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16/09/2019 | FRANCE | N°18/07611

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 16 septembre 2019, 18/07611


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 16 SEPTEMBRE 2019



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07611 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5PUG



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/18011





APPELANT



Monsieur [N] [Y]

[Adresse 1]
>[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1942 à [Localité 2] / TURQUIE



Représenté par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Représenté par Me...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 16 SEPTEMBRE 2019

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07611 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5PUG

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/18011

APPELANT

Monsieur [N] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1942 à [Localité 2] / TURQUIE

Représenté par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Représenté par Me Christophe DELRIEU de l'ASSOCIATION VEIL JOURDE, avocat au barreau de PARIS, toque : T06

INTIME

LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE PARIS

Pôle Fiscal Parisien 1, Pôle Juridictionnel Judiciaire

Ayant ses bureaux [Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Guillaume MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Mai 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Mme Christine SIMON-ROSSENTHAL, dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

A la suite d'une demande d'entraide judiciaire en matière pénale présentée par les autorités suisses en janvier 2009, le procureur de la République de Nice a fait procéder le 20 janvier 2009 à une perquisition au domicile de M. [F] [T], ancien informaticien salarié de la filiale suisse de l'établissement britannique HSBC Private Bank (sise à [Localité 4]), soupçonné d'avoir dérobé des données de la base client de cet établissement. Cette perquisition a eu lieu en présence d'un magistrat et de deux enquêteurs de la police judiciaire de Berne.

Par courrier du 09 juillet 2009, le procureur de la République de Nice a communiqué à l'administration fiscale, sur le fondement des dispositions de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, des informations sur la banque HSBC Private bank SA sise à [Localité 4] (Suisse) recueillies à l'occasion d'une enquête judiciaire. Sur instruction de ce magistrat, les services de la gendarmerie nationale, chargés de l'enquête préliminaire, ont ainsi remis aux services de la DGFIP deux séries de fichiers informatiques.

Après exploitation de ces fichiers et après avis conforme de la commission des infractions fiscales, l'administration fiscale a déposé plainte le 17 décembre 2010 auprès du parquet de Paris à l'encontre de Monsieur [N] [Y] pour fraude fiscale, faute de déclaration des avoirs qu'il détenait sur les comptes à l'étranger ouverts après de cet établissement, soit personnellement, soit par l'intermédiaire de la compagnie Camondo Financial limited, devenue en 2008 la compagnie New Marylebone Limited et de la compagnie financière Camondo.

Par note du 12 juillet 2011, en application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales précité, le parquet du tribunal de grande instance de Paris a spontanément transmis à l'administration fiscale, la copie d'un rapport de synthèse intermédiaire dressé par les enquêteurs de la Brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF) dans le cadre de l'enquête pénale le concernant.

Par suite, le service a exercé son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire conformément aux dispositions des articles L. 81 et L. 82 C du livre des procédures fiscales, les 24 février, 03 mai, 24 septembre, 16 octobre, 18 octobre, 13 novembre 2012 et 08 juillet 2013, afin de consulter et prendre copie des différents éléments recueillis par les agents des services de police dans le cadre de l'enquête judiciaire (pièces des procédures judiciaires portant le n° P 103519206/7 et n° P 103519205/8).

Le 2 décembre 2012, en application de l'article 23 C du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale a invité M. [Y] à s'expliquer sur les avoirs détenus à l'étranger d'une part sur les quatre comptes ouverts en Suisse sous le profil « JEN » créé le 9 mai 1984 auprès de la banque HSBC dont le solde cumulé faisait apparaître un solde créditeur de 2 098 415,99 USD en décembre 2006 et sur les six comptes qu'il détenait sous le profil New Marylebone Limited auprès du même établissement dont le solde cumulé était de 2 356 365,63 USD en août 2008.

Le service vérificateur, la 1ère brigade de contrôle des revenus de la direction nationale des vérifications de situations fiscales (DNVSF), lui a adressé à ce titre une lettre-modèle n° 3907-SD du 2 décembre 2013 concernant les avoirs précités détenus ou utilisés à l'étranger et non déclarés.

Par un courrier du 31 janvier 2014, par l'intermédiaire de son conseil, M. [Y] a adressé au service une réponse contestant le bien fondé du questionnement mis en 'uvre aux motifs que l'administration ne démontrait pas, qu'il était en obligation de révéler l'existence des comptes susmentionnés faute d'ouverture, clôture ou de mouvements relatifs à ces derniers au titre des dix années précédentes ; qu'il avait déjà indiqué l'origine et la nature des sommes figurant sur ces comptes dans le cadre de la procédure judiciaire comme indiqué dans les procès verbaux d'audition communiqués au service par l'autorité judiciaire ; que les informations issues des données dérobées à la banque suisse HSBC n'étaient pas fiables.

Estimant la réponse insuffisante, le service lui a adressé le 14 février 2014 une mise en demeure n° 3907-bis de répondre, sous 30 jours, à la demande d'informations ou de justifications s'agissant de l'origine et des modalités d'acquisition des avoirs figurant sur les comptes précités. Le vérificateur a confirmé la pertinence du questionnement mis en 'uvre, estimant que les comptes litigieux avaient été mouvementés au cours des dix années précédant l'envoi de la demande de justifications n° 3907, et demandé à M. [Y] de fournir des documents probants justifiant ses allégations durant l'enquête pénale relatives à l'origine des fonds figurant sur les comptes litigieux.

Par courrier du 14 mars 2014, M. [Y] a maintenu sa contestation de la régularité de la mise en 'uvre à son encontre du questionnement prévu à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales

Le 6 juin 2014, l'administration fiscale a notifié à M. [Y] une proposition de rectification sur une base de 2 098 415,99 USD (1 588 165 euros) détenus sur quatre comptes bancaires (profil « JEN ») à la date du 31 décembre 2006 et 2 356 365,53 USD (1839 332 euros) détenus sur six comptes bancaires (profil « New Marylebone Ltd ») au 31 août 2006 soumis aux droits d'enregistrement au taux de 60 %.

Par courrier du 03 juillet 2014, M. [N] [Y] a contesté le rappel de droits.

Par un courrier du 30 octobre 2014, le service a partiellement maintenu le rappel de droits à hauteur de 1 629 593 euros.

Le rappel en matière de droits d'enregistrement a été mis en recouvrement le 18 mai 2015 par avis n° 15 05 00448.

Par courrier du 09 juin 2015, par l'intermédiaire de son avocat, M. [N] [Y] a contesté l'imposition supplémentaire mise à sa charge en matière de droits d'enregistrement au titre de l'année 2014. Cette contestation a fait l'objet d'une décision de rejet du service en date du 25 octobre 2016.

Le 13 décembre 2016, M. [N] [Y] a assigné l'administration des finances publiques devant le tribunal de grande instance de Paris en vue d'obtenir la décharge de la totalité de l'imposition supplémentaire en litige mis à sa charge au titre de l'année 2014.

Par jugement du 15 mars 2018, Monsieur [N] [Y] a été débouté de la totalité de ses demandes et condamné aux dépens.

Monsieur [N] [Y] a relevé appel de ce jugement le 11 avril 2018.

Par conclusions signifiées le 4 mars 2019, Monsieur [N] [Y] demande à la cour de réformer le jugement entrepris, d'annuler la décision en date du 25 octobre 2016 par laquelle l'administration fiscale a rejeté la réclamation contentieuse en date du 09 juin 2015 et, en conséquence, d'annuler l'avis de mise en recouvrement en date du 18 mai 2015 et de prononcer la décharge totale des impositions qui lui sont réclamées pour un montant de 1 629 593 euros.

Il sollicite que les dépens soient mis à la charge de l'Etat et que l'administration fiscale soit condamnée à lui payer une somme de 100 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées 5 avril 2019, l'Etat représenté par le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et de Paris demande à la cour de débouter Monsieur [N] [Y] de toutes ses demandes, de confirmer le jugement entrepris et de le condamner en tous les dépens de première instance et d'appel et à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE,

Sur le caractère illicite de la preuve

Monsieur [Y] soutient qu'en fondant son redressement sur des documents obtenus de manière illicite, l'administration a manqué à son devoir de loyauté et a violé l'article 9 du code de procédure civile ;

L'administration fiscale réplique que les informations ont été régulièrement communiquées par le procureur de la république de Nice en application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales qui ont été exploitées dans le cadre de la procédure en cause et qui ont donné lieu à la mise en 'uvre de la procédure prévue par l'article L. 23 du même livre puis à la taxation des avoirs non déclarés ;

Ceci étant exposé, il n'est pas contesté que les données informatiques versées au soutien de la plainte de l'administration fiscale contre M. [Y] dont des extraits ont été transmis à l'appui des propositions de rectification avaient été dérobées par M. [T], ancien informaticien salarié de la filiale suisse de la banque HSBC. Ces pièces ont été obtenues par la perquisition légalement effectuée au domicile de M. [T] à Nice le 20 janvier 2009 dans le cadre de l'exécution d'une commission rogatoire internationale délivrée à l'initiative des autorités judiciaires helvétiques et ont fait l'objet d'une communication régulière à l'administration fiscale les 09 juillet 2009, 02 septembre 2009 et 12 janvier 2010, conformément aux dispositions des articles L 101 et L 135 du livre des procédures fiscales. Il n'est d'ailleurs pas établi que l'administration fiscale aurait confectionné les pièces litigieuses ni participé directement ou indirectement à la leur production, le rapprochement et le décryptage des données informatiques ne pouvant s'analyser comme une confection d'éléments de preuve par une autorité publique. Ces données ne peuvent donc pas constituer des preuves illicites.

En tout état de cause, les propositions de rectification de l'administration fiscale sont fondées non seulement sur les documents qui lui ont été transmis par l'autorité judiciaire provenant d'une perquisition régulièrement effectuée mais aussi sur les éléments tirés de la procédure pénale pour fraude fiscale diligentée à l'encontre de M. [Y] qui n'a pas été déclarée irrégulière, notamment sur ses propres déclarations et sur les scellés comptant les conventions fiduciaires des 05 janvier 2004 et du 15 octobre 2005, étant ajouté que M. [Y] a reconnu à l'audience correctionnelle être le bénéficiaire économique de profil « New Marylebone Limited » et ne conteste pas être titulaire des comptes ouverts sous le profil « Jen ».

Sur la violation de l'article 6 § 1 de la CEDH

Monsieur [Y] soutient que la demande sur l'origine des avoirs détenus sur des comptes à l'étranger et non déclarés à l'administration fiscale méconnaît les exigences de l'article 6.1 de la CEDH et le principe du respect des droits de la défense dès lors qu'il a fait l'objet d'une taxation d'office.

L'administration fiscale fait valoir que, par un arrêt de principe du 12 juillet 2014, la Cour de cassation a intégré à sa jurisprudence l'arrêt rendu le 12 juillet 2011 par la Cour européenne des droits de l'homme qui a décidé que le contentieux fiscal échappait au champ des droits et obligations de caractère civil en dépit des effets patrimoniaux qu'il avait nécessairement quant à la situation des contribuables de sorte que l'article 6-1 de CEDH ne s'y appliquait pas.

Ceci étant exposé, ainsi que le soutient l'administration fiscale, la combinaison des articles L 23 C et L 71 du livre des procédures fiscales et de l'article 755 du code général des impôts conduisant à la taxation à 60 % des avoirs non déclarés à l'administration et dont le contribuable ne justifie ni de l'origine ni de leurs modalités d'acquisition ne constituent pas une sanction au sens de la Convention européenne des droits de l'homme puisque elles ne visent pas à sanctionner le défaut de déclaration des comptes à l'étranger mais l'absence de justification de l'origine des avoirs qui n'ont pas été révélés à l'administration. Les sommes figurant sur ces comptes sont présumées constituer un patrimoine acquis à titre gratuit soumis aux droits de mutation à titre gratuit.

Sur la violation de l'article 7.1 de la CEDH

Monsieur [Y] soutient que la taxation d'office présente un caractère rétroactif contraire à l'article 7.1 de la CEDH.

L'administration fiscale réplique que'la taxation de 60 % n'a pas la nature de sanction répressive mais le caractère d'une imposition qui ne peut pas être modulée et que le principe de non-rétroactivité des lois répressives n'a pas lieu de s'appliquer au cas d'espèce. Elle expose que le fait générateur de l'impôt est constitué par l'absence de réponse ou le défaut de réponse du contribuable à la date d'expiration des délais prévus à l'article 23 C du livre des procédures fiscales et que le législateur n'a pas conféré d'effet rétroactif à ces dispositions entrées en vigueur le 1er janvier 2013.

Ceci étant exposé, les personnes physiques domiciliées en France sont tenues de déclarer en même temps que leur déclaration de revenus les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger ainsi que les contrats d'assurance-vie souscrits auprès de certains organismes établis à l'étranger en application des articles 1649 A deuxième alinéa et 1649 AA du code général des impôts. Lorsque cette obligation n'a pas été respectée au mois une fois au cours des dix dernières années précédentes, l'administration peut, en application de l'article 23 C du livre des procédures fiscales, demander au contribuable, indépendamment d'une procédure de vérification de situation personnelle, de fournir, dans un délai de soixante jours, toutes informations ou justifications sur l'origine et les modalités d'acquisition des fonds des avoirs figurant sur le compte ou le contrat d'assurance-vie. En application de l'article L 71 du livre des procédures fiscales, lorsque la personne a répondu de façon insuffisante aux demandes d'informations ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dan un délai de trente jours, en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite. A défaut de réponse ou lorsque la réponse est insuffisante, la personne est taxée d'office à hauteur de 60 % dans les conditions prévues à l'article 755 du code général des impôts.

La procédure de l'article 23 C du livre des procédures fiscales s'applique indépendamment des dispositions des articles L 186 et L 181-0 1 du même livre. Elle est applicable aux demandes de l'administration fiscale à compter du 1er janvier 2013.

La taxation à 60 % n'a pas la nature de sanction répressive et le principe de non-rétroactivité des lois répressives n'a pas lieu à s'appliquer.

Sur l'origine des fonds litigieux

Monsieur [Y] soutient que la décision du tribunal correctionnel rapporte la preuve de l'origine des fonds provenant de la vente des parts sociales de la Banque Camondo déposés sur les comptes HSBC intervenue entre 2000 et 2002 au profit d'une banque belge et ce constat s'impose au juge de l'impôt selon le principe de l'autorité de la chose jugée par le juge pénal. Il estime avoir apporté la preuve contraire visée à l'article 755 du code général des impôts et que son assujettissement aux droits de mutation à titre gratuit est dénué de fondement.

L'administration fiscale soutient que les constats partiels du juge pénal sur l'origine des fonds figurant sur les comptes bancaires ouverts sous les profils les profils « JEN » et « New Marylebone Limited » ne sauraient faire échec à l'imposition mise à la charge de M. [Y] en application des dispositions combinées des articles L. 23 C et L. 71 du livre des procédures fiscales et 755 et 777 du code général des impôts en l'absence de justification précise et complète de sa part concernant l'origine et le montant des avoirs litigieux relatifs à ces profits, de nature à étayer ses affirmations.

Ceci étant exposé, le tribunal correctionnel de Paris a, par jugement du 12 mai 2017 devenu définitif, déclaré M. [N] [Y] coupable notamment des faits de soustraction frauduleuse à l'établissement de l'impôt par dissimulation de sommes et de fraude fiscale commis à Paris et en tout cas sur le territoire national courant 2007 à 2009 et au cours des années 2008 à 2010 et des faits de blanchiment de fraude fiscale commis à Paris et en tout cas sur le territoire national courant 2006 à 2009.

La mention insérée au jugement selon laquelle « l'enquête a permis de déterminer que l'origine des fonds figurant sur les comptes suisses des profils litigieux provenant notamment de la vente de la banque de Comondo » ne participe pas d'une constatation matérielle qu'aurait fait le juge pénal mais retrace un raisonnement déductif appuyé sur les modalités de détention des parts de cette banque au moment de la cession dont 78 % environ par Monsieur [N] [Y] au moyen de sociétés interposée. Les motifs invoqués n'ont pas d'autorité de la chose jugée devant le juge de l'impôt. Il est d'ailleurs précisé que le juge pénal a utilisé l'adverbe « notamment » ce qui exclut la possibilité que les fonds proviennent exclusivement de la vente de la banque.

Sur les comptes liés au profil New Marylebone - CFC, M. [Y] fait valoir que le compte détenu par la société Compagnie Financière de Camondo dans les banques Handelsfinanz-CCF Bank puis HSBC a été crédité entre 2000 et 2004 par les sommes provenant du prix de cession de la SA Banque de Camondo.

Or, ainsi que le souligne l'administration fiscale la vente de 80 % du capital de la Banque de Camondo par la Camondo Holding SA indique le montant du prix d'achat de 13 600 000 francs suisses, diminué d'un montant de 4 000 000 francs suisses constituant une garantie versée sur un autre compte. Un montant de 1 700 000 francs suisses a été transféré sans référence de compte destinataire à une société Camondo Holding domicilié en Suisse. Il s'agit d'un bordereau interne de la banque de Camondo destiné à la Camondo Holding mais pas d'un relevé bancaire. La preuve des transferts par la Camondo Holding à la société Compagnie Financière de Camondo à hauteur de 4 900 000 francs suisses n'est pas rapportée. La pièce n° 15 versée aux débats par l'appelant mentionne une liste d'opérations dont celle du 9 janvier 2002 d'un montant de 3 516 342 euros sous l'article achat solde 20 % capital en débit ne constitue pas la preuve du versement'de la cession des 20 % restant de la SA Banque de Camondo et aucun contrat de vente n'est produit. La pièce n° 16 est un document interne de la société Camondo Holding des 14 et 16 janvier 2002 et non un relevé bancaire. Les pièces n° 17 et 8 ne rapportent pas la preuve de la vente supposée.

Sur les comptes liés au profil Jen, M. [Y] fait valoir que les avoirs ont pour seule origine les avoirs des comptes HSBC du profil client Compagnie Financière de Camondo qui ont été transférées sur les comptes du profil Jen.

Or, ainsi que le fait valoir l'intimée, M. [Y] a indiqué, dans le cadre de la procure judiciaire, qu'il avait repris en 1996 le compte ouvert en 1984 par son père à banque HSBC [Adresse 3]'; que le solde indiqué sur les documents de synthèse issu du fichier HSBC lui paraissait plausible compte tenu du fait qu'il avait reçu de l'argent suite la vente des actions de la société Eurotex et d'un immeuble situé à [Adresse 4] qui appartenaient à son père, pour un montant global d'environ 2 000 000 USD ; que ces biens lui avaient été donnés par son père'; que la donation n'avait pas été enregistrée en France et qu'à son décès il avait hérité du compte HSBS sous ce profil. Il ajoutait qu'il avait placé, sur ce même compte, des fonds issus la vente de la Banque de Camondo dont il était le président.

Les documents produits par l'intimé ne permettent pas de déterminer de manière précise et justifiée de l'origine des fonds, les données de la banque HSBC figurant dans la procédure judiciaire mentionnant que le solde des liquidités et placements ouvertes sous le profit Jen s'élevant à 2 098 414,99 USD en décembre 2006, étant précisé que l'administration fiscale a pris en compte le virement de compte à compte en provenance d'un compte lié au profil New Marylebone à hauteur de 910 104,06 USD, ramenant le montant des avoirs taxables à 876 657 euros.

L'appelant soutient que l'administration fiscale ne prouve nullement que M. [Y] aurait utilisé le compte HSBC de la société New Marylebone Limited et qu'il n'est donc pas tenu de justifier de l'origine des avoirs détenus sur ce compte et notamment la somme de 2 356 365,53 dollars américains figurant en août 2006, au motif qu'il en est le bénéficiaire économique et reproche aux premiers juges d'avoir dit qu'il n'avait pas respecté les dispositions de l'article 1649 A du code général des impôts et en conclut que le redressement est en tout état de cause infondé car selon lui, la procédure de l'article L. 23 C du livre des procédures fiscale n'était pas applicable sur le compte détenu par la société New Marylebone Limited.

Ainsi que le fait valoir l'administration fiscale, M. [Y] a justifié une partie des fonds déposés sur les comptes ouverts sous le profil Jen à la date du 31 décembre 2006, soit la somme de 940 104,06 USD par un virement de compte à compte en date du 29 décembre 2006 effectué à partir d'un compte du profil New Marylebone Limited.En outre, l'obligation déclarative s'impose au titulaire du compte mais aussi à celui qui en a la disposition en droit ou en fait, soit par le biais d'une procuration, soit par l'utilisation personnelle qu'il en fait.

En outre, s'agissant du profil New Marylebone Limited, comme le relèvent les premiers juges, M. [Y] n'est pas fondé à contester à en être le bénéficiaire économique alors qu'il a fait aveu contraire devant le juge pénal d'être le dirigeant officieux de la société titulaire des comptes ouverts à son nom au sein de la banque suisse HSBC Private Bank de sorte que l'administration fiscale était bien fondée à initier la procédure prévue à l'article L. 23 C du livre des procédures fiscales.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [Y] de ses demandes.

M. [Y] succombant en son appel sera condamnée aux dépens de la procédure et débouté de sa demande d'indemnité de procédure. Il sera condamné, sur ce même fondement, à payer à l'administration fiscale la somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le15 mars 2018 en toutes ses dispositions';

CONDAMNE Monsieur [N] [Y] aux dépens d'appel';

DEBOUTE Monsieur [N] [Y] de sa demande d'indemnité de procédure';

CONDAMNE Monsieur [N] [Y] à payer au directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 18/07611
Date de la décision : 16/09/2019

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°18/07611 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-16;18.07611 ?
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