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07/11/2019 | FRANCE | N°17/08492

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 07 novembre 2019, 17/08492


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 07 NOVEMBRE 2019



(n° , 24 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/08492 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3DV5



Sur renvoi après un arrêt de la Cour de cassation prononcé le 29 mars 2017 emportant cassation d'un arrêt rendu par la cour d'appel de PARIS ( Pôle 5- Chambre 5) le 10 septembre 2015 (RG n° 15/01899),

sur appel d'un jugement rendu le 12 juillet 2013 par le tribunal de grande instance d'EVRY (RG n°13/01859)





DEMANDEUR A LA SAISINE



Maître [B] [C] ès-...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 07 NOVEMBRE 2019

(n° , 24 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/08492 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3DV5

Sur renvoi après un arrêt de la Cour de cassation prononcé le 29 mars 2017 emportant cassation d'un arrêt rendu par la cour d'appel de PARIS ( Pôle 5- Chambre 5) le 10 septembre 2015 (RG n° 15/01899), sur appel d'un jugement rendu le 12 juillet 2013 par le tribunal de grande instance d'EVRY (RG n°13/01859)

DEMANDEUR A LA SAISINE

Maître [B] [C] ès-qualités de mandataire liquidateur de la SOCIÉTÉ ACHAT DIRECT

Demeurant [Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Pascale FLAURAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0090

Ayant pour avocat plaidant Me Eric DELFLY, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEUR A LA SAISINE

Monsieur [T] [P]

Demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2]

Né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 4]

Représenté par Me Gaël GRIGNON DUMOULIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0371

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 avril 2019, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Christine SOUDRY, Conseillère, chargée du rapport

Madame Estelle MOREAU, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Christine SOUDRY dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Hortense VITELA-GASPAR

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Madame Hortense VITELA-GASPAR, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Achat Direct, dont le gérant et l'associé unique est M. [A] [R], a pour activité l'import, l'export pour tout article textile, petit accessoire de la maison, cadran, gadget et autres produits de commercialisation hors alimentaires.

Cette société détenait une participation minoritaire dans la société Nouveauxproduits.com devenue la société Tavulesprix.com.

Le 20 septembre 2007, elle a conclu avec M. [T] [P] un contrat d'agence commerciale pour la représenter en exclusivité sur la France entière auprès de la clientèle suivante : grande et moyenne surfaces, rayon bazar/décoration.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 6 décembre 2012, la société Achat direct a reproché, par l'intermédiaire de son conseil, à M. [P] d'avoir accepté une carte de représentation de la société People love it, distribuant des produits concurrents, en violation de ses obligations et lui a demandé de cesser cette représentation sous peine de résiliation du contrat à ses torts exclusifs.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 14 janvier 2013, M. [P], prétendant avoir apporté à la société Achat direct la clientèle de la société Groupon France et se prévalant de l'engagement de la société Tavulesprix.com, à laquelle cette clientèle avait été transférée, de lui régler une commission de 10% sur les affaires traitées, a mis en demeure la société Tasvulesprix.com de lui adresser le relevé de toutes les factures adressées à la société Groupon France et de lui régler le montant des commissions correspondantes.

Par exploit du 22 janvier 2013, M. [P] a fait délivrer à la société Achat direct une sommation de lui régler la facture du mois de septembre 2012, de lui adresser le relevé des commissions des affaires réalisées en septembre, octobre, novembre et décembre 2012 et le double des factures correspondantes éditées pendant la période des mois d'août à décembre 2012, de fournir une attestation de son expert-comptable certifiant comme exhaustifs les relevés de commissions établis, de produire les factures Electro dépôt concernant les ventes à cette société réalisées depuis l'année 2011, d'adresser copie du grand livre comptable établissant le montant des affaires réalisées pendant les années 2008 à 2012 ainsi que le tarif général actualisé 2013, sous huitaine, sous peine de voir constater l'inexécution des obligations issues du contrat d'agent commercial du 20 septembre 2017.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 23 janvier 2013, la société Achat direct a rompu le contrat d'agent commercial en reprochant à M. [P] divers manquements et notamment un défaut de loyauté pour avoir accepté les mandats d'entreprises concurrentes, les sociétés People love it et [V].

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 30 janvier 2013, M. [P] a contesté les motifs de rupture invoqués et mis en demeure la société Achat direct de lui payer une somme de 118.472,17 euros TTC à titre d'indemnité de préavis ainsi qu'une somme de 792.458 euros à titre d'indemnité de cessation de contrat outre les commissions dues.

Cette mise en demeure étant demeurée vaine, M. [P] a fait assigner la société Achat direct, M. [R] ainsi que la société Tavulesprix.com, par exploits des 26 et 27 février 2013, devant le tribunal de grande instance d'Evry pour demander le versement des indemnités qu'il estimait devoir lui être dues, de ses commissions, ainsi que l'instauration d'une mesure d'expertise.

***

PROCÉDURE :

Par jugement du 12 juillet 2013, le tribunal de grande instance d'Evry s'est déclaré compétent et a :

- rejeté la demande de disjonction formée par la société Tavulesprix.com ;

- déclaré M. [P] recevable en l'ensemble de ses demandes, notamment en ce qu'elles sont formées à l'encontre de la société tavulesprix.com ;

- rejeté les demandes tendant au renvoi des parties devant le juge de la mise en état ;

- dit qu'aucune faute grave ne justifiait la rupture du contrat d'agent commercial du 20 septembre 2007 ;

- débouté M. [P] de ses demandes en ce qu'elles étaient dirigées contre la société Tavulesprix et M. [A] [R] à titre personnel ;

- condamné la société Achat direct à payer à M. [P] 792.458 euros à titre d'indemnité de cessation de contrat et 99.057 euros à titre d'indemnité de préavis ;

- condamné la société Achat direct à payer à M. [P] la somme de 30.886,12 euros TTC à titre de rappel de commissions pour les mois de juillet 2012 et de septembre 2012 ;

- dit que ces sommes seraient assorties des intérêts au taux légal à compter du 26 février 2013, avec application de l'article 1154 du code civil ;

- ordonné une expertise ;

- condamné la société Achat direct à verser à M. [P] 10.000 euros à titre de provision sur les commissions qu'elle resterait lui devoir pour la période d'octobre 2012 à janvier 2013 ;

- condamné la société Achat direct à verser à M. [P] 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- ordonné l'exécution provisoire pour la totalité des sommes allouées, à l'exception de l'indemnité de rupture de 792.458 euros sur laquelle l'exécution provisoire a été limitée au tiers de cette somme ;

- réservé les dépens.

La société Achat direct a interjeté appel de cette décision le 26 juillet 2013.

Cet appel a été enregistré sous le numéro RG 13/15564.

M. [P] a interjeté appel de la même décision le 07 août 2013 en intimant uniquement M. [R]. Cet appel a été enregistré sous le numéro RG 13/16504.

Par ordonnance du 30 janvier 2014, le conseiller de la mise en état a radié l'appel enregistré sous le numéro RG 13/15564.

Par arrêt du 2 octobre 2014, la cour d'appel de Paris a, dans l'affaire enregistrée sous le numéro RG 13/16504 :

-déclaré irrecevables les demandes formées au titre de l'appel de la société Achat direct dans les conclusions signifiées en son nom et en celui de M. [R] le 3 juin 2014,

-confirmé le jugement du tribunal de grande instance d'Evry du 12 juillet 2013 en ses seules dispositions par lesquelles il a débouté M. [P] de ses demandes dirigées contre M. [R] à titre personnel,

-rejeté la demande de M. [P] tendant à ce qu'une expertise soit ordonnée concernant M. [R],

-rejeté toute autre demande,

-dit n'y avoir lieu à condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné M. [P] aux dépens d'appel avec l'autorisation d'en procéder au recouvrement selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile.

Après réenrôlement de l'affaire enregistrée sous le numéro RG 15/01899, la cour d'appel de Paris a, par arrêt du 10 septembre 2015 :

- confirmé le jugement déféré sauf en ce qu'il a ordonné une expertise ;

- condamné la société Achat direct à payer à M. [P] la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté toute autre demande ;

- condamné la société Achat direct en tous les dépens de première instance et d'appel avec l'autorisation d'en procéder au recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Achat direct a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole du 21 septembre 2015 et Me [B] [C] a été désigné en qualité de mandataire judiciaire.

La société Achat direct et Me [C] ès-qualités ont formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 10 septembre 2015.

M. [P] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Par jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole du 18 janvier 2017, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en une procédure de liquidation judiciaire.

Par arrêt du 29 mars 2017, la chambre commerciale de la Cour de cassation a :

- cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remis, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris, autrement composée,

Sur le premier moyen du pourvoi principal,

aux motifs que:

1/ « pour imputer la rupture du contrat à la société Achat direct en excluant la faute grave de M. [P], condamner la première à payer au second des indemnités de cessation de contrat ainsi que de préavis et rejeter la demande reconventionnelle de la société Achat direct en réparation du préjudice résultant de la violation par l'agent de ses obligations contractuelles, l'arrêt, après avoir constaté que M. [P] avait accepté de commercialiser des luminaires pour le compte de la société People love it, retient que la société Achat direct, qui ne justifie pas que l'agent ait représenté pour celle-là d'autres produits que les luminaires, ne démontre pas qu'il a commis une faute grave ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté, par motifs propres et adoptés, que le mandat donné par la société Achat direct à M. [P] portait sur la commercialisation de tous ses produits dans le secteur de la grande distribution, rayon bazar et décoration, et que la société People love it avait pour activité l'achat et la vente import/export de tout article sans prédominance alimentaire, ce dont il se déduisait que les deux sociétés se trouvaient dans un rapport de concurrence, de sorte que l'acceptation par M. [P] de la représentation de la société People love it, fût-ce pour une catégorie de produits, sans l'autorisation de la société Achat direct, était constitutive d'une faute grave, la cour d'appel a violé les (articles L. 134-3 et L. 134-13 du code de commerce) ;

2/ « pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore que lorsque la société Achat direct a fait état de ce que l'activité de la société People love it était directement concurrente de la sienne, M. [P] a pris l'engagement de cesser toute relation avec celle-ci ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le seul fait pour M. [P] de représenter, sans autorisation de la société Achat direct, la société People love it, entreprise concurrente de celle de sa mandante, était de nature à constituer une faute grave privative de toute indemnité lors de la cessation du contrat, la cour d'appel a violé les (articles L. 134-3 et L. 134-13 du code de commerce) ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident,

au visa des articles L. 134-6, alinéa 2, R. 134-3 et R. 134-4 du code de commerce,

aux motifs que: « pour rejeter la demande d'expertise de M. [P] au titre des commissions concernant le client Electrodépôt, l'arrêt retient que la société Achat direct ne disposait pas d'un seul agent commercial et que, M. [P] ne justifiant pas des produits qu'il avait représentés auprès de ce client, il ne peut être suppléé à sa carence probatoire par une mesure d'expertise ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté que la société Electrodépôt faisait partie de la clientèle réservée par le contrat à M. [P] de sorte que celui-ci avait un droit à commission pour toute opération conclue pendant sa durée et qu'il incombait au mandant de fournir les éléments permettant leur calcul, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs inopérants, n'a pas donné de base légale à sa décision ».

Me [C] ès-qualités a saisi la cour de renvoi par déclaration en date du 11 avril 2017.

Par conclusions d'incident du 16 novembre 2018, M. [P] a saisi le conseiller de la mise en état d'une demande de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'instruction ouverte des chefs de faux et usage de faux à la suite d'une plainte avec constitution de partie civile qu'il a déposée.

Par ordonnance du 24 janvier 2019, le conseiller de la mise en état a :

- dit n'y avoir lieu d'ordonner un sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'instance pénale résultant de la plainte avec constitution de partie civile de M. [P] du chef de faux et usage adressée au doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Paris enregistrée sous le n°20/16/38 ;

- débouté Me [C] ès-qualités de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [P] aux dépens de l'incident.

***

Prétentions et moyens des parties

Dans ses dernières conclusions du 27 mars 2019, Me [C] en qualité de mandataire liquidateur de la société Achat direct demande à la cour de :

- déclarer l'incident de sursis à statuer soulevé par M. [P] devant la juridiction du fond, irrecevable,

A titre principal,

- constater, dire et juger qu'en n'invitant pas Achat Direct à conclure sur le fond, aprés avoir rejeté son exception d'incompétence territoriale, et au contraire en statuant sans que l'appelante ait pu faire valoir ses arguments sur le fond, la juridiction du premier degré a commis un excès de pouvoir et organisé un procès inéquitable ;

En conséquence,

- annuler le jugement frappé d'appel dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- constater, dire et juger que M. [P] a commis un manquement à l'obligation de loyauté en acceptant un mandat des sociétés People love it et [V],

- dire et juger en conséquence que la rupture du mandat repose sur une faute grave du mandataire,

- débouter M. [P] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions en ce compris celles relatives à la réformation du jugement ayant mis hors de cause M. [A] [R],

- condamner M. [P] à réparer le préjudice subi du chef de cette concurrence déloyale,

- le condamner à lui payer une somme de 70.000 euros à titre provisionnel et pour le surplus, désigner expert avec mission :

' de se faire remettre la comptabilité de M. [P] pour la période courant du 17 septembre 2007 au 23 janvier 2013 inclus ;

' d'identifier les commissions perçues sur les sociétés People love it et [V] au cours de cette même période ;

' d'identifier le chiffre d'affaires commercial réalisé par People love it et [V] sur lesquels ces commissions ont été versées ;

' de donner son avis sur la marge nette dégagée par People love it et [V] au titre du chiffre d'affaires réalisé brut ;

' du tout dresser rapport ;

- condamner également M. [P] à fournir dans les huit jours de la signification de la décision à intervenir, et passé ce délai sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, sa liasse BNC au titre des exercices 2008 à 2012 inclus,

- condamner enfin M. [P] à payer une somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les frais et dépens de première instance et d'appel,

Sur les commissions Electrodepot,

- constater, dire et juger que la société Electrodepot ne rentre pas dans la clientèle réservée des grandes et moyennes surfaces des rayons bazar et décoration contractuellement réservée au mandat de M. [P] ;

- constater pour le surplus que M. [P] n'est pas à l'origine de la mise en relation d'Electrodepot avec la société Achat Direct et qu'à cet égard, les échanges commerciaux remontent à une date antérieure à la naissance du mandat constaté ;

- constater, dire et juger pour le surplus que M. [P] n'apporte pas la preuve d'une entremise entre les deux sociétés, susceptible de justifier une commission à défaut d'exclusivité ou d'antériorité dans la relation clientèle ;

Sur les commissions Tavulesprix (Groupon),

- constater, dire et juger que, les sociétés Nouveauxproduits.com (anciennement Tavuleprix) et Groupon sont spécialisées dans la vente à distance et ne rentrent pas dans la clientèle réservée des grandes et moyennes surfaces des rayons bazar et décorations ;

- constater pour le surplus que M. [P] n'est pas à l'origine de la mise en relation des sociétés Nouveauxproduits.com (Tavulesprix.com) et Groupon avec la société Achat Direct, et qu'à cet égard, les échanges commerciaux remontent à une date antérieure à la naissance du mandat constaté ;

- constater, dire et juger pour le surplus que M. [P] n'apporte pas de preuve d'une entreprise entre les deux sociétés justifiée d'une commission autre que celles qui lui ont été payées ;

Sur la caducité de la mesure d'expertise ordonnée en première instance,

- constater en toute hypothèse que M. [P] ne peut pas former appel à l'encontre d'une partie d'une décision qui lui était favorable et dont il ne peut plus bénéficier à raison de la caducité qui en est entachée pour manquement à ses obligations, en l'espèce, le défaut de consignation de la provision de l'expert désigné dans le délai de trois mois du jugement ;

En toute hypothèse,

- débouter M. [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [P] à payer à Me [C] ès-qualités une somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner en tous les frais et dépens de la procédure, dont distraction au profit de Me Pascale Flauraud conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

A titre liminaire, la société Achat direct considère que la demande de sursis à statuer de M. [P] est irrecevable s'agissant d'un incident de procédure relevant de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état en vertu de l'article 771 du code de procédure civile.

Ensuite, la société Achat direct impute la rupture du mandat d'agent commercial à M. [P] en invoquant la faute grave de ce dernier. Elle prétend tout d'abord que M. [P] a manqué à son obligation de loyauté résultant de l'article L.134-3 du code de commerce en entretenant une collaboration avec la société People love it et la société [V] alors que ces sociétés exercent une activité concurrente de la sienne. Concernant la société People love it, elle affirme que contrairement à ce que soutient l'intimé, le devoir de loyauté ne se limite pas aux seuls produits distribués mais interdit au mandataire d'accepter tout mandat d'une société concurrente. Or elle soutient que M. [P] a entretenu des relations avec la société People love it à son insu depuis le mois d'août 2012 et que ces relations ont perduré au-delà du mois de décembre 2012. Elle conteste avoir toléré le manquement imputable à son mandataire après la découverte des relations entretenues avec la société People love it. Concernant la société [V], la société Achat direct dément tout accord implicite de sa part pour que son mandataire représente cette carte. Elle prétend à cet égard que le mandat d'agent commercial étant un contrat civil, la preuve de l'acceptation du mandat alléguée doit être rapportée par écrit.

Elle se prévaut d'un préjudice résultant de la concurrence déloyale de son mandataire et réclame à ce titre le versement d'une provision, l'instauration d'une mesure d'expertise et la production de pièces comptables de la part de M. [P].

Par ailleurs, elle dénie tout droit à commission de M. [P] pour les clients Electro dépôt et Groupon.

Elle affirme en effet que la société Electro dépôt, qui exerce une activité de commerce de détail d'électroménager en magasin spécialisé, ne rentre pas dans la clientèle des rayons bazar et décoration des grandes et moyennes surfaces contractuellement réservée à M. [P]. Elle ajoute que la société Electro dépôt est l'un de ses clients historiques et qu'elle n'a jamais travaillé avec M. [P]. Elle affirme que c'est par erreur qu'elle a commissionné M. [P] sur une vente réalisée avec la société Electro dépôt. Concernant la société Groupon, la société Achat direct explique avoir ponctuellement travaillé avec cette société au mois de décembre 2011 et avoir commissionné M. [P] à ce titre. En revanche, elle estime qu'elle ne saurait être redevable de commissions au titre des ventes réalisées entre la société Tavulesprix.com et la société Groupon.

Elle dément en tout état de cause que la rupture du mandat lui soit imputable en raison d'un défaut de paiement des commissions dues à son mandataire. Elle prétend à cet égard qu'à aucun moment, M. [P] ne s'est plaint auprès d'elle d'un quelconque manquement justifiant la résiliation du mandat à ses torts.

Elle soutient enfin que M. [P] ne peut interjeter appel au titre de l'expertise ordonnée en première instance dès lors que ce chef de la décision lui était favorable. Elle relève encore que M. [P] ne peut plus bénéficier de l'expertise ordonnée puisque la mesure est devenue caduque faute de consignation dans le délai imparti.

Dans ses dernières conclusions du 8 avril 2019, M. [P] demande à la cour de :

In limine litis,

- surseoir à statuer dans l'attente qu'il soit définitivement statué sur la plainte pénale N° du Parquet 1601300358 et sous le N° Instruction 2231/16/36 déposée devant le tribunal de grande instance de Paris dont l'issue aura nécessairement une incidence sur le présent procès civil ;

Au fond, à titre principal,

- débouter Me [C], en qualité de mandataire liquidateur de la société Achat direct, de son appel et de toutes ses demandes ;

- dire et juger que l'obligation de non concurrence à laquelle il était astreint à l'égard de la société Achat direct était contractuellement limitée aux produits concurrents ;

- constater qu'il n'a vendu aucun produit concurrent à ceux dont il avait la représentation pour le compte de la société Achat direct ;

- dire et juger que la rupture du contrat d'agence est exclusivement imputable à la société Achat direct qui a violé son obligation de loyauté en lui faisant concurrence par l'intermédiaire de la société Tavulesprix.com et porté atteinte à son exclusivité sur la clientèle, outre qu'elle a gravement manqué à ses obligations de paiement de commissions et de déclaration sincère de chiffre d'affaires ;

- dire et juger qu'aucune faute ne peut lui être reprochée susceptible de le priver de son indemnité de cessation de contrat d'agent commercial ;

-confirmer le jugement entrepris du 12 juillet 2013 du tribunal de grande instance d'Evry en son principe et en toutes ses dispositions, sauf celles concernant la mission de l'expert désigné et la T.V.A. sur le montant de l'indemnité de préavis ;

- le réformant sur ces points et y ajoutant,

- dire que l'indemnité de préavis de 99.057 euros sera augmentée de la T.V.A. au taux de 20 % ;

- dire et juger que la société Achat direct s'est portée fort de la société Tavulesprix pour le règlement des commissions qui lui sont dues sur les affaires réalisées avec le client Groupon ;

- juger que la société Achat direct doit réparer le préjudice qu'il a subi du fait de l'inexécution par la société Tavulesprix du règlement des commissions qui lui sont dues sur les affaires réalisées avec le client Groupon ;

-aménager la mesure d'expertise prononcée par le jugement en une mesure d'injonction à Me [C], en qualité de mandataire liquidateur de la société Achat direct, de communiquer un extrait des comptes Tavulesprix.com/Nouveauxproduits.com et Electro dépôt sur la période du 1er janvier 2010 au 30 janvier 2013, avec copie des factures adressées à ces sociétés, le tout certifié par un commissaire aux comptes, le tout sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard un mois après la signification de l'arrêt à intervenir ;

-Ou à défaut d'aménagement de la mesure,

- dire et juger que l'Expert qui sera désigné par la Cour d'Appel aura pour mission de :

- convoquer et entendre les parties assistées de leur conseil, recueillir leurs observations quant à la tenue des opérations d'expertise ;

- se faire remettre toutes les pièces utiles à la vérification et à l'établissement des commissions dues par la société Achat direct à M. [P] pendant toute la période contractuelle et en application des clauses et conditions du contrat et des articles L.134-1 et suivants du code de commerce ;

- chiffrer les commissions dues, en particulier pour le chiffre d'affaires réalisé avec les sociétés Groupon, Tavulesprix.com/Nouveauxproduits.com et Electro dépôt ;

- se faire remettre tout document comptable et renseignement utile à l'accomplissement de sa mission ;

- mettre les parties en mesure de faire valoir leurs observations qui seront annexées au rapport ;

- dire que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et déposera son rapport écrit dans les six mois de sa saisine ;

- dire et juger que la mission dévolue à l'Expert comprendra l'évaluation du chiffre d'affaires réalisé avec la société Groupon tant par Tavulesprix.com/Nouveauxproduits.com que par la société Achat direct et de préciser le montant des commissions correspondantes occultées au détriment de M. [P] ;

En tout état de cause,

-surseoir à statuer quant à l'admission et à la fixation du montant de ses créances dans le passif de la société Achat direct jusqu'à ce qu'il ait été déféré à l'injonction de communication des éléments comptables ci-avant sollicitée ou, à défaut, jusqu'au dépôt du rapport d'expertise ;

A titre subsidiaire,

-surseoir à statuer sur l'imputabilité de la rupture dans l'attente de la communication par Me [C], en qualité de mandataire liquidateur de la société Achat direct, du chiffre d'affaires réalisé sur les comptes clients Tavulesprix.com/Nouveauxproduits.com et Electro dépôt sur la période du 1er janvier 2010 au 30 janvier 2013 avec copies des factures adressées à ces sociétés, dans la mesure où ces éléments conditionnent le droit à indemnité de M. [P] et son droit à commissions ;

-condamner Me [C], en qualité de mandataire liquidateur de la société Achat direct, en application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à M. [P] la somme de 20.000 euros ;

-condamner Me [C], en qualité de mandataire liquidateur de la société Achat direct, en tous les dépens de première instance et d'appel.

M. [P] s'oppose tout d'abord à la demande de l'appelante tendant à voir prononcer la nullité du jugement du tribunal de grande instance d'Evry du 12 juillet 2013. Il affirme à cet égard que la société Achat direct avait, dans ses écritures et sa plaidoirie de première instance, largement abordé le fond du litige et que des pièces avaient été échangées sur ce point entre les parties.

Ensuite il demande à la cour de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale en cours. Il prétend en effet qu'une des pièces adverses, la pièce n°41, constitue un faux. Il précise qu'il s'agit d'une lettre de la société Achat direct datée du 29 mars 2013 qui lui aurait été adressée accompagnée d'un chèque d'un montant de 63 164,01 euros. Il prétend que cette pièce est utilisée par la société Achat direct pour s'opposer à ses demandes de commissions notamment sur le client Electro dépôt. Or il conteste que cette lettre et ce chèque lui aient été adressés. Il considère que cette pièce revêt une importance capitale pour l'issue du litige dès lors qu'en dépendent le montant des commissions qui lui sont dues, l'ouverture d'un droit à commission sur le client Electro dépôt et l'imputabilité de la rupture du mandat. Il estime qu'au vu de l'ensemble des éléments du dossier, il apparaît difficile que la cour puisse trancher l'essentiel du présent litige sans tenir compte de l'issue de la procédure de faux et usage en cours devant le juge pénal.

Sur le fond, M. [P] considère que l'obligation de non concurrence à laquelle il était astreint vis-à-vis de la société Achat direct était contractuellement limitée aux produits concurrents et non à l'activité de l'entreprise. Or il précise n'être intervenu dans la vente d'aucun produit concurrent à ceux dont il avait la représentation pour le compte de la société Achat direct. Il ajoute, en ce qui concerne la société [V], qu'il était déjà l'agent commercial de cette société au moment où il a contracté avec la société Achat direct et que c'est la raison pour laquelle celle-ci a fait appel à ses services. Il affirme en outre que lorsqu'un contrat d'agent commercial est conclu entre une personne physique non commerçante et une société commerciale, la preuve est libre à l'égard des commerçants de sorte qu'il est parfaitement admis à démontrer par des témoignages l'acceptation tacite par la société Achat direct de la poursuite de son mandat pour la société [V]. Il ajoute que la société [V] est spécialisée dans les arts de la table tandis que la société Achat direct est spécialisée dans les articles de bazar de sorte qu'elles ne sont pas concurrentes. Il fait valoir que c'est la société Achat direct qui a ajouté de nouveaux produits à son catalogue susceptibles d'être identiques à ceux commercialisés par la société [V]. Il précise qu'il n'a jamais représenté ces produits pour la société Achat direct. En tout état de cause, il fait valoir que les clauses de non concurrence doivent être claires et délimitées. En ce qui concerne la société People love it, il reconnaît être entré en contact avec elle pour commercialiser des produits cosmétiques ainsi qu'un luminaire (lampe avec abat-jour en sustentation magnétique). Il ajoute que ces produits n'étaient pas concurrents de ceux commercialisés par la société Achat direct. Il affirme n'avoir signé aucun contrat avec la société People love it, n'avoir vendu aucun article pour cette société et qu'en tout état de cause, il a renoncé à intervenir pour elle dès que la société Achat direct lui a fait part de son opposition. Il fait valoir que si la société Achat direct avait considéré qu'une faute grave lui était imputable à ce titre, elle aurait immédiatement résilié le mandat et n'aurait pas attendu deux mois pour le faire. Il prétend enfin qu'il ne peut lui être reproché de s'être intéressé à des produits éventuellement concurrents de ceux vendus par la société Achat direct postérieurement à la rupture du contrat d'agent commercial dès lors que ce contrat ne prévoyait aucune clause de non-concurrence post contractuelle.

M. [P] affirme que la rupture du contrat d'agent commercial est en réalité imputable à la société Achat direct dans la mesure où elle lui doit un important arriéré de commissions correspondant aux mois de septembre, octobre, novembre, décembre 2012 et janvier 2013 s'élevant à plus de 80.000 euros H.T.

Il ajoute que la société Achat direct a violé son obligation de loyauté en le privant de son droit à commission sur les clients Electro dépôt et Groupon. Il prétend à cet égard que la société Achat direct a transféré à la société Tavulesprix.com le client Groupon dans le but d'éluder son droit à commission. Néanmoins il affirme que la société Achat direct, par courriel du 29 septembre 2011, s'est portée fort du paiement par la société Tavulesprix.com des commissions dues au titre des ventes réalisées par cette dernière avec la société Groupon. Or comme la société Tavulesprix.com a refusé de régler lesdites commissions, il estime que la société Achat direct engage sa responsabilité à ce titre. Il soutient qu'en tout état de cause, il doit être commissionné pour toutes les affaires faites par la société Tavulesprix.com avec la société Groupon dès lors que ce client fait partie du secteur qui lui a été confié en exclusivité. Il affirme que le client Electro dépôt fait également partie de ce secteur et qu'en outre, il est intervenu pour négocier des commandes avec ce client.

Sur la mesure d'expertise, M. [P] dénie toute caducité dès lors qu'il a consigné la provision mise à sa charge. Il ajoute que l'expertise n'a pu être diligentée en raison du refus de la société Achat direct d'y participer compte tenu de l'appel en cours.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures susvisées pour l'exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 avril 2019.

***

MOTIFS :

Sur la demande de sursis à statuer

En vertu de l'article 771 du code de procédure civile, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :

'1. Statuer sur les exceptions de procédure» (') ; les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu'ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge (...) '.

En l'espèce, la demande de sursis à statuer formée par M. [P] s'analyse en une exception de procédure qui relève de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état et que M. [P] est irrecevable à soulever devant la cour. Il sera de surcroît observé que M. [P] a soulevé cette exception de procédure devant le conseiller de la mise en état qui l'a rejetée par ordonnance du 24 janvier 2019 ; cette ordonnance ayant au principal autorité de la chose jugée en vertu de l'article 775 du code de procédure civile.

Sur la demande de nullité du jugement

Selon l'article 76 du code de procédure civile, dans sa version applicable au litige, le juge peut, dans un même jugement, mais par des dispositions distinctes, se déclarer compétent et statuer sur le fond du litige, sauf à mettre préalablement les parties en demeure de conclure sur le fond.

Toutefois lorsque le jugement constate qu'après avoir décliné la compétence territoriale du tribunal saisi, le défendeur s'est expliqué sur le fond et que cette constatation n'est pas contestée, il n'y a pas lieu de le mettre en demeure de conclure sur le fond; les prescriptions de l'article 76 ayant, en fait, été observées.

En l'espèce, le jugement du tribunal de grande instance d'Evry du 12 juillet 2013 relève que les défendeurs ont longuement répondu sur le fond dans leurs écritures aux demandes de M. [P] en soulevant l'existence d'une faute grave qui justifierait la rupture et que de nombreuses pièces ont été versées aux débats par les parties. Ainsi aucune violation du principe du contradictoire ne peut être invoquée et il n'y avait pas lieu, pour le tribunal de grande instance d'Evry, de mettre en demeure les parties de conclure sur le fond préalablement au prononcé de son jugement le 12 juillet 2013.

En conséquence, la demande de nullité du jugement formée par la société Achat direct sera rejetée.

Sur la faute grave de M. [P] exclusive d'indemnité de rupture et d'indemnité de préavis

Selon les articles L. 134-11 et L. 134-12 du code de commerce, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice de préavis et à une indemnité de rupture sauf si le contrat prend fin en raison de sa faute grave.

La faute grave se définit comme celle portant atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rendant impossible le maintien du lien contractuel. Il appartient au mandant de rapporter la preuve d'une telle faute.

En vertu de l'article L.134-3 du code de commerce, l'agent commercial peut accepter sans autorisation la représentation de nouveaux mandants. Toutefois il ne peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de l'un de ses mandants sans accord de ce dernier.

Il résulte des dispositions de l'article 134-16 du code de commerce que les règles issues de l'article L.134-3 sont supplétives de volonté.

En vertu des dispositions précitées, il incombe aux juges de rechercher si les produits du mandant et ceux du nouveau mandant sont identiques et concurrents ou si les deux entreprises exercent des activités distinctes.

En outre, l'article L. 134-4, alinéa 2, du code de commerce prévoit que « les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d'information. »

Il en ressort que l'agent a l'obligation d'informer le mandant de l'exercice au profit d'un concurrent de celui-ci d'une activité similaire à la sienne.

Le manquement d'un agent commercial à son obligation de non-concurrence ou à son devoir de loyauté constitue une faute grave exclusive du versement de l'indemnité de rupture et de l'indemnité compensatrice de préavis.

En l'espèce, le contrat d'agent commercial du 20 septembre 2007, conclu pour une durée indéterminée entre la société Achat direct, mandant, et M. [P], agent, stipule notamment en son article 1er qu'à compter du 25 septembre 2007, « le mandant confie à l'agent qui l'accepte le mandat de négocier de manière permanente, en son nom et pour son compte, la vente des produits fabriqués par lui (ou des produits diffusés par lui, ou des services qu 'il offre à la clientèle ou d'un produit déterminé). Ceux-ci sont dé'nis à l'article 3. Ce mandat s'exerce dans la clientèle précisée à l'article 2 ».

L'article 2 du contrat prévoit que le mandat s'exerce auprès de la clientèle suivante: « Grande et moyenne surface ' Rayon bazar/Décoration », et sur toute la France, secteur dans lequel l'agent bénéficie d'une exclusivité. Le même article précise que: « De ce fait, le mandant s'interdit de concurrencer l'action de l'agent dans l'univers ainsi défini par des entreprises dans lesquelles il aurait des intérêts directs ou indirects.

De même, l'agent ne peut accepter, pour ce secteur et cette clientèle, la représentation de produits ou services concurrents de ceux définis à l'article 3, il a en revanche, toute liberté pour conclure d'autres contrats, sans avoir à en référer au mandant. »

L'article 3 stipule que « Le mandat confié à 1'agent porte sur la totalité des produits (ou services) fabriqués ou commercialisés par le mandant.

La gamme de ces produits est précisée ci-après:

Toute diversification du mandant entraînant la création ou la diffusion de produits (ou services) nouveaux, en-dehors de la gamme ci-dessus, devra être proposée à l'agent, qui aura la faculté de l'accepter ou de la refuser, sans que ce refus puisse faire obstacle à la poursuite du présent contrat. »

Il résulte des stipulations du contrat d'agent commercial conclu le 20 septembre 2007 que M. [P] représentait la totalité des produits commercialisés par la société Achat direct dans le secteur de la grande distribution, rayon bazar et décoration. C'est à tort que M. [P] prétend que son obligation de non-concurrence avait été limitée contractuellement et doit s'analyser au regard des produits sans s'attacher à l'activité de l'entreprise. En outre, le fait que la gamme de produits confiés à M. [P] n'ait pas été spécifiée à l'article 3 n'a pas pu avoir pour conséquence de le libérer de son obligation légale de non concurrence. M. [P] ne pouvait donc représenter des produits pour une société concurrente sans autorisation de la société Achat direct en vertu de l'article L.134-3 précité.

Par ailleurs, au titre de son obligation de loyauté, il se devait d'informer préalablement son mandant de toute intention d'exercer un nouveau mandat au profit d'un concurrent de celui-ci.

Sur les relations de M. [P] avec la société People love it

La preuve d'une faute grave tenant à la déloyauté ne peut découler d'une simple intention de l'agent de manquer à ses obligations et doit résulter d'actes objectifs et effectifs imputables à l'agent et commis avant la rupture. A cet égard, le seul engagement de représenter les produits concurrents est susceptible de constituer une telle faute.

En l'espèce, il résulte des statuts de la société People love it datés du 6 mars 2012 produits aux débats que cette société a pour objet « l'achat, la vente, Import/Export, commerce, par tous moyens, de détail, demi-gros, gros de tout article sans prédominance alimentaire quelle qu'en soit la nature, la forme ou la destination ». Le début d'exploitation de cette société est intervenu le 12 mars 2012.

La société Achat direct a, quant à elle, pour activité l'import, l'export pour tout article textile, petit accessoire de la maison, cadran, gadget et autres produits de commercialisation hors alimentaires.

Les activités des sociétés Achat direct et de la société People love it sont donc concurrentes de sorte que l'acceptation par M. [P] de la représentation de la société People love it, fût-ce pour une catégorie de produits comme les luminaires, nécessitait préalablement l'autorisation de son mandant en application de l'article L.134-3 du code de commerce et son information au titre de son obligation de loyauté.

Or il résulte d'un courriel du 23 juin 2012 (pièce 50 de l'intimé) que la société People love it et M. [P] sont effectivement entrés en relation. Dans ce courriel, la société People love it précisait en effet :

« On commence maintenant.

Lundi: les échantillons partent en DHL chez toi.

Mardi ou Mercredi:

-tu reçois les échantillons,

-tu reçois par mail: Fiches produits, Photos, Tarifs,

-Tu reçois par mail: Procédure SAV...

-Tu me demandes si tu as besoin de nouveaux éléments, de précisions...

Vendredi au plus tard:

-Tout doit être prêt à 100% et il « N'y a plus qu'à vendre. »

On passe à l'action »

En outre, il est établi (pièce 3 de l'intimé) que M. [P] est intervenu au mois de novembre 2012 auprès de la société Carrefour pour l'ouverture d'un compte au profit de la société People love it.

Par ailleurs, dans un courriel du 22 novembre 2012 adressé à M. [R] (pièce 7 de l'intimé), M. [P] a écrit : « Suite à la discussion d'hier au soir et la matrice que tu as reçue de carrefour je te confirme avoir débuté depuis peu une collaboration avec la société People love it dont le gérant est monsieur [F] [L].

Carrefour a fait une erreur de transmission.

Au niveau des produits que ce fournisseur travaille, il s'agit en aucun cas de produits identiques aux tiens. »

Enfin dans un courriel du 14 décembre 2012 adressé à M. [L] [F], dirigeant de la société People love it, (Pièce 54 de l'appelant), M. [P] a indiqué : « J'ai reçu un courrier de l'avocat de la société Achat direct avec laquelle je travaille depuis plusieurs années. Il m'informe que ta société est susceptible de mettre sur le marché des produits concurrents à la sienne.

Je t'informe donc que je n'ai d'autre choix que de mettre un terme immédiat à nos relations et que je ne pourrai pas travailler avec ta société. »

Il ressort de ces éléments que M. [P] s'est engagé à représenter certains produits de la société People love it, société concurrente de la société Achat direct, et que cet engagement s'est concrétisé à tout le moins par une demande d'ouverture de compte auprès de la société Carrefour alors même qu'il n'en avait pas informé préalablement son mandant et qu'il n'avait pas obtenu son autorisation. Dans ces conditions, le manquement de M. [P] à son obligation de loyauté et à son obligation de non-concurrence est caractérisé peu important qu'aucune vente n'ait été effectivement passée et que M. [P] n'ait perçu aucune commission de la part de la société People love it. En outre, le fait que la société Achat direct ait laissé passé deux mois entre la prise de connaissance de la faute de son mandataire et la notification de la rupture ne saurait manifester sa volonté de renoncer à la résiliation du contrat d'agent commercial alors qu'il apparaît qu'elle a immédiatement demandé des explications à son agent et a souhaité recueillir davantage d'éléments quant à l'étendue de la faute de celui-ci.

En revanche, aucune faute ne saurait être reprochée à M. [P] pour être intervenu pour le compte de la société People love it postérieurement à la résiliation du mandat conclu avec la société Achat direct dès lors qu'aucune clause de non-concurrence post-contractuelle n'était prévue au contrat d'agent commercial.

Sur les relations de M. [P] avec la société [V]

Il résulte des dispositions légales précitées qu'une activité de représentation d'un concurrent antérieure au mandat et connue du mandant ne constitue pas une faute grave, surtout s'il apparaît que le mandant lui-même ne considérait pas les faits comme constitutifs d'une faute grave.

En l'espèce, il ressort d'un certificat de travail produit aux débats que M. [P] a été salarié de la société [V] en qualité d'attaché commercial entre le 8 juin 1993 et le 11 mars 2005 avant de devenir agent commercial en 2007. Il est également établi que par contrat du 23 juillet 2007, soit antérieurement au contrat d'agent commercial du 20 septembre 2007 conclu avec la société Achat direct, la société [V] a confié à M. [P] une mission de représentation pour la vente de « verrerie, vaisselle, vaisselle enfant à jeter, cuisson, cadeaux, couverts, gadgets- moulin à poivre et sel » en Ile de France pour la clientèle suivante: « toutes les enseignes alimentaires ». La société [V] exerce une activité concurrente de celle de la société Achat direct puisqu'elle a pour activité l'exploitation de tous fonds de commerce dans les arts de la table et la décoration de la maison ainsi que le négoce d'appareils de pesage, cuisson, gadgets.

En revanche, ainsi que l'ont justement retenu les premiers juges, il résulte d'attestations circonstanciées de M. [J] [U] du 30 janvier 2013 et de Mme [M] [G] confortées par des échanges de courriels entre M. [P] et la société Carrefour datés des 10 septembre 2009, 3 et 25 novembre 2009 ainsi que des 9, 16 et 19 février 2012, envoyés en copie à différents salariés de la société Achat direct ainsi qu'à M. [R], que la société Achat direct était parfaitement informée dès le début du contrat de mandat des relations contractuelles parallèles de son agent commercial avec la société [V]. Les attestations contraires de ses salariés produites par la société Achat direct paraissent peu probantes eu égard au lien de subordination les unissant ainsi qu'à leur caractère vague étant en outre observé que les attestations de Mme [Z] [O] et de M. [D] [X] sont contredites par certains des courriels échangés entre M. [P] et la société Carrefour au sujet de la carte [V] dont ils apparaissent destinataires.

Or il sera relevé que pendant toutes ces années, la société Achat direct ne s'est ni opposée à l'existence de ces relations ni n'a demandé à M. [P] d'abandonner la carte [V] de sorte qu'elle ne considérait manifestement pas ces faits comme constitutifs d'une faute grave.

Ces faits ne sauraient en conséquence caractériser une quelconque faute grave à l'encontre de M. [P].

Sur l'imputabilité de la rupture

Sur la violation par la société Achat direct de son obligation de non concurrence

M. [P] reproche tout d'abord à la société Achat direct d'avoir violé son obligation de non-concurrence par l'intermédiaire de la société Tavulesprix.com, dont M. [R] détient des parts sociales, qui aurait capté la clientèle de la société Groupon qu'il lui avait apportée.

L'article 2 du contrat d'agent commercial du 20 septembre 2007 prévoit en effet une exclusivité de l'agent sur le secteur géographique et pour la clientèle confiés ainsi que l'interdiction pour « le mandant (...) de concurrencer l'action de l'agent dans l'univers ainsi défini par des entreprises dans lesquelles il aurait des intérêts directs ou indirects. »

Néanmoins la société Achat direct conteste toute exclusivité de M. [P] sur la clientèle Groupon en alléguant qu'elle ne fait par partie de la clientèle réservée à celui-ci, constituée des « Grande et moyenne surfaces ' Rayon bazar/Décoration ».

Il résulte en effet de l'extrait du registre du commerce et des sociétés produit aux débats que la société Groupon a pour activité la réalisation d'opérations commerciales notamment par Internet et sous forme de services numériques et la commercialisation de bons de réductions pour tous produits et services avec des avantages tarifaires groupes. Dès lors, elle ne relève pas de la clientèle faisant l'objet d'une exclusivité au profit de M. [P], cette exclusivité étant limitée aux grandes et moyennes surfaces de distribution. En conséquence, aucune violation de son obligation de non-concurrence ne saurait être reprochée sur ce point à la société Achat direct.

Sur le défaut de loyauté de la société Achat direct en ce qui concerne le client Groupon

M. [P] prétend ensuite que la société Achat direct aurait tenté de le priver des commissions dues sur le client Groupon.

Il ressort des pièces versées aux débats que M. [P] a représenté des produits de la société Achat direct auprès de la société Groupon dès le mois de juillet 2011 et que c'est dans ces conditions que la société Groupon a conclu un contrat avec la société Achat direct le 16 septembre 2011 pour la vente d'un balai vapeur (pièce 42/1 de l'intimé). Il est également établi qu'à la suite de ce contrat, M. [P] a présenté une offre à la société Groupon en vue de la vente de « Perfect grass » qui a été acceptée par la société Groupon le 27 septembre 2011 (pièce 45-1).

Dans un courriel du 29 septembre 2011 (pièce 6 de l'intimé), M. [R] a demandé à M. [P] que les contrats Groupon conclus par son intermédiaire soient désormais conclus non plus au nom de la société Achat direct mais au nom de la société Nouveauxproduits.com dont il détenait des parts sociales. Il a ainsi écrit :

« La procédure pour Groupon est la suivante :

Les op à venir seront gérées par nouveaux produits au prix que tu as fixé avec [W] ([I], chargée d'affaires de la société Groupon) en sachant que les contrats doivent être faits au nom de la société nouveauxproduits.com. Cela ne change en rien puisque je suis actionnaire de cette société. Tu peux expliquer à [W] que de faire les contrat à ad (Achat direct) ou à nouveaux produits est exactement la même chose.

Concernant ta com, elle est la même: 10% sur les op (reversé par nouveauxproduits.com à 30 jrs date de facture). Merci de confirmer cela à [W] ce matin sachant que c'est une volonté entre direction de groupon de nouveaux produits et d'Achat direct pour que les choses soient faites en bonne intelligence. »

A l'inverse de ce que soutient la société Achat direct, il est établi que ce courriel concernait bien les produits distribués par M. [P] pour la société Achat direct. En effet, il ressort d'échanges de courriels des 27 et 29 septembre 2011 entre M. [P] et la société Groupon qu'alors que celle-ci venait de lui adresser trois contrats pour l'offre « perfect grass » au nom de la société Achat direct, M. [P], se conformant en cela à la demande de M. [R], a demandé l'établissement desdits contrats au nom de la société Nouveauxproduits.com, ce qui a été fait par la société Groupon.

Malgré les termes du courriel du 29 septembre 2011 précité, la société Tavuslesprix a refusé de prendre en charge les commissions dues à M. [P] sur les ventes réalisées avec la société Groupon ainsi qu'il résulte d'un courriel du 31 janvier 2013 (pièce 25 de l'intimé).

Néanmoins le refus par la société Nouveauxproduits.com/Tavulesprix de s'acquitter de commissions à M. [P] au titre du client Groupon ne saurait être imputé à faute à la société Achat direct dès lors qu'il n'est pas acquis que M. [R], en sa qualité de représentant la société Achat direct, savait qu'il donnait une information inexacte sur le paiement desdites commissions par la société Tavulesprix lorsqu'il a adressé le courriel du 29 septembre 2011. En outre, il n'est pas établi que lors de l'envoi de ce courriel, M. [R] avait pour objectif de priver M. [P] de sa rémunération. Ainsi aucune faute n'est caractérisée à l'encontre de la société Achat direct sur ce point.

Sur le défaut de paiement des commissions dues au titre du client Groupon

Selon les dispositions de l'article L.134-6 du code de commerce, pour toute opération commerciale conclue pendant la durée du contrat d'agence, l'agent commercial a droit à commission lorsqu'elle a été conclue grâce à son intervention ou lorsque l'opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre.

Il résulte de ce qui précède que l'intervention de M. [P] a permis la conclusion d'un contrat entre la société Achat direct et la société Groupon le 16 septembre 2011 pour la vente d'un balai vapeur et de trois contrats au mois de septembre 2011 entre la société Nouveauxproduits.com/Tavulesprix et la société Groupon pour la vente de perfect grass. Toutefois ainsi qu'il a été observé plus haut les ventes ont finalement été conclues avec la société Nouveauxproduits.com/Tavulesprix.com, qui est une société distincte de la société Achat direct. En conséquence, à défaut d'être lié avec la société Nouveauxproduits.com/Tavulesprix.com par un contrat d'agent commercial, M. [P] ne saurait revendiquer aucun droit à commission sur ces ventes.

Aucune faute ne peut donc être reprochée de ce chef à la société Achat direct.

Sur la privation du droit à commission sur le client Tavulesprix/nouveaux produits

M. [P] ne saurait revendiquer un droit à commission sur le client Tavulesprix/Nouveauxproduits alors qu'il n'est aucunement démontré qu'il serait intervenu en vue de la conclusion de ventes entre les sociétés Achat direct et Nouveauxproduits.com/Tavulesprix.com. En outre, contrairement à ce qu'il prétend, la société Tavulesprix/Nouveauxproduits ne relève aucunement de son exclusité dès lors que cette société a pour activité la vente de produits originaux notamment électroménager, haute technologie, jardinage par le biais d'un site e-commerce.

Aucune faute ne peut donc être reprochée de ce chef à la société Achat direct.

Sur la privation du droit à commission sur le client Electro dépôt

M. [P] fait encore grief à la société Achat direct d'avoir tenté de l'évincer de son droit à commission sur le client Electro dépôt.

Le contrat d'agent commercial prévoit en son article 5 que la rémunération de l'agent est due « pour toutes les commandes directes ou indirectes dont les livraisons sont effectuées dans le secteur géographique ou dans la catégorie de clientèle réservées à l'agent. (...) Les factures correspondant à des commandes émanant du secteur ou de la clientèle réservée entraînant des livraisons hors de ce secteur ou de cette clientèle génèrent la même rémunération. ».

Il résulte de la pièce n°42 versée aux débats par la société Achat direct que la société Electro dépôt a pour activité le commerce de détail d'appareils électroménagers en magasin spécialisé. Dès lors, cette société ne relève pas de la clientèle faisant l'objet d'une exclusivité au profit de M. [P], cette exclusivité étant limitée aux grandes et moyennes surfaces de distribution.

Par conséquent, pour établir son droit à commission sur le client Electro dépôt, M. [P] doit, en vertu de l'article L. 134-6 du code de commerce précité, démontrer son intervention dans l'opération conclue ou encore avoir obtenu précédemment la clientèle d'Electro dépôt pour des opérations du même genre.

Or si M. [P] démontre être intervenu pour une vente de cocottes vapeur conclue entre la société Achat direct et la société Electro dépôt au mois d'octobre 2010 (pièces 49/5 à 49/19 de l'intimé) pour laquelle il a établi une facture le 16 novembre 2010 qui a été réglée, il ne rapporte pas la preuve de la conclusion d'autres ventes grâce à son intervention ni encore avoir apporté le client Electro dépôt à la société Achat direct.

Dans ces conditions, il ne peut valablement reprocher à la société Achat direct d'avoir tenté d'éluder son droit à commission sur ce client.

Sur le défaut de paiement des commissions et le défaut de production des justificatifs

Ainsi que l'ont exactement relevé les premiers juges, M. [P] justifie par les pièces produites aux débats (et notamment une facture du 13 septembre 2012 pour les opérations du mois de juillet 2012 et une facture du 4 décembre 2012 pour les opérations du mois de septembre 2012) qu'un montant de 30.882,12 euros TTC lui est dû par la société Achat direct au titre des commissions pour les opérations effectuées aux mois de juillet et septembre 2012.

La société Achat direct, à laquelle incombe la charge de la preuve, du paiement de ces commissions ne démontre pas s'en être acquittée alors qu'en vertu du contrat d'agent commercial, le règlement devait intervenir dans les 15 jours de la réception de la facture de l'agent et qu'il est stipulé que: « Le règlement, en temps voulu, des commissions, par le mandant, est une condition essentielle du présent contrat ».

Par ailleurs, selon l'article R. 134-3 du code de commerce, le mandant remet à l'agent commercial un relevé des commissions dues, au plus tard le dernier jour du mois suivant le trimestre au cours duquel elles sont acquises. Ce relevé mentionne tous les éléments sur la base desquels le montant des commissions a été calculé. L'agent commercial a le droit d'exiger de son mandant qu'il lui fournisse toutes les informations, en particulier un extrait des documents comptables nécessaires pour vérifier le montant des commissions qui lui sont dues.

Par exploit du 22 janvier 2013, M. [P] a fait délivrer à la société Achat direct une sommation de lui régler la facture du mois de septembre 2012, de lui adresser le relevé des commissions des affaires réalisées en septembre, octobre, novembre et décembre 2012 et le double des factures correspondantes éditées pendant la période des mois d'août à décembre 2012, de fournir une attestation de son expert-comptable certifiant comme exhaustifs les relevés de commissions établis, sous huitaine, sous peine de voir constater l'inexécution des obligations issues du contrat d'agent commercial du 20 septembre 2017.

Ainsi il apparaît que M. [P] a réclamé à la société Achat direct, avant que celle-ci ne résilie le contrat d'agent commercial le 23 janvier 2013, le paiement de la facture due au titre des commissions pour les opérations réalisées au mois de juillet 2012 outre les documents permettant d'une part, l'établissement des factures pour les opérations réalisées aux mois septembre, octobre, novembre et décembre 2012 et d'autre part, la vérification du montant des commissions dues.

Le non-respect par la société Achat direct de ces obligations contractuelles, alors même qu'il s'agissait d'obligations essentielles du contrat d'agent commercial, revêt une gravité particulière de sa part d'autant plus qu'il est établi (pièces 70, 71, 72, 84 de l'intimé) que de tels faits s'étaient déjà produits auparavant en novembre 2011 et janvier 2012.

Dans ces conditions, ces manquements graves et répétés antérieurs aux fautes relevées dans l'exécution postérieure du mandat justifient que la résiliation du contrat d'agent commercial soit imputée à la société Achat direct bien que cette dernière ait ensuite pris l'initiative de rompre le contrat le 23 janvier 2013 pour un manquement grave et avéré de M. [P] à son obligation de loyauté.

En conséquence, la rupture du contrat d'agent commercial n'étant pas imputable à la faute grave de ce dernier, M. [P] peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis ainsi qu'à une indemnité de cessation de contrat dans les conditions prévues aux articles L.134-11 et L.134-13 du code de commerce.

Sur les demandes d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de cessation de contrat

M. [P] demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Achat direct à lui payer une somme de 792.458 euros à titre d'indemnité de cessation de contrat et une somme de 99.057 euros à titre d'indemnité de préavis sauf sur ce dernier point à augmenter la somme de la TVA au taux de 20%.

Dès lors que la société Achat direct ne démontre pas que M. [P] a la possibilité de récupérer sur un tiers le montant de la TVA, il sera fait droit à cette demande. Toutefois compte tenu de la procédure de liquidation judiciaire dont fait l'objet la société Achat direct, la présente décision ne peut que fixer la créance de M. [P] à la procédure collective.

En conséquence, la créance de M. [P] à la procédure de liquidation judiciaire dont fait l'objet la société Achat direct au titre de l'indemnité de cessation de contrat sera fixée à une somme de 792.458 euros ce qui correspond à deux années de commissions, et la créance de M. [P] à la procédure de liquidation judiciaire dont fait l'objet la société Achat direct au titre de l'indemnité de préavis sera fixée à une somme de 99.057 euros, ce qui correspond à trois mois de préavis conformément aux dispositions de l'article L. 134-11 du code de commerce, à laquelle sera ajoutée la TVA au taux de 20%, correspondant à une somme de 19.811,40 euros, soit un total de 118.868,40 euros.

Ces sommes porteront intérêts au taux légal entre le 26 février 2013, date de l'assignation en première instance et le 21 septembre 2015, date de l'ouverture de la procédure collective, et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil jusqu'au 21 septembre 2015.

Sur la demande en paiement de commissions

Sur le paiement des commissions pour les opérations du mois de juillet et de septembre 2012

Ainsi qu'il a été dit précédemment, la société Achat direct doit une somme de

30.882,12 euros TTC au titre d'une facture du 13 septembre 2012 pour les opérations du mois de juillet 2012 et d'une facture du 4 décembre 2012 pour les opérations du mois de septembre 2012. La créance de M. [P] à la procédure de liquidation judiciaire dont fait l'objet la société Achat direct au titre de rappel de commissions pour les mois de juillet et septembre 2012 sera donc fixée à une somme de 30.882,12 euros TTC avec intérêts au taux légal entre le 26 février 2013, date de l'assignation en première instance et le 21 septembre 2015, date de l'ouverture de la procédure collective, et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil jusqu'au 21 septembre 2015.

Sur le paiement des commissions sur les ventes Groupon

Selon l'article 1120 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, on peut se porter fort pour un tiers, en promettant le fait de celui-ci; sauf l'indemnité contre celui qui s'est porté fort ou qui a promis de faire ratifier, si le tiers refuse de tenir l'engagement.

Ainsi qu'il a été dit précédemment, M. [R], dans un courriel du 29 septembre 2011 (pièce 6 de l'intimé), a demandé à M. [P] que les contrats groupon conclus par son intermédiaire soient désormais conclus non plus au nom de la société Achat direct mais au nom de la société Nouveauxproduits.com dont il détenait des parts sociales. Il a ainsi écrit :

« La procédure pour groupon est la suivante :

Les op à venir seront gérées par nouveaux produits au prix que tu as fixé avec [W] ([I], chargée d'affaires de la société Groupon) en sachant que les contrats doivent être faits au nom de la société nouveauxproduits.com. Cela ne change en rien puisque je suis actionnaire de cette société. Tu peux expliquer à [W] que de faire les contrat à ad (Achat direct) ou à nouveaux produits est exactement la même chose.

Concernant ta com, elle est la même: 10% sur les op (reversé par nouveauxproduits.com à 30 jrs date de facture). Merci de confirmer cela à [W] ce matin sachant que c'est une volonté entre direction de groupon de nouveaux produits et d'Achat direct pour que les choses soient faites en bonne intelligence ».

L'examen du courriel du 29 septembre 2011 permet de constater qu'il a été adressé à M. [R] depuis l'adresse « [Courriel 5] » et que sous la signature « [A] » figure le logo de la société Achat direct, suivie des indications d'adresse du siège social et du showroom de celle-ci. Il s'en déduit qu'il a été adressé par M. [R] en sa qualité de gérant de la société Achat direct et non à titre personnel.

Par ce courriel, M. [R], en sa qualité de gérant de la société Achat direct, a entendu se porter fort pour la société Tavulesprix du paiement des commissions dues à M. [P] au titre des opérations conclues entre les sociétés Tavulesprix et Groupon.

Il est établi que la société Tavulesprix a refusé de payer lesdites commissions. Dès lors, la responsabilité de la société Achat direct à l'égard de M. [P] doit être retenue du fait de l'inexécution par la société Achat direct de son obligation de faire.

En ce qui concerne le préjudice, M. [P] démontre que grâce à son intervention des ventes de balais vapeur et de perfect grass ont été proposées par la société Groupon au profit de la société Tavulesprix. Le seul préjudice réparable correspond aux commissions de 10% sur ces ventes qu'aurait dû percevoir M. [P].

En l'absence d'éléments permettant d'évaluer ce préjudice, il y a lieu d'enjoindre à Me [C] ès-qualités de produire aux débats un extrait du compte client Tavulesprix.com/nouveauproduits.com sur la période du 1er septembre au 30 novembre 2011 avec copie des factures adressées à cette société, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt.

Il sera en conséquence sursis à statuer sur la fixation du préjudice résultant pour M. [P] de l'inexécution par la société Achat direct de son obligation de faire résultant de sa promesse de porte-fort de la société Nouveauxproduits.com/Tavulesprix.com.

Sur le paiement des commissions sur les ventes Electro dépôt

Ainsi qu'il a été dit précédemment si M. [P] démontre être intervenu pour une vente de cocottes vapeur conclue entre la société Achat direct et la société Electro dépôt au mois d'octobre 2010 (pièces 49/5 à 49/19 de l'intimé) pour laquelle il a établi une facture le 16 novembre 2010 qui a été réglée, il ne rapporte pas la preuve de la conclusion d'autres ventes grâce à son intervention ni encore avoir apporté le client Electro dépôt à la société Achat direct.

Il ne justifie donc pas d'un droit à commissions sur le client Electro dépôt et sera débouté de toutes les demandes présentées à ce titre.

Sur la demande d'expertise

Il résulte de ce qui précède que M. [P] ne justifie d'aucun droit à commission sur des ventes réalisées avec la société Electrodépôt, d'aucun droit à commission autre que sur les opérations réalisés entre les mois d'octobre 2012 et janvier 2013, d'aucun droit à commission pour les ventes proposées par la société Groupon au profit de la société Tavulesprix.

Dès lors, l'expertise ordonnée par le jugement entrepris n'apparaît pas nécessaire et il convient d'infirmer le jugement sur ce point, la cour étant saisie de l'intégralité des chefs du jugement dans la mesure où la société Achat direct en a demandé l'annulation.

En revanche, il y a lieu d'enjoindre à Me [C] ès-qualités de produire aux débats un relevé des commissions dues à M. [P] sur la période du 1er octobre 2012 au 31 janvier 2013 outre les documents comptables nécessaires à la vérification du montant des commissions dues, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Achat direct à l'encontre de M. [P] pour concurrence déloyale

Il résulte de ce qui précède que si M. [P] a manqué à son obligation de loyauté à l'égard de la société Achat direct en prenant l'engagement de représenter certains produits de la société People love it et en contactant la société Carrefour pour obtenir le référencement de la société People Love it, aucun acte de concurrence déloyale n'est toutefois établi. En effet, il n'est aucunement démontré que la société People Love It ait effectivement été référencée par la société Carrefour à la suite de l'intervention de M. [P]. La pièce n°20 produite par la société Achat direct, consistant en un tableau dont l'origine est inconnue, ne permet pas de rapporter la preuve d'un tel référencement qui est contesté par M. [P].

Par ailleurs, il a été vu précédemment qu'aucune violation de son obligation de non-concurrence ou de loyauté ne peut être reprochée à M. [P] concernant la société [V].

En conséquence, les demandes de provision, d'expertise et de production de pièces comptables de la société Achat direct seront rejetées.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens seront mis à la charge de Me [C] ès-qualités et il sera alloué à M. [P] une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

REJETTE la demande de nullité du jugement du tribunal de grande instance d'Evry du 12 juillet 2013;

DÉCLARE irrecevable la demande de M. [P] tendant à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'instance pénale résultant de sa plainte avec constitution de partie civile du chef de faux et usage adressée au doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Paris enregistrée sous le n°20/16/38 ;

INFIRME le jugement du tribunal de grande instance d'Evry du 12 juillet 2013 en ce qu'il a dit qu'aucune faute grave ne justifiait la rupture du contrat d'agent commercial du 20 septembre 2007;

Statuant à nouveau,

DIT que M. [P] a commis une faute grave dans l'exécution du contra d'agent commercial en s'engageant à représenter certains produits de la société People love it, société concurrente de la société Achat direct, et en proposant à la société Carrefour son référencement ;

DIT qu'aucune faute ne peut être reprochée à M. [P] pour être intervenu pour le compte de la société People Love It postérieurement à la rupture du contrat d'agence commerciale avec la société Achat direct ;

DIT qu'aucune faute ne peut être reprochée à M. [P] pour avoir représenté la société [V] pendant l'exécution du contrat d'agent commercial conclu avec la société Achat direct ;

DIT que la société Achat direct a commis des fautes antérieures répétées et graves dans l'exécution de ses obligations résultant du contrat d'agent commercial la liant à M. [P] en ne payant pas ses commissions et en ne produisant pas les éléments ayant servi à l'établissement des relevés de commissions malgré la demande qui lui en avait été faite ;

DIT que la rupture du contrat d'agent commercial est imputable aux fautes antérieures de la société Achat direct ;

FIXE la créance de M. [P] à la procédure de liquidation judiciaire dont fait l'objet la société Achat direct au titre de l'indemnité de cessation de contrat à une somme de 792.458 euros ;

FIXE la créance de M. [P] à la procédure de liquidation judiciaire dont fait l'objet la société Achat direct au titre de l'indemnité compensatrice de préavis à une somme de 118.868,40 euros, comprenant la TVA au taux de 20% ;

FIXE la créance de M. [P] à la procédure de liquidation judiciaire dont fait l'objet la société Achat direct au titre des commissions dues pour les mois de juillet et septembre 2012 à une somme de 30.882,12 euros TTC ;

DIT que ces sommes porteront avec intérêts au taux légal entre le 26 février 2013 et le 21 septembre 2015 et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil jusqu'au 21 septembre 2015 ;

DIT que la société Achat direct a entendu se porter fort pour la société Tavulesprix du paiement des commissions dues à M. [P] au titre des opérations conclues entre les sociétés Tavulesprix et Groupon ;

DÉCLARE la société Achat direct responsable à l'égard de M. [P] du fait de l'inexécution par la société Achat direct de son obligation de faire au titre de la promesse de porte-fort ;

DIT que le préjudice de M. [P] résultant de cette inexécution correspond aux commissions de 10% sur les ventes de balais vapeur et de « perfect grass » proposées par la société Groupon au profit de la société Tavulesprix qu'aurait dû percevoir M. [P] ;

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise ;

Avant dire droit sur les demandes de M. [P] au titre des commissions dues pour la période du 1er octobre 2012 au 31 janvier 2013 et de la réparation du préjudice résultant de l'inexécution de la promesse de porte-fort, enjoint à Me [C] ès-qualités de produire aux débats :

- un relevé des commissions dues à M. [P] sur la période du 1er octobre 2012 au 31 janvier 2013 outre les documents comptables nécessaires à la vérification du montant des commissions dues,

- un extrait du compte client Tavulesprix.com/nouveauproduits.com sur la période du 1er septembre au 30 novembre 2011 avec copie des factures adressées à cette société,

sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt ;

DÉBOUTE M. [P] de l'ensemble de ses demandes au titre du client Electro dépôt;

DÉBOUTE Me [C] ès-qualités des demandes de provision, d'expertise et de production de pièces au titre d'une concurrence déloyale ;

CONDAMNE Me [C] ès-qualités à payer à M. [P] une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Me [C] aux dépens ;

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes.

La Greffière La Conseillère faisant fonction de Présidente

Hortense VITELA-GASPAR Fabienne SCHALLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 17/08492
Date de la décision : 07/11/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°17/08492 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-07;17.08492 ?
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