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26/06/2019 | FRANCE | N°17/20219

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 26 juin 2019, 17/20219


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 26 JUIN 2019



(n° 279 , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/20219 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4MFH



Décision déférée à la Cour : Décision du 25 Septembre 2017 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS





APPELANT

Monsieur [N] [N]

[Adresse 1]

[Localité 1]



Rep

résenté et plaidant par Me Pierre CHAUFOUR de l'AARPI AARPI CCVH, avocat au barreau de PARIS, toque : R109





INTIMEE

Madame [O] [M]

[Adresse 2]

[Localité 2]



Comparante



Assistée de...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 26 JUIN 2019

(n° 279 , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/20219 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4MFH

Décision déférée à la Cour : Décision du 25 Septembre 2017 - Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS

APPELANT

Monsieur [N] [N]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté et plaidant par Me Pierre CHAUFOUR de l'AARPI AARPI CCVH, avocat au barreau de PARIS, toque : R109

INTIMEE

Madame [O] [M]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Comparante

Assistée de Me Juliette SCHWEBLIN de la SELAS LIBRATO AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0966

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 Avril 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Christian HOURS, Président de chambre

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère, chargée du rapport

Mme Anne DE LACAUSSADE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Christian HOURS, Président de chambre et par Lydie SUEUR, Greffière présent lors du prononcé.

M.[N] et Mme [M] ont créé l'AARPI Versus& Versus spécialisée en droit de la propriété industrielle en juillet 2008, avec un troisième avocat qui s'est retiré au mois de juillet 2009. M. [N] a été le gérant de l'association de sa création jusqu'au 22 juillet 2015. Il a décidé de se retirer au cours de cette année. Son retrait a entraîné la dissolution de l'AARPI à effet au 31 décembre suivant, selon une délibération de l'assemblée générale du 23 juin 2016.

Un différend étant né entre les deux anciens membres de l'association et après l'échec d'une tentative de conciliation, le bâtonnier a rendu une sentence le 25 septembre 2017 aux termes de laquelle il a :

- débouté M.[N] de son incident de faux relatif aux pièces 19 et 20 versées aux débats par Mme [M],

- constaté que Mme [M] n'a pas violé le pacte social de l'AARPI et en conséquence débouté M.[N] de sa demande de ce chef,

- constaté que l'expertise demandée par M.[N] est inutile dès lors que les comptes versés aux débats et non utilement contestés permettent de déterminer la situation liquidative de l'AARPI à la date du 31 décembre 2015 et l'a débouté en conséquence de sa demande de ce chef,

- débouté M.[N] de ses autres demandes,

- constaté que la liquidation de l'AARPI se solde par un mali de liquidation de 37 250 € au 31 décembre 2015 et dit que cette somme sera partagée en parts égales entre Mme [M] et M.[N],

- en tant que de besoin, condamné M.[N] à régler à Mme [M] la somme de

18 625 € avec intérêts au taux légal à compter du jour du paiement sur justification par celle-ci du règlement de l'intégralité de cette somme,

- donné acte à Mme [M] qu'elle se réserve d'exercer toute action en responsabilité contre M.[N] pour le cas où sa propre responsabilité serait recherchée du fait du contrat de travail conclu le 1er juin 2013 avec Mme [P],

- débouté Mme [M] de toutes ses autres demandes,

- condamné M.[N] à régler à Mme [M] la somme de 16 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M.[N] a formé un recours contre cette décision le 28 septembre 2017.

Dans ses écritures déposées à l'audience et soutenues oralement, il demande à la cour de :

- dire que Mme [M] a violé le pacte social en décidant d'une répartition des bénéfices de l'AARPI contraire aux statuts, ce de manière unilatérale sans décision collective,

- en conséquence, la condamner à lui payer la somme de 22 893 € net à valoir sur la quote-part dans le bénéfice réalisé par l'AARPI au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2015 sauf à parfaire,

- désigner un expert chargé de vérifier la rémunération versée aux associés depuis le 22 juillet 2009 après déduction de l'ensemble des charges et cotisations versées par l'AARPI, établir le montant des charges qu'il a engagées au titre de l'exercice 2015, procéder à une vérification contradictoire des écritures comptables et bancaires, établir le montant du résultat de l'exercice clos le 31 décembre 2015, de déterminer l'éventuel boni de liquidation, donner son avis sur les opérations irrégulièrement traduites dans les comptes sociaux de l'AARPI,

- débouter Mme [M] de toutes ses demandes,

- la condamner à payer la somme de 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens comprenant les frais de l'expertise.

Dans ses écritures déposées à l'audience et soutenues oralement, Mme [M] demande à la cour :

- de confirmer la décision du bâtonnier en ce qu'il a débouté M.[N] de toutes ses demandes, de constater que la demande d'expertise est mal-fondée et de débouter M.[N] de toutes ses demandes, s'il était fait droit à la demande d'expertise, d'en laisser le coût à la charge de M.[N], de débouter M.[N] de sa demande au titre de son droit à une quote-part du boni de liquidation,

- d'infirmer la décision du bâtonnier en ce qu'il l'a déboutée de sa demande en dommages-intérêts, de constater la rupture du pacte social par M.[N] pour déloyauté et tromperie, de le condamner à lui payer la somme de 150 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice financier, ce avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la sentence, de le condamner à la garantir de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre dans le cadre de la procédure Franfinance ainsi qu'au paiement de la somme de 5 160 € à parfaire correspondant aux frais qu'elle a dû engager dans le cadre de cette procédure, de condamner également M.[N] à lui payer la somme de 120 000 € en réparation de son préjudice moral, ce avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la sentence, outre la somme de 50 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens y compris les frais de l'arbitrage.

MOTIFS DE LA DECISION :

M.[N] fait valoir que Mme [M] l'a éloigné de la gestion du cabinet et qu'elle a remis en cause les articles 7 et 14 des statuts qui prévoyaient une répartition des bénéfices de façon égalitaire par part virile, ce principe ne pouvant être modifié que par une décision de l'assemblée générale des membres de l'association. Il soutient que Mme [M], de façon unilatérale, a réparti les bénéfices selon la contribution de chacun des membres. Il ajoute que, contrairement à ce que le bâtonnier a retenu, il n'a pas renoncé à la prise en charge de ses cotisations par l'association et qu'il s'agit d'une décision de Mme [M] qui estimait qu'il ne contribuait pas assez aux résultats de la structure. Il soutient qu'il s'agit d'une violation du pacte social. Il ajoute qu'en sa qualité de liquidatrice amiable de l'AARPI, Mme [M] devait respecter les règles de l'association et ne pouvait exclure de sa mission le paiement de ses charges et cotisations sociales au titre de l'exercice 2015.

S'agissant des comptes de liquidation, M.[N] relève une augmentation très importante de la charge de loyers due au paiement d'un arriéré, avec des incohérences avec d'autres documents. Compte tenu des différences existant entre les différents comptes établis par Mme [M], l'expert-comptable et le projet de liasse fiscale, il sollicite une expertise et se fondant sur le projet de liasse fiscale faisant apparaître un bénéfice au titre de l'exercice 2015 de 45 787 €, il sollicite dès à présent la condamnation personnelle de Mme [M] à lui payer la somme de 22 893 €, l'association étant dissoute.

Par ailleurs, il s'oppose aux demandes reconventionnelles en dommages-intérêts de Mme [M], celles-ci étant fondées sur ses pièces 19 et 20 qui sont des lettres antidatées, qui n'émanent pas de lui et qui ne démontrent pas qu'il aurait continué à travailler pour le cabinet Hirsch pendant qu'il exerçait au sein de l'AARPI.

Mme [M] fait valoir qu'elle n'a pu modifier unilatéralement les rémunérations alors que M.[N] était le gérant de l'association. Elle soutient qu' à compter de 2012 et de l'écart qui se creusait entre leurs contributions respectives aux résultats de la structure, M.[N] a accepté de diminuer sa rémunération en renonçant à la prise en charge par l'AARPI de ses cotisations [U]. Elle ajoute que M.[N] savait que la règle de partage des bénéfices par parts viriles supposait des contributions égales aux bénéfices de l'association. Elle déclare qu'elle n'a repris la gestion de l'AARPI qu'en raison des défaillances de M.[N] et de son désengagement dans tous les domaines de la vie de la structure.

Mme [M] s'oppose à la demande d'expertise alors que M.[N] a laissé la comptabilité dans un grand désordre et que les comptes ont été établis par un expert-comptable. Elle déclare que l'AARPI n'a pas payé les cotisations de M.[N] pour un montant de 2 435 € pour l'année 2015 alors que celui-ci n'a pas communiqué ses appels de charges qu'il a reçus à son domicile . Elle ajoute qu'après son départ, l'AARPI n'était pas tenue de les payer. Elle déclare justifier de l'augmentation de la charge de loyers, elle rappelle les dettes accumulées par l'AARPI alors que M.[N] était gérant et son absence de contribution aux charges de fonctionnement du cabinet. Elle explique que le projet de liasse fiscale pour 2015 ne prenait pas en considération les engagements en cours, de même, elle explique les différences entre les documents qui ne sont pas établis à la même date. Elle rappelle que M.[N] a été gérant jusqu'en juillet 2015 et qu'il ne peut donc demander la vérification des rémunérations depuis 2009. Elle ajoute que pour l'établissement des comptes de liquidation, il ne s'est pas rapproché de l'expert-comptable comme il était incité à le faire. Elle déclare qu'une fois tous les engagements pris en considération, il n'existait pas un boni mais au contraire un mali de liquidation que M.[N] doit supporter à hauteur de sa quote-part. S'il existait un boni, Mme [M] fait valoir que M.[N] ne pourrait y prétendre au regard de sa faible contribution au fonctionnement de la structure.

Reconventionnellement, Mme [M] fait valoir que M.[N] a manqué à son obligation de loyauté en ne contribuant pas aux charges du cabinet, qu'il l'a trompée sur son chiffre d'affaires, s'abstenant de payer les factures de confrères pour les frais engagés et qu'il n'a entrepris aucune démarche pour redresser sa situation. Elle reproche également à M.[N] d'avoir facturé des clients au bénéfice d'autres structures ou à titre personnel. Elle fait aussi état de négligences découvertes après son départ (absence de résiliation d'un contrat de leasing, faux contrat de travail). Elle sollicite des dommages-intérêts au titre de son préjudice financier en tenant compte des charges qu'elle a dû supporter en raison de l'absence de contribution de M.[N] et de la perte de revenus qu'elle a ainsi subie, outre la condamnation de M.[N] à la garantir d'une éventuelle condamnation dans la procédure relative au leasing qu'il avait omis de résilier ainsi qu'à payer des frais qu'elle a d'ores et déjà engagés.

Elle sollicite également l'indemnisation de son préjudice moral résultant de l'atteinte à sa réputation, des actes de concurrence déloyale commis en captant ses compétences. Enfin, elle invoque les répercussions sur sa santé du comportement de son ex associé.

1 - Sur les demandes de M.[N] :

- sur la violation du pacte social par Mme [M] :

Le contrat d'association liant les parties prévoyait un partage des bénéfices par part virile, le principe de la répartition égalitaire étant révisable tous les dix-huit mois.

Ainsi que l'a relevé le bâtonnier, jusqu'en 2014 la quote-part de résultats des deux associés a été identique mais à compter de 2012, l'AARPI n'a plus pris en charge les contributions [U] de M.[N]. S'agissant de l'année 2015, le bâtonnier a relevé que les cotisations maladie, retraite et ordinales ont été acquittées par l'association.

Il convient de constater que M.[N] a été le gérant de l'AARPI de sa création jusqu'au 22 juillet 2015 et qu'à ce titre, il disposait de l'ensemble des informations comptables et financières et pouvait réagir à toute irrégularité qui lui serait apparue dans le paiement de ses charges sociales ou le calcul de sa rémunération. Or, il ne verse aux débats aucune pièce démontrant qu'il ait émis quelque observation ou critique que ce soit pendant cette période.

Ces circonstances amènent à considérer que l'absence de prise en charge de ses cotisations par M.[N] relève de sa seule initiative et la décision du bâtonnier qui a écarté toute violation du pacte social par Mme [M] doit être confirmée.

- sur la demande d'expertise :

M.[N] sollicite la désignation d'un expert chargé de vérifier la rémunération versée aux associés depuis le 22 juillet 2009 après déduction de l'ensemble des charges et cotisations versées par l'AARPI, d'établir le montant des charges qu'il a engagées au titre de l'exercice 2015, de procéder à une vérification contradictoire des écritures comptables et bancaires, d'établir le montant du résultat de l'exercice clos le 31 décembre 2015, de déterminer l'éventuel boni de liquidation, de donner son avis sur les opérations irrégulièrement traduites dans les comptes sociaux de l'AARPI.

M.[N] ayant été le gérant de l'association depuis son origine et ayant eu à ce titre un accès direct aux informations financières et n'ayant émis aucune contestation, ne peut légitimement solliciter une expertise pour les années 2009 à 2014.

S'agissant de l'année 2015 et des comptes de liquidation, le bâtonnier a rappelé que les comptes établis par l'expert-comptable de l'association ont été communiqués à M.[N], que celui-ci n'a pas répondu à l'invitation de venir consulter personnellement les pièces comptables ayant servi à leur établissement, qui ont été mises à sa disposition par l'expert-comptable. M.[N] ne peut pallier sa propre carence en réclamant une mesure d'instruction dont il n'envisage pas de prendre en charge le coût.

Les incohérences que M.[N] relève, trouvent leur explication dans la date des documents en cause et la nécessité d'établir une comptabilité d'engagements et ne sont pas de nature à mettre en cause les comptes établis pour l'année 2015.

La décision du bâtonnier qui a rejeté la demande d'expertise, doit être ainsi confirmée en ce qu'elle a relevé que les comptes de l'association signés par un expert-comptable et accompagnés d'une note explicative détaillant la situation nette de l'association au 31 décembre 2015 étaient suffisants pour déterminer la situation comptable de l'association pour les besoins de sa liquidation.

- sur le paiement d'un boni de liquidation :

M.[N] se fonde sur le projet de liasse fiscale pour 2015 pour réclamer à Mme [M] la somme de 22 893 € au titre de sa part dans le boni de liquidation.

Néanmoins, Mme [M] expose que ce projet de liasse fiscale a été établi en avril 2016 sans la prise en compte des engagements en cours qui ont été comptabilisés à la dissolution de l'association actée en juillet 2016.

Aussi, comme l'a retenu le bâtonnier, les comptes font en réalité apparaître un mali de liquidation et la demande de M.[N] tendant au paiement d'un boni doit être rejetée.

La décision du bâtonnier en ce qu'elle a débouté M.[N] de l'ensemble de ses demandes sera donc confirmée.

2 - Sur les demandes de Mme [M] :

- sur le mali de liquidation :

La note de l'expert-comptable au 31 mai 2017 fait apparaître un mali de liquidation de

37 250 €; conformément aux dispositions du contrat d'association, chaque membre doit supporter la moitié de cette somme et la décision du bâtonnier doit être confirmée sur ce point;

- sur la demande en dommages-intérêts pour préjudice financier :

Mme [M] reproche essentiellement à M.[N] de ne pas avoir contribué de façon égale aux résultats de l'association et de ne pas avoir pris de mesure pour rétablir la situation en cherchant à développer sa clientèle, ce désinvestissement de M.[N] ayant pour conséquence qu'elle a dû supporter les charges du cabinet de façon disproportionnée et subir ainsi une perte de revenus.

Néanmoins le contrat d'association qui fixait un principe de répartition égalitaire des bénéfices permettait d'écarter ce principe par une délibération de l'assemblée générale. Or ainsi que l'a relevé le bâtonnier, Mme [M] n'a pas cherché à obtenir une modification de ce mode de répartition pendant la vie de l'AARPI, ne faisant part de ses griefs à M.[N] qu'à compter du retrait de celui-ci. Elle ne peut obtenir par le biais d'une demande en dommages-intérêts une remise en cause des conditions du contrat qu'elle a conclu.

Par ailleurs, il n'existe aucun élément permettant de retenir que $ ait voulu tromper Mme [M] en annonçant en 2008 un chiffre d'affaires fantaisiste et qu'il ait ensuite failli à ses obligations en ne cherchant pas à pallier la baisse de celui-ci.

S'agissant des pièces 19 et 20 produites par Mme [M] et arguées de faux par M.[N], il y a lieu d'adopter les motifs de la décision du bâtonnier qui a relevé le défaut de concordance entre le contenu de ces lettres et les dates qui y étaient mentionnées et qui, tout en écartant l'incident de faux, leur a dénié tout caractère probant quant à l'existence d'une activité parallèle de M.[N]. Comme l'a également retenu le bâtonnier, les autres pièces produites par Mme [M] (17, 18, 36) à l'appui de ses soupçons ne sont pas décisives alors que l'emploi d'un ancien papier à lettre à l'égard d'une autorité administrative peut résulter d'une simple erreur ou être indifférent s'agissant d'un usage purement interne.

Il ressort néanmoins des pièces produites par Mme [M] qu'au moins dans les derniers temps, M.[N] se montrait négligent dans le suivi de ses comptes au point que certains clients se sont trouvés facturés deux fois ou facturés pour des prestations qui n'avaient pas été fournies (email Secosert et groupe Esia) et qu'il s'est abstenu de régler certains de ses confrères (factures [C] du 11 septembre 2015 et [B] du 12 novembre 2015).

Ces négligences ont contraint Mme [M] à procéder à des remboursements ou des paiements; néanmoins, il ne ressort pas des éléments fournis que ces négligences aient modifié les résultats de l'association. Par ailleurs survenues en 2015 à un moment où l'association disparaissait, les conséquences éventuelles sur la réputation professionnelle de celle -ci ont forcément été limitées.

La dissolution de l'AARPI a fait perdre à Mme [M] le bénéfice des signes distinctifs de celle-ci tels que sa dénomination Versus&versus déposée à titre de marque et le nom de domaine que M.[N] a conservés. Néanmoins, Mme [M] ne produit pas de pièce justifiant des circonstances de leur création et elle ne rapporte pas la preuve d'une captation fautive.

Enfin, Mme [M] invoque la perte importante de chiffre d'affaires qu'elle a subie entre 2015 et 2016 puisque celui-ci est passé de 209 210 € à 76 653 €. Néanmoins cette baisse s'explique par le fait que Mme [M] s'est trouvée en arrêt maladie à compter du 9 mai 2016 et n'a pu reprendre son activité professionnelle à mi-temps qu' à compter du 13 mars 2017. Ainsi cette diminution importante de revenus ne trouve pas directement sa source dans le comportement de M.[N].

La décision du bâtonnier sera donc confirmée en ce qu'elle a débouté Mme [M] de sa demande en dommages-intérêts pour préjudice financier.

- sur la demande relative à Franfinance :

Mme [M] justifie avoir fait l'objet d'une demande en justice ainsi que M.[N] de la part de la société Franfinance en raison d'un contrat de location de matériel de communication conclu en 2010 par M.[N] en sa qualité de gérant de l'AARPI. Il ressort de l'assignation en justice que M.[N] n'a pas répondu à la lettre de mise en demeure de payer les mensualités échues mais qu'il a également omis de restituer le matériel malgré la demande en ce sens de la société Franfinance.

Cependant le bâtonnier a retenu qu'il résultait de la pièce 71 produite par Mme [M] que tant la réclamation de Franfinance que les honoraires engagés pour la défense en justice dans le cadre de ce litige ont été pris en compte dans le mali de liquidation de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de garantie non plus qu'à la demande de paiement des frais formées par Mme [M]. Cette décision doit être confirmée alors qu'au surplus, Mme [M] ne verse pas le jugement aux débats bien qu'il se soit écoulé près de quatre ans depuis la délivrance de l'assignation en justice.

- sur la demande en dommages-intérêts pour préjudice moral :

Il ressort notamment des pièces susvisées ainsi que des réclamations du contrôleur des impôts et de l'URSSAF que M.[N] s'est montré négligent tant dans son activité d'avocat que dans celle de gérant de l'association et que ce désinvestissement a eu des conséquences sur Mme [M] qui s'est trouvée contrainte de pallier ses défaillances, résoudre les difficultés avec les tiers et prendre en charge la liquidation de l'AARPI sous l'égide du bâtonnier, dans un climat devenu conflictuel.

Les certificats médicaux qu'elle produit font état d'une anxiété, d'un stress et d'un surmenage, d'un état anxio-depressif sévère que sa situation professionnelle a nécessairement contribué à alimenter.

Aussi il y a lieu d'admettre que le comportement de M.[N] a créé un préjudice moral à Mme [M] qui sera évalué à la somme de 10 000 € qui produira des intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

En revanche les motifs de la décision du bâtonnier seront repris par la présent arrêt en ce qu'ils ont écarté les griefs tenant à une captation des compétences de Mme [M] et à une concurrence déloyale ainsi qu'une atteinte à sa réputation qui ne sont pas établies.

Enfin il sera alloué à Mme [M] la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Confirme la décision du bâtonnier sauf en ce qu'elle a débouté Mme [M] de sa demande en indemnisation de son préjudice moral,

Statuant à nouveau :

Condamne M.[N] à payer à Mme [M] la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

Y ajoutant :

condamne M.[N] à payer à Mme [M] la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M.[N] aux dépens de l'appel.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 17/20219
Date de la décision : 26/06/2019

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°17/20219 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-26;17.20219 ?
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