelle. En effet, au vu des pièces produites il n'est pas contestable qu'entre 2002, date à laquelle il disposait d'un revenu de 4878 euros et 2008, date à laquelle il a perçu une rémunération de 9569 euros, il a eu une progression du salaire de base hors primes (AIB) de 47,17 %.

L'ANFPA explique ce gel en démontrant qu'au niveau collectif, les négociations annuelles des salaires entre 2008 et 2017 n'ont pas permis de mettre en place ou de parvenir à un accord sur l'augmentation de l'AIB compte-tenu des difficultés qu'a connues l'agence.

Pour les autres éléments de salaire qui constituent des avantages salariaux à caractère discrétionnaire, Monsieur [D] ne démontre pas avoir été lésé sur ce point par rapport à d'autres salariés.

Au niveau individuel, il est justifié que Monsieur [D] a perçu deux primes de résultat de 450 et 300 euros en 2008 et 2011 et une prime d'objectif de 1350 euros en 2011. En 2008, il a bénéficié d'une promotion en classe 15.

S'il est constant que pendant une période, les revendications salariales de Monsieur [D] ont été soutenues par la DGEFP, il prétend sans en justifier que les propositions du ministère étaient toujours suivies auparavant par l'ANFPA et qu'elles s'imposaient à elle. L'ANFPA le conteste. Aucun texte ne permet de valider les allégations de Monsieur [D] à cet égard.

S'agissant de la classification, Monsieur [D] a en 2008 bénéficié d'une augmentation de sa classification de la classe 14 à la classe 15. C'est à tort qu'il entend opérer une comparaison de situation avec les salariés de la classe 16 /17 qu'il revendique. Il y a lieu d'emblée d'écarter les revendications du salarié concernant la classe 17, l'ANFPA justifiant de ce qu'aucun salarié ne bénéficie d'une classification 17.

L'ANFPA transmet la fiche de fonctions correspondant à la classification 15, soit celle de Directeur Régional niveau 2.

Cette fiche de fonctions fait apparaître un niveau de responsabilités, de compétences, de management, de représentation et de prise de décision très élevé et conforme aux fonctions que le salarié a pu exercer en qualité de conseiller auprès du délégué général ou comme chef de département Synthèses ou pendant son mandat électif auprès de l'EMCO.

Au vu de l'ensemble de ces motifs , il convient de rejeter les demandes salariales de Monsieur [D].

Sur le harcèlement moral

L'ANFPA soulève à titre liminaire, l'irrecevabilité de la demande de harcèlement moral à son encontre dans la mesure où en vertu des dispositions des articles L8241-2 et L1251-21 du code du travail et des conventions passées avec le Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social, ce dernier est responsable des conditions d'exécution du travail des agents mis à sa disposition et notamment pour ce qui a trait à la santé et à la sécurité du travail et précise valoir également qu'elle ne dispose pas de moyens pour contraindre l'Etat.

Il convient de noter que dans le cadre du décret numéro 82 ' 453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique, il est prévu que les dispositions des livres I à V de la quatrième partie du code du travail qui régissent l'hygiène la sécurité et la prévention sont directement applicables aux administrations sous réserve de quelques dispositions spécifiques. Ainsi, en application de l'article 2-1 du décret du 28 mai 1982, il appartient au chef de service de la fonction publique de l'État de veiller à la sécurité à la protection des agents placés sous leur autorité et dans la limite de leur attribution et dans le cadre des délégations qui leur sont consenties.

Dans le cadre plus spécifique de la convention de mise à disposition, il existe une relation tripartite entre la structure privée, le salarié et l'administration.

Les relations entre l'ANFPA et Monsieur [D] est un contrat de droit privé où l'ANFPA reste employeur et se trouve en tant que tel soumis aux obligations relevant des dispositions conventionnelles qui régissent le contrat de travail. Le seul fait qu'une autre relation de travail soit instaurée entre le salarié et l'administration qui l'emploie, ne suffit pas à dédouaner l'employeur de ses obligations conventionnelles.

Dans la cadre de la convention relative à la mise à disposition d'agent de l'AFPA auprès des services du Ministère du travail du 19 juillet 2013, il n'existe aucune délégation des obligations en matière de contrôle de surveillance et de prévention de la santé et de la sécurité des salariés.

Cette convention prévoit seulement un suivi des absences, des procédures spécifiques en matière de maladie et accident du travail et indique que le ministère du travail est civilement responsable des agents mis à disposition.

En ce qui concerne les risques psychosociaux rien n'étant précisé et l'employeur comme l'administration se doivent donc de garantir les salariés ou agents sous leur responsabilité des conséquences de ces risques.

Par ces motifs, l'action en matière de harcèlement moral engagée contre l'ANFPA doit être déclarée recevable.

Monsieur [D] sollicite que la Cour déclare irrecevables les conclusions pièces et plaidoiries du Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du

Dialogue social estimant qu'il y a détournement illicite de l'article 331 du code de procédure civile.

Néanmoins, dans la mesure où le Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social est en cause, que les faits invoqués sont susceptibles d'avoir des effets à son égard, il est en droit de s'y défendre sans que ses conclusions et pièces soient déclarées irrecevables. La demande sera rejetée.

Il appartient au salarié qui se prétend victime de harcèlement moral d'établir la matérialité de faits précis et concordants faisant présumer l'existence de ce harcèlement ; celui-ci se définit, selon l'article L 1152-1 du code du travail, par des actes répétés qui ont pour objet ou pour effet, indépendamment de l'intention de leur auteur, une dégradation des conditions de travail du salarié, susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Lorsque les faits sont établis, l'employeur doit démontrer qu'ils s'expliquent par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.Une situation de harcèlement moral se déduit ainsi essentiellement de la constatation d'une dégradation préjudiciable au salarié de ses conditions de travail consécutive à des agissements répétés de l'employeur révélateurs d'un exercice anormal et abusif par celui-ci de ses pouvoirs d'autorité, de direction, de contrôle et de sanction.

Monsieur [D] qui se dit victime de harcèlement moral, décrit à partir de 2013, une situation dans laquelle il s'est retrouvé mis à l'écart avec notamment une exclusion de la nouvelle organisation et du CODIR en octobre 2018, avec des taches de plus en plus réduites, une dévalorisation de sa réputation et de ses compétences à l'égard des tiers de la part de sa hiérarchie et des calomnies, le reproche d'expression d' opinions partisanes s'apparentant à de la discrimination et une tentative de mise à la porte par la fin de sa mise à disposition. Il estime que cette dégradation de ses conditions de travail a obéré son avenir professionnel.

Outre les éléments concernant sa rémunération et son déclassement évoqués plus haut, Monsieur [D] transmet à l'appui de ses allégations plusieurs courriers envoyés à la déléguée générale ou au ministère et notamment les lettres des 28 novembre 2011, 21 décembre 2012, 20 juin 2014, 5 septembre 2014 dans lequel il se plaint clairement d'une situation de harcèlement moral, des documents médicaux et notamment l'arrêt travail du 28 septembre 2014 portant la mention harcèlement au travail avec retentissement psychologique, plusieurs courriels et plus spécifiquement ceux du 4 avril 2013 et du 13 juin 2013 concernant les dossiers transversaux, la note du 12 juin 2013 sur ce point ceux du 2 septembre 2013 concernant l'organigramme, ceux du 7 décembre 2012 et les échanges de décembre 2016 concernant la tentative d'obtention d'un poste à la direction de la fondation ETF soutenu par la ministre et refusé par le comité d'évaluation, ceux de septembre 2015 concernant les échecs de sélection pour intégrer un poste au Bureau international du travail et un contrat à durée indéterminée au Ministère, le message du 13 novembre 2014 dans lequel il conteste la rémunération proposée à ce titre, et la réponse qui lui est faite par le service RH en mars 2015, plusieurs courriers de soutien de la délégation générale par des courriers de mai 2011 décembre 2011 mais 2013 et courriels de mars 2012 et mars 2013 et enfin les comptes-rendus d'entretien annuel d'évaluation signés en août 2012 et mai 2013.

Ces éléments sont contredits par l'ANFPA et la Ministère. L'ANFPA précise au préalable qu'elle n'est pas responsable des conditions d'exécution du contrat de travail au sein du Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social, des choix gouvernementaux et précise que le défaut de promotion ne peut constituer un harcèlement moral.

Le Ministère rappelle que Monsieur [D] n'a aucun droit à bénéficier d'un emploi déterminé et qu'il a l'obligation de se soumettre au règlement interne du Ministère. Le rôle de la DGEFP dans la mise en oeuvre la politique de l'Etat s'imposant au salarié et les propos tenus par la déléguée générale dans son message du 20 juin 2013, n'ont pas de caractère harcelant ou discriminatoire. Le Ministère contestant l'existence d'une situation de harcèlement moral ou d'une discrimination justifie avoir soutenu Monsieur [D] dans ses démarches notamment salariales et d'avancement. Il fait valoir que l'évolution du salarié dans plusieurs postes ou sur différents dossiers dément toute volonté de l'évincer. Il précise enfin qu'avec un statut de salarié de droit privé Monsieur [D] ne pouvait prétendre aux mêmes positionnements que ceux ouverts à la fonction publique d'Etat.

Après analyse de l'ensemble des pièces versées aux débats, il convient de relever un élément fondamental propre à la situation de Monsieur [D] et qui marque nécessairement de son empreinte le débat.

Monsieur [D] a occupé des fonctions à haute responsabilité notamment partir de 2008, en qualité de chef de département puis en tant qu'élu au Comité de l'emploi de l'Union européenne et membre du Conseil des ministres européens de l'emploi et des affaires sociales et enfin en tant que conseiller du délégué général. Dans ses fonctions où il disposait d'une grande autonomie de décision, il demeurait toutefois chargé de la mise en 'uvre de la politique de l'Etat notamment par délégation. Cette politique comme ses acteurs demeurent par définition mouvants et cette contrainte s'impose à l'ensemble des agents de l'Etat quelque soit leur statut. Outre la distinction du grade et de l'emploi, Monsieur [D] ne disposait pas du droit de bénéficier d'un emploi déterminé, ni même comme le lui rappelle la déléguée générale le 20 juin 2013 d'une garantie dans la prise en considération de ses rapports.

C'est donc par une interprétation erronée que Monsieur [D] estime que dans ses conclusions de première instance communiquées le 1er mars 2017, le Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social fait l'aveu judiciaire d'une discrimination en raison de ses opinions politiques. En ne retenant pas les analyses de Monsieur [D] alors que la DGEFP 'se doit de faire preuve de neutralité et de prendre en compte les positions de l'ensemble partenaire sociaux ... », le Ministère opère des choix à caractère politique dans les écrits qui lui sont soumis et le fait qu'ils soient ou non retenus par la déléguée générale, n'est pas révélateur de discrimination.

Dans le cadre des débats, les courriers et échanges de courriels transmis démontrent aussi que tant en ce qui concerne la place de Monsieur [D] dans l'organigramme, que la réorganisation de ses tâches dans la note du 12 juin 2013, il n'existe aucun exercice anormal ou abusif dans les pouvoirs d'autorité, de direction ou de contrôle exercé par la déléguée générale.

Plusieurs échanges de courriels attestent que le service des ressources humaines ou les différents délégués généraux ont soutenu Monsieur [D] dans ces différentes démarches d'évolution de carrière notamment lorsqu'il a exercé un mandat électif au niveau européen, qu'il a souhaité occuper un poste au Bureau international du travail ou à la direction de la Fondation ETF.

Les messages et courriers de soutien prouvent qu'il ne s'agissait pas d'évincer le salarié, ce d'autant qu'en 2014 et 2015 des négociations se sont engagées sur la proposition d'intégrer Monsieur [D] sur un contrat à durée indéterminée Etat.

Outre les motifs déjà exposés concernant la rémunération et la classification, les éléments de la cause ne permettent par d'établir l'existence d'une situation de harcèlement moral à l'égard de Monsieur [D].

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement entrepris ;

REJETTE les demandes de Monsieur [D] concernant l'égalité de traitement et de changement de classification ;

REJETTE les demandes de dommages-intérêts au titre de la discrimination et du harcèlement moral ;

DÉCLARE le jugement commun au Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Monsieur [V] [D] à payer à l'Agence Nationale pour la Formation Professionnelle des Adultes en cause d'appel la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [V] [D] à payer au Ministère du Travail, de l'Emploi, de la Formation Professionnelle et du Dialogue social en cause d'appel la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties du surplus des demandes ;

CONDAMNE Monsieur [V] [D] aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 17/06105
Date de la décision : 04/12/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°17/06105 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-04;17.06105 ?
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