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26/06/2019 | FRANCE | N°18/02060

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 26 juin 2019, 18/02060


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 26 JUIN 2019



(n° 282 , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02060 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B44XY



Décision déférée à la Cour : Décision du 25 Octobre 2017 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS





APPELANTS

Société SELAS [E]

Elisant domicile au cabinet de Me Arnaud G

UYONNET

[Adresse 1]

[Localité 1]



Monsieur [N] [U]

Elisant domicile au cabinet de Me Arnaud GUYONNET

[Adresse 1]

[Localité 1]



Monsieur [G] [R]

Elisant domicile au cabinet...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 26 JUIN 2019

(n° 282 , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02060 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B44XY

Décision déférée à la Cour : Décision du 25 Octobre 2017 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS

APPELANTS

Société SELAS [E]

Elisant domicile au cabinet de Me Arnaud GUYONNET

[Adresse 1]

[Localité 1]

Monsieur [N] [U]

Elisant domicile au cabinet de Me Arnaud GUYONNET

[Adresse 1]

[Localité 1]

Monsieur [G] [R]

Elisant domicile au cabinet de Me Arnaud GUYONNET

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentés par Me Arnaud GUYONNET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Ayant pour avocat plaidant Me Jean CASTELAIN de la SCP GRANRUT Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0014

INTIMES

SELAS [J] [F] [H] [X]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Monsieur [B] [J]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Madame [O] [H]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Monsieur [Y] [F]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentés et plaidant par Me Francis TEITGEN de la SELARL TEITGEN & VIOTTOLO, avocat au barreau de PARIS, toque : R011

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Avril 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Christian HOURS, Président de chambre

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère, chargée du rapport

Mme Anne de LACAUSSADE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Christian HOURS, Président de chambre et par Lydie SUEUR, Greffière présent lors du prononcé.

*****

A la suite de dissensions, MM.[J] et [F] ainsi que Mme [H] ont quitté au 30 juin 2015 la selas [E] dont ils étaient associés. Un protocole destiné à régler les conséquences de ce retrait a été conclu le 5 octobre 2015. Un accord de co-existence des retrayants dans les locaux de la selas [E] jusqu'au 31 décembre suivant, a également été signé le même jour.

Après l'échec d'une tentative de conciliation sollicitée le 10 janvier 2017, la selas [E] ainsi que ses deux associés, MM. [U] et [R], ont demandé au bâtonnier la condamnation des trois retrayants et de la structure qu'ils ont créée, la selas [J], [F], [H],[V] ( dite [J] [F]), à des dommages-intérêts en raison de détournements de facturation et du non respect du protocole du 5 octobre 2015.

Par une décision du 25 octobre 2017, le bâtonnier a :

- rejeté la fin de non recevoir soulevée par les défendeurs,

- dit recevables les demandes indemnitaires des demandeurs,

- rejeté les demandes indemnitaires des demandeurs fondées sur le champ des diligences réalisées par les défendeurs et devant ou non être facturées à la date de leur retrait comme sur la rémunération afférente qui aurait alors pu être conservée en partie par la selas [E],

- jugé les défendeurs redevables avec solidarité conventionnelle de la somme de 72 850, 50€ à l'égard de la selas [E] au titre de leur engagement souscrit à l'article 6 (i) du protocole d'accord transactionnel ( quote-part de la contre-garantie du prêt consenti à la filiale de Singapour de la selas [E] ); les y a condamnés au paiement en tant que de besoin,

- rejeté la demande des demandeurs en réparation de leur préjudice moral,

- constaté que les demandeurs reconnaissent être débiteurs des sommes suivantes:

er février 2016 réglée à la selas [E] : 8 172, 30€,

- constaté que les défendeurs reconnaissent être débiteurs des sommes suivantes :

-jugé que la somme totale de 49 813 € est due par la selas [E] au titre des cotisations ordinales et sociales des associés retrayants appelées au mois de septembre 2015,

- en conséquence, par compensation avec les sommes susvisées, condamné en tant que de besoin la selas [E] à payer à la selas [J] [F] la somme de 19 974,20 €,

- rejeté la demande reconventionnelle des défendeurs en réparation de leur préjudice moral,

- dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires.

La selas [E] et MM. [U] et [R] ont formé appel de cette décision.

Dans leurs écritures dites n°2 déposées et soutenues oralement à l'audience, la selas [E] et MM. [U] et [R] demandent à la cour :

- d'infirmer la décision du bâtonnier sauf en ce qu'elle a débouté les défendeurs de leur fin de non-recevoir, constaté qu'ils se reconnaissaient débiteurs de la somme totale de

46 419,97 €, compensé cette somme avec les sommes dues par la selas [E], débouté la selas [J] [F] et MM.[J] et [F] et Mme [H] de leur demande en réparation du préjudice moral,

en conséquence,

- à titre préliminaire, écarter des débats les pièces 27 et 28 comme violant la confidentialité attachée de plein droit aux médiations,

- à titre principal, de condamner MM.[J] et [F] et Mme [H] in solidum avec la selas [J] [F] à payer à la selas [E] une somme de 588 012, 90€ à titre de dommages-intérêts à raison des détournements frauduleux de facturation,

condamner MM.[J] et [F] et Mme [H] à payer à la selas [E] et MM. [U] et [R] la somme de 100 000 € à titre de dommages-intérêts complémentaires,

condamner solidairement MM.[J] et [F] et Mme [H] à payer à la selas [E] la somme de 212 960,79 € conformément à l'article 6 du protocole transactionnel,

condamner MM.[J] et [F], Mme [H] in solidum avec la selas [J] [F] à payer à la selas [E] la somme de 373 745,58 € au titre des frais et coûts engagés par celle-ci pour la défense de ses intérêts,

- en tout état de cause, débouter MM.[J] et [F] et Mme [H] et la selas [J] [F] de toutes leurs demandes, fins et conclusions et condamner MM.[J] et [F] et Mme [H] in solidum avec la selas [J] [F] à payer à la selas [E] et MM. [U] et [R] la somme de 110 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens.

Dans leurs écritures dites n°2 déposées et soutenues oralement à l'audience, la selas [J] [F], MM.[J] et [F] et Mme [H] demandent à la cour de :

- confirmer la décision du bâtonnier en ce qu'elle a rejeté les demandes indemnitaires des appelants fondées sur le champ des diligences réalisées par MM.[J] et [F] et Mme [H] et en réparation de leur préjudice moral, constaté que la selas [E], MM. [U] et [R] se reconnaissent débiteurs d'une somme de 16 581, 17 € à l'égard de MM.[J] et [F] et Mme [H] et de la selas [J] [F], jugé que la somme totale de 49 813 € est due par la selas [E] au titre des cotisations ordinales appelées en septembre 2015 et condamné la selas [E] au paiement de la somme nette résultant de la compensation entre cette somme et celles dues par MM.[J] et [F] et Mme [H] et la selas [J] [F],

- infirmer la décision du bâtonnier en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir qu'ils ont soulevé et a déclaré recevables les demandes indemnitaires de la selas [E] et de MM. [U] et [R], jugé MM.[J] et [F] et Mme [H] et la selas [J] [F] redevables avec solidarité conventionnelle, de la somme de 72 850, 50€ à l'égard de la selas [E] au titre de l'engagement souscrit à l'article 6(i) du protocole et les a condamnés au paiement de cette somme en tant que de besoin, a rejeté leur demande reconventionnelle en réparation de leur préjudice moral, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 ne leur faveur,

en conséquence,

- à titre principal, juger irrecevable la demande principale de la selas [E] et de MM. [U] et [R] portant sur le prétendu détournement de facturation, en raison de l'autorité de la chose jugée qui s'attache au protocole transactionnel et de débouter la selas [E] et MM. [U] et [R] de leur demande à ce titre,

- à titre subsidiaire, juger que ce protocole n'interdisait pas à MM.[J] et [F] et Mme [H] de facturer postérieurement à sa conclusion des diligences antérieures au 30 juin 2015 demeurant non facturées par la selas [E], et de débouter les appelants de leur demande à ce titre,

- à titre très subsidiaire, juger qu'ils pouvaient néanmoins facturer toutes les diligences antérieures au 30 juin 2015 qui n'étaient pas facturables à cette date, de juger conformément à ce qui précède et en tout état de cause, que

- en tout état de cause, de juger les appelants mal-fondés en toutes leurs autres demandes, de les en débouter, de les condamner à payer à la selas [J] [F] la somme de

18 736,32 € au titre du solde des sommes restant dues en exécution du protocole et de condamner les mêmes chacun à verser à MM.[J] et [F] et Mme [H] et la selas [J] [F] chacun la somme de 150 000 € en réparation de son préjudice moral et de condamner les mêmes chacun à verser aux intimés la somme de 150 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

La selas [E] et MM. [U] et [R] exposent que le protocole du 5 octobre 2015 stipulait que l'équipe sociale (MM.[J] et [F] et Mme [H]) devait avoir facturé l'ensemble des diligences facturables aux clients selon les mêmes termes et modalités que par le passé et que chacun des associés sortants attestait sur l'honneur que toutes les diligences facturables par lui et son équipe au 30 juin 2015 ou en cours au 30 juin 2015 avaient été facturés par lui au 30 juin 2015 ou prises en compte. Ils soutiennent qu'en violation de cet engagement, MM.[J] et [F] et Mme [H] ont détourné au profit de la selas [J] [F] près de 600 000 € HT de facturation de diligences de la selas [E] antérieures au 30 juin 2015 ainsi qu'il ressort de procès-verbaux de constats d'huissier de justice autorisés par des ordonnances rendues sur requête sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.

La selas [E], MM. [U] et [R] s'opposent tout d'abord à la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée du protocole transactionnel en faisant valoir que leurs demandes se rapportent à son exécution ainsi que l'a retenu la décision du bâtonnier dont ils demandent confirmation sur ce point.

Ils font valoir ensuite que les pièces 27 et 28 produites devant le bâtonnier ainsi que devant la cour sont couvertes par la confidentialité de la médiation conformément à l'article 21-3 de la loi 95-125 du 8 février 1995, s'agissant de mails échangés avec le médiateur qui avait été désigné par le bâtonnier.

Sur le fond, ils soutiennent qu'au 30 juin 2015, le montant des diligences non facturées par les retrayants s'élevait à un total de 637 252 € HT et qu'une somme totale de 490 736,10€ a ensuite été facturée par la selas [J] [F]. Or, ils font valoir que les retrayants avaient affirmé avoir facturé tout ce qui pouvait l'être et qu'ils ont ainsi attesté sur l'honneur que les diligences non facturées au 30 juin 2015 étaient non facturables. Ils expliquent que les diligences entrées dans le logiciel ne sont pas nécessairement facturables, qu'au 30 juin 2015, la selas [E] n'était pas capable de distinguer ce qui était facturable, ce qui le deviendrait en tout ou en partie et ce qui ne l'était pas et que l'attestation sur l'honneur de chacun des retrayants avait pour objet d'éviter les difficultés de compte.

La selas [E] et MM. [U] et [R] soutiennent que le bâtonnier a distingué à tort les diligences facturables qui devaient l'être au 30 juin et les encours à cette date qui seraient ultérieurement facturables dans la nouvelle structure des retrayants. Ils énoncent le principe selon lequel toutes les prestations effectuées par un avocat et son équipe doivent être facturées au sein de la structure dans laquelle il est associé à l'époque où elles ont été réalisées et que s'il avait été dérogé à ce principe, cela aurait été expressément mentionné dans le protocole et le montant des diligences en cours aurait été pris en considération dans la détermination de l'indemnité transactionnelle qui était due aux intimés. Ils déclarent qu'à aucun moment, les diligences en cours à hauteur de 637 252 € HT n'ont été prises en compte et qu'une annexe des encours aurait sinon due être établie.

Les appelants énumèrent ensuite les montants détournés suivant différents procédés :

- la somme de 117 239,70 € HT pour des diligences datées d'avant le 30 juin 2015,

- la somme de 159 500,46 € HT pour des diligences antérieures au 30 juin 2015 mais postdatées ou dépourvues de dates,

- la somme de 132 060,60 € HT pour des diligences antérieures au 30 juin faisant l'objet de factures de provisions ou forfaits,

- la somme de 81 935,34 € HT qui représente des diligences non facturées au 30 juin 2015 pour un montant anormalement élevé mais pour lesquelles il n'a pu être établi de lien avec des factures de la selas [J] [F],

- la somme de 97 276, 80€ HT enregistrée en préfacturation dans la comptabilité de la selas [E] et pour laquelle aucune facture n'a pu être retrouvée dans la selas [J] [F],

soit un total de 588 012,90 € HT.

La selas [E] et MM. [U] et [R] réclament donc le montant de cette somme à titre de dommages-intérêts en réparation de la perte financière subie, faisant valoir que les intimés ne peuvent se prévaloir du protocole transactionnel qu'ils ont violé, pour voir diminuer ce montant. Ils réclament une somme complémentaire de 100 000 € en réparation des préjudices résultant de la mise en péril de la situation financière de la société, du harcèlement et des injures proférées contre la secrétaire générale et du comportement de tiers proches des intimés.

Les intimés exposent qu'en raison du conflit les opposant à M.[U] et des incertitudes sur le sort du cabinet en 2015, ils ont continué à inscrire leurs diligences dans le logiciel de facturation mais ne les ont plus facturées qu'à hauteur des coûts qu'engendraient le fonctionnement de leur équipe et des besoins de trésorerie. Ils font valoir que selon l'accord auquel ils sont parvenus, la selas [E] devait bénéficier des honoraires liés aux diligences qu'ils avaient accomplies à hauteur des charges qu'elle supportait mais que la marge bénéficiaire devait leur revenir afin de leur permettre de créer leur nouvelle structure. Ils en veulent pour preuve que l'indemnité transactionnelle qui leur était due, devait être payée de façon échelonnée au fur et à mesure des encaissements provenant de leurs diligences, sans qu'aucune date limite ne soit stipulée mais les sortants étant garants de l'absence d'encaissement. Ils ajoutent que pour permettre à leur nouvelle structure de démarrer son activité, il avait été convenu qu'ils devaient bénéficier de la marge bénéficiaire dégagée sur les diligences non encore facturées. Ils soutiennent que les diligences antérieures au 30 juin 2015 mais non facturées à la date du protocole étaient connues et devaient être facturées ultérieurement par la selas [J] [F]. Ils rappellent qu'ils ont accepté de quitter la selas [E] que M.[J] avait créée avec M.[U], en laissant le nom du cabinet et que celui-ci ainsi que M.[R] ont nécessairement accepté qu'une partie des diligences soit facturée au nom de la nouvelle structure, faute de quoi aucun accord n'aurait été possible.

Les intimés s'opposent tout d'abord au retrait des pièces 27 et 28 constituées d'une demande d'avis adressée au médiateur sur deux points du protocole ainsi que de la réponse de ce dernier, en expliquant que conciliation et procédure contentieuse sont réputées être menées devant le bâtonnier et que les pièces communiquées pendant la phase de conciliation sont réputées être connues de tous ceux qui sont amenées à en connaître en 1ère instance avant même leur communication officielle.

A titre principal, ils concluent à l'irrecevabilité des demandes de réparation des appelants tendant à remettre l'autorité de la chose jugée du protocole par lequel les parties ont déclaré avoir réglé tous les comptes sans exception ni réserve pouvant exister entre eux au titre de leurs anciennes relations d'associé et de leur séparation. Ils estiment que les demandes ne visent pas à l'exécution du protocole mais posent des questions d'interprétation de l'objet et de la portée du protocole.

Ils font valoir que les attestations sur l'honneur ne peuvent être qualifiées d'engagement et avaient pour objet de clore toutes les discussions portant sur les modalités de facturation des diligences antérieures au 30 juin 2015, chacun se satisfaisant de la déclaration sur l'honneur des autres et s'interdisant d'en remettre en cause l'exactitude et la sincérité. Ils en concluent que la transaction a mis fin au litige entre les parties notamment pour toutes les questions relatives à la facturation et que les demandes s'y rapportant sont irrecevables car elles visent à remettre en cause l'extinction du litige par la transaction en obtenant une indemnité fondée sur l'encaissement par la selas [J] [F] de factures émises postérieurement aux accords.

A titre subsidiaire, les intimés concluent au mal-fondé des prétentions de la selas [E] et de MM. [U] et [R]. Ils énoncent les concessions que chacun a consenties pour parvenir à une solution et relèvent que l'accord ne mentionne pas qu'ils s'abstiendront de toute facturation pour les diligences antérieures au 30 juin 2015. Ils font valoir que le coût de fonctionnement de leur équipe avait déjà été couvert par les factures déjà émises. Ils ajoutent que les diligences réalisées avant le 30 juin 2015 ne pouvaient pas toutes être considérées comme facturables à cette date. Ils relèvent que si toutes ces diligences avaient été facturées par la selas [E], elles auraient augmenté d'autant le montant des impayés et donc le montant garanti par MM.[J] et [F] et Mme [H] mais aussi l'indemnité transactionnelle qui leur était due.

A titre très subsidiaire, les intimés critiquent la demande à hauteur de 97 276,80 € correspondant à des diligences pour lesquelles aucune facture n'a été émise. Ils expliquent que la somme de 81 935,44 € n'a pas été facturée par la selas [J] [F] car non facturable. S'agissant de la somme de 132 060, 60€, correspondant à des provisions ou des forfaits, sans mention de diligences, ils font valoir qu'elle se rapporte pour l'essentiel à des diligences qui n'étaient pas encore effectuées au 30 juin 2015 et qui, en tous les cas, n'étaient pas facturables à cette date.

S'agissant de la somme restante s'élevant à 276 740,16 €, ils contestent les accusations de falsification des dates émises pour partie des factures concernées. Ils font valoir qu'une examen contradictoire dossier par dossier serait nécessaire et qu'enfin les appelants ne pourraient prétendre qu'à 55 % de cette somme soit 152 207,08 €.

1 - Sur le retrait des pièces 27 et 28 de MM.[J] et [F] et de Mme [H] :

La pièce 27 est un mail de M.[J] du 16 novembre 2015 adressé à M. [I] ainsi qu'à l'ensemble des protagonistes de l'affaire soulevant deux difficultés d'application du protocole du 5 octobre 2015 et la pièce 28 est une réponse de M.[I] adressée uniquement aux conseils, le 26 novembre 2015.

Il n'est pas contesté que M.[I] qui intitule son mail 'médiation selas [E]' est intervenu dans un processus structuré par lequel les parties tentent de parvenir à un accord et qu'en l'espèce ce processus a effectivement abouti au protocole du 5 octobre 2015.

L'article 21-3 de la loi du 8 février 1995 dispose que sauf accord contraire des parties, la médiation est soumise au principe de confidentialité et les constatations du médiateur et les déclarations recueillies au cours de la médiation ne peuvent être divulguées aux tiers ni invoquées ou produites dans le cadre d'une instance judiciaire ou arbitrale sans l'accord des parties ; l'article 21-3 prévoit une exception lorsque la révélation de l'existence ou la divulgation du contenu de l'accord issu de la médiation est nécessaire pour sa mise en oeuvre ou son exécution.

Dans sa réponse du 26 novembre 2015, M.[I] donne son interprétation de deux points du protocole (cotisations sociales et filiale selas CVML de Singapour) dont l'exécution donne lieu à difficulté selon M.[J].

Ce mail ainsi que celui de M. [J] portent sur des problèmes d'exécution et si M. [I] déclare se reporter à ses notes et des tableurs précédemment échangés, il n'en révèle pas le contenu.

Aussi, il y a lieu de considérer que la production de ces deux pièces écrites après la signature du protocole d'accord et avant que la phase de concliiation prévue par l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 ait commencé, ne constitue pas une violation du principe de confidentialité et la décision du bâtonnier sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande tendant à les voir écartées.

2 - Sur l'autorité de la chose jugée attachée au protocole :

La selas [E] et MM. [U] et [R] font valoir que leurs demandes sont relatives à des difficultés d'exécution et qu'à ce titre, elles ne portent pas atteinte à l'autorité du protocole alors que de leur côté, MM.[J] et [F] et Mme [H] et la selas [J] [F] soutiennent que ces demandes visent en réalité à revenir sur l'accord conclu en en remettant en cause l'équilibre.

Pour trancher entre ces deux positions, il est nécessaire au préalable que la cour procède à une interprétation des clauses du protocole fondant les prétentions de la selas [E] afin de déterminer si celles-ci peuvent ou non être considérées comme une demande d'exécution d'une obligation de la partie adverse.

La difficulté soulevée porte sur la facturation des diligences accomplies par les retrayants alors qu'ils faisaient encore partie de la Selas [E] mais qui ont fait l'objet d'une facturation ultérieure par la nouvelle structure créée par ceux-ci.

L'article 2.1 du protocole stipule que les parties conviennent que la cessation de la participation de l'équipe sociale prendra effet au 30 juin 2015, date à laquelle elle doit avoir facturé l'ensemble des diligences facturables aux clients selon les mêmes termes et modalités que par le passé. En outre :

' chacun des associés sortants atteste sur l'honneur que toutes les diligences facturables par lui et son équipe au 30 juin 2015 ou en cours au 30 juin 2015 ont été facturées par lui au 30 juin 2015 ou prises en compte.' Les associés restants effectuaient la même déclaration sur l'honneur, ajoutant qu'ils n'avaient retenu aucuns travaux qui auraient dû être facturés au 30 juin au regard des règles comptables.

Le protocole prévoit en outre que les partants étaient indemnisés de leur préjudice moral par une indemnité globale de 235 000 € payable par la Selas [E] au fur et à mesure des encaissements des factures émises à son nom par les sortants, lesquels se portaient garants des impayés au 29 février 2016, la liste des factures en cause figurant en annexe 7 du protocole. Les modalités de calcul de l'indemnité de 235 000€ prévue par le protocole ne sont pas explicitées par celui-ci mais les sortants déclarent sans être contredits par la selas [E] et ses associés restants qu'elle représente 45% des factures établies au 30 juin 2015 au nom de la selas [E] par les associés sortants.

'Toutes les diligences facturables par lui et son équipe au 30 juin 2015 ou en cours au 30 juin 2015 ont été facturées par lui au 30 juin 2015 ou prises en compte' doit donner lieu à interprétation selon les principes énoncés par le code civil alors que les parties tirent de cette disposition des conséquences opposées.

Comme l'a justement relevé le bâtonnier, cette disposition distingue entre les diligences facturables et celles qui sont en cours c'est à dire les diligences qui étaient réalisées ou en cours de réalisation mais ne pouvaient être considérées comme facturables, situation habituelle pour les avocats qui ne facturent pas les diligences lorsque le lien avec son affaire n'est pas perceptible par le client ou qui les facturent lorsque le client acquiert une certaine visibilité sur le travail réalisé.

Cette disposition prévoit que ces diligences sont 'prises en compte'. En l'absence de toute autre précision, il sera admis, comme l'a retenu le bâtonnier, que ces termes signifient que l'existence de ces diligences a été prise en compte afin d'assurer l'équilibre général des conditions de la séparation auxquelles ont adhéré les parties en signant le protocole et que l'absence de facturation au nom de la selas [E] au 30 juin 2015 des 'en cours' constitue une des concessions de cette dernière au profit des sortants.

Ainsi que l'explicite le bâtonnier, cette concession a pour contrepartie le fait que MM.[J] et [F] et Mme [H] acceptent d'être les sortants alors même que M. [J] (qui constitue le V de selas [E]) est un associé fondateur, qu'ils renoncent à leur quote-part sur les réserves constituées par la société, qu'ils acceptent de contribuer aux charges exceptionnelles et qu'ils prennent le risque de créer une nouvelle structure tandis que la selas [E] conserve ses signes distinctifs.

De son côté, la selas [E] rachète les parts des sortants et leur verse une indemnité de 235 000 € à charge pour eux de se la répartir, indemnité dont ils financent eux-mêmes le coût puisque le protocole énonce qu'elle sera payée de façon échelonnée selon l'encaissement des factures qu'ils ont émises et dont ils sont garants du paiement. Cette indemnité représentant 45 % des factures émises, la selas [E] en a, quant à elle, conservé 55 % soit environ 300 000 € afin de couvrir les frais de fonctionnement engendrés par l'activité de l'équipe sociale pendant les six premiers mois de l'année 2015.

La Selas [E] dispose d'un logiciel CEGID dans lequel chaque avocat saisit ses temps de travail sur les dossiers et elle avait également à sa disposition la pré-facturation-papier de l'équipe sociale, ce pour les années 2012 à 2015. Le bâtonnier a ainsi justement considéré qu'elle disposait des moyens lui permettant d'apprécier les 'en cours'. La facturation finale des diligences ' en cours' qui est élaborée par l'associé selon une appréciation complexe d'un ensemble de circonstances, ne lui était pas encore connue. Néanmoins les parties au protocole s'étaient engagées à ne pas modifier leur pratique antérieure de sorte que la selas [E] pouvait évaluer de façon satisfaisante le montant facturable desdites diligences.

Ainsi il y a lieu de confirmer l'interprétation que le bâtonnier a donné des dispositions du protocole transactionnel et les demandes de la selas [E] ainsi que de MM. [U] et [R] relatives à un détournement de facturation visent en réalité à remettre en cause l'équilibre des concessions consenties par les parties et l'autorité de la chose jugée que la transaction a acquise. Celles-ci doivent donc être déclarées irrecevables.

Les appelants seront en outre déboutés de leur demande en dommages-intérêts formée contre MM.[J] et [F] et Mme [H] pour un montant de 100 000 €, qui est dépourvue de tout fondement dès lors que celle sur les détournements de facturation est irrecevable.

3 - Sur les autres demandes de la selas [E] et de MM.[J] et [F] et Mme [H] :

- les charges exceptionnelles tenant à la filiale de Singapour :

La selas [E] expose qu'elle s'est portée garante à première demande de sa filiale singapourienne pour le remboursement d'une ouverture de crédit consentie par la Société générale et que le protocole du 5 octobre 2015 prévoyait que les sortants participeraient aux charges générées par cette garantie à hauteur de 45 %. Elle déclare qu'elle a dû payer à la Société générale la somme de 324 490 € tout en expliquant les différentes étapes du conflit l'opposant au responsable de cette structure, M. [G] [T]. Elle réclame ainsi la somme payée à la Société générale et les frais engagés pour en obtenir le remboursement par M. [T], la perte de valeur de la filiale dans les comptes de la Selas [E], les coûts supportés du fait du non-paiement par M.[T] des sommes dues en exécution d'accords conclus en 2013 et divers coûts supportés au profit de la filiale. Elle déclare qu'elle a tenu informés les associés sortants qui ne sont jamais intervenus dans ce dossier. Elle conteste la décision du bâtonnier en ce qu'elle n'a retenu comme charge visée par l'article 65(i) du protocole que la somme payée à la Société générale, en faisant valoir que cet article visait toutes les charges exceptionnelles liées à la filiale singapourienne, en ce inclus tous les frais et honoraires, coûts, pertes engagés ou supportés. Elle demande donc paiement de la somme de 212 960,79 €.

MM.[J] et [F] et Mme [H] font valoir que les délais et procédure prévus par l'article 6(i) du protocole n'ont pas été respectés. Ils concluent au rejet de la totalité de cette demande, faute pour la selas [E] d'avoir respecté les obligations d'information et de consultation du protocole. Ils ajoutent qu'il n'est pas démontré que les frais réclamés sont en lien avec la garantie à première demande.

L'article 6(i) du protocole prévoit qu'en cas de mise en oeuvre de la garantie à première demande consentie à la Société générale, 'le montant des coûts exposés par la selas [E] dans ce cadre en ce inclus tous frais et honoraires, coûts, pertes engagés ou supportés, sera comparé avec la somme de 162 500€ et la différence sera payée par la ou les parties qui en sera(ont) débitrices aux autres parties. Dans le cas ou les sortants seraient débiteurs ils supporteront la différence de manière solidaire dans la limite de 45 %'. Une mention manuscrite non contestée précise :'dès lors que Selas [E] aura à chaque étape de la gestion du différend informé les sortants et sollicité leur avis sur sa stratégie'.

Il ressort des pièces produites par la selas [E] qu'elle a été amenée à régler à la Société générale la somme de 324 390, 08€ le 16 juin 2016, qu'elle a adressé divers mails aux sortants afin de les tenir informés de la procédure à l'égard de M.[T], étant précisé qu'il n'existait pas de contentieux avec la Société générale, que cette communication était rendue difficile par le conflit opposant les anciens associés et au surplus un climat de suspicion de collusion entre les sortants et M.[T] mais que les termes du protocole ont néanmoins été respectés, les informations reçues permettant aux sortants de comprendre la stratégie de la selas [E] et de proposer éventuellement des solutions, le protocole n'exigeant pas un accord.

Dans ces conditions la selas [E] est bien fondée à réclamer à MM.[J] et [F] et Mme [H] la part leur incombant des charges et frais supportés du fait de la garantie à première demande.

Cependant, les charges et frais qui concernent la filiale de Singapour mais qui ne peuvent pas être rattachés spécifiquement à la garantie à première demande doivent être écartés car non visés par l'article 6 du protocole. Doivent également être écartés les pertes et les coûts liés aux difficultés de la filiale singapourienne qui n'ont pas été prévus par le protocole.

Ainsi la décision du bâtonnier doit être confirmée en ce qu'elle a mis à la charge de MM.[J] et [F] et Mme [H] la somme de 72 850,50 €.

- les frais et coût supportés par la selas [E] pour la défense de ses intérêts :

La selas [E] réclame à ce titre la somme de 376 745,58 € en raison des frais engagés et des charges supportés pour défendre ses intérêts dans les procédures ayant suivi la signature du protocole qui était censée mettre fin au litige opposant MM [U] et [R] aux associés sortants. Elle inclut dans ses charges la somme de 180 000 € TTC pour le temps consacré par MM [U] et [R] au traitement de ce contentieux dont elle impute la responsabilité à MM.[J] et [F] et Mme [H] pour avoir violé les dispositions du protocole.

Les intimés répliquent que ces frais mentionnés TTC incombent à la selas [E] et qu'il lui appartenait d'en réclamer éventuellement la prise en charge par des demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Il y a lieu de constater que les frais d'avocat, huissier de justice et intervenant informatique liés à la défense des intérêts des appelants leur incombent et qu'ils ne peuvent être mis à la charge de la selas [J] [F] et de MM.[J] et [F] et Mme [H] que dans le cadre de condamnations sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile qu'il incombe aux intéressés de formuler.

S'agissant du temps consacré par MM. [U] et [R] à ce contentieux, il a été jugé ci-dessus que la réclamation fondée sur un détournement de facturation contrevenait au protocole signé entre les parties et la selas [E] doit donc en supporter pleinement la charge. La décision du bâtonnier sur ce point sera ainsi également confirmée.

Enfin il sera constaté que MM.[J] et [F] et Mme [H] ne formulent pas de contestation concernant la somme de 47 656, 98€ incluant la somme de 1 237,01 € réclamée au titre du bail [O], dont ils se reconnaissent débiteurs.

4 - Sur les demandes de MM.[J] et [F] et Mme [H] :

- sur les cotisations de septembre 2015 :

Ils réclament le paiement des charges sociales du mois de septembre 2015 qui ont été réclamées au mois d'octobre suivant.

La selas [E] n'expose aucun moyen pour contester cette demande bien qu'elle sollicite l'infirmation de la décision du bâtonnier sur ce point.

La décision du bâtonnier qui a retenu que la somme de 49 813 € n'était pas contestée dans son montant, que le protocole prévoyait un 'cut off' au 30 septembre 2015 et que les charges en cause ont été appelées au cours du mois d'octobre mais se rapportaient indéniablement à la période d'activité des retrayants au cours du 3ème trimestre doit être confirmée.

- sur la demande en dommages-intérêts :

MM.[J] et [F] et Mme [H] et la selas réclament chacun la somme de 150 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral résultant pour eux de la guerilla que la selas [E], MM.[J] et [F] et Mme [H] ont continué à mener à leur encontre après la signature du protocole transactionnel du 5 octobre 2015. Ils font valoir que ce comportement a été source de désordres multiples avec les clients, leurs confrères, les collaborateurs et leurs relations d'affaires. Ils relèvent que leurs adversaires ont fait pratiquer sur le compte bancaire de la selas [J] [F] une saisie-conservatoire pour un montant de 750 000 €, ce qui a obéré la trésorerie de la structure nouvelle et qu' ils en ont donné mainlevée six mois plus tard, après la décision du bâtonnier. Ils considèrent que le procès présente un carctère abusif

Les appelants répliquent que la selas [J] [F] et MM.[J] et [F] et Mme [H] invoquent le caractère abusif du procès mais qu'ils n'ont commis aucun abus du droit d'ester en justice.

Le protocole d'accord étant sujet à interprétation, l'action engagée par la selas [E] et MM; [U] et [R] ne peut être considérée comme abusive et il y a donc lieu de débouter la selas [J] [F] et MM.[J] et [F] et Mme [H] de leur demande en dommages-intérêts uniquement fondée sur l'existence d'un préjudice moral.

Il y a lieu de condamner la selas [E], MM [U] et [R], chacun, à payer à la selas [J] [F], MM.[J] et [F] et Mme [H], ensemble, la somme de

15 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Confirme la décision du bâtonnier du 25 octobre 2017, sauf en ce qu'elle a déclaré recevable la demande fondée sur un détournement de facturation,

Statuant à nouveau dans cette limite :

Déclare irrecevable la demande en dommages-intérêts de la selas [E], fondée sur des détournements de facturation,

Y ajoutant,

Condamne la selas [E], MM. [U] et [R] chacun à payer à la selas [J] [F],MM.[J] et [F] et Mme [H] ensemble la somme de 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la selas [E], MM. [U] et [R] aux dépens.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 18/02060
Date de la décision : 26/06/2019

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°18/02060 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-26;18.02060 ?
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