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19/09/2019 | FRANCE | N°19/04563

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 19 septembre 2019, 19/04563


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FIANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2019



(n° 394 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/04563 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7NOW



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Février 2019 - Président du Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2018R00389



APPELANTE



SAS EPIDEO prise en la personne de ses reprÃ

©sentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 2]

N° SIRET : 501 71 1 3 60



Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE P...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FIANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 19 SEPTEMBRE 2019

(n° 394 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/04563 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7NOW

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Février 2019 - Président du Tribunal de Commerce de CRETEIL - RG n° 2018R00389

APPELANTE

SAS EPIDEO prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 2]

N° SIRET : 501 71 1 3 60

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Assistée par Me Julien BALENSI de la SELARL ALTANA, avocat au barreau de PARIS, toque : R021

INTIME

Monsieur [P] [U]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 1]

Représenté par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

Assisté par Me Anne-Carine ROPARS-FURET de la SELARL W&S, avocat au barreau de PARIS, toque : L215

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Juin 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Bernard CHEVALIER, Président

Mme Véronique DELLELIS, Présidente

Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère

Qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère, dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Aymeric PINTIAU

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Bernard CHEVALIER, Président et par Lauranne VOLPI, Greffière,

Exposé du litige :

La société Epideo est une société Holding fondée en 2007 par des salariés de la société SCYNA 4, dont M. [U] et qui détient celle-ci à 100%.

L'article 11.1 des statuts de la société Epideo prévoient l'exclusion de plein droit d'un associé en cas de fin de son contrat de travail au sein de la société SCYNA 4.

Le 14 mars 2018 M. [U] a été licencié pour insuffisance professionnelle et son contrat a pris fin le 14 juin 2018. Il a saisi le conseil de prud'hommes de ce licenciement.

Une assemblée générale extraordinaire du 26 juillet 2018 modifie les statuts de la société Epideo datant de 2007 en leur article 10.1 relatifs aux modalités de transmission de ses titres en imposant à l'associé sortant du fait de son licenciement par la société SCYNA 4 un ajustement à la baisse du prix de cession par application de la formule suivante : Prix de cession = PV x 0,75.

Par lettre du 1er août 2018 la présidence a notifié à M. [U] son exclusion de la société Epideo et la valeur unitaire, soit 900 euros , de ses actions, qui lui ont été remboursées en octobre 2018.

Contestant cette évaluation, M. [U] a fait assigner, par acte du 16 novembre 2018, la société Epidéo devant le président du tribunal de commerce de Créteil qui, par ordonnance contradictoire rendue le 13 février 2019, a :

- dit que les statuts modifiés par l'assemblée générale extraordinaire du 26 juillet 2018 ne sont pas opposables à M. [U] pour l'évaluation du prix de rachat de ses actions ;

- commis M. [H] [B], en qualité d'expert, demeurant [Adresse 5], avec mission de déterminer la valeur des actions détenues par M. [U] dans le capital social de la SAS Epideo ;

- rejeté toute autre demande de M. [U] ;

- dit que les frais d'expertise seront mis à la charge de la SAS Epideo, et qu'en cas de carence de cette dernière, M. [U] pourra se substituer à celle-ci pour l'avance des frais d'expertise ;

- mis les dépens à la charge de SAS Epideo ;

- liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 42,79 euros dont TVA 20%.

La société Epideo a formé un appel tendant à l'annulation subsidiairement la réformation de cette ordonnance en toutes ses dispositions, par déclaration du 26 février 2019 et par conclusions communiquées par voie électronique le 4 juin 2019, elle demande à la cour, sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil, de :

- constater que le président du tribunal de commerce de Créteil a excédé ses pouvoirs en jugeant que « les statuts modifiés par l'assemblée générale extraordinaire du 26 juillet 2018 ne sont pas opposables à M. [U] pour l'évaluation du prix de rachat de ses actions »;

- constater que le président du tribunal de commerce de Créteil a excédé ses pouvoirs en se prononçant au moyen d'une ordonnance de référé ;

- constater que la question de l'opposabilité à M. [U] des statuts d'Epideo tels que modifiés par l'assemblée du 26 juillet 2018 est de la compétence exclusive du tribunal de commerce, et non de son président, en application de l'article L 721-3 du code de commerce ;

En conséquence :

- annuler l'ordonnance du 13 février 2019 ;

- désigner tel expert qu'il plaira à la Cour avec pour mission de déterminer la valeur des actions anciennement détenues dans le capital d'Epideo par M. [U] conformément aux dispositions de l'article 1843-4 du code civil ;

- dire que les frais de l'expertise seront à partager par parts égales entre les parties ;

- condamner M. [U] à lui régler la somme de 10 000 euros 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [U] aux dépens de l'instance.

La SAS Epideo soutient que même en statuant la forme des référés, le juge n'exerce les pouvoirs du juge du fond que dans la limite des pouvoirs qui lui sont conférés par le texte spécial qui l'habilite, sans pouvoir fixer la méthode d'évaluation à suivre ni pouvoir statuer en lieu et place du tribunal de commerce exclusivement compétent sur l'opposabilité à un associé d'une modification statutaire votée en assemblée générale et qu'en tout état de cause, il a rendu une ordonnance de référé dont la signification mentionne les voies de recours en la matière.

M. [U], intimé, par conclusions transmises par voie électronique le 12 juin 2019, demande à la cour, sur le fondement des articles 1843-4 du code civil et 122, 492-1, 559, 699 et 700 du code de procédure civile, de :

- constater que le président du tribunal de commerce de Créteil statuant par l'ordonnance entreprise rendue en la forme des référés du 13 février 2019 n'a commis aucun excès de pouvoir;

par conséquent :

- déclarer irrecevable la société Epideo en son appel ;

- débouter la société Epideo de l'ensemble de ses demandes ;

- confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

En tout état de cause :

- constater que seuls les présidents de tribunal ont pouvoir pour désigner un expert sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil ;

- rejeter la demande tendant à la désignation par la cour d'appel de Paris de l'expert chargé d'évaluer les droits de M. [U] ;

- condamner la société Epideo à 10 000 euros d'amende civile, en vertu des dispositions de l'article 559 du code de procédure civile ;

- condamner la société Epideo aux dépens de l'instance dont le recouvrement sera effectué par l'AARPI JRF Avocats représentée par maître Fertier, et à verser la somme de 10 000 euros à M. [U] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [U] soutient qu'aucun excès de pouvoir n'a été commis par le premier juge tenu de vérifier les conditions d'application de l'article 1843-4 du code civil, la mention 'ordonnance de référé' en entête l'ordonnance entreprise résultant, au vu de son contenu, d'une erreur de pure forme .

La cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE LA COUR

L'article 37 de l'ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés, prise en application de l'article 3 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises, a modifié les termes de l'article 1843-4 du code civil, comme suit:

I. - Dans les cas où la loi renvoie au présent article pour fixer les conditions de prix d'une cession des droits sociaux d'un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible.

L'expert ainsi désigné est tenu d'appliquer, lorsqu'elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par les statuts de la société ou par toute convention liant les parties.

II.-Dans les cas où les statuts prévoient la cession des droits sociaux d'un associé ou le rachat de ces droits par la société sans que leur valeur soit ni déterminée ni déterminable, celle-ci est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné dans les conditions du premier alinéa.

L'expert ainsi désigné est tenu d'appliquer, lorsqu'elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par toute convention liant les parties;

Et il n'est dérogé à l'absence de recours contre l'ordonnance du président du tribunal saisi au visa de ce texte qu'en cas d'excès de pouvoir;

Or, ne constitue pas un excès de pouvoir pour le président du tribunal de commerce statuant en la forme des référés au visa de ce texte d'estimer que sont inopposables à M. [U] les statuts modifiés par l'assemblée générale extraordinaire du 26 juillet 2018, soit après le licenciement de l'intimé le 14 juin 2018 et avant la notification, le 1er août suivant, de son exclusion de plein droit de la société Epidéo de ce chef, à compter de laquelle cette exclusion produit ses effets, compte tenu de la manoeuvre opérée pour réduire la valeur de rachat des titres en cause et de l'ambiguïté sur la date effective de l'exclusion d'un associé quand celle-ci est liée à un événement objectif et non à une décision de la présidence.

Il est en effet constant que l'erreur d'appréciation quant aux conditions d'application de l'article 1343-4 précité, à la supposer établie, ne constitue pas un excès de pouvoir.

Il en est de même de la méconnaissance éventuelle de l'article 721-3 du code de commerce attribuant compétence exclusive au tribunal de commerce pour statuer sur l'opposabilité à M. [U] de la décision d'assemblée générale extraordinaire du 26 juillet 2018 modifiant les statuts de 2007, dès lors que le président du tribunal de commerce est tenu, sauf à commettre un excès de pouvoir négatif, de vérifier les conditions d'application du texte litigieux, partant de trancher la contestation des parties quant aux statuts pertinents devant permettre l'évaluation à dire d'expert sollicitée, et qu'il ne fixe pas pour autant une méthode d'évaluation autrement qu'en référence aux statuts qu'il estime pertinents.

En outre, la mention 'ordonnance de référé' en entête de l'ordonnance entreprise résulte manifestement d'une erreur de plume au vu de son contenu qui rappelle expressément dans ses motifs que le juge, saisi par assignation en la forme des référés, a les pouvoirs juridictionnels dont dispose la juridiction du fond et qui énonce dans son dispositif que le juge statue en la forme des référés.

A cet égard, peu importe les indications relatives aux modalités de recours telles que portées sur l'acte de signification de cette ordonnance dès lors que la société Epideo a régulièrement formé un recours en annulation fondé sur les excès de pouvoirs prétendus du juge saisi, statuant en la forme des référés et que l'irrecevabilité de ce recours ne tient pas à la méconnaissance des modalités de ce recours mais à l'absence d'excès de pouvoir.

L'appel de la société Epideo, expressément prohibé par le texte au visa duquel la cour a été saisie, doit donc être déclaré irrecevable.

L'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à dommages-intérêts que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équivalente au dol, non caractérisées en l'espèce. La demande à ce titre ne peut donc être accueillie.

Conformément aux articles 696 et 700 du code de procédure civile, la société Epideo, dont le recours échoue, doit supporter la charge des dépens sans pouvoir prétendre à une indemnité de procédure et l'équité commande de la condamner comme indiqué au dispositif.

PAR CES MOTIFS

déclare l'appel nullité de la société Epideo irrecevable ;

condamne la société Epideo aux dépens d'appel distraits conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

condamne la société Epideo à payer M. [U] à une indemnité de procédure de 10.000 euros et rejette toute autre demande.

La Greffière, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 19/04563
Date de la décision : 19/09/2019
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°19/04563 : Déclare la demande ou le recours irrecevable


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-19;19.04563 ?
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