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11/10/2019 | FRANCE | N°16/08106

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 11 octobre 2019, 16/08106


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 11 Octobre 2019



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/08106 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BY77T



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Mai 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 14/01445



APPELANTE

SOCIÉTÉ MOTUL

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par

Me Guillaume BREDON, avocat au barreau de PARIS, toque : L0305 substitué par Me Thomas HUMBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0305



INTIMÉE

CPAM DE LA SEINE SAINT DENIS

[Adresse 2]

[Adr...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 11 Octobre 2019

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/08106 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BY77T

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Mai 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 14/01445

APPELANTE

SOCIÉTÉ MOTUL

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Guillaume BREDON, avocat au barreau de PARIS, toque : L0305 substitué par Me Thomas HUMBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0305

INTIMÉE

CPAM DE LA SEINE SAINT DENIS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901 substituée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 3]

[Adresse 3]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Juin 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Lionel LAFON, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre

Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Conseillère

M. Lionel LAFON, Conseiller

Greffier : Mme Typhaine RIQUET, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre et par Mme Typhaine RIQUET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la société MOTUL SA, ci-après la société, à l'encontre du jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny le 9 mai 2016 dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis, ci après 'la caisse'.

L'affaire est enregistrée sous le numéro RG 16/08106, les parties ont comparu à l'audience du 17 juin 2019 et la décision est mise à disposition à la date du 11 octobre 2019.

EXPOSE DU LITIGE

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.

Il suffit de rappeler qu'une déclaration d'accident du travail a été complétée le 28 novembre 2013, indiquant que M. [A] [T], exerçant la profession d'ouvrier de conditionnement au sein de la société Motul, avait été victime d'un accident le 26 novembre 2013 à 17h20 sur son lieu de travail habituel. Les circonstances de l'accident étaient ainsi décrites : 'En tirant une palette avec le crochet pour la positionner, le crochet s'est détaché de la palette et le salarié s'est cogné le coude gauche contre la table à bidons'.

Il n'était pas indiqué la présence de témoins. L'employeur était informé de l'accident le jour même et l'accident était inscrit au registre d'accidents du travail bénins.

Selon le certificat médical initial établi le 26 novembre 2013 M. [A] présentait une 'contusion du coude gauche avec ecchymose'.

La caisse a reconnu d'emblée le caractère professionnel de l'accident et a notifié à l'employeur cette prise en charge par lettre datée du 17 février 2014.

La société Motul a contesté la prise en charge de l'accident du travail en saisissant par lettre datée du 1er avril 2014 la commission de recours amiable de la caisse, qui a rejeté son recours par décision du 18 juin 2014.

La société Motul a saisi par lettre du 7 juillet 2014 le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny de ce rejet.

Par jugement du 9 mai 2016, ce tribunal a :

- déclaré recevable le recours formé par la société Motul,

- dit que la société ne rapportant pas la preuve de l'envoi de réserves motivées concomitamment à la déclaration d'accident du travail la caisse n'était pas tenue de respecter le principe de la contradiction,

- débouté la société Motul de sa demande tendant à rendre inopposable à son égard la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident déclaré par M. [T] [A] le 26 novembre 2013,

- débouté la société Motul de sa demande d'expertise,

- déclaré opposable à la société la décision de prise en charge de cet accident au titre de la législation professionnelle.

La société Motul a interjeté appel de ce jugement par lettre datée du 3 juin 2016.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, la société demande à la cour :

- d'infirmer le jugement rendu,

- de lui déclarer inopposable la décision de prise en charge de la caisse de l'accident déclaré le 26 novembre 2013 par M. [T],

- d'ordonner une expertise, soutenant que la caisse ne justifie pas de l'ensemble des lésions, soins et arrêts pris en charge au titre de l'accident,

Faisant valoir que la caisse n'a pas tenu compte de sa lettre de réserves, n'a envoyé aucun questionnaire et n'a procédé à aucune enquête contradictoire, en violation des articles

R 441-11 et suivants du code de la sécurité sociale, que ses réserves étaient motivées, et que la caisse n'a pas mis à sa disposition le dossier litigeux, par ailleurs que l'accident du travail repose sur les seules déclarations de l'assuré.

Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l'audience par son conseil, la caisse demande à la cour :

- à titre principal de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de débouter la société Motul de l'ensemble de ses demandes,

- à titre subsidiaire d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevable la contestation de la société Motul portant sur l'opposabilité des décisions de prise en charge des soins et arrêts de travail consécutif à l'accident du 26 novembre 2013,

- à titre très subsidiaire si la cour ordonnait une expertise judiciaire, de fixer une mission précise et d'en faire avancer les frais par la société Motul,

- de condamner la société Motul aux dépens.

Maintenant qu'elle n'a jamais reçu la lettre de réserves invoquée par la société et que celle-ci ne prouve pas qu'elle l'aurait reçue, faisant valoir qu'elle a pris en charge d'emblée l'accident au titre de la législation professionnelle en se fondant sur l'existence de présomptions graves, précises et concordantes, subsidiairement que la commission de recours amiable n'a pas été saisie de cette question, en violation des dispositions de l'article R.142-1 du code de la sécurité sociale, qu'elle n'a pas l'obligation d'informer l'employeur en lui transmettant les pièces du dossier postérieurement à sa décision de prise en charge, que la présomption d'imputabilité des soins et arrêts à l'accident n'est pas renversée et qu'il n'y a pas lieu à ordonner une expertise sur des motifs hypothétiques, qu'en tout état de cause la mission d'expertise devrait être conforme à la présomption d'imputabilité.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

SUR CE,

En application de l'article R 441- 11 du code de la sécurité sociale, la déclaration d'accident du travail peut être assortie de réserves motivées de la part de l'employeur. Dans ce cas, la caisse adresse un questionnaire à l'employeur ou procède à une enquête.

Selon la jurisprudence, ces réserves motivées s'entendent de la contestation du caractère professionnel de l'accident pas l'employeur et ne peuvent porter que sur les circonstances de lieu et de temps de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail.

En l'espèce, la société Motul doit apporter la preuve que la caisse a bien reçu sa lettre de réserves. Elle soutient qu'elle a adressé cette lettre par télétransmission à la caisse, sur net entreprise.fr, et produit un accusé de dépôt qui atteste de l'envoi le 29 novembre 2013 d'une pièce jointe avec une déclaration d'accident du travail. Ce seul élément, comme l'a justement considéré le premier juge, établit l'envoi, mais non la réception par la caisse d'un document en plus de la déclaration d'accident du travail, dont on ne peut savoir en l'état s'il s'agit d'une lettre de réserves.

Or, la société Motul produit en appel une pièce nouvelle qui est un message électronique envoyé à elle par GCPAM151 hotline employeurs, qui indique 'En réponse à votre demande, je vous confirme que la pièce jointe présente avec la déclaration d'accident du travail saisie le 29 novembre 2013 est bien une lettre de réserves'.

Cet élément permet bien d'identifier comme une lettre de réserves la pièce qui a été envoyée avec la déclaration d'accident du travail.

La caisse souligne que cette réponse émane de la caisse primaire d'assurance maladie d'Aurillac CNMATS, qui est un organisme distinct, et non pas d'elle. Elle considère qu'au même titre que les juridictions du fond rappellent que les organismes de sécurité sociale ne peuvent se prévaloir d'un dysfonctionnement des services postaux pour contester un manquement aux obligations mises à leur charge au titre du principe du contradictoire, la société appelante ne saurait se prévaloir d'un dysfonctionnement dans la transmission de sa lettre de réserves.

Mais en l'espèce la société Motul a adressé à la caisse sa déclaration d'accident du travail et une lettre de réserves par le biais d'un système de transmission électronique spécialement dédié aux employeurs, qui doit normalement fonctionner.

Rien ne permet d'établir s'il y a eu dysfonctionnement et s'il doit être attribué à l'organisme émetteur ou à l'organisme récepteur qu'est la caisse elle-même, puisque la déclaration d'accident du travail a bien été reçue par la caisse par voie électronique et que la lettre de réserves a été reçue initialement.

Il y a donc lieu de considérer que la société Motul a bien adressé à la caisse une lettre de réserves.

Il appartient dés lors à la société Motul d'établir que cette lettre de réserves était effectivement motivée, au sens de la jurisprudence.

Sur ce point, la société Motul ne prouve que l'envoi d'une lettre de réserves, mais elle ne rapporte pas la preuve du contenu de la lettre effectivement envoyée.

Elle ne rapporte donc pas la preuve de réserves effectives et motivées, et n'est pas en droit de faire reproche à la caisse de ne pas avoir procédé à une enquête ou de ne pas avoir adressé de questionnaires, sur le fondement de l'article R.441-11 précité.

La caisse souligne qu'elle était en mesure de prendre en charge d'emblée l'accident au titre de la législation professionnelle car il existait des présomptions graves, précises et concordantes, et en l'absence de réserves motivées de la part de l'employeur elle était en droit de le faire.

Le jugement doit être de ce chef confirmé.

La société Motul conteste enfin l'imputabilité à l'accident du travail des arrêts et soins pris en charge par la caisse.

En application de l'article R.142-1 du code de la sécurité sociale, 'les réclamations relevant de l'article L.142-4 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d'administration de chaque organisme. Cette commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent formuler une réclamation.'

Il apparaît, à la lecture de la lettre de la société Motul saisissant la commission de recours amiable en date du 1er avril 2014, que la question de l'imputabilité à l'accident des soins et arrêts de travail n'a pas été soumise à l'appréciation de la commission.

La saisine préalable de la commission est obligatoire et c'est à tort que le premier juge a examiné la demande d'inopposabilité qui était irrecevable.

Le jugement déféré qui a examiné cette demande sera donc infirmé de ce chef.

La société Motul sera déboutée de l'ensemble de ses demandes.

Il y a lieu de condamner la société Motul qui succombe aux dépens d'appel, en application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevable la demande de la société Motul visant à contester l'imputabilité à l'accident du travail des soins et arrêts pris en charge par la caisse,

Le confirme pour le surplus

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable la demande de la société Motul visant à contester l'imputabilité à cet accident du travail des soins et arrêts de travail pris en charge par la caisse,

Déboute la société Motul de toutes ses demandes,

Condamne la société Motul aux entiers dépens d'appel.

La Greffière,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 16/08106
Date de la décision : 11/10/2019

Références :

Cour d'appel de Paris L4, arrêt n°16/08106 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-11;16.08106 ?
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