RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 13
ARRÊT DU 13 Septembre 2019
(n° , 2 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/09911 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B32AY
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Mai 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'EVRY RG n° 16-00267
APPELANTE
CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PRÉVOYANCE ET D'ASSURANCE VIEILLESSE
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Hélène LECAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0027 substituée par Me Philippe LECAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0027
INTIMÉ
Monsieur [K] [W]
[Adresse 2]
[Localité 2]
représenté par Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0322
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 3]
[Localité 3]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre, et
Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Conseillère, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre
Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Conseillère
M. Lionel LAFON, Conseiller
Greffier : Mme Typhaine RIQUET, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire
- délibéré du 5 juillet 2019 prorogé au 13 septembre 2019, prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre et par Mme Typhaine RIQUET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (ci-après la CIPAV) d'un jugement rendu le 30 mai 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'EVRY dans un litige l'opposant à M. [K] [W].
EXPOSE DU LITIGE
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.
Il suffit de rappeler que M. [W], affilié à la CIPAV et antérieurement à la CREA à compter du 1er janvier 1995 en sa qualité de décorateur, a reçu signification le 11 février 2016 d'une contrainte du 9 décembre 2015, lui réclamant le paiement de cotisations et majorations pour les années 2013 et 2014, soit un montant global de 28.272,58€. Il a fait opposition à cette contrainte en saisissant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry suivant requête du 23 février 2016.
Par ailleurs, M. [W] a reçu signification d'une seconde contrainte datée du 31 octobre 2016 et signifiée le 30 novembre 2016, lui réclamant le paiement de cotisations pour l'année 2015, soit un montant global de 11.104,73€. Il a fait opposition à cette contrainte en saisissant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry suivant requête du 8 décembre 2016.
Par jugement du 30 mai 2017, ce tribunal a ordonné la jonction des deux dossiers, déclaré M. [W] recevable et bien fondé en ses oppositions, annulé les deux contraintes en litige, débouté la caisse de l'ensemble de ses demandes et débouté M. [W] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
C'est la décision attaquée par la CIPAV qui fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions aux termes desquelles elle demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, de valider la contrainte émise le 9 décembre 2015 à hauteur de 27.803,58€, de valider la contrainte émise le 31 octobre 2016 et signifiée le 30 novembre 2016 à hauteur de 11.104,73€, et de condamner M. [W] à lui payer la somme de 200€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les frais de recouvrement.
Elle soutient que les contraintes ont été précédées de mises en demeure que M. [W] n'est pas aller chercher, que seules les mises en demeure doivent indiquer le mode de calcul des sommes réclamées, que l'adhérent a donc pu connaître la nature, la cause et l'étendue exactes de son obligation, que la signature répond aux exigences de la loi en ce qu'elle est signée du directeur de la caisse, que si cette signature est scannée, elle a été intégrée par un procédé informatique fiable, et non apposée par un tiers, que ce procédé est suffisamment fiable pour être sans incidence sur la validité de l'acte, que la régularisation du régime de base doit s'opérer même en cas de radiation, que faute pour M. [W] d'avoir contesté les mises en demeure, elles ont acquis un caractère définitif.
M. [W] fait déposer et plaider par son conseil des conclusions aux termes desquelles il sollicite de la cour de, à titre principal, confirmer le jugement ; à titre subsidiaire, cantonner la contrainte du 9 décembre 2015 à 16.299€ et celle du 31 octobre 2016 à 5.949€, et condamner la CIPAV à lui payer la somme de 3.000€ au titre des frais irrépétibles.
Il fait valoir que les contraintes ne sont pas motivées, et ne répondent donc pas aux exigences légales, même si les mises en demeure l'étaient, qu'elles n'individualisent pas les cotisations dues année par année, qu'il y a discordance avec les demandes en justice, sans qu'un décompte précis n'explique la différence, qu'il n'y a pas eu de régularisation des cotisations sur la base du revenu réel, qu'il n'est pas justifié de l'habilitation du signataire, et en tout état de cause, qu'elles devraient être cantonnées au montant dû en fonction des revenus réels.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.
SUR CE,
M. [K] [W] est affilié à la CIPAV depuis le 1er janvier 2005 en qualité de décorateur ; il est donc redevable à ce titre des cotisations y afférentes.
La contrainte doit permettre au cotisant de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation. Cependant le renvoi explicite à la mise en demeure régulière adressée au cotisant constitue une motivation suffisante de la contrainte exigée de l'organisme social qui met ainsi le cotisant d'exercer ses droits.
Tel est le cas de la contrainte émise le 9 décembre 2015 et de la contrainte émise le 31 octobre 2016 qui visent les mises en demeure préalables des, respectivement, 24 juin 2015 et 17 mai 2016, qui précisaient pour chaque régime (de base, complémentaire et invalidité décès) les cotisations provisionnelles, les régularisations ainsi que les majorations de retard, pour des montants de 28.272,58€ et 11.465,73€, mettant le cotisant en mesure de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation. M. [W] qui n'a pas réclamé les envois des dites mises en demeure ne peut donc reprocher à la CIPAV de ne pas en avoir eu connaissance.
Les contraintes font à nouveau figurer la période d'exigibilité, années 2013 et 2014, et année 2015, les montants restant dus, respectivement de 28.272,58€ et 11.104,73€, ainsi que la ventilation entre les cotisations globales d'une part, et les majorations d'autre part.
Certes, la comparaison entre la mise en demeure du 17 mai 2016 et la contrainte signifiée le 31 octobre 2016 fait apparaître une différence entre les montants réclamés, respectivement de 11.465,73€ et 11.104,73€. Cependant cette différence est expliquée dans la contrainte par une mention 'régularisations' pour un montant de 361€, qui explique de surcroît le montant de la demande en justice.
Le débiteur ne pouvait donc ignorer la nature, la cause et l'étendue de ses obligations;
Enfin, la signature numérisée du directeur qui a émis la contrainte n'est pas une cause de nullité de celle-ci, le procédé informatique d'émission des contraintes étant parfaitement fiable et assurant que la signature n'est pas celle d'un tiers ne bénéficiant pas d'une délégation de signature. En tout état de cause, la preuve contraire n'est pas rapportée.
Le jugement, qui a annulé à tort les contraintes attaquées, sera donc infirmé.
Sur le montant des cotisations dues par M. [W], qui peuvent expliquer la différence des sommes réclamées en justice, il convient de rappeler que la base de calcul des cotisations sociales correspond au revenu tel que retenu pour le calcul de l'impôt sur le revenu, sans qu'il soit tenu compte notamment des exonérations, y compris celles attachées aux cotisations [R] et aux régimes facultatifs.
M. [W] demande l'annulation des demandes de la CIPAV pour défaut de régularisation des cotisations sur la base du revenu réel de l'adhérent, en méconnaissance des prescriptions de l'article L.131-6-2 du code de la sécurité sociale et de l'article 3 du décret modifié n°79-262 du 21 mars 1979;
En l'espèce, la CIPAV justifie, au titre du régime de base, d'un calcul de cotisations en 2013 sur la base d'un revenu déclaré de 61.326€ en 2013, d'un calcul de cotisations en 2014 sur la base d'un revenu déclaré de 45.633€ en 2014, d'un calcul de cotisations en 2015 sur la base d'un revenu déclaré de 42.012€ en 2015 ; ainsi les sommes dues à hauteur de 3.609€ en 2013, de 3.481€ en 2014 et de 3.917€ en 2015 sont justifiées.
La CIPAV justifie aussi de régularisations, correspondant à de nouveaux calculs sur la base des revenus réels, à hauteur de 552€ pour l'année 2011 et de 232€ pour l'année 2012.
La somme de 76€ due par ailleurs annuellement au titre du régime invalidité décès, soit 228€ pour les années 2013, 2014 et 2015, est justifiée.
En revanche, les sommes revendiquées au titre du régime complémentaire ont été calculées sur la base de revenus N-2 et n'ont pas été régularisées sur la base des revenus réels ; elles ne peuvent donc être validées. M. [W] reconnaît cependant devoir la somme de 5.922€ pour 2013, de 2.395€ pour 2014 et de 2.427€ pour 2015.
M. [W] sera donc condamné au paiement de ces sommes, à charge pour la CIPAV de procéder à un nouveau calcul des majorations de retard qui restent dues.
Compte tenu de la décision, il parait équitable que les parties soient déboutées de leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dépens seront laissés à la charge de la CIPAV.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a annulé les contraintes contestées,
Statuant à nouveau,
Condamne M. [K] [W] au paiement à la CIPAV de la somme totale de 22.763€, à charge pour l'organisme social de procéder à un nouveau calcul des majorations de retard.
Déboute les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Laisse les dépens à la charge de la CIPAV.
La Greffière,La Présidente,