RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 13
ARRÊT DU 29 Novembre 2019
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/00903 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B43GP
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Novembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16/04100
APPELANTE
SYNDICAT DES TRANSPORTS D'ILE DE FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Mme [Z] [N] en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMÉE
ASSOCIATION SCOUTS ET GUIDES DE FRANCE
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Me Marielle GAROT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0056
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 1]
[Localité 3]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Juillet 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre
Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Conseillère
M. Lionel LAFON, Conseiller
Greffier : Mme Typhaine RIQUET, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- délibéré du 25 octobre 2019 prorogé au 15 novembre 2019 puis au 29 novembre 2019, prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre et par Mme Typhaine RIQUET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par le Syndicat des Transports d'Île-de-France (ci-après le STIF) à l'encontre du jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en date du 28 novembre 2017 dans un litige l'opposant à l'association Scouts et guides de France (ci-après dénommée l'association).
EXPOSE DU LITIGE
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.
Il suffit de rappeler que par décision en date du 29 juin 2016, le Syndicat des Transports d'Île-de-France a abrogé sa décision du 6 décembre 2001 accordant à l'association Scouts et guides de France l'exonération du versement de transport.
Contestant cette décision, l'association a, par lettre adressée le 28 juillet 2016, saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris.
Par jugement rendu le 28 novembre 2017, ce tribunal a annulé la décision du 29 juin 2016 contestée.
Le STIF a interjeté appel de cette décision et fait plaider par son représentant des conclusions aux termes desquelles il demande à la cour de :
- dire et juger que le jugement viole les dispositions des articles L.2531-2 du code général des collectivités territoriales, 1353 du code civil et 455 du code de procédure civile,
En conséquence,
- infirmer le dit jugement,
- dire et juger que le siège social et le centre national de [Localité 4] de l'association Scouts et guides de France n'ont pas une activité de caractère social au sens de l'article L.2531-2 du code général des collectivités territoriales,
- dire et juger que la décision n°2016-0020 du 29 juin 2016 du STIF est fondée en droit,
- rejeter la demande de l'association,
- condamner l'association à payer au STIF la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il reproche au tribunal d'avoir inversé la charge de la preuve, de ne pas avoir répondu à ses conclusions et estime que l'association n'a pas d'activité à caractère social.
L'association Scouts et guides de France fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions tendant à :
- annuler la décision du 29 juin 2016 par laquelle le STIF a abrogé sa précédente décision qui l'exonérait du versement transport,
- dire qu'elle remplit les conditions d'exonération du versement transport prévues par l'article L.2531-2 du code général des collectivités territoriales et qu'en conséquence elle doit être exonérée de ce versement pour son établissement situé en Ile-de-France réunissant le siège de l'association et le centre national,
- condamner le STIF à lui payer 4.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle estime que la décision d'abrogation est entachée d'irrégularité car le STIF ne justifie pas en quoi la nature de l'activité aurait changé durant la période visée, soit entre 2001 et 2016. Elle considère que c'est à la date d'effet de l'abrogation, soit le 1er janvier 2017, que les conditions d'exonération doivent être vérifiées, qu'elle n'exerce plus d'activité au sein du domaine de [Localité 4], que le caractère social de son activité ne peut s'apprécier au regard d'un seul établissement et que l'établissement parisien n'exerce pas qu'une activité de siège social. Elle fait valoir que son activité présente bien un caractère social compte-tenu de la nature même de son activité principale de scoutisme et de son activité accessoire de formation, de la part prépondérante prise par les bénévoles dans ces activités, du mode de financement de ses activités et des 'tarifs' pratiqués qui permettent au public le plus large d'enfants et de jeunes d'en bénéficier.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées par les parties pour un plus ample exposé des moyens développés au soutien de leurs prétentions.
SUR CE,
- Sur les conditions de l'exonération :
Aux termes de l'article L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales, dans la région d'Ile-de-France, les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, à l'exception des fondations et associations reconnues d'utilité publique, à but non lucratif, dont l'activité est de caractère social, sont assujetties à un versement de transport lorsqu'elles emploient plus de neuf salariés ( ...) .
Ainsi pour bénéficier de l'exonération du versement de transport, trois conditions doivent cumulativement être remplies : la reconnaissance d'utilité publique, un but non lucratif et une activité à caractère social. Il s'en déduit que même si un seul critère a été visé par la décision d'abrogation de l'exonération, ce sont néanmoins ces trois critères qui doivent être satisfaits pour obtenir ou maintenir cette exonération. Par ailleurs, les conditions s'apprécient au jour de la décision rendue par le STIF.
En l'espèce, la décision contestée étant en date du 29 juin 2016, il convient de rechercher si à cette date l'association Scouts et guides de France justifiait de l'ensemble de ces conditions, étant précisé que les critères d'utilité publique et de but non lucratif ne sont pas discutés en l'espèce.
- Sur l'activité à caractère social :
S'agissant d'une exception au principe d'assujettissement, c'est à l'association qu'incombe la charge de la preuve que ses activités ont un caractère social. Ce caractère s'apprécie au regard des modalités d'exercice de son activité. Sur ce point, le recours au bénévolat, la gratuité ou la participation modique au regard des prestations et la nécessité de recourir à des aides extérieures pour équilibrer le budget participent de la reconnaissance du caractère social de l'activité.
L'association soutient ne plus exercer d'activité sur le site de [Localité 4] depuis la conclusion avec la société Scoutik d'un bail commercial et d'un contrat de cession de branches d'activités portant sur la vente d'objets et l'accueil de groupes. Or au regard du contrat de cession du 15 novembre 2015 et de la page internet de la boutique du scoutisme qu'elle produit, il apparaît que la société Scoutik est la filiale de l'association, laquelle exploite bien le site de [Localité 4] et y exerce des activités de vente d'objets et d'accueil de groupes par l'intermédiaire de sa filiale.
Elle indique que le site de [Localité 4] permet aux groupes de scouts d'y camper, la tenue de réunion et de rassemblements par les responsables de l'association. Néanmoins ce critère n'est pas en soi suffisant à caractériser une activité de caractère social.
En outre elle reconnaît qu'au siège social, '47 salariés sont en charge d'activités relevant des fonctions support (ressources humaines, administration et finances, communication)', lesquelles ne sont pas des activités à caractère social.
L'association affirme que le bénévolat est la première ressources de financement sans pour autant le démontrer. De plus, elle produit les sources de financement de l'exercice 2000/2001 et de l'exercice 2016/2017 au niveau national, lesquels, outre le fait que l'exercice 2000/2001 concerne une période hors litige, ne permettent pas d'étudier spécifiquement les financements de ces établissements en Ile-de-France.
Elle mentionne la présence de 21 182 bénévoles pour 131 salariés, pour l'ensemble des établissements ce qui ne permet pas de vérifier la réalité du bénévolat en Ile-de-France. Elle se prévaut également de 354 bénévoles pour 71 salariés dans l'établissement comprenant le siège social et le centre national, et produit un document listant les bénévoles nationaux, sans en-tête, ni date ainsi que la liste du personnel salarié de 2016 du siège social, qui ne peuvent être comparés en raison de l'absence de preuve de concordance des dates et de l'absence de distinction des employés du centre national.
L'association produit la grille de cotisation appliquée dans tous les centres, dont la modicité des sommes est avérée. Cependant, il n'est pas possible de vérifier le nombre de personnes concernées pour chaque catégorie du barème, ni la tranche comportant le plus de cotisants, car les seuls chiffres produits correspondent une nouvelle fois au niveau national.
De plus, les tarifs des formations proposées, notamment de 435€ pour le brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur (BAFA) et 543€ pour le brevet d'aptitude aux fonctions de directeur (BAFD), correspondent aux prix moyens proposés et ne peuvent en aucun cas être considérés comme des sommes modiques.
En l'absence d'indices suffisants, l'association Scouts et guides de France ne rapporte pas la preuve qu'elle exerce une activité de caractère social au sens des dispositions de l'article L.2531-2 du code des collectivités territoriales, susceptible de lui faire bénéficier de l'exonération de la taxe de transport.
Dés lors, faute de satisfaire à ce critère, l'association Scouts et guides de France ne pouvait bénéficier d'une exonération du versement de transport au 1er janvier 2017.
Le jugement doit donc être infirmé.
Eu égard à la décision rendue, à l'équité et aux circonstances, il convient de rejeter les demandes présentées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement entrepris,
Déboute les parties de leur demande au titre des frais irrépétibles,
Condamne l'association Scouts et guides de France aux dépens d'appel.
La Greffière,La Présidente,