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02/12/2019 | FRANCE | N°17/22306

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 3, 02 décembre 2019, 17/22306


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 3



ARRÊT DU 02 DÉCEMBRE 2019



(n°2019 , 20 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/22306 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4SZW



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Octobre 2017 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 15/16162





APPELANTS



Monsieur [W] [D]

Né le [Date naissance 1] 1

965 à [Localité 3]

De nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 1]



SA ALLIANZ I.A.R.D, pris en qualité d'assureur de M. [D]

[Adresse 3]

[Adresse 3]



représentés par Me Anne ...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 3

ARRÊT DU 02 DÉCEMBRE 2019

(n°2019 , 20 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/22306 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4SZW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Octobre 2017 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 15/16162

APPELANTS

Monsieur [W] [D]

Né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 3]

De nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

SA ALLIANZ I.A.R.D, pris en qualité d'assureur de M. [D]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentés par Me Anne BERNARD-DUSSAULX, avocat au barreau de PARIS, toque : C1901

INTIMÉS

Monsieur [P] [B]

Né le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 4] (ALGÉRIE)

De nationalité française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représenté par Me Martine LAUTREDOU, avocat au barreau de PARIS, toque : C2565 substitué par Me Sandrine ROBLOT, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 113

CPAM DE DE LA [Localité 5] dont la gestion recours contre tiers est centralisée avec la CPAM DE L'[Localité 1], sous la dénomination 'CPAM DE L'[Localité 1]'.

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Rachel LEFEBVRE de la SELARL KATO & LEFEBVRE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Septembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente, et Mme Clarisse GRILLON, conseillère chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente

Mme Clarisse GRILLON, Conseillère

Mme Anne DUPUY, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Laure POUPET

ARRÊT : Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 18 novembre 2019, prorogé au 2 décembre 2019, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente et par Laure POUPET, greffière présente lors du prononcé.

*******

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 24 octobre 2011, M. [P] [B], né le [Date naissance 2] 1960 et alors âgé de 50 ans, a été victime d'un accident corporel (accident du travail) dans les circonstances suivantes.

En sa qualité de salarié de la société Veolia, il est intervenu, pour procéder au remplacement d'un compteur divisionnaire d'eau dans l'appartement dont est propriétaire à [Localité 2] M. [W] [D], assuré pour sa responsabilité civile par la société Allianz Iard.

Lors de cette intervention, M. [B] s'est glissé sous les plaques électriques de cuisson, dont les fils et connexions n'étaient pas protégés, pour pouvoir accéder au compteur d'eau à remplacer. Il a reçu une décharge électrique qui lui a fait violemment heurter les installations avec la tête et le dos.

Par ordonnance de référé du 13 mai 2014, le docteur [G] a été désigné en qualité d'expert pour examiner M. [B]. Il a clos son rapport le 17 novembre 2014.

Par jugement du 10 octobre 2017 (instance n°15/16162), le tribunal de grande instance de Paris a :

- déclaré M. [W] [D] responsable à proportion de 75 % des conséquences dommageables de l'accident dont a été victime M. [P] [B] le 24 octobre 2011,

- dit que M. [D] et la société Allianz Iard doivent in solidum réparer à proportion de 75 % les préjudices corporels de M. [B] consécutifs à l'accident,

- fixé aux sommes détaillées ci-après la réparation du préjudice corporel de M. [P] [B] consécutif à l'accident du 24 octobre 2011, après déduction des prestations servies par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] et en proportion de son droit à indemnisation,

- condamné in solidum M. [D], tiers responsable, et la société Allianz Iard, son assureur de responsabilité, à payer à M [B], en tenant compte du partage de responsabilité retenu à son encontre pour 25 %, une indemnité de 50 024,83 € avec intérêts au taux légal à compter de la date du jugement pour parfaite réparation de son préjudice corporel,

- condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard à payer la somme de 38 080,22 € à la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1] pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5], majorée des intérêts au taux légal :

$gt; à compter du 30 novembre 2015 sur la somme de 37 045,66 €,

$gt; à compter du 8 janvier 2016 sur la somme de 1 034,56 €,

- condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1] pour le compte de la caisse de [Localité 5], 75 % des arrérages à échoir de la rente accident du travail au fur et à mesure de leur engagement, majorés des intérêts au taux légal à compter de la date de la demande de remboursement après paiement effectif,

- condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard à payer une indemnité forfaitaire de gestion de 791,25 € à la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1],

- réservé les droits de la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1] quant aux prestations non connues à ce jour et celles qui pourraient être versées ultérieurement,

- condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard à payer une indemnité pour frais irrépétibles :

$gt; à M. [B] de 3 500 €,

$gt; à la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1] de 1 000 €,

- condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard aux entiers dépens qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire et autorisé Maître Martine Lautredou, avocate de M. [B], et la Selarl Kato & Lefebvre associés, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1], à faire application de l'article 699 du code de procédure civile pour recouvrer ceux des dépens dont ils auront respectivement fait l'avance,

- ordonné l'exécution provisoire intégrale du jugement, déclaré commun à la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1] agissant pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5].

Sur appel interjeté par déclaration du 6 décembre 2017, et selon conclusions notifiées le 5 mars 2018, M. [W] [D] et la société Allianz Iard demandent à la cour de :

- réformer en toutes ses dispositions le jugement dont appel, et statuant à nouveau,

- juger que M. [W] [D] n'est pas responsable de l'accident dont a été victime M. [P] [B],

- débouter en conséquence M. [P] [B] de l'intégralité de ses demandes,

- le condamner à payer aux appelants la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Maître Anne Bernard-Dussaulx,

subsidiairement :

- surseoir à statuer sur la liquidation des PGPA,

- enjoindre à M. [B] de présenter un décompte précis de sa perte de gains professionnels avec production des pièces justifiant les calculs effectués,

- réduire les autres réclamations de M. [B],

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

Selon conclusions notifiées le 30 avril 2018, M. [P] [B] demande à la cour, sur appel incident, de :

- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

$gt; retenu la responsabilité de M. [D] dans le cadre de la survenance de l'accident et l'a condamné in solidum avec son assureur à l'indemniser de ses préjudices,

$gt; condamné in solidum M. [D] et son assureur au paiement d'une somme de 5 000 € au titre de préjudice d'agrément,

$gt; condamné solidum M. [D] et son assureur au paiement d'une somme de 10 000 € au titre des souffrances endurées,

- sur appel incident, réformer de la décision entreprise en ce qu'elle a :

$gt; considéré qu'il avait commis une faute d'imprudence qui avait concouru à la réalisation de son préjudice,

à titre subsidiaire,

$gt; considéré que la faute par imprudence commise réduisait son droit à réparation à hauteur de 25 %,

$gt; rejeté sa demande relative aux pertes de revenus futurs,

$gt; rejeté la demande d'indemnisation au titre du préjudice d'établissement,

$gt; décidé que l'indemnité journalière due au titre de déficit fonctionnel allouée serait d'un montant de 25 €,

$gt; arrêté les pertes de revenus avant consolidation à hauteur de 19 983,52 €,

$gt; assorti les indemnisations allouées d'un intérêt au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement et non à compter de la date de l'assignation,

$gt; rejeté les demandes formulées au titre de perte de points de retraite,

statuant à nouveau,

- constater que les équipements litigieux en cause sont bien privatifs et que seul M. [D] en est responsable,

- constater qu'il n'avait pas à intervenir sur le réseau électrique et qu'il était simplement passé faire un repérage et procéder à une coupure d'eau,

- constater qu'il n'était pas d'usage pour les agents de maintenance de la société Veolia de procéder à une coupure d'électricité dans le cadre d'un repérage des lieux dans lesquels ils devaient procéder ultérieurement à la mise en oeuvre de travaux,

en conséquence,

- juger qu'il ne peut lui être reproché aucune faute ni négligence dans le fait qu'il n'ait pas procédé à la coupure de l'électricité avant de procéder à son repérage des lieux,

- juger qu'il n'a pas, par faute ou négligence, participé à la réalisation de son dommage,

- juger que M. [D] et son assureur doivent réparer l'intégralité des préjudices ayant résulté pour lui de son accident,

en conséquence,

- condamner in solidum M. [D] et son assureur Allianz Iard à lui verser les sommes récapitulées ci-après,

- débouter M. [D] et son assureur de toutes leurs demandes,

- juger que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la date de l'assignation,

- condamner les défendeurs (sic) à lui verser in solidum la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les mêmes aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Lautredou en application de l'article 699 du même code.

Selon conclusions notifiées le 16 avril 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1] demande à la cour, pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie de la [Localité 5], de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

$gt; condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard à lui payer la somme de 38 080,22 €, majorée des intérêts au taux légal :

- à compter du 30 novembre 2015 sur la somme de 37 045,66 €,

- à compter du 8 janvier 2016 sur la somme de 1 034,56 €,

$gt; condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard à lui rembourser 75 % des arrérages à échoir de la rente accident du travail au fur et à mesure de leur engagement, majorés des intérêts au taux légal à compter de la date de la demande de remboursement après paiement effectif,

- sur appel incident, infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a limité le montant de l'indemnité forfaitaire due à 75 % de son montant maximum,

-condamner M. [W] [D], solidairement avec son assureur, la société Allianz Iard, à lui verser la somme de 1 066 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, valeur 1er janvier 2018, telle qu'elle est due de droit en application des dispositions d'ordre public de l'article L.454-1 du code de la sécurité sociale,

-condamner M. [W] [D], solidairement avec son assureur, la société Allianz Iard, à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

-condamner M. [W] [D], solidairement avec son assureur, la société Allianz Iard, en tous les dépens, dont distraction au profit de la SELARL Kato & Lefebvre associés, avocats, en application de l'article 699 du même code.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 16 septembre 2019.

MOTIFS DE L'ARRÊT

L'article 9 alinéas 1 et 3 de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations dispose : les dispositions de la présente ordonnance entreront en vigueur le 1er octobre 2016. Lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation.

En application de cette disposition transitoire, dès lors que l'assignation introductive de la première instance a été délivrée les 21 et 29 octobre 2015, les articles du code civil visés ci-après sont ceux dans leur rédaction antérieure à ladite ordonnance, applicables dans la présente instance d'appel.

1 - Sur l'action en responsabilité

Le tribunal a jugé que l'accident dont a été victime M. [B] le 24 octobre 2011 engage la responsabilité de M. [D] en sa qualité de gardien des installations électriques situées à l'intérieur de l'appartement, sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1 ancien devenu 1242 du code civil.

Il a toutefois considéré que la faute de M. [B] est de nature à réduire de 25 % son droit à indemnisation, dès lors qu'il n'a pas appliqué la consigne de son responsable qui était de couper le courant, alors qu'il se savait exposé à un risque l'électrocution par les effets conjugués de la présence d'un équipement électrique aux fils apparents non isolés et de l'étroitesse de la niche où il lui fallait évoluer, et qu'étant titulaire d'un CAP et d'un BEP d'électrotechnique, il disposait d'un niveau de connaissances professionnelles suffisant pour prendre conscience de la nécessité de suspendre préalablement à son intervention toute alimentation électrique.

La société Allianz et son assuré sollicitent l'infirmation du jugement en faisant valoir :

- que la preuve de la non-conformité de l'installation électrique ou de la défectuosité des appareils électriques équipant l'appartement n'est pas rapportée, les attestations produites par les collègues de travail de M. [B] ne faisant pas état d'anomalie concernant les plaques électriques de cuisson,

- que conformément à l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965, les éléments d'équipements communs, tels que les canalisations et le réseau électrique, sont des parties communes relevant de la responsabilité du syndicat des copropriétaires, de sorte que la responsabilité de M. [D] ne peut être envisagée sur le fondement du texte précité puisqu'il n'est pas le gardien de l'installation électrique,

- qu'aucune faute ne peut lui être reprochée puisqu'il n'avait pas de compétence technique pour déceler une éventuelle dangerosité de l'installation électrique de son appartement,

- qu'en sa qualité de professionnel qualifié, M. [B] aurait dû, si l'installation lui paraissait dangereuse, prendre les précautions nécessaires et couper l'alimentation électrique au niveau du disjoncteur, de sorte que l'accident relève de sa seule imprudence.

Invoquant indistinctement la responsabilité du fait personnel (articles 1382 et 1383 du code civil) et la responsabilité du fait des choses (article 1384 du code civil), M. [B] fait valoir en réplique :

- que si le réseau électrique peut être considéré comme étant une partie commune, en revanche les éléments équipant de l'appartement, dont la plaque de cuisson, doivent être considérés comme des éléments de nature privative, comme rappelé par la note adressée par le syndicat des copropriétaires à l'ensemble des copropriétaires le 24 mai 2012,

- que M. [D], en sa qualité de propriétaire de l'appartement, était gardien de ses équipements et ne pouvait ignorer l'état des installations et leur dangerosité potentielle (défaut de mise à la terre et d'isolation des équipements électriques) ; que dès lors, étant responsable des travaux mis en oeuvre dans son appartement et des personnes intervenant chez lui, il aurait dû l'empêcher d'accéder sous l'évier (sic) avant d'avoir coupé l'alimentation électrique.

Il soutient qu'aucune faute d'imprudence ne peut lui être reprochée dès lors :

- qu'il n'avait pas à intervenir sur le réseau électrique puisqu'il était simplement venu faire un repérage et couper l'eau, et qu'il n'était pas d'usage de couper l'électricité dans le cadre d'un simple repérage, comme en attestent les salariés de la société Veolia,

- qu'il ne pouvait soupçonner la défectuosité des installations de l'appartement de M. [D].

1.1 - En droit, l'article 1384 alinéa 1er du code civil dispose que l'on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.

Il résulte de ce texte qu'est engagée la responsabilité du gardien d'une chose inerte se trouvant en position anormale ou dangereuse et qui a été l'instrument d'un dommage. Et seule la faute de la victime ou la cause extérieure empruntant les caractères de la force majeure est de nature à exonérer le gardien de sa responsabilité.

1.2 - Opérateur d'exploitation titulaire d'un contrat saisonnier au sein de l'agence [Localité 5] de Veolia Eau, M. [B] était chargé de procéder au remplacement des compteurs d'eau au sein de la résidence Aiguille Rouge située à Arc 2000, lorsqu'il a été gravement blessé le 24 octobre 2011, au cours d'une intervention dans l'appartement n°260 appartenant M. [D]. Il s'agit d'un accident du travail.

Il est établi que l'appartement de M. [D] était en travaux et qu'un ouvrier, présent dans les lieux, a aidé M. [B] à sortir le lave-vaisselle situé sous les plaques électriques, afin de permettre à ce dernier d'accéder au compteur d'eau en se glissant sous les plaques de cuisson.

Il décrit l'accident de la manière suivante : 'Je me suis glissé sous les plaques. J'avais bien vu qu'il y avait pas de plaque de protection en amiante et de plaque de métal. Je ne savais pas s'il y avait ou non de disjoncteur vigil 30 mA. Là il n'y avait qu'un vigil 500 mA. Je me baisse bien. J'accède à l'installation d'eau. J'ai pris le courant soit au tuyau d'eau soit au bâti métallique qui supporte les plaques électriques dans un premier temps. Cela m'a contracté et je pense que c'est là que je me suis relevé par réflexe et que j'ai dû toucher les plaques. Ensuite j'ai une amnésie totale'.

Un enquête a été confiée à la gendarmerie, dont M. [B] ne communique que deux procès-verbaux d'audition, outre une planche photographique montrant la niche dans laquelle il s'est glissé et, sous les plaques de cuisson, des fils et connexions électriques à nu, sans aucune protection.

Lors de son audition par les gendarmes le 15 novembre 2011, il a déclaré qu'il était employé chez Veolia à titre saisonnier depuis six ans, chargé de changer les compteurs d'eau de la résidence. Il a indiqué n'avoir aucun souvenir de la présence du propriétaire lorsqu'il est intervenu dans l'appartement. A la question : 'Pourquoi ne pas avoir coupé le courant lorsque vous avez vu les fils à nu '', il a répondu : 'Parce que les gens travaillaient et que je ne voulais pas les embêter. De plus je ne travaillais pas sur l'installation mais je devais juste faire une mise au point'. A la question : 'Aviez-vous déjà travaillé sur de telles installations avant '', il a répondu : 'Oui. On fait très attention de ne pas toucher les conducteurs. On avait bien la consigne du responsable de couper le courant'.

M. [B] a déposé plainte à l'encontre du propriétaire des lieux 'par rapport à l'installation électrique qui n'est pas aux normes'.

Il verse aux débats l'audition du 8 novembre 2011 de M. [E] [O], directeur adjoint au sein de l'agence Veolia Eau de [Localité 5], assisté de deux responsables sécurité, MM. [Z] [V] et [A] [C]. M. [O] indique que M. [B] travaille au sein de la société depuis le 15 mai 2006 en contrat saisonnier, qu'il réalise la pose de compteur depuis le mois de juin 2011 et qu'il a bénéficié le 22 juin 2011 d'une formation à la sécurité ('formation renforcée à la sécurité pour l'emploi d'agent de réseaux' d'une durée de 20 minutes selon l'attestation versée aux débats).

Il précise qu'il s'est rendu sur les lieux où il a constaté qu'en raison de l'étroitesse de l'espace où il travaillait, M. [B] a pu toucher les fils à nu avec la tête et le conduit d'eau, ce qui aurait provoqué l'électrisation.

A la question : 'D'après vous, quelle est l'origine de cet accident '', M. [O] a répondu : 'Une inattention de sa part', avant d'ajouter :'Je précise que l'on a envoyé un courrier à la régie qui gère l'immeuble à Elegna Immo. Ce n'est pas normal que des fils électriques soient à nu sous des plaques électriques'.

Dans un courriel daté du 25 octobre 2011, soit le lendemain de l'accident, M. [O] a écrit :

'1. [P], saisonnier chez nous depuis plusieurs années, pose des compteurs divisionnaires dans le bâtiment Aiguille rouge à arcs 2000 depuis début juin.

2. Il vient le lundi à 14h30 dans un appartement en travaux pour repérer les lieux avant son intervention.

3. Il touche la vanne d'arrêt d'arrêt d'eau et se fait électrocuter.

4. Le propriétaire présent sur les lieux coupe le disjoncteur qui n'est pas tombé. (...)

Consigne a été rappelée aux agents de ponter les compteurs lors des changements ou de tomber le disjoncteur quand cela est possible. P. [B] ne l'a pas fait car il venait simplement faire un repérage avant intervention'.

Le 8 novembre 2011, il a adressé le courrier suivant à la régie Elegna Immobilier:'L'un de nos salariés à été victime d'un accident du travail le 24 octobre 2011 (...). Celui-ci est intervenu dans l'appartement n°260 de M. [D] pour effectuer un repérage avant la pose d'un compteur divisionnaire. Il a touché la vanne d'arrêt d'eau. Sa tête était vraisemblablement à ce moment-là en contact avec les fils électriques de la plaque de cuisson (absence d'isolant) et il s'est fait électriser. (...) Dans le but d'éviter tout accident similaire, je vous invite à effectuer une information auprès de vos propriétaires afin que la conformité électrique des appartements soit vérifiée notamment vis-à-vis des locataires'.

Aucun autre élément de l'enquête réalisée par les gendarmes n'est communiqué par M. [B] qui indique que sa plainte aurait été classée sans suite par le procureur de la République. L'avis de classement sans suite n'étant pas versé aux débats, son ou ses motifs demeurent ignorés.

Les pièces versées aux débats établissent que M. [B] a sollicité un contrat de saisonnier pour la période du 31 mai 2011 au 30 novembre 2011 (son courrier du 26 février 2011) en se présentant comme 'ayant des notions de soudure, plomberie et électricité' (pièce n°41), et il résulte de son curriculum vitae (n°42) qu'il est titulaire d'un BEP CAP électromécanique électrotechnique, et que, en sus de son activité de moniteur de ski et snowboard et moniteur de voile, il bénéficie d'une expérience professionnelle comme 'artisan durant 16 ans, couvreur de toitures en lauzes et rénovations appartements (tous corps d'Etats), monteur dépanneur en ascenseur'.

M. [B] produit plusieurs attestations établies par ses collègue de travail, ainsi rédigées :

- M. [R] [J], agent de maintenance chez Veolia, présent dans l'appartement juste après l'accident, indique : 'L'appartement est en travaux (...) M. [D] me dit que c'est lui qui a coupé le disjoncteur général pour stopper l'électrisation de M. [B] et pour pouvoir le dégager. En effet, le tableau électrique est vétuste et il n'y a pas de disjoncteur différentiel 30 ml ampères et les fusibles n'ont pas empêché l'électrisation de M. [B]' ; il ajoute dans une seconde attestation : 'J'atteste avoir travaillé pendant plusieurs années avec M. [P] [B] en tant qu'agent de maintenance et qu'il est un agent consciencieux, rigoureux et professionnel et que l'accident dont il a été victime n'est pas dû à sa négligence mais plutôt à la vétusté de l'installation électrique et la non-protection des plaques de cuisson. Il n'est pas dans les habitudes des agents de couper l'alimentation électrique des appartements dans le cadre de repérage des lieux pour les travaux à effectuer, ce qui aurait pour conséquence de plonger l'agent dans l'obscurité. M. [B] n'a pour moi fait preuve d'aucune négligence dans son travail, contrairement au propriétaire qui n'a pas protégé ses plaques de cuisson d'un point de vue électrique et mécanique de façon correcte et sécuritaire',

- M. [S] [Y], opérateur exploitation au sein de Veolia, présent dans l'appartement juste après l'accident, indique : 'L'appartement était en travaux, les fils électriques dépassaient des murs avec aucune protection. (...) M. [D] me dit qu'il a coupé le disjoncteur de l'appartement pour stopper l'électrisation (...). Le tableau électrique n'était pas aux normes actuelles car pour la protection des personnes, il faut un disjoncteur différentiel de 30 ml ampères et non un disjoncteur de 500 ml ampères',

- M. [K] [X], technicien de maintenance chez Veolia : 'J'atteste avoir travaillé avec M. [P] [B] pendant plusieurs années (...) il a toujours fait preuve de rigueur, de professionnalisme, c'est un agent consciencieux dans son travail. Il n'est pas d'usage et dans les habitudes des agents de couper l'alimentation électrique des appartements dans le cadre d'un repérage de travaux à effectuer, ou dans le cadre d'une coupure d'eau, ce qui plongerait l'agent dans l'obscurité. J'atteste qu'il était impossible à M. [B] de prévoir la présence d'une fuite de courant sur les vannes de coupure d'eau de l'appartement qui l'a propulsé dans les plaques de cuisson non isolées mécaniquement et électriquement'.

1.3 - Contrairement aux allégations des appelants, non étayées par un quelconque élément de preuve, l'accident dont a été victime M. [B] a pour origine les éléments d'équipement et installations électriques situés dans l'appartement de M. [D], partie privative de l'immeuble.

Par une note en date du 24 mai 2012, la société Urbania, syndic de la copropriété, a rappelé aux copropriétaires que la mise en sécurité des tableaux électriques des appartements constituait des travaux privatifs et que chaque propriétaire 'reste seul responsable d'éventuelles conséquences en cas de désordres électriques de son installation privative'. Dans le même sens, le directeur adjoint de la société Veolia, M. [O], a informé le 8 novembre 2011 la régie Elegna Immo de la nécessité pour les propriétaires de faire vérifier la conformité électrique des appartements.

Le défaut d'isolation de la plaque de cuisson électrique, dont les fils et connexions étaient complètement à nu le jour de l'accident, résulte des attestations des salariés de Veolia (MM. [J] et [Y]) corroborées par les photographies des lieux, confirmant l'absence de toute protection mécanique destinée à éviter les risques d'électrisation. La dangerosité de l'installation, qui est à l'origine de l'électrisation de la victime, n'est donc pas contestable et engage la responsabilité du propriétaire des lieux sur le fondement du texte précité.

Il est toutefois établi qu'immédiatement après l'accident et afin de porter secours à la victime, M. [D] a coupé le courant depuis le compteur individuel situé dans l'appartement, ce que M. [B] n'avait pas fait préalablement à son intervention.

Il est établi que le 24 octobre 2011, l'appartement faisait l'objet de travaux de rénovation et qu'un ouvrier était présent dans les lieux.

Lors de son audition par les gendarmes, M. [B] n'a pas contesté que les fils électriques étaient à nu sous la plaque de cuisson mais a déclaré qu'il s'était abstenu de couper le courant pour une double raison : la première étant liée à la présence d'ouvriers travaillant dans l'appartement ('je ne voulais pas les embêter'), et la seconde tenant à ce qu'il procédait seulement à un repérage ('je devais juste faire une mise au point').

Au vu de ces explications, le directeur adjoint de l'agence Veolia a attribué l'accident à 'une inattention' de la part de M. [B], lequel avait connaissance des consignes de sécurité puisqu'il a par ailleurs reconnu lors de son audition qu'il devait faire 'très attention de ne pas toucher les conducteurs' et que la consigne était bien de couper le courant.

Un rappel des consignes de sécurité a été adressé dès le lendemain de l'accident par son responsable, soit 'ponter les compteurs lors des changements ou tomber le disjoncteur quand cela est possible', sans aucune distinction selon la nature de l'intervention (simple état des lieux ou installation d'un compteur d'eau), contrairement aux attestations rédigées par les collègues de travail de la victime, faisant état d'un 'usage' et des 'habitudes des agents' consistant à ne pas couper l'alimentation électrique lors du repérage pour les travaux à effectuer afin d'éviter d'être 'plongé dans l'obscurité', situation pourtant non insurmontable avec un éclairage d'appoint.

Enfin, même à supposer qu'un simple repérage préparatoire aux travaux ne nécessitait pas de couper l'alimentation électrique, M. [B] n'a pu que constater, après avoir retiré le lave-vaisselle et avant de s'engager dans la niche étroite pour vérifier l'installation d'eau, la présence de nombreux fils électriques totalement à nu sous la plaque de cuisson. Or en ne coupant pas le courant préalablement à son intervention, malgré la dangerosité manifeste de l'installation électrique dépourvue de toute protection, M. [B] a commis une imprudence fautive.

En sa qualité de professionnel, il ne peut soutenir qu'il ignorait qu'il s'exposait alors à un risque d'électrisation. Il justifie en effet être titulaire d'un BEP CAP électromécanique et électrotechnique, avoir une expérience professionnelle de seize années comme artisan notamment dans le domaine de la rénovation d'appartements, travailler comme saisonnier depuis six ans au sein de la société Veolia et avoir bénéficié d'une formation relative à la sécurité quatre mois avant l'accident. Il ne peut davantage soutenir qu'il incombait au propriétaire des lieux de l'empêcher de procéder au repérage dans les conditions sus-décrites, étant souligné qu'il n'est démontré ni que M. [D] était présent dans l'appartement avant la survenance de l'accident ni qu'il avait connaissance de l'absence de toute protection isolant la plaque de cuisson.

Au vu des circonstances de l'accident, la faute d'imprudence commise par M. [B], alors qu'il agissait en tant que professionnel, est de nature à réduire de moitié son droit à indemnisation.

Le jugement entrepris sera par conséquent infirmé et la société Allianz et son assuré condamnés in solidum à réparer 50 % des conséquences dommageables de l'accident subi par M. [B] le 24 octobre 2011.

2 - Sur le préjudice corporel subi par M [B]

Les prétentions de M. [B] peuvent être récapitulées comme suit, étant rappelé que la société Allianz et son assuré sollicitent à titre principal le rejet de l'ensemble des demandes, et subsidiairement un sursis à statuer sur le poste de perte de gains professionnels actuels et la réduction des autres réclamations :

jugement

demandes

préjudices patrimoniaux

DI à 75 %

DI 100 %

temporaires

- assistance par tierce personne

540,00 €

816,00 €

- perte de gains professionnels

14 987,64 €

41 061,90 €

permanents

- perte de gains prof. futurs

0,00 €

236 000,00 €

préjudices extra-patrimoniaux

temporaires

- déficit fonctionnel temporaire

3 559,69 €

5 910,00 €

- souffrances endurées

7 500,00 €

10 000,00 €

permanents

- déficit fonctionnel permanent

18 562,50 €

40 000,00 €

- préjudice esthétique permanent

1 125,00 €

3 000,00 €

- préjudice d'agrément

3 750,00 €

5 000,00 €

- totaux

50 024,83 €

341 787,90 €

Le docteur [G], expert, a émis l'avis suivant sur le préjudice corporel subi par M. [B] :

- blessures provoquées par l'accident :

$gt; traumatisme crânien (impact occipital),

$gt; fracture tassement du corps vertébral de L1, avec recul du mur postérieur, sans trouble neurologique, ayant nécessité une intervention sous anesthésie générale le 29 octobre 2011, avec rachisynthèse postérieure et cimentoplastie de L1 (ablation du matériel le 27 mai 2014),

$gt; brûlure au deuxième degré du pouce droit,

$gt; purpura important du visage et des conjonctives, associé à une épistaxis,

$gt; plaies superficielles du scalp,

- arrêt de travail : du 24 octobre 2011 au 10 mai 2013 et du 27 mai 2014 au 10 octobre 2014,

- déficit fonctionnel temporaire :

début de période

24/10/2011

taux déficit

fin de période

04/11/2011

12

jours

100 %

fin de période

05/02/2012

93

jours

30 %

fin de période

27/05/2014

842

jours

15 %

fin de période

29/05/2014

2

jours

100 %

fin de période

10/10/2014

134

jours

15 %

- assistance temporaire par tierce personne :

$gt; 1 heure par jour durant un mois,

$gt; 2 heures par semaine durant deux mois,

- souffrances endurées : 3,5/7,

- consolidation fixée au 10 octobre 2014 (dernière consultation auprès du chirurgien traitant, à l'âge de 53 ans),

- incidence professionnelle : limitation des travaux de force, des positions statiques prolongées et de l'accroupissement, limitation du temps de travail comme moniteur de ski,

- déficit fonctionnel permanent : 15 %,

- préjudice esthétique : 1/7,

- préjudice d'agrément : limitation des activités sportives antérieures du fait des rachialgies résiduelles (douleurs du dos au niveau de la colonne vertébrale),

- réserves quant à une évolution arthrosique au niveau de la fracture vertébrale.

Au vu de ces éléments et des pièces produites par les parties, le préjudice corporel de M. [B] sera indemnisé comme suit.

Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

* assistance par tierce personne

Les parties acquiescent aux conclusions de l'expert, qui a retenu un besoin d'assistance par tierce personne évalué à 1 heure par jour durant un mois, puis 2 heures par semaine durant deux mois pour le port des courses lourdes, en précisant qu'il n'y a pas eu d'aide pour la toilette et l'habillage.

Elles divergent s'agissant du coût horaire d'indemnisation, M. [B] sollicitant

17 € (et non 15 € comme retenu par le tribunal) tandis que la société Allianz et son assuré offrent 12 €.

Il sera fait application du coût horaire d'indemnisation de 15 € retenu par le tribunal, s'agissant d'une assistance non médicalisée et non spécialisée, soit :

- 1 heure par jour pendant 1 mois : 1h x 30 jours x 15 € = 450 €

- 2 heures par semaine pendant 2 mois : 2h x 9 semaines x 15 € = 270 €.

Ce poste de préjudice est liquidé à hauteur de 720 €, soit après réduction de moitié du droit à indemnisation la somme de 360 € revenant à la victime.

* perte de gains professionnels actuels

Le tribunal a fixé la perte de revenus subie par M. [B], pour la période de 2011 à 2013 (sic) et avant réduction de son droit à indemnisation, à la somme de 19 983,52 €, au vu des avis d'imposition versés aux débats et après déduction des indemnités journalières versées par la CPAM, 'présumée déclarées pour moitié puisqu'elles sont imposables dans cette proportion depuis 2010' (soit 21 986,72 € x 50 %), et déduction de la créance de la caisse de secours des moniteurs de l'Ecole du ski français (ESF), soit la somme de

3 372 € déclarée par M. [B] au titre de l'année 2013.

M. [B] soutient qu'il a subi une perte de revenus de 2011 à 2014 par comparaison avec son revenu de référence, soit 32 252 € correspondant au revenu annuel moyen perçu pour les années 2009-2010.

Il fait valoir :

- que sa perte totale de revenus s'élève à la somme de 41 061,90 €, soit la somme de 37 329 € majorée de la valeur des congés payés qu'il n'a pu acquérir (10 %),

- que le tribunal a déduit à tort les aides versées par la caisse de secours des moniteurs de l'ESF et les indemnités journalières versées par la CPAM, s'agissant de prestations comprises dans les revenus déclarés.

En réplique, la société Allianz et son assuré acquiescent au revenu annuel de référence perçu avant l'accident, évalué à 32 252 € par M. [B], mais soulignent que les montants invoqués au titre de la perte de revenus pour la période postérieure ne sont pas vérifiables et que les indemnités journalières retenues par la victime ne sont pas conformes aux sommes indiquées par la CPAM ; qu'il y a donc lieu de surseoir à statuer afin que M. [B] clarifie ses décomptes et justifie ses calculs.

Ce poste de préjudice tend à compenser les répercussions de l'invalidité sur la sphère professionnelle de la victime jusqu'à la consolidation de son état de santé.

L'évaluation de la perte de gains alléguée doit être effectuée in concreto, étant rappelé que la preuve d'une perte de revenus imputable à l'accident incombe à la victime.

Il n'y a donc pas lieu de surseoir à statuer sur ce poste de préjudice.

Avant l'accident, M. [B] exerçait en période hivernale l'activité de moniteur de ski, en alternance avec un emploi salarié au sein de la société Veolia.

Les parties s'accordent pour retenir un revenu annuel de référence antérieur à l'accident d'un montant de 32 252 € retenu par le tribunal, correspondant à 2 687,67 € par mois ou 88,36 € par jour.

La date de consolidation étant fixée au 10 octobre 2014, la période indemnisable court du 24 octobre 2011 au 10 octobre 2014, période au cours de laquelle l'expert a retenu deux arrêts de travail imputables à l'accident : le premier du 24 octobre 2011 au 10 mai 2013, le second du 27 mai 2014 au 10 octobre 2014.

M. [B] n'explicite par aucun calcul le montant de sa perte de revenus qu'il évalue à la somme de 37 329 €.

Sur la base de son revenu de référence, il aurait dû percevoir, du 24 octobre 2011 au 10 octobre 2014, la somme de 95 693,88 € (soit 1083 jours x 88,36 €).

Il résulte des avis d'impôt sur le revenu que M. [B] a perçu les sommes suivantes postérieurement à son accident :

activité libérale

activité salariée

prorata temporis

total

2011

20 302,00 €

9 694,00 €

du 24/10 au 31/12/11

5 670,48 €

2012

4 601,00 €

8 429,00 €

13 030,00 €

2013

3 372,00 €

13 029,00 €

16 401,00 €

2014

30 337,00 €

4 711,00 €

du 1/01 au 24/10/14

27 174,20 €

total période :

62 275,68 €

M. [B] démontre par les pièces comptables qu'il verse aux débats que les revenus ainsi perçus incluent les versements de la caisse de secours des moniteurs d'ESF 2000 pour un total de 14 325,12 € (soit 7 413,12 € pour la saison 2011-2012 et 6 912 € pour la saison 2012-2013). Au vu de l'attestation du directeur de l'ESF-Arc 2000 ('J'atteste que l'association n'a jamais souscrit aucune assurance groupe pour ses moniteurs. Seule une caisse de secours peut apporter une petite aide financière aux moniteurs blessés sur décision du bureau directeur'), il n'est pas démontré que ces prestations versées à la victime ouvrent droit au recours subrogatoire prévu par les articles 29 § 1 à 31 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985.

Sa perte de revenus s'élève par conséquent à la somme de 33 418,20 € (95 693,88 € - 62 275,68 €).

M. [B] ne conteste pas avoir perçu des indemnités journalières durant la période avant consolidation, lesquelles sont imputables sur le poste de perte de gains professionnels actuels en application de la subrogation légale dont bénéficie la caisse en application des articles 29 § 1 à 31 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985.

Il résulte de l'attestation de débours versée aux débats que ces indemnités se sont élevées à 21 986,72 € (du 22 novembre 2011 au 10 mai 2013) + 5 619,74 € (du 27 mai au 10 octobre 2014), soit une somme imputable de 27 606,46 €.

Après application de la réduction du droit à indemnisation à 50 %, imputation de la créance de la CPAM afférente aux indemnités journalières versées et application du droit de préférence de la victime en vertu de l'article 31 alinéa 2 de la loi précitée du 5 juillet 1985, il revient à M. [B] la somme de 5 811,74 € :

indemnité

débours

dette

revenant à

revenant

totale

CPAM

indemnitaire

la victime

à la CPAM

33 418,20 €

27 606,46 €

16 709,10 €

5 811,74 €

10 897,36 €

Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)

* perte de gains professionnels futurs

Le tribunal a rejeté la demande de M. [B] au titre des pertes de gains futurs, après avoir constaté que son revenu imposable s'est élevé à 35 048 € pour l'année 2014, dont 30 337 € au titre de son activité de moniteur de ski (dont il n'expliquait pas le montant, le plus élevé jamais réalisé depuis 2009) et 4 711 € au titre de son activité salariée (sans justifier la provenance des salaires perçus). Il a également rejeté sa réclamation au titre de la perte alléguée de point de retraite, en l'absence de tout élément de preuve.

M. [B] invoque une double perte financière en faisant valoir :

$gt; en premier lieu, sur la perte de gains :

- qu'il n'a plus la capacité d'exercer son activité de moniteur de ski et qu'il a également perdu la possibilité de travailler pour Veolia en dehors de la saison hivernale,

- que compte tenu de son âge et de son état de santé, il n'est pas parvenu à ce jour à retrouver un emploi, de sorte que sa perte de revenu peut être évaluée 'à hauteur d'un minimum de 12 000 € par an', subie durant 15 ans de 50 ans (sic) jusqu'à 65 ans ; que son préjudice peut ainsi être évalué à la somme de 180 000 €,

$gt; en second lieu, sur la perte de retraite :

- qu'il subira une perte de points de retraite qu'il évalue à la somme 56 000 € 'en application de la jurisprudence'.

En réplique, la société Allianz et son assuré font valoir :

- que l'expert médical a retenu un taux de déficit fonctionnel permanent de 15 % et une limitation pour certains mouvements, mais aucune impossibilité d'exercer une activité professionnelle, et que M. [B] ne démontre pas en quoi il a été empêché de reprendre son travail chez Veolia ou d'occuper un autre emploi,

- qu'il ne démontre pas l'existence d'une perte de gains futurs pour son activité saisonnière de moniteur de ski, dès lors qu'il a perçu à ce titre un revenu de 30 337 € en 2014, alors qu'il n'a été consolidé qu'au mois d'octobre 2014, et que ce revenu est sensiblement supérieur à ceux qu'il a perçus avant l'accident (soit 25 175 € en 2009 et 20 210 € en 2010).

Ils concluent à titre principal au rejet de la demande et offrent à titre subsidiaire une indemnisation forfaitaire de 15 000 € au vu des conclusions de l'expert concernant la limitation professionnelle et de l'âge de M. [B], tout en soulignant que cette somme est entièrement absorbée par la créance de la CPAM afférente à la rente d'accident du travail (s'élevant à 62 496,90 €).

Ce poste indemnise la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l'incapacité permanente à laquelle elle est confrontée du fait du dommage dans la sphère professionnelle, après la consolidation de son état de santé.

L'expert a retenu une incidence professionnelle en lien avec l'accident, résultant d'une 'limitation des travaux de force, positions statiques prolongées et accroupissement et limitation de son temps de travail comme moniteur de ski'.

Les doléances mentionnées par M. [B] au cours de l'expertise consistent en des lombalgies chroniques avec limitation du port de charges, le gênant dans ses activités professionnelles.

L'expert n'a pas conclu à une inaptitude professionnelle, totale ou partielle, concernant l'activité de moniteur de ski ou l'emploi salarié d'agent de maintenance.

M. [B] évalue sa perte annuelle de revenus à la somme de 12 000 €, qui ne résulte d'aucun calcul précis, et sollicite la réparation de sa perte de gains futurs de l'âge de 50 ans à l'âge de 65 ans alors que sa consolidation a été fixée au 14 octobre 2014, à l'âge de 53 ans.

Il résulte des deux seuls avis d'impôt sur le revenu versés aux débats qu'il a perçu les sommes suivantes postérieurement à la consolidation :

activité libérale

activité salariée

total

2015

26 633 €

7 181 €

33 814 €

2016

12 984 €

6 737 €

19 721 €

M. [B] soutient qu'il n'a plus la capacité d'exercer son activité de moniteur de ski depuis l'accident, sans produire aucune pièce médicale à l'appui de cette affirmation, et sans s'expliquer sur les revenus pourtant tirés de cette activité en 2014 (cf. supra au titre des PGPA), 2015 et 2016. Si les revenus perçus en 2016 témoignent d'un net ralentissement de son activité de moniteur de ski, ceux perçus en 2014 et 2015 démontrent que M. [B], même non consolidé puis postérieurement à sa consolidation le 10 octobre 2014 a pu maintenir une activité soutenue.

La cour souligne en outre que l'expert judiciaire a mentionné l'existence d'un état antérieur, ainsi décrit : 'M. [B] a présenté dans les suites de son accident des troubles de la sensibilité profonde du membre inférieur gauche, des troubles mnésiques et un syndrome vertigineux qui ont nécessité des bilans para-cliniques, dont une IRM cérébrale le 25 octobre 2013 qui est revenue normale, et une IRM médullaire qui objectivait des remaniements dégénératifs lombaires et cervicaux à rattacher à un état antérieur arthrosique dégénératif, indépendant de l'accident du 24 octobre 2011. (...) Ces différents symptômes sont plus à rattacher à un syndrome subjectif ainsi qu'à un syndrome dépressif, en partie réactionnel à l'accident du 24 octobre 2011, avec atteinte du narcissisme de M. [B], sans suivi psychologique ni traitement mis en place'.

Dès lors, et en l'absence d'avis médical infirmant l'existence de cet état antérieur, M. [B] ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité direct et certain entre les séquelles de l'accident et la perte de revenus tirés de son activité de moniteur de ski, étant observé qu'il ne justifie pas de ses revenus postérieurement au 31 décembre 2016.

Concernant son activité salariée, M. [B] indique avoir perdu la possibilité de travailler pour la société Veolia, sans justifier des motifs de la cessation de son activité saisonnière. Il fait état d'un licenciement en page 27 de ses conclusions, mais n'en précise ni la date ni la cause.

Enfin, il ne justifie ni de sa situation professionnelle ni de ses revenus depuis le 1er janvier 2017. Il produit plusieurs courriers de Pôle Emploi relatifs au versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi et à diverses formations en vue d'une reconversion professionnelle, mais aucun avis d'imposition permettant d'apprécier la perte financière alléguée.

S'agissant de la perte de points de retraite, celle-ci est évaluée à la somme 56 000 €, par référence à la jurisprudence, sans aucun élément de preuve versé à l'appui de sa réclamation, non explicitée par un quelconque calcul.

La carence probatoire de M. [B] doit conduire au rejet de sa demande au titre de ce poste de préjudice, en confirmation du jugement.

Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

* déficit fonctionnel temporaire

Les parties s'accordent sur les conclusions de l'expert mais s'opposent sur la base journalière d'indemnisation, M. [B] réclamant une somme de 30 € tandis que la société Allianz et son assuré offrent une somme de 20 €.

L'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire sera liquidée comme suit, en conformité avec l'avis expertal (dont les conclusions comportent une erreur puisque la deuxième hospitalisation et fixée du 27 au 29 mai 2014, comme indiqué en pages 9 et 13 du rapport) et sur la base journalière de 25 € retenue par le tribunal :

dates

25,00 €

/ jour

24/10/2011

taux déficit

total

04/11/2011

12

jours

100 %

300,00 €

05/02/2012

93

jours

30 %

697,50 €

27/05/2014

842

jours

15 %

3 157,50 €

29/05/2014

2

jours

100 %

50,00 €

10/10/2014

134

jours

15 %

502,50 €

4 707,50 €

Ce poste de préjudice est liquidé à hauteur de 4 707,50 €, soit après réduction de moitié du droit à indemnisation la somme de 2 353,75 € revenant à la victime.

* souffrances endurées

L'expert les a évaluées à 3,5/7 compte tenu du traumatisme initial et ses suites, de la rééducation et des douleurs séquellaires physiques, psychiques et morales.

Il précise que M. [B] 'a présenté dans les suites de son accident des troubles de la sensibilité profonde du membre inférieur gauche, des troubles mnésiques et un syndrome vertigineux qui ont nécessité des bilans para-cliniques dont une IRM cérébrale le 25 octobre 2013 qui est revenue normale, une IRM médullaire qui objectivait des remaniements dégénératifs lombaires et cervicaux à rattacher à un état antérieur arthrosique dégénératif, indépendant de l'accident du 24 octobre 2011'. Il ajoute que l'interrogatoire montre que ces différents symptômes 'sont plus à rattacher à un syndrome subjectif ainsi qu'à un syndrome dépressif, en partie réactionnel à l'accident du 24 octobre 2011 avec atteinte du narcissisme de M. [B], sans suivi psychologique ni traitement mis en place'.

M. [B] sollicite une indemnisation de 15 000 € dans les motifs de ses conclusions mais 10 000 € dans le dispositif, qui seul saisit la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile.

La société Allianz et son assuré concluent à la réduction de l'indemnité.

A vu des conclusions de l'expert et de la durée de la période avant consolidation (trois ans), l'indemnisation de ce poste de préjudice est liquidée à hauteur de 8 000 €, soit après réduction de moitié du droit à indemnisation la somme de 4 000 € revenant à la victime.

Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)

* déficit fonctionnel permanent

L'expert l'a évalué au taux de 15 %, en tenant compte de la réduction définitive du potentiel physique, psycho-sensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomo-physiologique, à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et répercussions psychologiques.

La victime étant âgée de 53 ans au jour de sa consolidation, l'indemnisation de ce poste de préjudice est liquidée à hauteur de 25 350 €.

Il résulte de l'attestation de débours versée aux débats que la CPAM verse à M. [B] une rente accident du travail détaillée comme suit :

- arrérages échus du 4 juillet au 15 décembre 2015 : 1 232,79 € ( soit 7,517 € par jour),

- capital rente au 16 décembre 2015 : 61 264,11 €.

En droit, la créance du tiers payeur servant à la victime une rente accident du travail doit s'imputer prioritairement sur les pertes de gains professionnels futurs, sur l'incidence professionnelle et, le cas échéant pour le reliquat, sur le déficit fonctionnel permanent s'il existe.

Après application de la réduction du droit à indemnisation à 50 %, imputation de la créance de la CPAM afférente à la rente accident du travail (62 496,90 €) et application du droit de préférence de la victime, il ne revient aucune somme à M. [B]. 

indemnité totale

débours CPAM

dette indemnit.

revenant à la victime

revenant à la CPAM

25 350 €

62 496, 90 €

12 675 €

0 €

12 675 €

* préjudice esthétique permanent

L'expert l'a évalué à 1/7 en raison des cicatrices (une cicatrice chirurgicale dorsale centrée sur les épineuses de 13 cm et une cicatrice de 1 cm² au niveau de la pulpe du pouce droit) et de la raideur dorso-lombaire.

L'indemnisation de ce poste de préjudice est liquidée à hauteur de 2 000 €, soit après réduction de moitié du droit à indemnisation la somme de 1 000 € revenant à la victime.

* préjudice d'agrément

M. [B] sollicite à ce titre une indemnisation de 5 000 €, en confirmation du jugement entrepris, au motif qu'il résulte des opérations d'expertise qu'il ne peut plus pratiquer ses activités sportives et d'agrément.

La société Allianz et son assuré concluent à la réduction de l'indemnité, qui apparaît excessive dès lors que les rachialgies sont en partie imputables à l'état antérieur arthrosique dont il est atteint.

Ce poste de préjudice tend à réparer l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs, mais également la limitation de la pratique antérieure. Il appartient à la victime qui invoque l'existence d'un préjudice d'agrément de justifier de la pratique spécifique et régulière, avant l'accident, d'une activité sportive ou de loisir devenue impossible ou difficilement praticable depuis le fait dommageable

S'il a décrit des remaniements dégénératifs lombaires et cervicaux à rattacher à un état antérieur arthrosique dégénératif indépendant de l'accident, l'expert a néanmoins retenu en conclusion de son rapport un préjudice d'agrément en lien avec le fait dommageable, résultant non d'une impossibilité mais d'une 'limitation des activités sportives antérieures du fait des rachialgies résiduelles'.

Il mentionne en page 5 du rapport, au titre des activités sportives et de loisirs pratiquées avant l'accident par la victime : 'ski, snowboard, ski de randonnée, voile, planche voie, wakeboard, kite surf, VTT, vélo, course à pied, roller, cueillette de champignons, bricolage, jardinage'.

Il résulte de son curriculum vitae que M. [B] est titulaire du BEES premier degré ski, du BEES premier degré voile et du permis de conduire bateau (mer et fluvial).

L'examen clinique a révélé une raideur dorso-lombaire et l'expert indique, au titre des doléances exprimées par la victime, des lombalgies chroniques avec limitation du port de charges, qui sont à l'origine d'une gêne dans ses activités sportives.

Compte tenu des éléments ainsi réunis et de l'âge de la victime à la consolidation (53 ans), ce poste de préjudice est liquidé à hauteur de 5 000 €, soit après réduction de moitié du droit à indemnisation la somme de 2 500 € revenant à la victime.

3 - Sur les demandes de la CPAM de l'[Localité 1] agissant pour le compte de la CPAM de [Localité 5]

Exerçant son recours subrogatoire sur le fondement de l'article L.454-1 du code de la sécurité sociale, la CPAM justifie d'une créance ainsi détaillée au titre des prestations versées dans l'intérêt de M. [B] :

- frais médicaux : 21 934,37 €

- indemnités journalières : 27 606,46 €

- rente accident du travail : 1 232,79 € (arrérages échus du 4 juillet au 15 décembre 2015) + 61 264,11 € (capital rente AT au 16 décembre 2015).

La caisse sollicite la confirmation du jugement qui a condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard à lui payer :

- la somme de 38 080,22 € au titre des prestations servies après réduction du droit à indemnisation de la victime (soit 50 773,62 € x 75 %), majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2015 sur la somme de 37 045,66 € et du 8 janvier 2016 sur le reliquat,

- 75 % des arrérages à échoir de la rente accident du travail.

En droit, l'article 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 dispose : Les recours subrogatoires des tiers payeurs s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel.

En fait, les prestations en nature de la CPAM au titre des frais médicaux et pharmaceutiques (21 934,37 €) correspondent à un préjudice de dépenses de santé avant consolidation effectivement subi par la victime, indépendamment de son statut d'assuré social. Le recours de la caisse doit être accueilli à hauteur de 10 967,19 € (21 934,37 € /2).

Comme énoncé supra, les indemnités journalières versées étant imputables sur les pertes de gains professionnels actuels subies par la victime avant sa consolidation, il revient à la caisse la somme de 10 897,36 €.

La créance de la caisse afférente à la rente d'accident versée à M. [B] étant imputable sur le poste de déficit fonctionnel permanent, il lui revient la somme de 12 675 € correspondant à la somme de 1 232,79 € au titre des arrérages échus au décembre 2015

(164 jours x 7,517 €) et 10 877,09 € au titre des arrérages échus au 2 décembre 2019 soit 12 109,88 € au titre des arrérages échus, le reliquat de 565,11 restant à échoir jusqu'au 16 février 2020.

La somme de 33 974,43 € (10 967,19 + 10 897,36  + 12 109,88) lui sera allouée au titre des prestations servies jusqu'au 2 décembre 2019, majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2015, outre la somme de 565,11 € au titre des arrérages à échoir de la rente accident du travail au fur et à mesure de leur engagement, majorés des intérêts au taux légal à compter de la date de la demande de remboursement après paiement effectif.

Le jugement entrepris sera également infirmé en ce qu'il a appliqué la réduction du droit à indemnisation de la victime au montant de l'indemnité forfaitaire due en application des dispositions de l'article L.454-1 du code de la sécurité sociale, et la somme de 1 066 € sera allouée à la CPAM au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion actualisée pour l'année 2018.

4 - Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société Allianz et son assuré, qui échouent en leur appel principal sur la responsabilité, supporteront les dépens d'appel.

L'indemnisation revenant à M. [B] et à la CPAM étant réduite en cause d'appel, leurs demandes indemnitaires fondées sur l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 10 octobre 2017, en ce qu'il a :

- condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard à payer une indemnité pour frais irrépétibles à M. [B] de 3 500 € et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1] de 1 000 €,

- condamné in solidum M. [D] et la société Allianz Iard aux entiers dépens qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire et autorisé Maître Martine Lautredou, avocate de M. [B], et la Selarl Kato & Lefebvre associés, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1], à faire application de l'article 699 du code de procédure civile pour recouvrer ceux des dépens dont ils auront respectivement fait l'avance,

Infirme le jugement pour le surplus et statuant à nouveau,

Déclare M. [W] [D] et son assureur la société Allianz Iard obligés in solidum à l'indemnisation de 50 % des conséquences dommageables de l'accident corporel dont a été victime M. [P] [B] le 24 octobre 2011,

Condamne in solidum M. [W] [D] et son assureur la société Allianz Iard à payer à M. [P] [B] les sommes suivantes en réparation de son préjudice corporel, provisions et sommes versées en exécution provisoire du jugement non déduites, avec intérêts au taux légal à compter du jugement :

- assistance par tierce personne

360,00 €

- perte de gains professionnels actuels

5 811,74 €

- déficit fonctionnel temporaire

2 353,75 €

- souffrances endurées

4 000,00 €

- préjudice esthétique permanent

1 000,00 €

- préjudice d'agrément

2 500,00 €

Dit que le préjudice de M. [B] au titre du déficit fonctionnel permanent est absorbé par la créance de la caisse primaire d'assurance maladie au titre de la rente accident du travail,

Condamne in solidum M. [W] [D] et son assureur la société Allianz Iard à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'[Localité 1] pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] les sommes suivantes, sommes versées en exécution provisoire du jugement non déduites :

- 33 974,43 € au titre des prestations servies à M. [P] [B], majorée des intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2015,

- la somme de 565,11 € au titre des arrérages à échoir de la rente accident du travail au fur et à mesure de leur engagement, majorés des intérêts au taux légal à compter de la date de la demande de remboursement après paiement effectif,

- 1 066 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion,

Condamne in solidum M. [W] [D] et son assureur la société Allianz Iard aux dépens d'appel, dont recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Rejette les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 17/22306
Date de la décision : 02/12/2019

Références :

Cour d'appel de Paris C3, arrêt n°17/22306 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-02;17.22306 ?
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