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04/11/2019 | FRANCE | N°18/20273

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 04 novembre 2019, 18/20273


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2019



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/20273 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6KQI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juillet 2018 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2015F00941



APPELANTE



SAS AMCOR FLEXIBLES PACKAGING FRANCE

Ayant son si

ège social [Adresse 5]

[Localité 2]

N° SIRET : 509 628 798

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Marie-Ca...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2019

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/20273 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6KQI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juillet 2018 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2015F00941

APPELANTE

SAS AMCOR FLEXIBLES PACKAGING FRANCE

Ayant son siège social [Adresse 5]

[Localité 2]

N° SIRET : 509 628 798

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Représentée par Me Léopold FARQUE, avocat au barreau de PARIS, toque : R073

INTIMEES

SA XL INSURANCE COMPANY LTD

Ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 4]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Robert BYRD de la SELEURL BYRD SELURL, avocat au barreau de PARIS, toque : E1819

SA ENGIE ENERGIE SERVICES

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 3]

N° SIRET : 552 046 955

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Antoine RICARD de la SELARL RICARD RINGUIER, avocat au barreau de PARIS, toque : J058

PARTIES INTERVENANTES :

SARL EDOM DEVELOPPEMENT

Ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 1]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Régulièrement assignée, non représentée

DONAU IMMOBILIARE SRL, société de droit italien

Ayant son siège social [Adresse 6]

22070 ITALIE

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Régulièrement assignée, non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Septembre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

Monsieur Stanislas de CHERGÉ, Conseiller

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur [M] [I] dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN

ARRET :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Par suite d'un incendie survenu le 30 mars 2010 dans les installations d'incinération de son usine de [Localité 5] (Isère), la société Amcor Flexibles Packaging France SAS, a assigné en référé le l0 juillet 2010 devant le tribunal de commerce de Nanterre, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, les sociétés potentiellement responsables de ce sinistre, soit la société alors dénommée Gdf Suez Énergie Services Cofely, devenue Engie Énergie en charge de la maintenance et de l'exploitation de l'équipement, la société Donau Carbon, société de droit italien ayant construit l'incinérateur, et le récupérateur, la société Endel, immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 438 277 030 et dont le siège social est sis [Adresse 2], ayant réalisé des travaux sur l'incinérateur et le récupérateur avant son incendie, et la société Salomon & Casadeï, 'Chaudronnerie de Belledonne', immatriculée avant sa radiation au Rcs de Grenoble sous le numéro 073 500 464, et dont le siège social était sis [Adresse 4], ayant également effectué des travaux sur l'incinérateur. La société Développement, immatriculée au Rcs de [Localité 6] sous le numéro 503 328 072, et dont le siège social est sis [Adresse 4], vient désormais aux droits de la société Salomon & Casadeï.

L'assureur dommages de la société Amcor, la société Xl Insurance Company Ltd, est intervenu volontairement à cette procédure.

Par ordonnance de référé en date du 06 juillet 2010, le tribunal de commerce de Nanterre a désigné M. [T] comme expert. Celui ci a rendu son rapport le 24 février 2014. La société Cofely a contesté ce rapport .

Par ordonnance prononcée le 30 avril 2014, le juge chargé du contrôle des expertises a déclaré irrecevables les demandes formées par la société GDF Suez Energie Services en remplacement de l'expert et en réouverture de l'expertise.

Par ordonnance du 11 mars 2015, le premier président délégué de la cour d'appel de Versailles a fixé la rémunération de l'expert [T] à 80 543,48 euros en écartant les demandes de la société GDF Suez Energie Services tendant à diminuer le montant des honoraires de l'expert en raison de la mauvaise qualité du rapport, du non respect des délais impartis et d'un manque d'objectivité et d'impartialité .

Entre temps, par acte du 22 janvier 2014, la société Cofely a assigné la société Amcor devant le tribunal de commerce de Paris pour obtenir le règlement des factures impayées, d'un montant en principal de 44 465,90 euros, outre 5 000 euros pour exécution de mauvaise foi du contrat et 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Une tentative de conciliation a échoué. Constatant un lien de parenté avec un des dirigeants de Cofely, le président du tribunal de commerce de Paris a demandé à madame le premier président de la cour d'appel de Paris le dépaysement de l'affaire.

Par ordonnance du 21 janvier 2015 , le premier président a désigné le tribunal de commerce de Bobigny pour connaître de l'affaire.

* * *

Vu le jugement prononcé le 3 juillet 2018 par le tribunal de commerce de Bobigny qui dans l'instance opposant la Sa Engie Energie Services anciennement dénommée GDF SUEZ Energie Services aux sociétés Amcor, XL insurance, Edom Développement et la société de droit italien Donau Immobiliaire, a statué ainsi qu'il suit :

Reçoit la société Engie Énergie Services en son action en garantie à l'encontre des sociétés Donau Immobiliaire et Edom Développement venant aux droits de la société Salomon et & Casadeï ;

Déboute la société Engie Energie Services de sa demande tendant à prononcer la nullité du rapport d'expertise de monsieur [T] ;

Condamne la société Amcor Flexibles Packaging France à payer à la société Engie Énergie Services la somme de 44 465,90 euros au titre de la facture n 2011030/J00443

du 24 mars 2011, avec intérêts au taux légal à compter du 11 juillet 201 1, et capitalisation

des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil dans sa rédaction antérieure

au premier octobre 2016 ;

Condamne la société Engie Energie Services à payer à la société Amcor Flexibles Packaging France la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour inexécution partielle de ses obligations ;

Ordonne la compensation entre les sommes dues de part et d'autre entre les sociétés Engie Energie Services et Amcor Flexibles Packaging France ;

Déboute la société Engie Energie Services de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de la société Amcor pour exécution de mauvaise foi du contrat ;

Fixe le préjudice global consécutif au sinistre à 1 051 275,10 euros ;

Déboute Xl Insurance Company Ltd de ses demandes au titre des frais engagés outre l'indemnisation versée à la société Amcor Flexibles Packaging France ;

Dit la société Edom Développement venant aux droits de la société Salomon de Casadeï

hors de cause ;

Dit prescrite l'action de la société Amcor Flexibles Packaging France à l'encontre de la

société Donau Immobiliaire ;

Dit que les responsabilités de la survenance du sinistre sont partagées entre Amcor et

Engie. et les répartit de la maniére suivante :

* 80 % à la charge de la société AMCDR Flexibles Packaging France, soit 84. 02l,08 euros ;

* 20 % à la charge de la société Engie Énergie Services soit 210 255,02 euros exonérant les autres parties de toute responsabilité dans le sinistre ;

Déboute la société Engie Énergie Services de son action en garantie a l'encontre de la société Donau Immobiliaire ;

Condamne la société Engie Energie Services à payer à la société Xl Insurance Company

LTD la somme de 210 255,02 euros, déboute la société Xl Insurance Company Ltd du surplus de ses demandes et déboute la société Amcor Flexibles Packaging France de toutes ses demandes ;

Condamne la société Engie Energie Services à verser à la société Edom Développement venant aux droits de la société Salomon & Casadeï la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Amcor Flexibles Packaging France à payer à la société Donau Immobiliare la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Engie Énergie Services à payer à la société Donau Immobiliare la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société Donau Immobiliare du surplus de ses demandes de ce chef ;

Déboute la société Amcor Flexibles Packaging France et la société Engie Énergie Services de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Engie Énergie Services à payer à la société Xl Insurance Company

Ltd la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société XL Insurance Company Ltd du surplus de ses demandes de ce chef ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

Condamne les sociétés Amcor Flexibles Packaging France et Engie Énergie Services aux entiers dépens, à raison de 80 % pour la société Amcor MCOR Flexibles Packaging France, et de 20 % pour la société Engie Énergie Services, ainsi que les frais d'expertise de 80 543,82 euros ;

Vu l'appel le 21 Août 2018 de la société Amcor

Vu les assignations en appel provoquées délivrées par la société Engie Energie Services le 21 février 2019 à l'encontre de la société de droit italien Donau Immobiliaire (assignation délivrée selon l'article 9-2 du règlement CE du 13 novembre 2007) et le 21 février 2019 également à l'encontre de la société Edom Développement (assignation délivrée à personne habilitée) avec signification des conclusions ;

Vu l'absence de constitution des sociétés Donau Immobiliaire et Edom Développement assignées en intervention forcée ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 20 mai 2019 par la société Amcor Flexibles Packaging France (Amcor),

Vu les dernières conclusions signifiées le 18 avril 2019 par la société Axa XL Insurance Company Ltd ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 27 juin 2019 par la société Engie Energie Services

La société Amcor demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :

Vu les articles 1134 et suivants du code civil

Vu l'article 1147 du code civil,

Vu le rapport de l'Expert [T],

Vu l'ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Versailles du 12 mars 2015 ;

- Confirmer le jugement rendu en ce qu'il a jugé valide le rapport d'expertise judiciaire établi par Monsieur [P] [T],

- Infirmer le jugement rendu pour le surplus.

Et statuant à nouveau :

- Juger que la facture du 24 mars 2011 émise par la société Engie Energie Services n'est pas due ;

- Juger que la société Engie Energie Service a gravement violé ses obligations contractuelles envers la société Amcor Flexibles Packaging France ;

- Juger que la société Engie Energie Services est responsable du sinistre subi le 30 mars 2010 par la société Amcor Flexibles Packaging France ;

- Juger que la violation par la société Engie Energie Services de ses obligations contractuelles a causé un préjudice à la société Amcor Flexibles Packaging France ;

En conséquence :

- Condamner la société Engie Energie Services à payer à la société Amcor Flexibles Packaging France la somme de 4 552 020,89 euros HT ;

- Condamner la société Engie Energie Services à payer à la société Amcor Flexibles Packaging France la somme de 250 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés au cours de l'expertise judiciaire et en première instance ;

- Débouter la société Engie Energie Services de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner la société Engie Energie Services à payer à la société Amcor Flexibles Packaging France la somme de 40 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel ;

- Condamner la société Engie Energie Services aux entiers dépens.

La société XL Insurance Company Se demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :

Vu les articles 1147 et suivants du code civil (aujourd'hui 1231-1 et suivants du code civil), les articles 1250 du Code civil (aujourd'hui 1346-1 du code civil) et L. 121-12 du code des assurances

* A Titre Principal

- Confirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a déclaré Insurance Company Ltd (aujourd'hui Xl Isurance Company Ltd Se) recevable en son intervention volontaire et en son recours subrogatoire ;

- Confirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a constaté la parfaite validité du rapport d'expertise judicaire déposé par Monsieur [P] [T] le 24 janvier 2014,

Par conséquent,

- Débouter Engie de ses demandes d'annulation du rapport d'expertise judiciaire déposé par Monsieur [P] [T] le 24 janvier 2014,

- Infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'il a mis à la charge de la société Amcor 80 % de responsabilité dans la survenance du sinistre,

- Juger que Engie a manqué à ses obligations contractuelles les plus élémentaires,

- Juger que la société Engie est entièrement responsable du sinistre incendie qui s'est produit le 30 mars 2010 dans l'incinérateur de la société Amcor Flexibles Packaging France au sein de son usine de [Localité 5],

- Juger que XL Insurance Company Se est subrogée dans les droits de son assuré à hauteur de l'indemnité versée, soit 995 404 euros ;

- Juger que la compagnie Xl Insurance Company Se a supporté des frais directs dans le cadre de la procédure d'expertise judiciaire pour un montant total de 277 483,82 euros (dont 80 543,82 euros de frais d'expertise judiciaire compris dans les dépens) ;

Par conséquent,

- Condamner Engie à indemniser la société Xl Isurance Company Se en sa qualité d'assureur subrogé dans les droits de son assuré Amcor Flexibles Packaging France en lui réglant la somme de 995 404 euros ;

- Condamner Engie à indemniser la société Xl Insurance Company Se des frais directs supportés par elle dans le cadre de la procédure d'expertise judiciaire à hauteur de 196 940 euros (les frais de l'expertise judiciaire à hauteur de 80 543,82 euros étant compris dans les dépens) ;

* A titre subsidiaire,

Si la Cour retenait la responsabilité de la société Amcor Flexibles Packaging France, ramener à de plus justes proportion la part de responsabilité de la société Amcor, qui ne

saurait en tous cas être supérieure à 50 %,

* En tout état de cause,

- Condamner Engie à régler à Xl Insurance Company Se la somme de 30 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des 10 000 euros déjà alloués par le Tribunal de commerce de Bobigny ;

- Condamner Engie aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais de l'expertise

judiciaire à hauteur de 80 543,82 euros.

La société Engie demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :

Vu l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, les articles 16, 66, 233, 234, 237, 282, 341, du Code de procédure civile, L.111-6 du Code de l'organisation judiciaire

Vu les articles 1134 et 1382 du code civil

- Recevoir la société Engie en ses demandes les dire bien fondées.

In Limine Litis :

- Constater que l'Expert n'a pas rempli personnellement sa mission ;

- Constater que l'Expert n'a pas rempli sa mission avec conscience, objectivité et impartialité ;

- Constater que l'Expert a violé le principe du débat contradictoire ;

En conséquence:

- Infirmer le Jugement entrepris et prononcer la nullité du rapport d'expertise établi par Monsieur [P] [T]

Au fond :

A titre principal :

- Infirmer le Jugement entrepris et constater que la responsabilité de la société Amcor Flexibles Packaging France est engagée et que son intervention constitue la cause de la survenance du sinistre en date du 30 mars 2010 ;

En conséquence,

- Infirmer le Jugement entrepris et débouter la société Amcor Flexibles Packaging France de l'ensemble de ses demandes dirigées à l'encontre de la société Engie ;

A titre subsidiaire,

- Constater que la responsabilité de la société Amcor Flexibles Packaging France est engagée dans la survenance du sinistre ;

- Infirmer le jugement entrepris et déclarer irrecevable Xl Insurance en son intervention volontaire et en son recours subrogatoire ;

- Infirmer le Jugement entrepris et constater la responsabilité des sociétés Donau Immobiliare Srl et Edom Développement venant aux droits de la société Salomon Casadeï dans la survenance du sinistre ;

- Juger qu'il y existe un partage de responsabilité entre les sociétés Amcor, Donau Immobiliare Srl et Edom Développement venant aux droits de la société Salomon Casadeï dans l'origine de la survenance du sinistre,

En conséquence,

- Juger que les éventuelles condamnations pécuniaires prononcées devront être partagées entre les responsables à proportion de leur part contributive dans la réalisation du dommage,

- Débouter la société Xl Insurance de l'ensemble de ses demandes ;

- Condamner les sociétés Donau Immobiliare Srl et Edom Développement venant aux droits de Salomon Casadei à relever et garantir la société Engie de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre elle ;

A titre également subsidiaire,

- Infirmer le Jugement entrepris et ramener le préjudice allégué de la société Amcor à de plus justes proportions ;

En tout état de cause,

- Confirmer le Jugement entrepris et condamner la société Amcor Flexibles Packaging France à payer à la société Engie la somme de 44 465,90 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2011.

- Dire que les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l'article 1154 du code civil.

En cas de besoin,

- Confirmer le Jugement entrepris et ordonner la compensation de toute condamnation qui serait prononcée à l'encontre de la société Engie et le paiement des sommes au titre du paiement des factures impayées pour un montant de 44 465,90 euros ;

- Condamner solidairement les sociétés Amcor Flexibles Packaging France, Donau Immobiliare Srl et Edom Développement venant aux droits de la société Salomon et Casadeï à payer à la société Engie la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civil ainsi qu'aux dépens.

SUR CE,

A) Sur le rapport d'expertise

Considérant que la société Engie demande à la cour d'annuler le rapport d'expertise de M. [T] , l'expert n'ayant pas rempli personnellement sa mission, n'ayant pas agi avec conscience, objectivité et impartialité et ayant violé le principe du débat contradictoire ;

Mais considérant que la société Amcor et la société Axa-XL Company sont bien fondées à s'opposer à cette demande ; qu'en effet, par ordonnance prononcée le 30 avril 2014, le juge chargé du contrôle des expertises auprès du tribunal de commerce de Nanterre, a déclaré irrecevables les demandes formées par la société GDF Suez Energie Services devenue Engie en remplacement de l'expert et en réouverture de l'expertise ; que cette ordonnance est définitive en l'absence d'appel ; que de même , par ordonnance du 11 mars 2015, le premier président délégué de la cour d'appel de Versailles a fixé la rémunération de l'expert [T] à 80 543,48 euros en écartant les demandes de la société GDF Suez Energie Services tendant à diminuer le montant des honoraires de l'expert en raison de la mauvaise qualité du rapport, du non respect des délais impartis et d'un manque d'objectivité et d'impartialité ; que ces griefs exactement repris devant la cour ont ainsi été écartés par une décision ayant autorité de chose jugée ; que la cour n'a pas à examiner cette demande de nullité du rapport d'expertise qui a été définitivement rejetée ;

Considérant que, par motifs substitués, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du rapport d'expertise.

B) Sur les responsabilités du sinistre

Considérant qu'il résulte du rapport d'expertise de M. [T] que l'incendie survenu le 30 mars 2010 dans les installations d'incinération de l'usine de [Localité 5] (Isère) exploitée par la société Amcor n'a pas pour origine la surface extérieure du récupérateur mais provient de l'enchaînement des causes suivantes :

- dégradation de l'huile utilisée lors de la première phase d'utilisation du récupérateur,

- un nettoyage ne pouvant pas restaurer une surface d'échange convenable,

- la présence de résidus complexes en surface interne pendant l'utilisation du récupérateur avec le thermino 66 ;

Que l'expert poursuit comme suit :

ces causes 'ont contribué à des réductions de section , des températures élevées. Une corrosion résultant de conditions carburantes et sulfurantes a pu ainsi se développer, des changements de structure ont été induits par la température, ces facteurs ayant conduit à une (des) rupure (s) locale (s) et au sinistre' (page 28) .;

Qu'en page 34 l'expert précise que l'incendie est dû à un percement d'un serpentin du réchauffeur entraînant l'inflammation du thermofluide ; qu'il mentionne que le récupérateur est constitué de 8 spirales et qu'il est indispensable que les circuits soient équilibrés avec débits identiques pour assurer le refroidissement des tubes ; que les désordres suivants ont été constatés :

- tubes montrant des différences importantes d'encrassements , les encrassements réduisant le débit de refroidissement,

- présence dans le thermofluide d'insolubles en suspension ayant pour origines la dégradation et l'oxydation des tuyauteries de distribution de machines, la dégradation des thermofluides et les mauvais rinçages des installations ;

Considérant que l'expert conclut à la responsabilité de Cofely devenue Engie qui, au terme des contrats conclus les 22 mars 2000 et le 1er septembre 2007 était en charge de l'exploitation et de la maintenance, qui devait procéder à des analyses régulières du thermofluide , procédé à un nettoyage annuel du récupérateur (selon les préconisations de Babcock Wanson), qui n'a pas surveillé le récupérateur (4 jours de relevés des températures d'entrée/ sortie du fluide thermique sur 10 ans de fonctionnement) ;

Considérant que la société Engie soutient que la responsabilité d'Amcor serait engagée dans la survenance du sinistre du 30 mars 2010 en raison d'une pollution du fluide thermique survenue en octobre 2008 lors d'un nettoyage décidé par Amcor et de la suppression décidée par Amcor en août 2009 de 5 des 8 purges ;

Mais considérant que l'expert s'est expressément prononcé sur le premier point puisqu'il précise en page 71 de son rapport :

"Nous n'avons pas omis de considérer l'incident de 2008 comme très important, car la corrosion n'a pas une cause chimique (corrosion non aqueuse) et la modification des purges en 2009 par Amcor au lieu de Cofely n'est pas plus l'élément déclencheur de la corrosion que l'erreur de 2006 qui elle a entraîné une montée en température que vous omettez." ; que l'expert précise également en page 73 de son rapport que l'absence de rinçage et le remplacement du fluide à la suite de la pollution de 2008 ont pu jouer un rôle aggravant indirect dans l'incendie de 2010 ; que cette réponse est exclusive de lien de causalité direct et certain ; que par ailleurs la société Amcor justifie avoir adressé à la société Cofathec (devenue Cofely) le 17 septembre 2008 un courrier de mise en garde sur la qualité du thermofluide et l'invitant à prendre les mesures nécessaires pour garantir la qualité du thermofluide ;

Considérant que l'expert s'est également prononcé sur la suppression des tubes de purge en 2009 en apportant la réponse suivante :

'Toutes les purges n'ont pas été supprimées. Nous l'avons déjà indiqué dans le pré rapport et nous confirmons nos propos : la conception initiale des purges n'était pas la meilleure. Mais des modifications après analyses des mauvais fonctionnements (voir question N° 6) de ce système auraient pu être effectuées en prévoyant un collecteur de grande capacité situé au-dessus du récupérateur pour faciliter le dégazage. Mais jamais il n'aurait supprimé les bras morts dans l'arrivée des gaz chauds en haut du récupérateur. Les croquis explicatifs concernant ce sujet joint à votre dire ci-dessus sont exacts mais la cokéfaction que vous dénoncez, et qui boucherait les tubes de purge, ne provient pas de la décomposition du thermofluide mais du phénomène de « métal dusting » déjà bien avancé.' ;

Considérant qu'il se déduit de ce qui précède que les contestations techniques soulevées par la société Engie notamment dans ses pièces 12 et 13 ne sont pas susceptibles de remettre en cause les conclusions auxquelles est parvenu l'expert judiciaire ;

Considérant que , par de justes motifs que la cour adopte , les premiers juges ont justemement écarté la responsabilité des société Donau Immobiliare (concepteur de l'échangeur) et Edom Développement (réalisateur de 5 des 8 purges ) dans l'origine du sinistre ;

Considérant que la société Engie sera ainsi déclarée responsable de l'entier préjudice consécutif à l'incendie du 30 mars 2010 ; que le jugement doit ainsi être infirmé ;

C ) Sur les indemnisations

a) Demandes de Amcor

Considérant que la société Amcor sollicite les indemnisation suivantes :

* frais supportés par Amcor au titre du nettoyage, de la remise en sécurité et du redémarrage des installations : 570 166,24 euros,

* Les pertes de production consécutives à l'indisponibilité des installations : 661 000 euros

* Les coûts de désorganisation occasionnés par le sinistre : 102 000 euros,

* Le préjudice né de la surconsommation de gaz occasionnée par l'absence de tout suivi

et maintenance de l'échangeur thermique puis en raison de sa disparition : 1 141 876 euros,

* Le désinvestissement consécutif au sinistre : 569 244,65 euros,

* Le coût et les pertes d'exploitation induits par une reconstruction à l'identique : 1 107 000 euros,

* Montant total : 4 552 020,89 euros ;

Considérant que la société Engie propose les indemnisations suivantes :

* frais supportés par Amcor au titre du nettoyage, de la remise en sécurité et du redémarrage des installations : 158 20 euros , compte tenu d'une vétusté de 63 %,

* Taxe sur la pollution : 39 000 euros,

* surconsommation de gaz : 23 833,23 euros,

* coût de reconstruction à l'identique : 0, à titre subsidiaire : 120 220,20 euros ;

Considérant qu'il convient au préalable de constater que l'expert s'est prononcé sur le montant des indemnisations et ainsi que justement relevé par la société Engie a proposé les montants suivants, le premier montant correspondant à la somme chiffrée par Amcor dans un dire du 24 janvier 2014 :

* frais de nettoyage, de mise en sécurité et de redémarrage des installations : 468 586,24 euros chiffrés dans le dire, 428 161,10 euros retenus par l'expert,

* taxe sur la pollution : 65 450,00 euros chiffrés dans le dire, 111 060,00 euros retenus,

* Pertes de productivité suite à l'indisponibilité des installations : 661 000,00 euros chiffrés dans le dire proposés, 0,00 euros retenu,

* coûts de désorganisation suite au sinistre : 102 000,00 euros chiffrés dans le dire proposés, coûts d'expertise retenus,

* Frais d'expertise : 157 952,08 euros chiffrés dans le dire, coûts d'expertise,

* Surconsommation de gaz : 1 141 876,00 euros chiffrés dans le dire, 144 521,06 euros retenus,

* Désinvestissement consécutif au sinistre 569 244,65 euros chiffrés dans le dire, 0,00 euros retenu,

* Coûts de reconstruction à l'identique : 400 734,00 euros chiffrés dans le dire, 400 734,00 euros retenus,

* Perte d'exploitation due à la reconstruction 1 107 000,00 euros chiffrés dans le dire 0,00 euros retenu,

Total : 4 673 842,97 euros chiffrés dans le dire, 1 084 476,16 euros retenus ;

Considérant, ceci observé, que les montants suivants seront retenus :

* Frais de nettoyage, de mise en sécurité et de redémarrage des installations ;

Considérant que le montant retenu par l'expert soit 428 161 euros sera retenu avec application d'un taux de vétusté de 50 % soit 214 080 euros

* Pertes de productivité suite à l'indisponibilité des installations ;

Considérant que l'expert a justement écarté cette prétention au motif que l'installation avait été rapidement remise en service et qu'il n'y avait pas eu d'arrêt significatif de la fabrication, les résultats de l'année 2010 ayant par ailleurs été meilleurs que ceux des années précédentes

* Coûts de désorganisation suite au sinistre

Considérant que cette demande porte sur le temps consacré par le personnel à la gestion du sinistre ; que cette demande doit être rejetée en l'absence de hausse de la masse salariale puisque le personnel affecté a été celui de l'entreprise qui en toute hypothèse devait être rémunéré ;

* Surconsommation de gaz occasionnée par l'absence de tout suivi, maintenance puis disparition de l'échangeur thermique ;

Considérant que l'expert a justement retenu que les pertes invoquées liées à l'absence de récupération d'énergie en raison de la dégradation de l'échangeur ne pouvaient porter que sur la période postérieure au sinistre survenu le 30 avril 2010 ; qu'au vu des pièces examinées , il a appliqué une pourcentage de 6,93 % correspondant à la perte d'économie; que sa proposition d' indemnisation à hauteur de 144 521 euros sera retenue ;

* désinvestissement consécutif au sinistre ;

Considérant que ce préjudice ne se dissocie pas de celui ci dessus indemnisé au titre de la maintenance puis de la disparition de l'échangeur thermique ;

* coûts et pertes d'exploitation induits par une reconstruction à l'identique ;

Considérant que si le coût de reconstruction d'un récupérateur présente un lien de causalité direct et certain avec le sinistre , la société Engie est bien fondée à solliciter l'application d'un taux d'abattement pour vétusté qui portera sur 50 % ; que la somme de 200 367 euros doit être allouée à ce titre ;

Considérant qu'aucune pièce n'est versée susceptible de justifier du bien fondé de la demande au titre de la perte d'exploitation due à la reconstruction ;

Considérant que le préjudice de la société Amcor doit être chiffré à la somme de 597 970 euros résultant du décompte suivant :

Frais de nettoyage, de mise en sécurité et de redémarrage des installations : 214 080 euros,

Surconsommation de gaz : 144 521 euros,

coût de reconstruction d'un récupérateur : 200 367 euros,

Taxe sur la pollution : 39 002 euros ;

b) Sur les demandes de la société Axa-XL Insurance Company

Considérant que la socité Axa-XL Company verse aux débats les quittances subrogatoires en date du 10 mai 2011 à hauteur de 512 994 euros et du 04 novembre 2011 à hauteur de 482 410 euros soit au total 995 404 euros ; que la société Amcor reconnait dans ses quittance avoir reçu par virement bancaire les sommes ainsi chiffrées ; que cette subrogation est conforme à l'article L.121-12 ducode des assurances ; qu'il convient de condamner la société Engie à verser à la société Axa-XL la somme de 995 404 euros ;

Considérant que la société Axa-XL Insurance Company sollicite également la condamnation de la société Engie à lui verser la somme de 196 940 euros, cette somme correspondant à des frais de rémunération d'experts techniques et d'avocats ;

Mais considérant que les frais engagés auprès d'experts amiables ont été exposés par la société Engie de manière discrétionnaire dans le cadre de sa défense ; que la société Amcor n'est pas tenue d'en supporter le coût ; que le traitement des honoraires d'avocat (87 784 euros) nt est pris en considération dans l'examen des demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

c) Sur les demandes de la société Engie

Considérant que la société Engie verse aux débats une facture datée du 24 mars 2011 d'un montant de 44 465,90 euros émise à l'encontre de la société Amcor portant sur des prestations couvrant la période du 1er janvier au 15 juin 2011 ; que la société Amcor se contente de contester cette facture en soutenant sans le prouver que la société Engie ne serait plus intervenue sur le site à compter de septembre 2010 ; qu'il convient de faire droit à cette demande en ordonnant la compensation ;

PAR CES MOTIFS :

La cour,

INFIRME le jugement déféré et statuant de nouveau :

REJETTE la demande de nullité du rapport d'expertise ;

DIT la société Engie Energie Services entièrement responsable du sinistre survenu à [Localité 5] le 30 mars 2010 ;

CONDAMNE la société Engie Energie Services à verser :

* à la société Amcor Flexibles Packaging France la somme de 597 970 euros,

* à la société Axa XL Insurance Company la somme de 995 404 euros,

CONDAMNE la société Amcor Flexibles Packaging France à verser à la société Engie Energie Services la somme de 44 465,90 euros ;

ORDONNE la compensation aux conditions de l'article 1347 du code civil ;

CONDAMNE la société Engie Energie Services à verser sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile 15 000 euros à la société Amcor Flexibles Packaging France et 15 000 euros à la société Axa XL Insurance Company;

REJETTE toutes autres demandes ;

CONDAMNE la société Engie Energie Services aux entiers dépens qui comprendront les frais de l'expertise de M. [T].

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 18/20273
Date de la décision : 04/11/2019

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°18/20273 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-04;18.20273 ?
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