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28/11/2019 | FRANCE | N°18/09476

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 28 novembre 2019, 18/09476


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9



ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2019



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/09476 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5VQF



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Avril 2018 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2016061409





APPELANTE :



Madame [S] [G]

Demeurant [Adresse 2]

[Localité

5]



représentée par Me Nathalie DREUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C1644,

représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065





INTIMÉS :



Ma...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2019

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/09476 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5VQF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Avril 2018 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2016061409

APPELANTE :

Madame [S] [G]

Demeurant [Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Nathalie DREUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C1644,

représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

INTIMÉS :

Madame [R] [X]

Demeurant [Adresse 1]

[Localité 5]

Monsieur [H] [Y]

Demeurant [Adresse 1]

[Localité 5]

SARL CRISTASEYA, pris en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 793 992 736

Ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 4]

représentés par Me Emilie PERICARD de la SELARL BLACKSTONE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0974

COMPOSITION DE LA COUR :

    En application des dispositions de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Octobre 2019, en audience publique, devant Madame Michèle PICARD, Présidente de chambre, Madame Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère et Madame Aline DELIERE, Conseillère.

           Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame Hanane AKARKACH

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Michèle PICARD, Présidente de chambre et par Madame Hanane AKARKACH, Greffière présente lors du prononcé.

*****

FAITS ET PROCÉDURE :

La SARL Cristaseya, constituée en mai 2013 par Mme [R] [X] et Mme [S] [G], co-gérantes, commercialise du prêt-à-porter et des objets de décoration intérieure haut de gamme, vendus essentiellement par un réseau de boutiques de luxe.

Le 1er juin 2015 les deux associées ont cédé chacune 13 parts sociales (sur 100) à M. [H] [Y].

Le 4 avril 2016 Mme [X] a convoqué l'assemblée générale ordinaire de la société Cristaseya afin qu'il soit statué sur la révocation du mandat de Mme [G] pour les motifs énoncés dans le rapport joint à la convocation :

«'Conformément aux dispositions légales, nous vous proposons de révoquer Mme [G] [S] de ses fonctions de co-gérant de la société pour justes motifs consistant en la mauvaise gestion de la facturation de la société, et plus généralement, en l'existence d'un désaccord stratégique avec le co-gérant et les autres associés de la société.

En effet, nous avons notamment constaté que Mme [G] [S] avait omis d'émettre différentes factures au nom de la société pour un montant total de 19 719 euros, que les mentions obligatoires devant figurer sur les factures de la société n'étaient pas toujours reproduites et que la TVA n'était pas systématiquement comptabilisée sur les factures émises.'»

Le 19 avril 2016 l'assemblée générale ordinaire de la société Cristaseya a décidé à la majorité de 63% des voix de révoquer le mandat de co-gérante de Mme [G] pour les motifs exposés dans la convocation.

Le 21 juillet 2016 le président du tribunal de commerce de Paris, statuant en référé, a débouté Mme [G] de ses demandes d'annulation de la décision de l'assemblée générale du 19 avril 2016, de provision pour dommages et intérêts et de nomination d'un administrateur provisoire.

Le 12 octobre 2016 Mme [G] a assigné devant le tribunal de commerce de Paris la société Cristaseya et ses deux associés en annulation de la décision de l'assemblée générale du 19 avril 2016, en désignation d'un administrateur provisoire et en paiement d'une indemnité provisionnelle de 35 000 euros, et à défaut en désignation d'un mandataire ad hoc pour vérifier les comptes de la société et concilier les associés.

Par jugement du 13 avril 2018 le tribunal de commerce de Paris :

- a débouté Mme [G] de l'ensemble de ses demandes,

- l'a condamnée aux dépens et à payer la somme de 3 000 euros à Mme [X] et M. [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [G] a fait appel le 15 mai 2018.

Elle expose ses moyens et ses demandes dans ses dernières conclusions notifiées et remises au greffe le 11 septembre 2019 auxquelles il est renvoyé en application de l'article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.

Elle conclut à l'infirmation du jugement et demande à la cour :

- d'annuler la décision de révocation de son mandat de co-gérante du 19 avril 2016 pour abus de majorité,

- à titre subsidiaire, de nommer un administrateur provisoire afin de superviser la gestion de la société Cristaseya et de condamner solidairement Mme [X] et M. [Y] à lui verser à titre de provision la somme de 67 500 euros à titre de dommages et intérêts,

- à titre plus subsidiaire, de nommer un mandataire ad hoc ayant pour mission de procéder à la vérification des comptes de la société Cristaseya, procéder à la vérification des modalités de règlement des conventions non approuvées avec la société Kaboto et de condamner solidairement Mme [X] et M. [Y] à lui verser à titre de provision la somme de 67 500 euros à titre de dommages et intérêts.

Elle réclame la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [X], M. [Y] et la société Cristaseya exposent leurs moyens et leurs demandes dans leurs dernières conclusions notifiées et remises au greffe le 25 octobre 2018 auxquelles il est renvoyé en application de l'article 455 alinéa 1 du code de procédure civile.

Ils demandent à la cour de déclarer irrecevables les conclusions de Mme [G] du 27 juillet 2018 pour violation des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, ils demandent à la cour de confirmer le jugement.

Ils réclament la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE L'ARRÊT

1) Sur la demande au titre de l'irrecevabilité des conclusions de Mme [G]'du 27 juillet 2018

Les intimés soutiennent que Madame [G] aurait du, dès ses premières conclusions et ce à peine d'irrecevabilité en application de l'article 910-4 du code de procédure civile et de caducité de l'appel, exposer les critiques des chefs du jugement du 13 avril 2018 dont elle a interjeté appel, mais que ses conclusions en réponse en vue de l'audience du 28 septembre 2017 devant le tribunal de commerce de Paris et ses conclusions du 27 juillet 2018 sont, à l'exception de quelques commentaires, identiques et qu'il en ressort qu'elle n'a formulé aucune critique du jugement déféré.

Mme [G] répond que la déclaration d'appel a été réalisée en respect des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure et que ses conclusions d'appelante régularisées le 27 juillet 2018 contiennent l'ensemble de ses prétentions au fond.

Le tribunal de commerce a débouté Mme [G] de toutes ses demandes.

La déclaration d'appel précise qu'elle critique cette décision de débouté de l'ensemble de ses demandes. Ses conclusions du 27 juillet 2018 mentionnent, dans leur dispositif, qu'elle sollicite l'infirmation du jugement et qu'elle demande à la cour de statuer sur toutes les demandes qu'elle avait formées devant le premier juge, ces demandes étant précisément reprises.

Ses conclusions sont conformes aux dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile alinéa 1 qui énonce qu'à peine d'irrecevabilité les parties doivent présenter dans leurs premières conclusions l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. Elles seront déclarées recevables.

2) Sur la demande d'annulation de la décision de l'assemblée générale du 19 avril 2016 pour abus de majorité'

Mme [G] soutient que la décision de l'assemblée générale du 19 avril 2016 doit être annulée pour abus de majorité car elle favorise uniquement Mme [X], qui est rémunérée depuis le 10 octobre 2016, alors qu'avant les co-gérantes ne percevaient aucune rémunération, et M. [Y], qui a augmenté les prestations de sa société Kaboto au profit de la société Cristaseya, sans respect des dispositions de l'article L223-19 du code de commerce sur les conventions réglementées, et qui perçoit une rémunération plus importante comme directeur artistique. Elle ajoute qu'elle ne percevra jamais de dividendes, compte-tenu du conflit qui l'oppose à Mme [X], et que sa révocation va à l'encontre de l'intérêt général de la société Cristaseya car elle a provoqué une baisse de l'activité de la société, baisse qui n'est pas la conséquence de faits de concurrence déloyale et de parasitisme dont elle est accusée à tort.

Les intimés répondent que la rémunération accordée à Mme [X] par décision du 10 octobre 2016 est justifiée au regard de ses responsabilités accrues depuis la révocation de Mme [G], que les factures de la société Kaboto sont justifiées car elles correspondent à des prestations de communication qui ont permis d'augmenter l'activité de la société Cristaseya et que leur montant est calculé à des tarifs préférentiels. Ils ajoutent que Mme [G] ne sera pas spoliée car elle pourra toucher le fruit de son investissement comme associée par le biais des dividendes. Ils répondent également que sa révocation est consécutive à des fautes de gestion et que les difficultés rencontrées ensuite par la société sur le marché japonais sont imputables au comportement de Mme [G] auprès des fournisseurs et clients japonais.

L'abus de majorité est caractérisé quand la décision contestée est contraire à l'intérêt général de la société et quand elle favorise les membres majoritaires au détriment des membres minoritaires.

Le 10 octobre 2016 l'assemblée générale de la société Cristaseya a décidé d'allouer à Mme [X] une rémunération mensuelle de 2500 euros nets par mois. Mais cette rémunération, qui est prévue par les statuts de la société, est justifiée au regard des nouvelles responsabilités de Mme [X], restée seule gérante. A juste titre les intimés relèvent qu'en 2016, grâce à son activité et celle de la société Kaboto, le chiffre d'affaires de la société a plus que doublé par rapport à l'année 2015.

S'agissant des factures de la société Kaboto, chargée de la direction artistique de la société, les intimés justifient que les prestations de direction artistique et photographiques ont été facturées en 2015 pour des montants moins élevés que pour d'autres sociétés, que les prestations facturées en 2016 correspondent à l'augmentation de l'activité de la société et que celles facturées en 2017 correspondent aux efforts de la société Cristaseya pour pallier les pertes de commandes subies au deuxième semestre 2016. Quant au chiffre d'affaires de la société Kaboto, il doit être relevé que celui de l'année 2018 est en fait du même niveau que celui de 2015, après une baisse en 2016 et en 2017, de telle sorte qu'il n'est pas établi que M. [Y], dirigeant de cette société, a profité du départ de Mme [G] pour s'enrichir.

Les conventions réglementées avec la société Kaboto devaient être approuvées par l'assemblée générale et ont bien été soumises à celle-ci en 2016, 2017 et 2018 mais n'ont pas été approuvées par la majorité des associés. M. [Y] n'a pas participé au vote et Mme [G] a refusé systématiquement de ratifier les conventions. Dans ces conditions il ne peut être affirmé, comme le fait Mme [G], que les conventions n'ont pas été ratifiées parce qu'elles avaient des conséquences préjudiciables pour la société et ce au profit de M. [Y], alors que Mme [G] pouvait par son seul vote rejeter la demande de ratification.

Mme [G] ne démontre donc pas que c'est son départ, et non leur travail, qui est la cause d'une augmentation des revenus de ses associés.

Mme [G] soutient qu'elle subit un préjudice en sa qualité d'actionnaire minoritaire sans pouvoir de décision parce qu'elle a été spoliée des investissements personnels réalisés de 2013 à 2016 et qu'elle ne percevra pas de dividendes. Mais ainsi que l'a relevé le tribunal de commerce, en sa qualité d'associée elle a vocation à percevoir des dividendes quand ils seront distribués, et son investissement personnel l'a été au profit de la société dont la valeur s'est accrue, ce dont elle profite également. La révocation de son mandat n'a donc pas eu pour effet de la spolier.

Enfin Mme [G] ne démontre pas que sa révocation va à l'encontre de l'intérêt général de la société.

En l'espèces la révocation est intervenue notamment à la suite d'irrégularités comptables décrites dans la convocation à l'assemblée générale, qui ne sont pas contestées. Ces irrégularités pouvaient avoir des conséquences fiscales et financières importantes au détriment de la société, ce qui justifie déjà la décision de révocation dans l'intérêt général de celle-ci.

Sa révocation est intervenue également à la suite d'une mésentente stratégique avec les actionnaires majoritaires, notamment sur le positionnement des produits et de la marque, de haut de gamme relevant de boutiques de luxe, que Mme [G], ce qu'elle ne conteste pas, voulait commercialiser dans des magasins grand public.

Mme [G] invoque le fait qu'avant son départ l'entreprise avait une croissance continue et que depuis elle connaît une forte baisse d'activité. Elle reconnaît toutefois que la société a retrouvé un chiffre d'affaires en octobre 2017 légèrement supérieur à celui qu'elle avait avant la révocation de son mandat de gérant en avril 2016.

La baisse du chiffre d'affaires après son départ n'a donc été que temporaire et par ailleurs les intimés versent à la procédure plusieurs pièces qui établissent qu'après son départ Mme [G] a créé sa propre société, en 2016, commercialisant sous la marque «'[G]'» les mêmes produits que ceux de la société Cristaseya, et a entretenu une confusion, au lancement de sa marque, entre celle-ci et la marque Cristaseya, qu'elle a dénigré la société auprès de certains fournisseurs et clients, en les informant des procès en cours et en se plaignant d'avoir été victime d'une escroquerie et que des fournisseurs ont annulé des commandes, compromettant le lancement de la nouvelle collection à l'automne 2016.

Ainsi, indépendamment du fait qu'en raison de ses origines japonaises Mme [G] avait certainement permis à la société de se développer sur ce marché et que son départ a enrayé ce développement, son comportement déloyal et son rôle dans les difficultés temporaires de la société Cristaseya sont établis. Le 19 juin 2018 la société Cristaseya a d'ailleurs engagé une action en réparation de ses agissements à l'encontre de Mme [G].

Celle-ci ne peut donc, sans mauvaise foi, affirmer que sa révocation est la seule cause de la baisse de l'activité et du chiffre d'affaires de la société Cristaseya en 2017.

Le jugement sera donc confirmé pour avoir retenu que la révocation du mandat de co-gérante de Mme [G] ne relève pas de l'abus de majorité et avoir rejeté la demande d'annulation de cette décision sur ce fondement.

3) Sur la demande d'indemnité provisionnelle pour révocation abusive du mandat de co-gérante

Mme [G] soutient que sa révocation est abusive car elle ne repose pas sur un juste motif, ses associés n'apportant pas la preuve que les fautes reprochées lui sont directement imputables et que la société a subi un préjudice réel imputable à elle seule. Elle ajoute que les divergences de stratégie n'affectaient pas les résultats de la société qui était en pleine croissance et que ses associés ont mis en oeuvre la politique stratégique qu'ils critiquaient.

Les intimés répondent que les motifs invoqués dans la convocation à l'assemblée générale sont établis et constituent un juste motif de révocation.

Aux termes de l'article L223-25 du code de commerce, si le gérant d'une SARL est révoqué sans juste motif des dommages et intérêts peuvent lui être alloués.

Il ressort des échanges entre Mme [G] et la comptable, versés à la procédure, que Mme [G] a commis un certain nombre d'irrégularités comptables : absence de certaines mentions obligatoires et absence de TVA sur certaines factures ; défaut de facturation de certaines ventes pour un montant total de 19 719,00 euros. Ces erreurs ont été reprises par Mme [X] et la comptable de telle sorte que l'assemblée générale du 10 octobre 2016 a pu donner quitus des comptes à la gérante, ce quitus ne prouvant donc pas qu'aucune erreur n'a été commise, contrairement à ce que soutient Mme [G].

Il ressort du rapport [D] du 4 février 2016 sur le fonctionnement global de la société qu'il existe un énorme problème de communication et de fonctionnement en équipe, notamment entre les deux co-gérantes, et qu'il est nécessaire de formaliser les objectifs par écrit, de réaliser des évaluations annuelles et de partager la stratégie et la feuille de route. Les parties sont d'accord sur le fait qu'il existait des divergences entre Mme [X] et M. [Y] d'une part et Mme [G] d'autre part, sur la stratégie commerciale de la société.

Même s'il n'est pas établi que la position de Mme [G] était contraire à l'intérêt de la société et que ses décisions ont affecté négativement ses résultat de la société, la mésentente entre les deux co-gérantes, qui perdurait et entravait le bon fonctionnement de la société, constitue bien un juste motif de révocation, qui s'ajoute au motif rappelé ci-dessus.

Le jugement sera donc confirmé pour avoir rejeté la demande de dommages et intérêts pour révocation abusive du mandat de co-gérante de Mme [G].

4) Sur la demande de désignation d'un administrateur provisoire

Mme [G] soutient que le fonctionnement normal de la société est impossible au regard du désaccord manifeste entre les associés et que ces dysfonctionnements affectent l'avenir de la société dans la mesure où le maintien des relations commerciales avec le marché japonais dépend en grande partie de sa participation à la gestion de la société, dont elle est désormais écartée. Elle ajoute que la nomination d'un administrateur provisoire est nécessaire pour protéger ses droits d'associée minoritaire et l'intérêt social de la société et pour permettre le rétablissement du fonctionnement normal de la société.

Les intimés répondent que les arguments de Mme [G], qui se prévaut de sa propre turpitude, sont erronés pour justifier d'un dysfonctionnement de la société Cristaseya et que les résultats des années 2015, 2016 et 2017 et le prévisionnel 2018 démontrent que celle-ci n'est pas en péril.

En premier lieu, la révocation de Mme [G] a été décidée pour mettre fin, avec d'autres mesures, aux dysfonctionnements signalés dans le rapport [D] et Mme [G] ne démontre pas que la société ne fonctionne pas actuellement de façon normale, même s'il peut exister des désaccords entre les associés, ni que les associés majoritaires prennent des décisions contraires à l'intérêt social.

En second lieu il ressort des bilans comptables versés à la procédure pour les années 2014 à 2017 et de l'attestation de l'expert comptable de la société sur le chiffre d'affaires pour l'année 2018, le montant du chiffre d'affaires étant de 942 935 euros au 30 septembre 2018, que la société n'est pas en péril actuellement ou de façon imminente.

Notamment l'augmentation importante des charges d'exploitation visée par Mme [G] entre 2015 et 2016 n'est pas anormale au regard de la croissance postérieure du chiffre d'affaires et ne permet pas d'affirmer que la société est en péril.

Compte-tenu de ces éléments, la situation de la société ne justifie pas qu'un administrateur provisoire soit désigné pour superviser la gestion de la société Cristaseya comme il est demandé. Le jugement, qui a rejeté cette demande, sera confirmé.

5) Sur la demande de désignation d'un mandataire ad hoc

Madame [G] fait valoir que lorsque les conditions de nomination d'un administrateur provisoire ne sont pas réunies, la cour peut nommer un mandataire ad hoc à qui il confère une mission ponctuelle.

Les intimés répondent que dans le cadre d'une personne morale de droit privé ayant une activité commerciale, seul le représentant légal est habilité à solliciter la désignation d'un mandataire ad hoc conformément à l'article L611-3 du code de commerce. Ils relèvent en outre que la société n'est pas en état de cessation des paiements et qu'une éventuelle nomination impliquerait un coût supplémentaire.

La demande de désignation d'un mandataire ad hoc, hors les cas visés par les articles 223-27 et 235-7 du code de commerce seuls cités par Mme [G], ne peut être fondée que sur les dispositions de l'article L611-3 du code de commerce.

En l'espèce, Mme [G] ne représente pas la société Cristaseya et ne justifie pas non plus que celle-ci est en difficulté ou va être en difficulté, et ne peut solliciter la désignation d'un mandataire ad hoc.

Le jugement, qui a rejeté sa demande, sera donc confirmé.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

DÉCLARE recevables les conclusions de Mme [G] notifiées et remises au greffe le 27 juillet 2018,

CONFIRME le jugement déféré,

DÉBOUTE Mme [G] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

LA CONDAMNE aux dépens et à payer à Mme [X], M. [Y] et la société Cristaseya, conjointement, la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente

Hanane AKARKACH Michèle PICARD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 18/09476
Date de la décision : 28/11/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°18/09476 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-28;18.09476 ?
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