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15/10/2019 | FRANCE | N°17/14030

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 15 octobre 2019, 17/14030


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2019



(n° 2019- 345, 13 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/14030 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3XQI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juin 2017 -Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE - RG n° 14/00060







APPELANTE



SCI SOLABIOS agissant pou

rsuites et diligences en la personne de son gérant domcilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRÊT DU 15 OCTOBRE 2019

(n° 2019- 345, 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/14030 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3XQI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juin 2017 -Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE - RG n° 14/00060

APPELANTE

SCI SOLABIOS agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant domcilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocat plaidant Me Frank MARTIN LAPRADE de l'AARPI JEANTET, avocat au barreau de PARIS, toque : T04

INTIMES

Maître [O] [I]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par Me Thierry KUHN de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0090

Ayant pour avocat plaidant Me François DE MOUSTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C2018

SAS VOLTAICA SERVICES, prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Ayant pour avocat plaidant Me Claudia LUISI, avocat au barreau de BASTIA

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Juin 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Christian HOURS, président de chambre

Mme Marie-Claude HERVE, conseillère

Mme Anne de LACAUSSADE, conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Mme Anne de LACAUSSADE dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

Greffier, lors du délibéré: Mme Delphine DENEQUE

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Christian HOURS, président de chambre et par Mme Delphine DENEQUE, Greffière présent lors du prononcé.

*****

La Sci Solabios, gérante de la société Solabios Production, est propriétaire d'un appartement situé [Adresse 4], qui constitue le siège social de son associée majoritaire, la Sa Solabios, laquelle est cotée sur le marché alternext de la Bourse de Paris et détient 80 % de ses parts, les 20 % restants l'étant par M. [W] [G].

M. [G] a exercé jusqu'en 2013 les fonctions de gérant de la Sci Solabios, de président de la société Solabios Production, de directeur général de la Sa Solabios. Il est également président d'une société de droit monégasque, la Green Institute.

En mars 2011, la Sas Voltaïca Services, qui a notamment pour activité l'installation, l'entretien et le dépannage de centrales solaires photovoltaïques, est entrée au capital de la Sa Solabios, laquelle a pour objet le commerce de gros composants et autres équipements électroniques, notamment des équipements en centrales photovoltaïques, dans le cadre d'un protocole d'association avec une prise de participation minoritaire (12,97 %).

Il a été mis fin à cette association l'année suivante, à la suite de divergences entre les associés.

C'est ainsi que, par acte du 4 avril 2012, la Sas Voltaïca Services a cédé à la société Solabios Production substituant M. [G], tenus solidairement entre eux de l'exécution des engagements, les 78 106 actions qu'elle détenait dans la Sa Solabios moyennant le prix de 1 288 749 euros payable comptant à hauteur de 300 000 euros et au plus tard le 30 juin 2012 pour le solde de 988 749 euros dont les parties sont convenues qu'il serait réglé par la Sci Solabios en sa qualité de gérante de la société Solabios Production par avance de trésorerie d'un montant d'un million d'euros avec mise en place d'une garantie de paiement complet du prix avant le 09 avril 2012.

Le transfert de la propriété et de la jouissance des actions au profit du cessionnaire est intervenu le jour de l'acte par son inscription dans les comptes d'actionnaires ouverts par la Sa Solabios.

M. [G] a mis en vente l'immeuble de la Sci Solabios situé à [Localité 4], ce qu'il envisageait depuis 2011, afin de permettre le règlement du solde du prix des actions, mais n'a pas mis en place de garantie de paiement du prix dans le délai précédemment fixé.

Entre-temps, le 15 février 2012, Me [I], notaire demeurant professionnellement à [Localité 5], avait obtenu un état hypothécaire hors formalités sur le bien immobilier révélant l'inscription d'un privilège de prêteur de deniers du 21 mai 2010 au profit de la Banque populaire Rives de Paris pour 2 200 000 euros.

Le 4 juin 2012, Me [I] a obtenu une prorogation d'état hypothécaire hors formalités de 1'immeuble ne comportant pas d'autre mention que ce privilège de prêteur de deniers.

Le 06 juin 2012, a été publiée et enregistrée au service de la publicité foncière de Paris une hypothèque provisoire sur l'immeuble, datée du 30 mai 2012, au profit de la Sas Voltaïca Services, pour un montant de 1 000 000 euros.

Le 08 juin 2012, la Banque populaire Rives de Paris a donné mainlevée de son privilège contre paiement de la somme de 2 046 904 euros.

Le 11 juin 2012, l'hypothèque provisoire de la Sas Voltaïca Services a été dénoncée à la Sci Solabios.

Par acte authentique dressé le 21 juin 2012 par Me [I] avec le concours de Me [D] notaire à [Localité 6] assistant l'acquéreur, la Sci Solabios a cédé à la Sci [Adresse 5], acquéreur substitué, l'immeuble situé à cette adresse à Paris 8ème, moyennant le prix de 3 300 000 euros.

Les 21 et 22 juin 2012 :

- Me [I] s'est dessaisi du produit de la vente à hauteur de la somme de 2 046 904 euros, par chèque, au profit de la Banque populaire Rives de Paris afin de la désintéresser et du solde, soit la somme de 1 194 442,87 euros, par virement bancaire dont l'identité du bénéficiaire fait l'objet d'une contestation dans le cadre de la présente procédure,

- la Sas Voltaïca Services a fait assigner la Sci Solabios, M. [G] et la société Solabios Production devant le tribunal de grande instance de Paris en paiement de la somme de 1 000 000 euros, sauf à parfaire.

Le 25 juin 2012, le conseil de la Société Voltaïca Services a informé Me [I] du dépôt de l'inscription d'hypothèque provisoire auprès du bureau de la conservation des hypothèques.

Alors qu'il accomplissait les formalités afférentes à la publication de l'acte de vente, Me [I] a sollicité et reçu le 11 juillet 2012 un état hypothécaire sur formalités faisant apparaître l'hypothèque provisoire de la société Voltaïca Services.

Le 18 juillet 2012, la Sci Solabios a saisi le juge de l'exécution de Paris pour obtenir mainlevée de l'inscription d'hypothèque provisoire de la Sas Voltaïca Services, ce dont elle a été déboutée par jugement du 12 novembre 2012.

Le 19 février 2013, le conseiller de la mise en état a déclaré la cour d'appel de Paris incompétente au profit du tribunal de commerce de Paris pour connaître de la procédure engagée par la Sas Voltaïca Services en paiement de la somme de 1 000 000 euros.

En septembre 2013, M. [G] [C] est devenu gérant de la Sci Solabios et président directeur général de la Sa Solabios en lieu et place de M. [G].

Le 14 octobre 2013, la Sa Solabios, la Sci Solabios, la Sarl Solabios Production, la société Voltaïca et la Sas Voltaïca Services ont conclu un protocole d'accord aux termes duquel, notamment :

- elles reconnaissent que la cession du 4 avril 2012 est effective, que le solde du prix des actions aurait dû être payé à la Sas Voltaïca Services par la Sci Solabios agissant sur délégation de la société Solabios Production, elle-même en substitution de M. [G], solidairement tenu du paiement,

- la société Solabios production et Voltaïca Services conviennent dès lors de se retourner toutes les deux vers M. [G] afin de récupérer auprès de lui 300 000 euros pour la société Solabios Production, ce qui correspond au montant payé comptant pour l'acquisition des 78 106 actions de la société Solabios, 988 749 euros pour la société Voltaïca Services, ce qui correspond au solde qui aurait dû être payé,

- elles se désistent réciproquement de leurs demandes dans le cadre de la procédure pendante devant le tribunal de commerce de Paris,

- les parties conviennent d'engager toute procédure judiciaire permettant d'obtenir, de la part de l'étude notariale, le paiement de la somme de 1 000 000 euros et ce en réparation du préjudice subi à raison de la violation par le notaire des termes de l'inscription d'hypothèque provisoire inscrite sur le bien immobilier dont la Sci Solabios était propriétaire,

- elles s'entendent pour que les montants ainsi restitués par l'étude notariale soient répartis à hauteur de 75 % pour la société Voltaica Services et 25 % pour la société Solabios Production.

En décembre 2013, la Sa Solabios a été placée en redressement judiciaire avec désignation d'un administrateur provisoire par le tribunal de commerce de Nice.

Le 10 janvier 2014, la Sas Voltaïca Services, qui n'était toujours pas réglée du solde du prix des actions cédées, a fait assigner Me [O] [I], notaire, en paiement de la somme de 1 000 000 euros en réparation de son préjudice. La Sci Solabios est intervenue volontairement à l'instance.

En 2015, la Sa Solabios, a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du 12 juin 2017, le tribunal de grande instance d'Auxerre a, notamment, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la Sci Solabios ;

- rejeté la responsabilité de Me [O] [I] au titre de l'hypothèque provisoire ;

- dit que la responsabilité civile de Me [O] [I] est engagée à l'égard de la Sci Solabios pour avoir versé le prix de vente à la société Green Institute ;

- constaté l'accord de la Sci Solabios et de la société Voltaïca Services pour que les dommages et intérêts soient versés à cette dernière ;

- condamné en conséquence Me [O] [I] à verser à la société Voltaïca Services la somme de 358 332,86 euros ;

- condamné Me [O] [I] à verser à la société Voltaïca Services la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Me [O] [I] aux dépens et rejeté toutes les autres demandes non satisfaites.

Le tribunal a retenu que :

- l'intervention de la Sci Solabios, venderesse du bien immobilier objet du litige, est recevable alors que le solde du prix de vente ne lui a pas été versé et que la Sas Voltaïca Services prétend n'avoir pas été réglée des causes de son inscription judiciaire provisoire,

- le notaire a, d'une part, commis une faute d'imprudence en ne constituant pas de garanties pour prévenir le risque d'inscription malgré le délai écoulé entre la levée de l'état hypothécaire et la signature de la vente, ce d'autant que la Sci Solabios devait désintéresser rapidement la Sas Voltaïca Services et, d'autre part, manqué de diligences alors qu'il pouvait obtenir des informations sur l'état hypothécaire la veille de la signature,

- la Sci qui, connaissant cette inscription, ne l'a pas déclarée et a affirmé même l'inverse le jour de la vente, a trompé le notaire et concouru à son dommage,

- le dol de la victime n'est pas la cause exclusive du dommage alors que, si le notaire avait levé un état hypothécaire à une date plus proche de la vente, il aurait pu constater l'existence de l'hypothèque judiciaire provisoire et prendre des mesures conservatoires tel le séquestre des sommes, de sorte qu'il a concouru à la réalisation du préjudice,

- néanmoins, l'incertitude liée à la demande d'annulation du protocole d'accord et à l'issue de la procédure tendant à donner à l'hypothèque un caractère définitif ne permet pas de dire si l'hypothèque provisoire a des chances d'être convertie en hypothèque définitive et l'ouverture d'une liquidation judiciaire rend d'autant plus incertaine l'exécution d'une hypothèque de sorte que la responsabilité du notaire sera écartée de ce chef,

- le notaire a par ailleurs commis une faute en versant le solde du prix à une société tierce,

- alors que M. [G], également président de la Sci Solabios, n'a pas reversé les fonds, rien ne permet d'affirmer que la Sas Voltaïca Services aurait été désintéressée si la Sci les avait perçus de sorte que sa perte de chance de percevoir les fonds est évaluée à 30 %,

- le notaire ne peut réclamer d'indemnisation à la Sci Solabios alors qu'il a commis une faute professionnelle sans laquelle l'omission de la Sci Solabios aurait été révélée, pas plus qu'à la Sas Voltaïca Services qui, n'ayant pas connaissance de la vente et de l'intervention du notaire, ne pouvait l'informer de son inscription.

La Sci Solabios a relevé appel de la décision le 11 juillet 2017.

Par ordonnance du 09 octobre 2018, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables à l'égard de Me [O] [I], les conclusions d'appel incident de la Sas Voltaïca Services notifiées par voie électronique le 07 décembre 2017, dit que le débat sur le sort des pièces communiquées au soutien de celui-ci relève de la compétence de la cour, débouté Me [O] [I] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la société Voltaïca Services aux dépens de l'incident.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 1er avril 2019, la Sci Solabios demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable son intervention volontaire et jugé engagée à son égard la responsabilité civile de Me [I] pour avoir versé à la société Green Institute le solde du prix de vente de son bien immobilier soit la somme de 1 194 442,87 euros, le réformer pour le surplus et, statuant à nouveau, condamner Me [I] à lui verser les sommes de :

- 1 194 442,87 euros à charge pour elle de désintéresser la Société Voltaïca Services à hauteur de la somme de 988 749 euros, avec intérêts légaux à compter du 21 juin 2012, date de réalisation de la vente, et anatocisme par année entière,

- 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 18 avril 2019, Me [I] demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la Sas Voltaïca Services des demandes qu'elle faisait valoir sur la question de l'hypothèque et, y ajoutant, dire et juger qu'il n'a commis aucune faute, que les sociétés ne caractérisent leur dommage, ni dans son principe ni dans son quantum, les débouter de toutes leurs demandes,

- l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau :

- dire et juger la Sci Solabios irrecevable en son intervention,

- dire et juger qu'il n'a commis aucune faute,

- dire et juger que les sociétés ne caractérisent leur dommage ni dans son principe ni dans son quantum,

- les débouter de toutes leurs demandes,

- condamner la Sas Voltaïca Services à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de l'article 1240 du code civil,

- condamner in solidum les sociétés à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de Me Thierry Kuhn, avocat qui y a pourvu conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

SUR CE,

A titre préliminaire, il convient d'indiquer que si, par ordonnance du 09 octobre 2018, désormais irrévocable pour n'avoir pas été déférée à la cour, le conseiller de la mise en état a dit que le sort des pièces communiquées au soutien des conclusions d'appel incident de la société Voltaïca Services relevait de la compétence de la cour, celle-ci n'a été saisie d'aucune demande de ce chef, étant observé que les dites pièces ont été communiquées à l'ensemble des parties.

Sur l'intervention volontaire de la Sci Solabios

La Sci Solabios indique que, sans la faute du notaire, elle aurait été bénéficiaire d'un reliquat de 205 693,87 euros une fois réglée la créance de la Sas Voltaïca Services et que les désistements d'instance actés dans le protocole d'accord de 2013 n'ont jamais été régularisés compte tenu du placement soudain de la Sa Solabios en redressement judiciaire et de la désignation d'un administrateur provisoire se substituant aux organes sociaux.

Me [I] indique que la Sci a été intégralement réglée du solde du prix de vente, que ce soit directement ou par désintéressement de ses créanciers et extinction du passif afférent.

Il précise que le virement du 22 juin 2012 a été réalisé à son profit, que la Sci a quittancé le prix sans réserve dans l'acte de vente ce qui ne peut être contredit qu'après inscription de faux. Il indique que la Sci pouvait disposer en 2012 de plusieurs comptes bancaires, fermés en 2015 et que le virement n'étant pas 'Sepa', il n'a pu avoir lieu qu'au profit d'un établissement bancaire en France. Il ajoute qu'effectué le 22 juin par l'étude, il a pu être transféré au profit de la société tiers qui l'a reçu le 25 juin suivant. Il indique ne pas conserver les relevés d'identité bancaire de ses clients une fois l'opération effectuée, lesquels ne sont pas un élément d'authentification des conditions de la vente et ne démontrent en rien le destinataire d'un virement. Il souligne l'invraisemblance de la découverte si tardive de cette absence de versement dans un contexte tendu de modification de gouvernance des sociétés, les faits et gestes de M. [G] ayant nécessairement été scrupuleusement et très rapidement examinés par la nouvelle direction. Il conteste toute connivence voire proximité avec M. [G], expose que le relevé bancaire que la Sci communique laisse supposer que, trois jours après le virement, celle-ci, agissant par M. [G], a viré le montant à la société tiers.

Il expose également que le protocole d'accord signé entre les sociétés ne mentionne aucune dette de la Sci Solabios envers la Société Voltaïca Services et que l'hypothèque provisoire garantissait une créance de la Société Voltaïca Services sur la société Solabios Production. Il observe que d'ailleurs la Sci Solabios n'est pas comparante dans la procédure pendante devant le tribunal de commerce dans le cadre de laquelle aucune demande n'est formée contre elle. Il ajoute qu'à supposer qu'elle ait une dette, le protocole d'accord a éteint l'ensemble des obligations réciproques entre les sociétés du groupe Voltaïca et Solabios.

Il indique enfin que l'action réservée à l'encontre du notaire par le protocole n'a pas le but de celle engagée, s'agissant uniquement de la méconnaissance de l'inscription de l'hypothèque provisoire.

***

Aux termes de l'article 325 du code de procédure civile : 'L'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.' Aux termes de l'article 329 du code de procédure civile : 'L'intervention est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme. Elle n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention.'

L'instance initiale a été engagée par la Sas Voltaïca Services.

Celle-ci souhaite voir engager la responsabilité du notaire pour n'avoir pas donné effet à son inscription d'hypothèque judiciaire provisoire sur le bien immobilier objet de la vente et s'être libéré de l'intégralité du prix auprès d'un tiers, de sorte qu'elle n'a pas été réglée par la Sci Solabios, venderesse, du solde du prix de ses actions.

Cette dernière souhaite également voir engager la responsabilité du notaire pour, s'étant par erreur départi des fonds auprès d'un tiers, ne pas lui avoir permis de solder sa dette auprès de la Sas Voltaïca Services ni de bénéficier du solde du prix, une fois ses créanciers désintéressés.

Il résulte de ce qui précède que l'intervention de la Sci Solabios se rattache aux prétentions de la Sas Voltaïca Services par un lien suffisant.

La Sci Solabios justifie en outre avoir le droit d'agir relativement à cette prétention qui lui est propre alors notamment qu'elle est partie à l'acte de vente instrumenté par le notaire en qualité de venderesse propriétaire du bien immobilier, que le désintéressement de ses créanciers lui laissait un solde sur le prix de vente qu'elle soutient ne pas avoir perçu et que le protocole d'accord du 14 octobre 2013 concerne les engagements réciproques des signataires dont le notaire n'est pas et qui n'a au demeurant pas reçu exécution alors que des instances sont toujours pendantes entre les parties devant les tribunaux de commerce de Paris et de Nice. En tout état de cause, si 'les parties sont également convenues d'engager toutes procédures permettant d'obtenir de la part de l'étude le paiement de la somme de 1 000 000 euros pour réparation du préjudice subi à raison de la violation par le notaire des termes de l'inscription d'hypothèque provisoire, inscrite sur le bien immobilier dont la Sci était propriétaire', elles ne se sont pas interdit toute autre demande envers le notaire.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu'il a accueilli l'intervention volontaire de la Sci Solabios.

Sur la responsabilité du notaire à l'égard de la Sci Solabios

La Sci Solabios fait état de la faute du notaire à son égard ayant consisté à ne pas lui verser le solde du prix de vente et reprend à son compte les motifs retenus par les premiers juges sur ce point. Contestant avoir reçu les fonds, elle relève que le notaire ne justifie pas du contraire alors que, malgré sommation, il ne produit pas son relevé bancaire qui permettrait de déterminer sur quel compte il a effectué le virement. Elle précise qu'étant endettée d'environ deux millions d'euros auprès de la banque populaire Rives de Paris qui bénéficiait d'une hypothèque et détenait le compte sur lequel étaient versés les loyers qui constituaient son unique source de revenus, elle n'aurait jamais été autorisée à ouvrir un autre compte ailleurs.

La Sci Solabios indique que, si elle s'est entendue avec la Sas Voltaïca Services sur un partage de la somme de 1 194 442,87 euros, il n'a jamais été question qu'en sa qualité de venderesse du bien, elle ne reçoive rien du notaire compte tenu de la faute de ce dernier à son égard, l'accord entre les sociétés ayant porté sur les modalités du partage entre elles de l'indemnisation, qu'elle s'engage à exécuter. Elle ajoute que seul le notaire et non M. [G] est à l'origine du virement litigieux vers une société tierce ainsi qu'il résulte de l'intitulé du virement reçu par cette dernière le jour ouvré suivant celui où le notaire l'a initié.

Me [I], rappelant avoir viré les fonds sur le compte de la Sci ainsi que précédemment développé, conteste avoir connu l'inscription de la Sas Voltaica Services avant de s'être dessaisi du prix, l'ordonnance n'ayant pas été portée à sa connaissance et le courrier d'information de la Sas Voltaica Services, daté du 25 juin 2012, étant postérieur à la vente et à la distribution du prix. Il ajoute avoir respecté la procédure en levant un état hypothécaire avant la vente lequel ne révélait pas cette inscription, en le prorogeant à une date aussi proche possible de cette-ci, et en distribuant les fonds en conséquence. Il conteste en outre avoir omis d'informer la Sci de l'existence et des effets de l'hypothèque judiciaire qu'il ne connaissait pas alors qu'elle, qui la connaissait et avait l'obligation de l'en informer, a nié son existence lors de la vente. Il conclut que cette faute de la Sci, équipollente au dol, absorbe l'intégralité des autres manquements qui pourraient lui être reprochés.

***

En sa qualité d'officier public, le notaire est tenu d'assurer la validité, l'efficacité et la sécurité des actes qu'il instrumente et il lui appartient d'éclairer les parties, d'appeler leur attention de manière complète et circonstanciée sur la portée et les effets de ceux-ci. Pour en assurer l'efficacité, le notaire doit établir des actes qui réalisent exactement les buts poursuivis par ses clients et dont les conséquences sont pleinement conformes à celles qu'ils se proposaient d'atteindre. Le devoir d'information et de conseil du notaire porte sur l'opportunité de l'opération juridique et conduit également à la prévention des risques encourus notamment hypothécaires. Le notaire a également à ce titre l'obligation de procéder à toutes les investigations et tous les contrôles que l'efficacité de l'acte implique.

En l'espèce, l'acte notarié dispose au titre du 'paiement du prix' que 'l'acquéreur a payé le prix ....comptant ce jour ainsi qu'il résulte de la comptabilité de l'office notarial ... au vendeur, qui le reconnaît et lui en consent quittance sans réserve.'

Il résulte de cette mention que le paiement du prix n'est pas intervenu hors la comptabilité du notaire mais auprès du notaire, qui l'a reçu. Par cette clause, l'acquéreur donne ainsi quitus du son paiement, certifié par le notaire qui détient les fonds en sa comptabilité, au vendeur et non au notaire. Cette mention ne fait ainsi pas la preuve du versement des fonds par le notaire au vendeur mais du versement du prix de vente par l'acquéreur au notaire.

S'agissant du reversement des sommes par le notaire, le relevé des opérations passées en sa comptabilité au titre de la vente est un document que l'étude s'établit à elle-même en listant ses différentes écritures comptables. Il ne fait pas la preuve, en lui-même, de la réalité de celles-ci. Le notaire ne produit pas son relevé bancaire sur la période considérée permettant de retracer le destinataire du virement et ne produit pas davantage l'ordre de virement qu'il a passé.

Or, la Sci Solabios produit de son côté :

- le relevé bancaire de son compte détenu auprès de la banque populaire Rives de Paris pour la période du 11 au 27 juin 2012 qui mentionne la remise d'un chèque de 2 046 904 euros le 26 juin 2012 et le remboursement anticipé du prêt bancaire le lendemain, 27 juin, pour 2 045 504,44 euros. Aucune des autres opérations listées ne porte sur le virement d'une somme complémentaire au titre du solde du prix de vente,

- un courrier signé de Me [I], adressé à la société Green Institute, daté du 21 juin 2012 ainsi libellé : 'Suite à la vente par la Sci Solabios, tu trouveras sous le présent pli les documents suivants :

. une attestation suite à la vente,

. une attestation loi Carrez,

. deux dossiers de la Sarf, merci de m'en retourner un signé par [W] [G]',

- le relevé bancaire de la société Green Institute située à [Localité 7] qui fait apparaître au 25 juin 2012 la mention ' solde disponible sur prix de vente à Sci [Adresse 6]. Vir Sepa [I]' et le montant de 1 194 442,87 euros.

Il résulte de ces derniers éléments concordants entre eux, en l'absence de tous autres, que le notaire s'est libéré du solde du prix de la vente auprès d'une société tiers, sans lien avec l'opération de vente, dont M. [G], gérant de la Sci Solabios, était également président, ce qui est constitutif d'une faute.

S'agissant du préjudice en résultant pour la Sci Solabios et du lien de causalité avec cette faute, il n'est pas contesté que la société Green Institute n'a pas reversé la somme indûment perçue, que ce soit au notaire, à la Sci Solabios ou à la Sas Voltaïca Services.

Il est également constant qu'au jour de la vente, la Sas Voltaïca Services bénéficiait sur le bien objet de la vente d'une inscription d'hypothèque provisoire du 30 mai 2012 à hauteur d'un million d'euros.

Le notaire n'en a pas fait mention dans l'acte de vente, se référant à la prorogation de l'état hypothécaire hors formalités de 1'immeuble obtenu le 4 juin 2012 ne comportant pas d'autre mention que le privilège de prêteur de deniers au profit de la banque populaire Rives de Paris.

S'il est désormais permis au notaire, qui a pris soin de lever un état hypothécaire avant la signature de l'acte de vente, de se dessaisir du prix sans attendre la publication de l'acte et le renseignement hypothécaire sur formalité pour remettre le prix au vendeur, encore faut-il que le renseignement hypothécaire urgent hors formalité soit demandé et obtenu à une date relativement proche de celle de la signature de l'acte, et nécessairement moins de deux mois avant l'acte de vente, étant indiqué que le délai pour obtenir un renseignement hypothécaire est réduit à dix jours.

En l'espèce, l'inscription d'hypothèque provisoire de la Sas Voltaïca Services a été publiée le 06 juin 2012 soit plus de dix jours avant la signature de l'acte authentique de sorte que le notaire aurait été en mesure de la connaître en sollicitant un acte à une date plus proche de la vente.

Pour autant, la société Voltaïca Services avait fait dénoncer à la Sci Solabios et à la société Solabios Production, préalablement à la vente soit le 11 juin 2012, son hypothèque provisoire. La Sci ne l'a pas mentionnée le jour de la vente, déclarant même, au vu des mentions portées sur l'acte authentique, que la situation hypothécaire résultant du renseignement délivré le 15 février 2012 et prorogé le 1er juin 2012 révélant une inscription de privilège de deniers au profit de la banque était identique au jour de la vente et n'était susceptible d'aucun changement.

Il résulte des mentions portées au protocole d'accord conclu en 2013 que la Sas Voltaïca Services a fait inscrire cette hypothèque provisoire car elle ne parvenait pas à obtenir la mise en place de la garantie de paiement de ses titres stipulée au protocole d'association de 2011 et que dans la procédure engagée entre elles dès le mois de juin 2012, la société Solabios Production et la Sci Solabios étaient opposées au paiement du solde du prix des titres au profit de la Sas Voltaïca Services, en arguant de la mauvaise exécution par cette dernière d'un contrat conclu entre elles portant sur la réalisation de deux centrales photovoltaïques.

A toutes fins, il sera rappelé qu'à l'époque, le gérant de la Sci Solabios était également le président de la société Solabios Production et de la société Green Institute finalement bénéficiaire de la somme en litige.

Il résulte de ce qui précède que par sa réticence dolosive, exonératoire pour le notaire alors qu'elle prenait connaissance de son ignorance, la Sci Solabios a interdit à ce dernier d'à tout le moins consigner les fonds, voir de les remettre à la Sas Voltaïca Services si elle consentait finalement à lui régler la somme, ou encore de constituer séquestre, de sorte qu'elle est à l'origine et la cause de son dommage à hauteur du montant de l'hypothèque, étant ajouté qu'en aucun cas, en tout état de cause, elle ne pouvait prétendre au versement des fonds à son profit à la date de la vente par application combinée de l'article 79 de la loi du 09 juillet 1991 et 258 alinéa 1 du décret du 31 juillet 1992 désormais codifés.

Enfin, alors que nul ne peut plaider par procureur en application de l'article 31 du code de procédure civile, la Sci Solabios ne peut utilement solliciter le versement de l'ensemble de la somme soit 1 194 442,87 euros, à charge pour elle d'en reverser une partie à un tiers, étant en outre observé à toutes fins qu'il n'est pas justifié d'un désistement des parties dans les instances en cours qui les opposent notamment sur le bien fondé de la créance de la Sas Voltaïca Services à l'égard de la Sci Solabios.

Pour autant, il ne résulte pas des écritures de la Sci Solabios, ni des termes du protocole d'accord de 2013, auquel en tout état de cause Me [I] n'est pas partie et dont la validité fait l'objet d'une instance pendante, l'existence d'un accord entre les deux sociétés pour que les dommages-intérêts éventuellement dus par le notaire à la Sci Solabios soient versés à la Sas Voltaïca Services.

Ainsi, et alors que la Sas Voltaïca Services s'accorde, au vu des mentions du jugement et des écritures de la Sci, pour que sa créance, garantie par l'inscription d'hypothèque provisoire, soit appréciée en principal dans ses rapports avec cette dernière, le préjudice de la Sci Solabios résultant de la faute du notaire ayant consisté à se départir du prix auprès d'une société tiers s'élève à la somme de 205 693,87 euros, qu'il sera condamné à lui verser à titre de dommages-intérêts.

S'agissant d'une indemnisation, les intérêts légaux sur la somme accordée courent à compter de la présente décision et l'anatocisme sollicité trouvera application dans les conditions et selon les modalités de l'article 1343-2 du code civil.

Le jugement déféré sera dès lors infirmé en ce sens.

Sur la responsabilité du notaire à l'égard de la Sas Voltaïca Services

Me [I] soutient que les demandes de la Sas Voltaïca Services ont été jugées irrecevables à son égard par le conseiller de la mise en état.

Au fond, Me [I] reprend l'argumentation précédemment développée s'agissant du paiement du prix à la Sci Solabios, son ignorance de l'inscription de la Sas Voltaïca Services au moment de la vente et son respect de la procédure, contestant toute autre procédure applicable notamment de consignation des fonds à la Caisse des dépôts.

Il indique en outre n'être tenu d'aucune obligation d'information ni de conseil au profit des tiers à l'acte qu'il a été chargé d'instrumenter, lequel a été utile, valide et efficace, ayant emporté l'intégralité des effets de droit que les parties entendaient lui donner, le paiement pouvant intervenir aussi bien en deniers qu'en quittances.

Il conteste également tout lien de causalité entre la faute prétendue et le dommage allégué par la société Voltaïca Services du fait de son désistement d'instance et d'action devant le tribunal de commerce, lequel est avéré alors que le jugement du tribunal de commerce du 21 septembre 2015 fait état d'un acte introductif 'complété par une note du 16 mai 2013". Il indique que ce second acte introductif ayant été régularisé hors délai, l'inscription provisoire n'a pas été convertie en hypothèque judiciaire définitive de sorte qu'elle n'a pu produire aucun effet et que, partant, la société est réputée avoir perdu rétroactivement ses droits réels provisoires sur l'immeuble, renonçant délibérément à son droit de suite. Il rappelle que le délai pour convertir une inscription provisoire en une hypothèque définitive étant d'un mois à compter de la dénonce à peine de caducité le jugement à intervenir ne peut plus l'ordonner.

Me [I] ajoute que si l'inscription avait encore vocation à être convertie en inscription définitive, la Sas Voltaïca Services n'aurait aucun dommage à faire valoir à son encontre puisqu'il lui appartiendrait alors de faire valoir ses droits sur l'immeuble en application de l'inscription dont elle serait titulaire. Il indique que, si l'inscription n'est plus convertible, le seul préjudice de la Sas Voltaïca Services consisterait en la perte d'une hypothèque judiciaire provisoire devenue caduque par sa faute ce qui n'est pas constitutif d'un dommage et ce d'autant que la société Voltaïca Services a régularisé un protocole avec sa débitrice, prévoyant l'apurement du passif de la Sa Solabios selon des modalités arrêtées entre les parties, la remplissant ainsi de ses droits de sorte que la créance, dont l'hypothèque judiciaire provisoire venait garantir le paiement, est désormais éteinte.

***

Par ordonnance du 09 octobre 2018, désormais irrévocable, le conseiller de la mise en état a déclaré les conclusions de la Sas Voltaïca Services irrecevables à l'égard du notaire, de sorte qu'il est interdit à la cour d'appel de s'y référer pour statuer. L' intimée est réputée dès lors ne pas avoir fait appel de la décision, ne pas avoir conclu et s'être approprié les motifs du jugement sans que la cour ne puisse se référer davantage à ses conclusions de première instance.

Au fond, en sa qualité d'officier ministériel, si le notaire n'est pas tenu d'un devoir de conseil envers ceux qui restent tiers par rapport aux actes auxquels il intervient, sa responsabilité fonctionnelle est engagée envers tout 'tiers intéressé' par l'acte qu'il authentifie.

Il a été précédemment retenu que :

- le notaire, qui n'en a pas fait mention dans l'acte de vente, a ignoré l'hypothèque provisoire de la Sas Voltaïca Services, pourtant publiée, se référant à la prorogation de l'état hypothécaire hors formalités de 1'immeuble obtenu le 4 juin 2012 sans autre mention que le privilège de prêteur de deniers au profit de la banque populaire Rives de Paris,

- l'inscription d'hypothèque provisoire de la Sas Voltaïca Services a été publiée le 06 juin 2012 soit plus de dix jours avant la signature de l'acte authentique, de sorte que le notaire aurait été en mesure de la connaître en sollicitant un acte à une date plus proche de la vente.

Si le notaire est exonéré de sa faute dans ses relations avec la Sci Solabios compte tenu de la réticence dolosive de cette dernière, il n'en est pas de même dans ses rapports avec la Sas Voltaïca Services qui aurait dû voir les sommes consignées, voire séquestrées, par le notaire.

Le notaire a également commis une faute à son égard en se départissant de la somme garantie par son hypothèque provisoire auprès d'une société tiers sans lien avec l'acte passé.

S'agissant du préjudice en résultant pour la Sas Voltaïca Services et du lien de causalité de ce préjudice avec ces fautes, ils supposent la perte de toute possibilité pour celle-ci de recouvrer sa créance, à la supposer certaine, la sûreté n'en étant que l'accessoire.

En l'espèce, la Sas Voltaïca Services ne dispose à l'encontre de la Sci Solabios que d'une inscription d'hypothèque provisoire initiale, datant désormais de 2012.

Une instance est pendante devant le tribunal de commerce de Paris, qui intervient notamment sur renvoi de compétence du tribunal de grande instance de Paris lui-même saisi en juin 2012 de la demande formée par la société Voltaïca Services tendant, à titre principal, à la condamnation solidaire de M. [G], de la Société Solabios et de la Sci Solabios à lui verser la somme de 1 000 000 euros, ce à quoi ces derniers s'opposent.

Par jugement du 21 septembre 2015, le tribunal de commerce s'est déclaré compétent, et a notamment débouté la Sarl Voltaïca et la Sarl Voltaïca Services de leur demande de sursis à statuer dans l'attente de la suite de l'enquête pénale en cours devant le pôle financier du tribunal de grande instance de Paris, a prononcé le sursis à statuer dans l'attente du jugement à intervenir dans la procédure initiée devant le tribunal de commerce de Nice au visa de l'article L. 632-1 2° du code de commerce.

Le tribunal de commerce de Nice a été notamment saisi en 2014 d'une demande formée par le liquidateur de la Sa Solabios, à l'encontre de la Sa Solabios, de l'administrateur judiciaire de la Sa Solabios, de l'eurl Voltaïca, de la Sas Voltaïca Services, en nullité du protocole d'accord de 2013 en toutes ses dispositions concernant la Sa Solabios.

Par jugement du jugement du 27 janvier 2016, le tribunal de commerce de Nice a prononcé le retrait du rôle de l'affaire.

En l'état des pièces produites, il résulte de ce qui précède que l'affaire tendant à voir prononcer la nullité du protocole de 2013 est retirée du rôle depuis plus de deux ans. La procédure engagée devant le tribunal de commerce est toujours pendante en ce qu'un sursis à statuer a été prononcé dans l'attente de l'issue de la procédure en nullité du-dit protocole.

Cette instance porte notamment sur la créance de 1 000 000 euros dont la Sas Voltaïca Services estime disposer à l'encontre de M. [G], de la Société Solabios et de la Sci Solabios au titre de l'acte de cession des titres du 04 avril 2012 et dont il sollicite la reconnaissance, créance invoquée à l'appui de sa demande d'inscription d'hypothèque provisoire, autorisée par le juge de l'exécution.

Dès lors, il apparaît que l'issue de cette procédure est susceptible d'avoir une incidence sur la présente instance quant au préjudice subi par la société Voltaïca Services en raison des fautes du notaire et au lien de causalité entre le préjudice allégué et ces fautes.

Il convient dès lors de surseoir à statuer sur le surplus des demandes opposant Me [I] et la Sas Voltaïca Services, dans l'attente de l'issue définitive de ces différentes procédures.

A toutes fins, il sera observé qu'il résulte des pièces versées aux débats que la Sas Voltaïca Services a été autorisée par ordonnance du 04 juillet 2014 du président du tribunal de première instance de la principauté de Monaco à faire pratiquer une saisie-arrêt auprès de l'établissement bancaire LCL ouvert au nom de M. [G] à concurrence de la somme de 1 million d'euros pour avoir garantie et paiement de ce montant auquel est évalué provisoirement sa créance. Or, les suites données ne sont ni justifiées, ni même précisées. Il en est de même de la procédure pénale engagée devant le pôle financier du tribunal de grande instance de Paris.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Me [I], et lui seul, sera condamné à verser à la Sci Solabios, et à elle seule, la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code civile de première instance et d'appel, le jugement déféré étant infirmé de ce chef.

Il sera sursis à statuer sur le surplus de ces demandes dans les rapports opposant Me [I] et la Sas Voltaïca Services.

Les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS :

la cour,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance d'Auxerre sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'intervention volontaire de la Sci Solabios et condamné Me [I] aux dépens ;

Statuant à nouveau,

Dit que Me [I] a commis une faute à l'égard de la Sci Solabios en se départissant du solde du prix de vente déduction faite de la créance de la banque populaire Rives de Paris et du montant de la créance de la Sas Voltaica services auprès d'une société tierce ;

Le condamne à lui verser la somme de 205 693,87 euros à titre de dommages-intérêts, portant intérêts légaux à compter de la présente décision ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions et selon les modalités de l'article 1343-2 du code civil ;

Condamne Me [I] à verser à la Sci Solabios la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que Me [I] a commis une faute à l'égard de la Sas Voltaïca Services en ne levant pas un état hypothécaire à une date plus proche de la vente et en se départissant du montant de l'hypothèque provisoire auprès d'une société tierce ;

Sursoit à statuer sur le surplus des demandes entre Me [I] et la Sas Voltaïca Services dans l'attente de l'issue définitive des procédures pendantes devant le tribunal de commerce, de l'instance pénale en cours contre M. [G] et de celle en cours devant le tribunal de première instance de la principauté de Monaco à l'encontre de M. [G] ;

Ordonne le retrait du rôle de l'affaire ;

Dit qu'elle sera rétablie à la demande de la partie la plus diligente lorsque les causes du sursis auront disparu ;

Réserve les dépens ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 17/14030
Date de la décision : 15/10/2019

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°17/14030 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-15;17.14030 ?
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