La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/10/2019 | FRANCE | N°16/12937

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 30 octobre 2019, 16/12937


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 30 Octobre 2019

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/12937 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZZGM



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Septembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS RG n° 12/09499





APPELANT



Monsieur [X] [F]

[Adresse 2]

[Localité 5]

né le [Date nais

sance 1] 1964 à [Localité 5]



représenté par Me Thierry DOUËB, avocat au barreau de PARIS





INTIMEE



Société DUFF ET PHELPS

[Adresse 3]

[Localité 6]

N° SIRET : 494 50 3 6 42



r...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 30 Octobre 2019

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/12937 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZZGM

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 20 Septembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS RG n° 12/09499

APPELANT

Monsieur [X] [F]

[Adresse 2]

[Localité 5]

né le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 5]

représenté par Me Thierry DOUËB, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Société DUFF ET PHELPS

[Adresse 3]

[Localité 6]

N° SIRET : 494 50 3 6 42

représentée par Me Olivier KRESS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0461 substitué par Me Claire LEHUCHER, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juillet 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Antoinette COLAS, Présidente, chargée du rapport, et Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Antoinette COLAS, Présidente de Chambre,

Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de Chambre,

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère.

Greffier : M. Julian LAUNAY, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Antoinette COLAS, Présidente de Chambre et par Monsieur Julian LAUNAY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [F] a été embauché, suivant contrat à durée indéterminée, le 9 mars 2009, par la société Duff & Phelps, en qualité de managing director de la division Invesment Banking, cadre niveau 3.3, coefficient 270. À

Il a été convoqué à un entretien préalable licenciement par lettre remise en main propre le 10 avril 2012. Il a accepté un contrat de sécurisation professionnelle le 7 mai 2012, et reçu notification du motif économique de la rupture de son contrat de travail par lettre recommandée du 22 mai 2012.

Le 21 août 2012, il a saisi le conseil de prud'hommes de Paris afin d'obtenir le paiement notamment d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et non-respect de la procédure de licenciement, de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier, d'heures supplémentaires, des bonus 2009 à 2012 et complément d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Par jugement de départage du 20 septembre 2016, le conseil de prud'hommes a condamné la société à lui payer :

'11 666,66 euros à titre d'indemnité pour irrégularité de la procédure

'2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

'dit que la moyenne des 3 derniers mois de salaire était fixée à la somme de 11 666,66 euros.

Monsieur [F] a interjeté appel par voie électronique et par des conclusions adressées par voie électronique le 28 août 2018 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions de l'appelant, il sollicite de voir :

'confirmer le jugement en ce qu'il lui a accordé une indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement et au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

'infirmer le jugement en ses autres dispositions,

condamner la société au paiement des sommes de :

-233 333,32 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-233 333,32 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier

-278 941 euros à titre d'heures supplémentaires

-27 894,10 euros à titre de congés payés afférents

-443 333 euros à titre de bonus pour les années 2009 à 2012

-24 655 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement

-13 458,18 euros à titre de complément d'indemnités pôle emploi

-38 499 euros à titre de complément pour le contrat de sécurisation professionnelle

-4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

'condamner la société à lui remettre sous astreinte de 100 euros par jour de retard son certificat de travail du 9 mars 2009 au 7 mai 2012 ainsi que ses bulletins de paye rectifiés.

Par conclusions adressées par voie électronique le 4 septembre 2018 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits de la procédure et des prétentions de l'intimée, la société demande de voir :

'confirmer le jugement sauf en ce qu'il a alloué au salarié une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ;

'à titre principal, débouter Monsieur [F] de ses demandes ;

'à titre subsidiaire, limiter les dommages-intérêts de Monsieur [F] au titre d'un droit éventuel au paiement d'un bonus et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'en tout état de cause, le condamner à lui verser 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la demande de rejet de pièces communiquées le 17 septembre 2018 formulé par la société

Les pièces communiquées par Monsieur [F] le 17 septembre 2018, soit postérieurement à l'ordonnance de clôture du 4 septembre 2018, seront rejetées. La société subisse même

Sur les heures supplémentaires

Monsieur [F] soutient qu'il n'avait pas la qualité de cadre dirigeant et qu'il est donc recevable à réclamer des heures supplémentaires.

Selon l'article L. 3111'2, du code du travail, les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions des titres II et III. Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant, les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.

Le contrat de travail de Monsieur [F] stipulait qu'au regard tant de sa rémunération que de l'importance de ses responsabilités, il entrait dans la catégorie des cadres dirigeants au sens de l'article L. 3111'2 du code du travail et ne serait donc pas soumis à l'essentiel de la réglementation sur la durée du travail.

L'annexe 1 du contrat de travail de Monsieur [F] détaillait ses fonctions : « Le directeur de la division Investment Banking est responsable de la gestion des opérations locales et doit être au service des besoins des clients de Duff and Phelps de la division Investment Banking . La stratégie à mettre en 'uvre devra être cohérente et conforme à la stratégie globale du groupe. Le managing director de la division Investment Banking est responsable du développement et de la mise en 'uvre de solutions efficaces et innovantes aux problèmes rencontrés en définissant des objectifs réalistes et pragmatiques, et en concevant des stratégies efficaces et des plans d'action logiques pour la division Investment Banking...... »

Monsieur [F] occupait une fonction de première importance au sein de l'entreprise et percevait une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués au sein de celle-ci. En outre, il percevait une indemnité de voiture de 1000 euros par mois.

Il ne résulte d'aucun élément probant l'existence d'un manque d'autonomie ou de responsabilité l'obligeant à recevoir validation de sa hiérarchie de ses décisions. Par ailleurs, il avait été demandé à l'ensemble du personnel de remplir des feuilles de temps car il s'agissait d'un nouvel outil plus large de gestion des plannings et expertises.

Ainsi, Monsieur [F] sera débouté de sa demande au titre des heures supplémentaires.

Sur le licenciement

Aux termes de l'article L. 1233'3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

Il ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été effectués et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi de même catégorie ou équivalent, ou même, avec l'accord du salarié, d'une catégorie inférieure, ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel elle appartient. Les offres de reclassement proposées aux salariés doivent être écrites et précises.

L'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur est une obligation de moyen renforcée, de sorte qu'il doit établir qu'il a recherché les moyens d'éviter le licenciement du salarié.

La recherche doit s'étendre à l'entreprise mais également aux autres sociétés du groupe auquel appartient est le reclassement doit être envisagé à l'international et ce indépendamment du secteur d'activité concerné.

La société a certes proposé à Monsieur [F] un poste de directeur à [Localité 4] mais celui-ci, dans son questionnaire de mobilité internationale, avait accepté une mutation notamment aux États-Unis. Or, la société ne verse aux débats aucune pièce permettant de s'assurer qu'elle ne disposait d'aucun poste dans ce pays où la société a de nombreux bureaux. En outre, peu après le licenciement de Monsieur [F], elle a recruté au bureau de [Localité 6] Monsieur [J], en qualité managing director, et quelques mois plus tard, elle annonçait le recrutement de 9 managing directors.

Ainsi, la société ne justifie pas de son impossibilité de reclasser Monsieur [F]. En conséquence, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Compte tenu de l'ancienneté de Monsieur [F] (un peu plus de 3 ans) de sa rémunération (précisée ci-après soit, 15 166,66 euros) et des circonstances de la rupture, il convient de lui accorder une somme de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Sur le préjudice moral et financier pour des circonstances intervenues après le licenciement

Monsieur [F] soutient que :

'son employeur a transmis à pôle emploi avec retard et de façon incomplète des documents relatifs à son licenciement contraignant pôle emploi à annuler le rendez-vous d'inscription,

'de mai à septembre 2012, il n'a pu bénéficier du suivi CSP auquel il avait droit aux termes de la lettre de licenciement du 22 mai 2012,

'son choix de maintenir le bénéfice de la mutuelle devait être exprimé au plus tard 10 jours après la rupture du contrat le 7 mai 2012 et que pour ne pas être pénalisé par ce retard de 5 jours, il a dû intervenir de peur d'être radié de sa mutuelle, je je souffre du si je suis frileuse

'son employeur a, sans son accord, utilisé sa base de données personnelles pour un cocktail dînatoire au Petit palais et Monsieur [F] a adressé un courriel le 27 mars 2013 pour dénoncer cette utilisation indue,

'son employeur l'a délibérément et publiquement dénigré en l'associant à l'échec du bureau des fusions acquisitions de [Localité 6] dans le journal Capital finance.

Un article du journal Capital finance indique : « La maison-mère new-yorkaise a décidé de mettre fin à l'activité lancée en 2009, avec l'arrivée de [X] [F] et de [G] [I], pour ne conserver que celle du bureau londonien. Un échec, donc, pour le cabinet de conseil côté au NYSE ».

Cependant, il n'est pas établi que la société Duff & Phelps soit à l'origine de la mise en cause de Monsieur [F] dans cet article écrit le 11 juin 2012 par un journaliste, Monsieur [H], qui fait une analyse de l'activité de la société dans son ensemble en mettant en relief les côtés positifs et négatifs. Quant aux autres faits allégués, le salarié ne justifie pas d'un préjudice. Il sera débouté de cette demande.

Sur la procédure de licenciement

Le licenciement ayant été déclaré sans cause réelle et sérieuse, cette demande ne peut être accueillie, l'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement ne pouvant se cumuler avec celle pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le bonus

Monsieur [F] soutient que :

'aux termes de l'article 5 du contrat de travail, le président détermine une formule de calcul des bonus annuellement ;

'plusieurs directors ont bénéficié de ce bonus ;

'il n'a jamais participé à la rédaction du business plan et ne l'a pas signé ;

'il n'a été que destinataire de ce document rédigé par Monsieur [I] ;

'il était prévu qu'en 2012 une équipe de 26 personnes alors que celle-ci a été en réalité 5 fois moins importante en raison du refus de la société de procéder à des recrutements,

'Monsieur [F] n'a jamais eu de discussions avec son supérieur hiérarchique pour définir ses objectifs annuels personnels ;

'il n'a pas eu non plus de réponse à son courriel du 13 février 2012 adressé à sa direction sur les conditions d'attribution des bonus ;

'le bonus concerne tout le groupe et n'est pas spécifique à la France ;

'les évaluations de l'employeur permettent de constater que Monsieur [F] a toujours atteint les objectifs qui lui étaient fixés.

La société réplique que :

'le bonus présentait un caractère discrétionnaire, la lettre d'embauche ne mentionnant pas l'existence d'une rémunération variable à caractère contractuel ;

'la version française du bonus plan indique qu'il s'agit d'un plan de gratification discrétionnaire ;

'en sa qualité de managing director, Monsieur [F] avait la responsabilité d'évaluer les directors de son équipe et de leur expliquer le système de rémunération variable mis en place au sein de la société ;

'Monsieur [F] avait connaissance des objectifs à atteindre puisqu'il était responsable de leur fixation ;

'la clause relative aux primes de Monsieur [F] reposait sur des éléments objectifs et indépendants ;

'la condition d'octroi du bonus était simplement potestative ;

'l'octroi du bonus dépend des résultats de la ligne de service au sein de la société ; c'est en toute légalité et égalité que l'équipe américaine du groupe, qui a eu des résultats importants en 2011, a perçu un bonus, alors que l'équipe française, qui n'a pas eu de bons résultats en 2011, n'a perçu aucun bonus, en ce application des règles du plan de bonus ; de même, le fait que certains salariés d'autres lignes de service en France aient perçu un bonus, en raison de leurs résultats, en application des règles du plan de bonus, n'est pas constitutif d'une inégalité à l'égard de la ligne de service M&A, qui n'a pas eu de bons résultats et donc n'a pas eu de bonus ;

'à titre subsidiaire, les montants réclamés par Monsieur [F] au titre des primes variables discrétionnaires sont fantaisistes.

L'article 5 du contrat de travail stipulait : « Le salarié pourra participer au plan de bonus du groupe réservé aux cadres dirigeants. La formule de calcul de ce bonus, qui dépendra de la réalisation d'objectifs, sera déterminée chaque année par le président de la société ».

Ainsi, si le montant de ce bonus repose sur la décision unilatérale de l'employeur qui en définit la formule de calcul, celui-ci s'est néanmoins contractuellement engagé à définir un plan de bonus des directors et fixer les objectifs entrant en ligne de compte dans le calcul du bonus.

Ces dispositions ne peuvent être remises en cause par le bonus plan dont il n'est pas justifié que le salarié a eu connaissance avant son engagement et dont le contenu est, en tout état de cause, dépourvu de tout caractère contractuel ; au demeurant, ce document est en contradiction avec l'argumentation développée par la société qui se réfère à des objectifs collectifs de résultats d'une équipe pouvant déclencher le droit à prime, alors que le bonus plan prévoit que si les objectifs financiers de la société sont atteints, le résultat individuel de chaque salarié sera examiné pour déterminer la gratification.

La société ne justifie ni de l'établissement d'un plan de bonus du groupe directors, ni de la fixation d'objectifs portés à la connaissance du salarié (objectifs individuels auxquels fait référence le bonus plan de la société, ou collectifs, selon ce que celle-ci prétend), ni de l'élaboration annuelle d'une formule de calcul du bonus telle que prévue par le contrat.

Le business plan ne détermine pas le bonus ; il n'est pas établi que Monsieur [F] a participé à sa rédaction et il ne l'a pas signé ; il n'a été que destinataire de ce document ainsi qu'en atteste notamment le courriel de Monsieur [I] du 31 octobre 2008.

En outre, il était prévu qu'en 2012 une équipe de 26 personnes alors qu'en réalité l'équipe a été 5 fois moins importante.

Le document intitulé « gratification discrétionnaire » ne peut être considéré comme définissant « le plan de bonus du groupe directors » car, d'une part, il n'est pas réservé à cette catégorie d'employés, et, d'autre part, aucune précision n'est donnée sur les objectifs à atteindre et sur les modalités de calcul du bonus.

En conséquence, le business plan et ses objectifs pour les années 2009, 2010 et 2011 ne peuvent être opposés à l'appelant ; en outre, les effectifs étaient nettement inférieurs et les rapports d'évaluation de Monsieur [F] étaient particulièrement élogieux ainsi que les lettres de la société des 15 mars 2010 et 18 février 2011 le remerciant pour son dévouement, son travail et sa contribution au succès et à la croissance de la vie de celle-ci.

L'employeur qui n'a pas respecté ses engagements contractuels ne peut donc se prévaloir de sa propre carence pour justifier le non-paiement de la rémunération variable prévue par le contrat. À défaut d'accord entre les parties sur les modalités de calcul de cette rémunération variable, il incombe au juge de déterminer son montant en fonction, notamment, des critères fixés dans le contrat et des éléments de la cause.

Monsieur [F] prétend qu'il peut recevoir 100 % de son salaire fixe

La société réplique qu'il fixait lui-même ce pourcentage à 32 % dans l'hypothèse où il aurait réalisé le chiffre d'affaires attendu et oublie de mentionner le bonus encouragement qu'il a reçu par l'octroi d'actions gratuites et « RSA RSU » en 2010 et 2011 qui devraient nécessairement venir en déduction des sommes réclamées par lui.

En considération des explications et pièces fournies aux débats, au regard de la taille de l'entreprise et étant relevé que la preuve d'un engagement de la société à hauteur d'une rémunération variable équivalente au salaire fixe n'est pas rapportée, le montant de la part variable annuelle dû sera fixé à 30 % du salaire fixe, étant précisé qu'il n'y a pas lieu de déduire la gratification exceptionnelle octroyée au titre des actions « RSA/ RSU » en 2010 et 2011.

Il sera donc attribué à Monsieur [F] 30 % de la rémunération brute perçue par lui pendant la période de d'emploi, soit 133 000 euros

Sur le complément d'indemnité conventionnelle de licenciement

Monsieur [F] soutient à juste titre que son indemnité conventionnelle de licenciement a été calculée sur la base du salaire hors prime en méconnaissance de l'article 19 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques précisant que la rémunération doit inclure les primes prévues dans les contrats de travail individuels.

Eu égard à la rémunération perçue par Monsieur [F] de 15 166,66 euros (salaire de 11 666,66 + prime (part variable) de 3500 euros), le montant de l'indemnité de licenciement s'élève à 16 026,10 euros dont il conviendra de déduire la somme déjà perçue à ce titre.

Sur le complément d'indemnités de chômage et d'allocation CRP

Monsieur [F] sollicite également le paiement d'une somme au titre d'un reliquat d'allocation de sécurisation professionnelle du fait du défaut d'intégration de la prime annuelle dans la moyenne salariale au motif que le montant de l'allocation journalière versée par Pôle emploi aurait dû être doublé en raison du doublement de sa rémunération du fait de l'intégration de son bonus dans son salaire.

Cependant, outre le fait que la cour ne retient son droit à un bonus qu'à hauteur de 30 %, la demande de Monsieur [F] doit s'analyser en une demande pour perte de chance de percevoir des sommes dont, en tout état de cause, son employeur n'est pas débiteur puisqu'il s'agit d'indemnités versées par Pôle emploi.

Certes, le montant de l'ASP versé par Pôle emploi aurait été majoré de 30 %, mais il n'est pas justifié de la situation de Monsieur [F] au regard de ses droits à Pôle emploi, hormis pour les mois d'octobre et novembre 2012, novembre et décembre 2013.

En considération de ces éléments, il sera alloué à Monsieur [F] la somme de 2500 euros nets à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi relativement aux indemnités de chômage.

Il lui sera attribué la même somme de 2500 euros nets à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour le contrat de sécurisation professionnelle.

Sur la remise des documents

La société sera condamnée à remettre le certificat de travail et les bulletins de salaire rectifiés sans qu'il y ait lieu d'ordonner une astreinte.

Il est équitable d'allouer en appel à Monsieur [F] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement déféré sauf en ses dispositions ayant alloué à Monsieur [F] une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et débouté Monsieur [F] de ses demandes à titre d'heures supplémentaires, congés payés afférents, et de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Monsieur [F] est sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Duff & Phelps à payer à Monsieur [F] les sommes de :

'100 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'133 000 euros à titre de bonus pour les années 2009 à 2012

'16 026,10 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement sauf à déduire la somme déjà perçue à ce titre

'2500 euros à titre de complément d'indemnités Pôle emploi

'2500 euros à titre de complément pour le contrat de sécurisation professionnelle

'3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société Duff & Phelps à remettre à Monsieur [F] son certificat de travail du 9 mars 2009 au 7 mai 2012 ainsi que ses bulletins de paye rectifiés ;

Déboute Monsieur [F] du surplus de ses demandes ;

Ordonne le remboursement par la société Duff & Phelps aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à Monsieur [F] du jour de dans son licenciement au jour de l'arrêt dans la limite de 3 mois ;

Condamne la société Duff & Phelps aux dépens.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 16/12937
Date de la décision : 30/10/2019

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°16/12937 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-30;16.12937 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award