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23/10/2019 | FRANCE | N°17/00653

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 23 octobre 2019, 17/00653


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 23 OCTOBRE 2019



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/00653 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B2MZM



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Septembre 2016 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° F 14/00284





APPELANT



Monsieur [P] [D]

Chez Mr et Mme [J] [C] [Adress

e 2]

Représenté par Me Marie-dominique GAUVRIT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0642





INTIMEES



Me GUILLOUËT [H] (SELARL GARNIER GUILLOUËT) - Mandataire liquidateur ...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 23 OCTOBRE 2019

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/00653 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B2MZM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Septembre 2016 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° F 14/00284

APPELANT

Monsieur [P] [D]

Chez Mr et Mme [J] [C] [Adresse 2]

Représenté par Me Marie-dominique GAUVRIT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0642

INTIMEES

Me GUILLOUËT [H] (SELARL GARNIER GUILLOUËT) - Mandataire liquidateur de SELARL SELARL GARNIER GUILLOUET

[Adresse 3]

Représenté par Me Florence FREDJ-CATEL, avocat au barreau de MEAUX

Association AGS CGEA ILE DE FRANCE EST

[Adresse 1]

Représentée par Me Claude-marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Septembre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne BERARD, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Anne BERARD, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Pauline MAHEUX, greffière, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Anne BERARD, Présidente de chambre et par Madame Pauline MAHEUX, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

M. [D] a été embauché par la société L'Elasto le 1er juin 1987 par contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de magasinier.

La convention collective des commerces de détail non alimentaires N°3251 est applicable à la relation de travail.

La société emploie moins de onze salariés.

Par lettres recommandées avec accusé de réception du 22 novembre 2011, puis du 22 juillet 2013, M. [D] a réclamé un rattrapage de salaire en estimant que son salaire horaire ne correspondait pas au minimum légal.

M. [D] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Meaux le 27 février 2014 afin de solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail, outre des rappels de salaire.

Il a fait l'objet de plusieurs avertissements : le 14 avril 2014, le 15 avril 2014 et le 24 avril 2014, qu'il a contestés par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 juillet 2014.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 janvier 2015, il a sollicité de son employeur le versement de sa prime d'ancienneté.

Par jugement du tribunal de commerce de Meaux en date du 1er juin 2015, la société L'Elasto a été placée en liquidation judiciaire, la SELARL [M], prise en la personne de Me [H] [M], ayant été désignée comme liquidateur judiciaire.

M. [D] a été convoqué le 2 juin 2015 à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement fixé le 10 juin 2015 et a été licencié pour motif économique par lettre en date du 15 juin 2015.

Par jugement du 13 septembre 2016, le conseil de prud'hommes a :

- fixé la créance de M. [D] sur la liquidation judiciaire de la société L'Elasto, représentée par Me [H] [M], es qualités, à la somme de 8.806€ à titre de rappel de prime d'ancienneté,

- ordonné au liquidateur judiciaire d'inscrire au passif de la société les intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2015, date du jugement d'ouverture de la procédure collective, ceux-ci n'entrant pas dans la garantie de l'Unedic,

- débouté M. [D] du surplus de ses demandes,

- dit le jugement opposable à l'AGS CGEA

- laissé les dépens à la charge de la liquidation judiciaire de la société L'Elasto, représentée par Me [H] [M], es qualités .

Le 9 janvier 2017, M. [D] a régulièrement interjeté appel.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 19 juillet 2019, auxquelles il est expressément fait référence, M. [D] demande à la cour d'infirmer le jugement rendu,

- de prononcer la résolution judiciaire de son contrat de travail,

- de mettre à la charge de la liquidation judiciaire les sommes suivantes :

- 9.737,95€ à titre de rappel de salaire de janvier 2011 à mai 2015, outre 973,79€ au titre des congés payés afférents,

- 120,83 € à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires de janvier 2011 à mai 2015, outre la somme de 12,08 € au titre des congés payés afférents,

- 8806 € à titre de rappel de salaire sur la prime d'ancienneté de janvier 2012 à mai 2015,

le tout avec intérêts de droit à compter de la saisine du Conseil des prud'hommes et application, par année entière, des dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

- 35 635,60 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 53.000€ de dommages et intérêts au titre de la discrimination sur sa rémunération en fonction de son âge,

- 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS IDF Est dans les limites de garantie prévues par la loi.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 14 juin 2017, auxquelles il est expressément fait référence, la SELARL [M] es qualité de liquidateur judiciaire de la société L'Elasto demande de confirmer le jugement rendu et de condamner M. [D] à lui verser une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 21 juillet 2018, l'Unedic délégation AGS CGEA Ile de France Est demande de débouter M. [D] de toutes ses demandes et précise en tout état de cause les limites de sa garantie.

MOTIFS :

Sur la demande au titre de la prime d'ancienneté

Cette prime due en application de l'article 2 du chapitre XII de la convention collective n'est, ni dans son principe, ni dans son montant, contestée par les intimés.

Le jugement du conseil de prud'hommes qui a fixé au passif de la liquidation judiciaire la somme de 8.806€ à titre de prime de rappel d'ancienneté sera confirmé de ce chef.

En application de l'article 1231-6 du code civil, le rappel de salaire au titre des primes d'ancienneté est assorti d'intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, soit le 25 mars 2014.

En application de l'article L622-28 du code de commerce le jugement du tribunal de commerce qui a prononcé l'ouverture de la procédure collective à l'encontre de la société L'Elasto a arrêté le cours des intérêts légaux.

C'est donc à tort que le conseil de prud'hommes a ordonné au mandataire liquidateur d'inscrire au passif de la société les intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2015, date du jugement d'ouverture de la procédure collective.

Comme précisé au dispositif, les intérêts au taux légal du rappel de salaire au titre des primes d'ancienneté ont ainsi couru du 25 mars 2014, en application de l'article l'article 1231-6 du code civil et jusqu'au 1er juin 2015, en application de l'article L622-28 du code de commerce.

Sur la demande de rappels de salaire

M. [D] réclame des rappels de salaire de janvier 2011 à mai 2015, tant au titre des heures normales que supplémentaires, en soutenant que les forfaits pour heures supplémentaires à 125%, les primes de productivité et le 13 ème mois figurant sur ses bulletins de paie doivent expressément être exclus de la base permettant la comparaison avec le SMIC.

Il fait aussi valoir que son salaire horaire aurait dû, en tout état de cause, être calculé sur la base minimale du taux horaire du SMIC.

Aux termes de l'article L3232-1 du code du travail, 'Tout salarié dont l'horaire de travail est au moins égal à la durée légale hebdomadaire, perçoit, s'il n'est pas apprenti, une rémunération au moins égale au minimum fixé dans les conditions prévues à la section 2".

Aux termes de l'article L3232-3 alinéa 1er du même code, 'La rémunération mensuelle minimale est égale au produit du montant du salaire minimum de croissance tel qu'il est fixé en application des articles L. 3231-2 à L. 3231-12, par le nombre d'heures correspondant à la durée légale hebdomadaire pour le mois considéré.

Aux termes de l'article D3231-5 du même code, 'Les salariés définis à l'article L. 3231-1 âgés de dix-huit ans révolus, reçoivent de leurs employeurs, lorsque leur salaire horaire contractuel est devenu inférieur au salaire minimum de croissance en vigueur, un complément calculé de façon à porter leur rémunération au montant de ce salaire minimum de croissance'.

Aux termes de l'article D3231-6 du même code, 'Le salaire horaire à prendre en considération pour l'application de l'article D. 3231-5 est celui qui correspond à une heure de travail effectif compte tenu des avantages en nature et des majorations diverses ayant le caractère de fait d'un complément de salaire.

Sont exclues les sommes versées à titre de remboursement de frais, les majorations pour heures supplémentaires prévues par la loi et la prime de transport'.

Sauf dispositions conventionnelles contraires, toutes les sommes versées en contrepartie du travail entrent dans le calcul de la rémunération à comparer au salaire minimum conventionnel.

M. [D] percevait des heures supplémentaires forfaitisées qui doivent être exclues de la base de comparaison.

L'examen de l'ensemble de ses bulletins de paye des années 2011 à 2015 établit que M. [D] percevait mensuellement, outre son salaire de base, une prime de productivité et une fraction de sa prime de treizième mois.

Le versement mensuel systématique de cette prime de productivité et de cette fraction de la prime de treizième mois, qui constituent des contreparties du travail du salarié, justifie donc, en raison de leur caractère non aléatoire, d'être prises en considération comme des éléments de rémunération.

Ainsi, quand bien même ses bulletins de paie font apparaître un taux horaire inférieur au SMIC, M. [D] n'établit pas qu'il justifie d'un rappel de salaire, tant au titre de ses heures normales que de ses heures supplémentaires forfaitisées.

M. [D] sera en conséquence débouté de ses demandes de rappels de salaires.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur la résiliation judiciaire

Lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée.

C'est aussi à juste titre que M. [D] soutient que c'est à la date de saisine du juge que doit s'apprécier la demande de résiliation judiciaire.

Dans ses écritures, il caractérise exclusivement les manquements qu'il impute à l'employeur par le non paiement à un salarié du SMIC, en rappelant que ce fait est par ailleurs pénalement réprimé et par le fait que son employeur n'a pas répondu à ses demandes répétées de rappel de salaire autrement que par de multiples avertissements.

Il résulte cependant des développements qui précèdent qu'il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir rémunéré le salarié en dessous du SMIC.

Par ailleurs, le salarié ne rapporte nullement la preuve du lien existant entre ses deux réclamations en date des 22 novembre 2011, puis du 22 juillet 2013 et les avertissements particulièrement circonstanciées que lui a adressés l'employeur, qui sont sans rapport avec sa rémunération et sont intervenus les 14, 15 et 24 avril 2014, soit plusieurs mois après son dernier courrier de réclamation.

Il sera dès lors débouté de sa demande de résiliation judiciaire.

Le jugement entrepris qui a rejeté ses demandes indemnitaires de ce chef sera confirmé.

Sur la discrimination

Même si l'appelant a tenu à s'en expliquer, il n'est pas débattu par les intimés que cette demande nouvelle en cause d'appel est parfaitement recevable dans le cadre d'une procédure orale, en considération du principe d'unicité de l'instance.

Aux termes de l'article L1132-1 du code du travail en sa version applicable à l'espèce, '[....] aucun salarié ne peut [....] faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, [....] en raison[....] de son âge, [....] '.

En application de l'article L 1134-1 du même code en sa version applicable à l'espèce il incombe au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, et dans une telle hypothèse il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

M. [D] fonde sa demande sur le fait que le non paiement systématique des sommes qui lui étaient dues remonte à 1991, date à partir de laquelle son ancienneté ne sera jamais prise en compte et qu'il subit ainsi une discrimination fondée sur l'âge puisque c'est bien en fonction de son âge qu'il devait bénéficier d'une prime d'ancienneté progressive, et qu'il n'a jamais pu bénéficier du salaire correspondant contrairement aux salariés de l'entreprise.

Ce faisant, l'ancienneté dans l'entreprise étant fonction de la date d'entrée dans celle-ci et non fonction de l'âge des salariés et M. [D] ne versant aux débats aucune pièce susceptible de laisser supposer l'existence d'une discrimination par rapport à un autre salarié de l'entreprise, il sera débouté de sa demande.

Il sera ajouté au jugement entrepris de ce chef.

Sur les frais irrépétibles

M. [D] sera condamné aux dépens de l'instance d'appel et conservera la charge de ses frais irrépétibles.

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la SELARL [M], prise en la personne de Me [H] [M], liquidateur judiciaire de la société L'Elasto et de condamner M. [D] à lui verser une somme de 800€.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

CONFIRME le jugement entrepris, sauf à préciser que la somme de 8.806€ inscrite au passif de la liquidation judiciaire à titre de rappel de la prime d'ancienneté a produit des intérêts légaux entre le 25 mars 2014 et le 1er juin 2015, date à laquelle le cours des intérêts a été arrêté par la procédure collective ;

Y ajoutant

DÉBOUTE M. [D] de sa demande au titre d'une discrimination ;

DIT que le présent arrêt sera opposable au Centre de Gestion et d'Etude AGS Ile de France Est dans la limite du plafond légal,

DIT que le Centre de Gestion et d'Etude AGS Ile de France Est ne devra faire l'avance de la somme représentant les créances garanties que sur présentation d'un relevé du liquidateur judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à son paiement,

CONDAMNE M. [D] aux dépens ;

CONDAMNE M. [D] à payer à la SELARL [M], prise en la personne de Me [H] [M], liquidateur judiciaire de la société L'Elasto la somme de 800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE M. [D] de sa demande présentée au titre des frais irrépétibles.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 17/00653
Date de la décision : 23/10/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°17/00653 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-23;17.00653 ?
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