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25/09/2019 | FRANCE | N°18/02907

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 25 septembre 2019, 18/02907


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 25 Septembre 2019

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/02907 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5EJ4



Décision déférée à la Cour : jugement du conseil de prud'hommes de PARIS rendu le 13 janvier 2015 sous le RG n°14/04198, partiellement infirmé par l'arrêt de la chambre 6/4 de la cour d'appel de PARIS, le 27 octobre 2015 sous le RG n°15/02399, lui même partiellement

cassé et annulé par la décision de la Cour de cassation du 30 novembre 2017, sous le pourvoi n°15-28.989, qui a renvoyé la cause et les parti...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 25 Septembre 2019

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/02907 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5EJ4

Décision déférée à la Cour : jugement du conseil de prud'hommes de PARIS rendu le 13 janvier 2015 sous le RG n°14/04198, partiellement infirmé par l'arrêt de la chambre 6/4 de la cour d'appel de PARIS, le 27 octobre 2015 sous le RG n°15/02399, lui même partiellement cassé et annulé par la décision de la Cour de cassation du 30 novembre 2017, sous le pourvoi n°15-28.989, qui a renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel de PARIS autrement composée.

APPELANTE

SA CREDIT AGRICOLE CORPORATE AND INVESTMENT BANK agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration et/ou tous représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125 substitué par Me Calmann BELLITY, avocat au barreau de PARIS, toque : T12

INTIMES

Madame [M] [P] VEUVE [M] Agissant en qualité d'héritière de Feu [E] [M] et de représentante de son fils mineur [W] [M]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Marie-laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936 substitué par Me Agnès LASKAR, avocat au barreau de PARIS, toque : C0710

Madame [Z] [M] Agissant en qualité d'héritière de feu [E] [M]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Marie-laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936 substitué par Me Agnès LASKAR, avocat au barreau de PARIS, toque : C0710

Monsieur [Q] [M] Agissant en qualité d'héritier de feu [E] [M]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Marie-laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936 substitué par Me Agnès LASKAR, avocat au barreau de PARIS, toque : C0710

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Juin 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de Chambre

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère

Madame Florence OLLIVIER, Vice Présidente placée faisant fonction de Conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 08 avril 2019

Greffier : M. Julian LAUNAY, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de Chambre et par Monsieur Julian LAUNAY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [E] [M] a été engagé une première fois par la Banque de financement de trésorerie, aux droits de laquelle vient la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank, du 1er mars 1988 au 1er mars 1990, puis à compter du 29 octobre 1990, en qualité de gestionnaire de la position obligataire et des transformations de la banque avec la position cadre. Il a été mis à pied à titre conservatoire le 14 octobre 1996 puis a été licencié pour faute lourde le 28 octobre 1996.

Il a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 9 avril 1997.

L'employeur a déposé plainte le 30 juillet 1997 avec constitution de partie civile et une information judiciaire a été ouverte. Par jugement du 9 mars 2011, le tribunal de grande instance de Paris a relaxé le salarié. Par arrêt du 6 mars 2014, la cour d'appel de Paris a confirmé cette décision et le pourvoi en cassation formé par la banque a été rejeté le 1er juin 2016.

Par jugement du 13 janvier 2015, le conseil de prud'hommes de Paris a :

*Révoqué le sursis à statuer ;

*Requalifié le licenciement de Monsieur [E] [M] en licenciement sans cause

réelle et sérieuse ;

*Condamné le Crédit agricole Corporate and Investment Bank à lui verser les indemnités suivantes :

- 6123,74 € au titre de la mise à pied

- 612,37 € au titre de l'indemnité de congés payés afférente

- 55 113,12 € au titre de l'indemnité de licenciement

- 27 556,86 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 2 755,68 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

- 16 330,00 € au titre de l'indemnité de congés payés

avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la

convocation devant le bureau de conciliation, soit le 13 mars 1997, jusqu'au jour du

paiement.

*Rappelé qu'en vertu de l'article R.1454-28 du Code du Travail, ces condamnations sont

exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite minimum de neuf mois de salaire

calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire ; fixé cette moyenne à la somme de 9185€ ;

- 244 340 € au titre de la perte des stock-options du fait du licenciement

- 900 000 € au titre du préjudice moral

- 60 000 € au titre de la perte de la rémunération variable (1996)

avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement, jusqu'au jour du

paiement.

*Ordonné la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 1154 du Code Civil.

- 2 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

*Ordonné l'exécution provisoire des condamnations sommes ci-dessus, en application de

l'article 515 du code de procédure civile, avec consignation à la caisse des dépôts et

consignations à hauteur de 50%. »

Par arrêt en date du 27 octobre 2015, la cour d'appel de Paris a ainsi statué :

*Confirme le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement de Monsieur [E] [M] est sans cause réelle et sérieuse et condamné la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank à lui payer les sommes suivantes :

- 6123.74 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied plus 612.37 € pour congés payés

- afférents

- 55113.72 € à titre d' indemnité de licenciement

- 27556.86 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis plus 2755.68 €

- 16330 € au titre des congés payés

- les intérêts légaux des sommes ci-dessus à compter de la date de réception par la partie

défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation

- 60000 € au titre de la perte de la rémunération variable sur 1996

- 244340 € à titre de dommages intérêts pour perte des stocks options détenues par le

salarié à la date du licenciement

- 900000 € à titre de dommages intérêts pour préjudice moral

*L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau :

*Condamne la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank à payer à Monsieur [E] [M] les sommes de :

- 250000 € à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice financier résultant du

licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 30000 € pour perte de chance d'obtenir des stocks options en 1996

- 100000 € à titre de dommages intérêts pour perte de chance de bénéficier du versement de cotisations de retraite

*Dit que les condamnations autres que celles de nature salariale telles que précitées portent

intérêts à compter du jugement du 13 janvier 2015 pour celles qui sont confirmées et à

compter de ce jour pour les autres.

Par arrêt en date du 30 novembre 2017, la Cour de cassation a cassé cet arrêt mais seulement en ce qu'il avait condamné la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank à payer à Monsieur [E] la somme de 900 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Devant la cour d'appel de Paris autrement composée, désignée comme juridiction de renvoi, le Crédit agricole CIB, sollicite de voir :

-dire irrecevable la demande formulée à titre principal par les ayants droits de Monsieur [M] tendant à l'allocation d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dans la mesure où une telle demande excède le périmètre de la saisine de la Cour d'appel de renvoi ;

-infirmer le jugement en ce qu'il a condamné Crédit agricole CIB à indemniser M.

[M] d'un « préjudice moral » ;

-dire que les ayants droit de Monsieur [M] ne démontrent pas l'existence d'un comportement fautif de la BFTBFT qui leur aurait causé un préjudice distinct de celui résultant du licenciement ;

-dire en conséquence que les ayants droit de Monsieur [M] ne peuvent revendiquer un « préjudice moral » ;

-débouter les ayants droit de Monsieur [M] de toute demande d'indemnisation au titre d'un « préjudice moral » ;

-condamner conjointement et solidairement les ayants droits de Monsieur [M] à payer au

Crédit Agricole CIB à titre de restitution la somme de 900.000 euros, avec intérêts au taux légal à

compter du 30 novembre 2017, date de l'arrêt de la Cour de cassation qui a cassé (partiellement)

l'arrêt de la Cour du 27 octobre 2015 ;

-débouter les ayants droit de Monsieur [M] de toutes leurs demandes ;

-condamner les ayants droit de Monsieur [M] pas trop si incomparable [R] [E] au paiement d'une somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les ayants droits de Monsieur [M] sollicite de voir :

-fixer le salaire moyen de Monsieur [M] à 9185,62 euros ;

-confirmer le jugement et condamner le crédit agricole CIB à leur payer :

900 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

à titre subsidiaire, 900 000 euros au titre du préjudice personnel moral subi

15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

avec intérêts de droit compter de la saisine du conseil de prud'hommes de Paris

-ordonner la capitalisation des intérêts sur le fondement de l'article 154 du Code civil

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties la cour se réfère la cour se réfère aux conclusions déposées par elles, visées par le greffier et développé oralement à l'audience.

MOTIFS

La demande principale des ayants droits de Monsieur [M] au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être accueillie, l'arrêt de la Cour de cassation ayant cassé l'arrêt de la cour d'appel de Paris seulement en ce qu'il avait condamné la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank à payer à Monsieur [M] la somme de 900 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Seule la demande formulée au titre du préjudice moral est recevable.

Monsieur [M] a été soumis à un interrogatoire éprouvant de 9 heures le jour de la remise de sa lettre de mise à pied.

En outre, le rapport de la COB, public et accessible à tous, indiquait : « Paris le 23 juillet 1998 activités de Messieurs [C] [D] et [E] [M] abus de confiance et escroquerie ordonnance de non-lieu du 10 janvier 2007 ».

Sur le Bloomberg business, outil financier utilisé par toutes les entreprises en lien avec le monde de la finance, un article intitulé ''BNP, Crédit Agricole face à un ancien trader dans un procès pénal à Paris'' citait le nom de Monsieur [M] et décrivait les accusations portées contre lui.

Ainsi, de façon gravement fautive, la banque a multiplié les informations qui ont été diffusées auprès d'organismes financiers et ont obéré l'avenir de Monsieur [M] en portant atteinte à sa réputation et à son honneur, alors que celui-ci n'avait que 35 ans. En outre, il n'a pu conserver l'emploi qu'il avait retrouvé en raison des pressions exercées sur son nouvel employeur (attestations de Monsieur [R], ancien directeur général de la Banque de financement et de trésorerie, et de Monsieur [F], président du directoire de Cyril finance).

Il convient d'évaluer le préjudice moral de Monsieur [M] à la somme de 500 000 euros.

Il est équitable d'accorder aux intimés une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant dans les limites de l'arrêt de la Cour de cassation du 30 novembre 2017 ;

Infirme le jugement déféré sur le montant des dommages-intérêts pour préjudice moral ;

Statuant à nouveau,

Condamne la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank à payer aux ayants droits de Monsieur [M] la somme de 500 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral avec intérêts de droit avec compter du jugement ;

Y ajoutant,

Condamne la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank à payer aux ayants droits de Monsieur [M] la somme de 2000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne la capitalisation des intérêts judiciaires dans les conditions posées par l'article 1343'2 du Code civil ;

Déboute les ayants droits de Monsieur [M] du surplus de leurs demandes

Condamne la société Crédit agricole Corporate and Investment Bank aux dépens.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 18/02907
Date de la décision : 25/09/2019

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°18/02907 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-25;18.02907 ?
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