Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRET DU 19 JUIN 2019
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/06003 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3FX2
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Mars 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de BOBIGNY - RG n° 13/03933
APPELANTE
Madame [C] [X]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Aurélien WULVERYCK, avocat au barreau de PARIS, toque : C0016
INTIMÉE
SAS EMBRAER AVIATION INTERNATIONAL
[Adresse 2],
[Adresse 2]
Représentée par Me Yvette HEERAMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : R013
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 785 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 mai 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Séverine TECHER, vice-présidente placée , chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Sandra ORUS, Présidente de chambre
Mme Carole CHEGARAY, Conseillère
Mme Séverine TECHER, vice-présidente placée
Greffier, lors des débats : Mme Catherine CHARLES
ARRÊT :
- contradictoire
- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Sandra ORUS, Présidente et par Madame Anouk ESTAVIANNE, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire
RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [C] [X] a été engagée par la SAS Embraer aviation international suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 22 mars 2010, en qualité d'administrateur de service maintenance, agent de maîtrise, coefficient 260.
Par courriel du 2 juillet 2012, puis par lettre du 4 octobre 2012, deux avertissements ont été successivement notifiés à la salariée.
Après avoir été convoquée le 28 janvier 2013 à un entretien préalable devant se tenir le 4 février 2013, Mme [X] a été licenciée pour cause réelle et sérieuse par lettre du 11 février 2013.
Contestant le bien-fondé de son licenciement et estimant ne pas avoir été remplie de l'intégralité de ses droits, Mme [X] a saisi, le 4 juillet 2013, le conseil de prud'hommes de Bobigny qui, par jugement rendu le 21 mars 2017, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a débouté chacune des parties des prétentions soumises et laissé à chacune ses dépens.
Le 20 avril 2017, Mme [X] a interjeté appel du jugement.
Par conclusions transmises le 29 mars 2019 par voie électronique, auxquelles il est expressément fait référence, Mme [X] demande à la cour de :
- infirmer le jugement,
- condamner la société Embraer aviation international à lui payer les sommes suivantes :
* 50 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 58 823,24 euros bruts, subsidiairement 33 694 euros bruts, à titre de rappel de salaire et 5 882,32 euros bruts, subsidiairement 3 369,40 euros bruts, au titre des congés payés afférents,
* 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour différence de traitement,
* 25 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral,
* 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en conséquence de l'annulation des avertissements qui lui ont été notifiés les 2 juillet et 4 octobre 2012,
* 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner la remise d'un bulletin de paie et d'une attestation Pôle emploi conformes, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document,
- condamner la société Embraer aviation international aux dépens.
Par conclusions transmises le 10 mai 2019 par voie électronique, auxquelles il est expressément fait référence, la société Embraer aviation international sollicite la confirmation du jugement, le rejet de toutes les prétentions de l'appelante et la condamnation de cette dernière aux dépens.
La clôture de l'instruction est intervenue le 17 mai 2019 et l'affaire a été plaidée le 21 mai 2019.
MOTIFS
À titre liminaire, la cour constate qu'une discussion a eu lieu entre les parties sur la communication, par l'appelante, de ses dernières pièces, mais fait observer qu'elle n'a été saisie, conformément à l'article 954 du code de procédure civile, d'aucune demande sur ce point dans le dispositif des conclusions de l'intimée.
Sur l'exécution du contrat de travail
Sur l'annulation des avertissements
Selon l'article L. 1333-1 du code du travail, en cas de litige, le juge apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Aux termes de l'article L. 1333-2 du même code, le juge peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
La lettre d'avertissement notifiée à Mme [X] le 2 juillet 2012 énonce les faits suivants :
'L'objet du présent courriel est de vous notifier un avertissement disciplinaire en raison des propos inappropriés que vous avez tenus à plusieurs occasions à l'égard de votre responsable.
Nous reconnaissons bien évidemment votre droit de demander des explications concernant votre classification, votre niveau de responsabilité ou encore les modalités de versement de votre rémunération variable. Nous avons d'ailleurs veillé à prendre en compte chacune de vos questions posées à ce titre lors d'une réunion organisée en ma présence, ainsi que celle de votre responsable en date du 29 mars 2012.
Néanmoins, et malgré notre prise en compte de ces sujets, vous avez continué à vous adresser de manière inappropriée à votre responsable. Vous avez ainsi adressé un courriel à ce dernier le 7 juin 2012, soit à peine 3 jours après votre précédent courriel, avec un ton directif particulièrement inadapté. Il convient de préciser que notre société est ouverte à toute discussion et a un profond respect pour la liberté d'expression de ses salariés. Nous ne remettons donc aucunement en cause votre droit à demander des explications sur les règles en vigueur au sein de notre société. Il n'en demeure pas moins que la mise en cause de votre responsable, en alléguant de son absence de considération à votre égard, apparaît totalement inappropriée, alors même que seulement trois jours s'étaient écoulés depuis votre dernier courriel et que vous aviez de nombreux interlocuteurs à votre écoute au sein de notre société.
Cela constitue donc un comportement qui ne saurait être toléré. Par conséquent, notre société a pris la décision de vous notifier par le présent courriel un avertissement qui sera versé à votre dossier personnel'.
La lettre d'avertissement qui lui a été notifiée le 4 octobre 2012 énonce les faits suivants :
'Lors d'un courriel en date du 9 août dernier, nous vous avons rappelée à l'ordre concernant certains points dont le respect des horaires en vigueur au sein de l'entreprise.
En effet, nous vous avions alerté quant à votre manque de respect de ces horaires et plus particulièrement quant aux plages fixes pendant lesquelles vous deviez impérativement être présente.
Malheureusement, il semble que vous n'ayez pas tenu compte de ce rappel puisque nous constatons à nouveau de votre part des arrivées tardives, en dehors de la plage fixe (soit de 9h30 à 11h30 le matin). Ainsi, le 23 août dernier, vous êtes arrivée à 9h42, le 27 du même mois, à 9h45, le 29 août à 9h47, mais encore à 10h02 le 7 septembre 2012, à 9h45 le 13 septembre ou encore à 10h03 le 14 septembre.
Nous vous rappelons que conformément à l'article 2 de notre règlement intérieur, 'les salariés sont astreints à l'horaire arrêté par la Direction'. Par ailleurs, vous ne pouvez prétendre méconnaître ces horaires puisqu'ils vous avaient déjà été rappelés lors de votre entretien du 26 juillet dernier ainsi que dans le courriel du 9 août qui a suivi.
Par ailleurs, nous vous rappelons également que la durée journalière de travail normale pour les salariés non-cadres est de 8 heures par jour du lundi au jeudi et de 7 heures le vendredi. Or vous vous autorisez certaines latitudes par rapport à cette durée : ainsi le vendredi 7 septembre vous n'avez effectué que 6h42 au lieu de 7h et le 12 septembre, 7h32 au lieu des 8 heures attendues.
Cette persistance à ne pas vouloir respecter les règles en vigueur nuit à l'esprit d'équipe au sein du département auquel vous appartenez et n'est pas favorable à un climat de confiance à votre égard : vous ne tenez pas compte des remarques de votre supérieur hiérarchique ni de celle de la Direction. Par ailleurs, ces retards à répétition entraînent des anomalies répétées dans le système de gestion hors du temps Horsys nécessitant un retravail permanent avant de pouvoir finaliser les bulletins de paie.
Par conséquent, notre société a pris la décision de vous notifier par la présente un avertissement qui sera versé à votre dossier personnel'.
En l'espèce, si le règlement intérieur de l'entreprise, obligatoire au vu de son effectif, de vingt salariés à la date du licenciement, comme cela ressort de l'attestation Pôle emploi remise à Mme [X], prévoit la possibilité pour l'employeur de prononcer un avertissement à titre de sanction, la preuve de son dépôt auprès du greffe du conseil de prud'hommes pour lui permettre d'entrer en vigueur n'est pas rapportée par l'intimée, ce qui le rend inopposable à la salariée.
Or, une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L. 1311-2 du code du travail, dont l'application est subordonnée, notamment, à son entrée en vigueur.
Il s'en déduit que les avertissements litigieux, notifiés en vertu d'un règlement intérieur dont l'entrée en vigueur n'est pas démontrée, ne sont pas fondés, ce qui conduit à leur annulation, sans examen au fond des agissements de la salariée, par infirmation du jugement sur ce point.
En revanche, Mme [X], qui n'avait pas contesté ces sanctions en leur temps, ne fait aucune démonstration du préjudice qui en est résulté pour elle, de sorte que c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté sa demande d'indemnisation de leur chef.
Sur l'inégalité de traitement
L'article L. 3221-2 du code du travail énonce que tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes.
Sont considérés comme ayant une valeur égale par l'article L. 3221-4 du code du travail les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, ainsi que de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.
S'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe 'à travail égal, salaire égal' de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.
En l'espèce, Mme [X] invoque une inégalité de traitement en se comparant avec Mme [V] [D].
Selon les pièces produites par l'intimée, notamment une lettre d'information datée du 7 octobre 2011 et le bulletin de paie de l'intéressée de janvier 2013, Mme [D] occupait la fonction de 'chargé de service maintenance II'.
Au vu de la fiche descriptive des postes d'administrateur services maintenance I et de chargé de services maintenance II, datée du 30 novembre 2011, cette fonction recouvrait des missions identiques à celles de Mme [X], mais également des missions qui n'incombaient pas à cette dernière, à savoir, notamment :
- veiller à ce que les questions récurrentes relatives à l'EASC sont traitées au bon niveau de l'organisation,
- fournir à l'EASC un niveau suffisant d'information sur la couverture des avions,
- assurer l'équilibre entre les intérêts techniques et commerciaux,
- former EASC en cas de demande et de besoin sur les 'eParts',
- interagir avec le support technique pour évaluer les demandes de l'EASC,
- pouvoir de valider tout document produit par l'administrateur commercial,
- réaliser ses activités de vente de services dans le cadre de services complexes (EEC pool),
et des missions distinctes, à savoir, notamment :
- s'assurer que les termes et conditions des accords conclus entre la société et l'EASC sont respectés '(MH Rate, Handling Fees, Core Return, etc...) + (garanties, services, etc...)', alors que Mme [X] était chargée de s'assurer que les termes et conditions des accords exécutés par la société et les clients étaient respectés '(garanties, services, etc...)',
- développer et maintenir une relation à long terme de confiance et de respect avec le réseau EASC, alors que Mme [X] était chargée de développer ses relations avec l'EASC et ses connaissances de l'organisation interne,
- connaître les produits Embraer et leurs composantes, alors que Mme [X] était chargée de développer ses connaissances sur ces sujets,
- réaliser ses activités pour les comptes clés dans la zone EMEA, alors que Mme [X] était chargée de réaliser ses activités dans la zone EMEA.
Or, par les pièces qu'elle produit, établies majoritairement en langue anglaise et dans une police, particulièrement pour les power point et les courriels, difficilement lisible, Mme [X] ne démontre pas qu'elle accomplissait le même travail que Mme [D].
Le témoignage de M. [K] [T], salarié de la société Embraer entre décembre 2011 et novembre 2012, qui fait état de favoritisme de la part de M. [O] [R] à l'égard de Mme [D] au détriment de Mme [X], n'apporte aucune précision sur les fonctions exercées par chacune et n'est donc d'aucun éclairage utile, étant observé qu'il n'est pas, par ailleurs, conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile dès lors qu'il est dactylographié et qu'il ne contient pas les indications prévues à l'alinéa 3.
À l'aune des capacités de compréhension de la cour en langue anglaise à défaut de traduction, même libre, et d'explications précises de l'appelante sur les conclusions qu'elle tire de chacune des pièces qu'elle produit, la cour constate, en outre, que :
- les extraits power point, certains étant datés (22 avril 2009, 2012, 30 et 31 mai 2012, juin 2012), d'autres non, manuels, datés (avril 2009, novembre 2011), et guide, daté (avril 2012), donnent des indications théoriques sur le fonctionnement de la société et/ou le service de maintenance de la société sans référence aux fonctions exercées par les deux salariées ni aucune précision sur les destinataires de ces documents,
- les courriels au terme desquels Mme [X] a évoqué sa situation professionnelle constituent des preuves à soi-même qui n'ont pas de valeur probante,
- les échanges de courriels relatifs, notamment, au traitement de réclamations, datés d'octobre 2012, puis janvier et février 2013, qui ne font aucune mention de Mme [D], n'établissent pas que Mme [X] accomplissait des tâches dévolues à cette dernière ou similaire aux tâches effectuées par cette dernière,
- les courriels impliquant Mme [D], en destinataire ou copie, parmi d'autres, datés de janvier et février 2013, confortent l'appartenance des deux salariées au même service mais n'apportent aucune précision sur les tâches accomplies par elles, en ce compris le courriel de Mme [X] daté du 11 février 2013 faisant mention de données à compléter par Mme [D],
- les tableaux excel mentionnant pour certains uniquement les initiales de Mme [X], pour d'autres, en sus, les initiales de Mme [D], ne contiennent aucune référence objective à la société ni ne sont rattachés à aucun courriel permettant de les objectiver, de les dater et d'en comprendre l'objet et le contenu, de sorte qu'il ne peut en être tiré aucune conclusion,
l'ensemble de ces pièces ne contredisant donc pas les distinctions constatées dans la fiche de poste susvisée.
Aucune preuve n'est rapportée de ce qu'une modification a été effectuée par l'employeur sur cette fiche de poste, la fiche communiquée par l'appelante, datée du 24 mai 2011, ayant trait à des fonctions distinctes, soit responsable réseau EASC et administrateur réseau centres de maintenance, étant observé qu'une différence de niveaux se traduisant par des différences de missions et responsabilités apparaît pour ce dernier poste.
Par ailleurs, il ne résulte pas des pièces versées au débat que les deux salariées étaient interchangeables pendant leurs congés ni que Mme [X] a accompli d'autres missions que celles qui lui étaient attribuées conformément à la fiche de poste susvisée.
Enfin, Mme [X] ne produisant aucune pièce sur le profil et l'évolution de carrière de M. [L] [G], engagé le 9 janvier 2012 sur le même poste qu'elle, au vu des écritures de l'intimée, le contrat de travail de ce dernier n'étant pas produit en intégralité, il ne peut être retenu que ce salarié a bénéficié d'un traitement de faveur par rapport à elle dans sa classification.
Au regard de l'ensemble des éléments ainsi recueillis, la cour considère que Mme [X] ne soumet pas des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, ce qui conduit à rejeter les demandes de rappel de salaire et de dommages-intérêts pour différence de traitement qu'elle présente sur ce fondement, comme l'ont fait à juste titre les premiers juges.
Mme [X] n'établit pas davantage le droit qu'elle revendique à un repositionnement.
Il est acquis, en effet, que l'employeur lui a octroyé un nouveau grade en décembre 2011, puisqu'elle est passée de 11 à 12, et que, sur ce nouveau grade, le coefficient le plus bas, Q1, lui a été attribué, alors que sur le grade inférieur, elle était au plus haut, à Q3.
Or, Mme [X] ne démontre pas le bien-fondé d'un positionnement au coefficient le plus élevé, soit Q3, au sein de son nouveau grade.
Il y a lieu, en conséquence, de la débouter de sa demande de rappel de salaire de ce chef et de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
Sur le harcèlement moral
Selon l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L'article L. 1154-1 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, énonce que lorsque survient un litige relatif à l'application cette disposition, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
En l'espèce, il résulte des développements qui précèdent que les sanctions notifiées à la salariée ne sont pas justifiées et l'appelante démontre qu'elle s'est vu prescrire des arrêts de travail entre les 17 et 18 mars 2011, les 5 et 16 mars 2012, puis les 7 et 19 janvier 2013.
En revanche, Mme [X] n'établit pas la réalité des insultes et menaces dont elle prétend avoir été victime de la part de Mme [D].
En effet, ses courriels, notamment celui daté du 19 décembre 2012 qu'elle a adressé à un autre salarié de la société pour lui rapporter ces faits, ne sont corroborés par aucune pièce objective, l'écrit dactylographié de M. [T] faisant état du comportement en général de Mme [D] mais à aucun moment de l'incident relaté par l'appelante et les échanges de messages écrits avec une salariée qui n'a pas voulu témoigner pour ne pas se mettre en difficulté ne permettant pas à la cour d'en déduire la véracité des faits allégués.
Ces faits sont, au surplus, contestés par Mme [D] qui, dans une attestation établie le 24 avril 2014, conformément à l'article 202 du code de procédure civile, fait état, tout au plus, d'un différend.
Mme [X] n'établit pas davantage la mise à l'écart qu'elle allègue dès lors que, contrairement à ce qu'elle affirme, elle a bénéficié à tout le moins d'une formation de 38 heures en langue portugaise entre septembre et décembre 2012, comme cela ressort de l'attestation produite au débat par l'intimée.
Elle ne démontre pas que son responsable a fait barrage à son changement de service, les courriels produits faisant état de sa candidature et des échanges auxquels ils ont donné lieu sans qu'apparaisse à aucun moment un refus de M. [R].
Enfin, elle ne rapporte pas la preuve de sa participation à une enquête interne sur le harcèlement moral au sein de l'entreprise peu de temps avant sa convocation à un entretien préalable.
Au regard de ces développements, la cour juge que Mme [X] n'établit pas de faits qui, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre, les sanctions injustifiées, datées des 2 juillet et 4 octobre 2012, étant trop éloignées, dans le temps, des deux premiers comme du dernier arrêts de travail pour qu'un rapprochement soit utilement fait entre tous ces événements.
Il est donc justifié de rejeter la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral, comme l'ont fait à juste titre les premiers juges.
Sur la rupture du contrat de travail
La lettre de licenciement notifiée à Mme [X], qui fixe les termes du litige, énonce les faits suivants :
'(...) nous sommes contraints de vous notifier par la présente votre licenciement au motif de non-respect des règles en vigueur au sein de notre société, notamment en matière d'horaires de travail.
Bien que votre attitude vous ait été reprochée à de multiples reprises tant à l'oral que par écrit au travers d'un rappel à l'ordre en date du 9 août 2012 puis d'un avertissement en date du 4 octobre 2012, aucune amélioration n'est intervenue et vous poursuivez avec vos retards incessants. Ainsi, à titre de rappel parmi d'autres, le 13 décembre dernier vous êtes arrivée à 10h20, le 17 décembre à 10h10, le 25 janvier 2013 à 9h52, le 30 janvier à 9h50 ou encore le 1er février à 9h55.
Vous ne semblez tenir aucun compte des remarques qui vous sont faites tant par votre responsable hiérarchique que par la Direction de la société ce qui au-delà de la transgression des règles établies constitue un manque certain de respect et de considération tant vis-à-vis de votre supérieur que de vos collègues de travail qui eux respectent les règles en vigueur.
Votre refus de vous soumettre aux règles en vigueur a également généré une mauvaise ambiance au sein du service auquel vous êtes rattachée.
Nous ne pouvons tolérer une telle attitude persistante sans aucune volonté de votre part pour améliorer la situation et sommes donc aujourd'hui dans l'obligation de procéder à votre licenciement'.
Selon l'article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.
Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
En l'espèce, l'intimée établit, par les listes de pointage qu'elle verse au débat, que Mme [X] est arrivée au travail :
- à 10h20 le 13 décembre 2012,
- à 10h10 17 décembre 2012,
- à 9h52 le 25 janvier 2013,
- à 9h50 le 30 janvier 2013,
-ou encore à 9h55 le 1er février 2013,
pour ne reprendre que les exemples cités dans la lettre de licenciement.
Or, nonobstant l'absence d'horaires de travail expressément stipulés dans le contrat de travail, la cour constate que, dans le cadre de son pouvoir de direction, l'employeur a communiqué à Mme [X] à plusieurs reprises ses exigences sur son heure d'embauche le matin :
- par courriel du 7 octobre 2011, il lui a ainsi été demandé de prendre ses dispositions pour arriver à 9h30 au plus tard, ce à quoi elle avait répondu qu'elle était d'accord et qu'elle souhaitait faire le maximum pour arriver 'pas plus tard qu'à 09:30',
- par courriel du 9 août 2012, il lui a été indiqué que, même si elle disposait d'horaires flexibles, elle devait impérativement être présente pendant les plages horaires suivantes : de 9h30 à 11h30 et de 14h à 17h,
- par lettre du 4 octobre 2012, indépendamment de l'avertissement annulé, la plage horaires susvisée lui a été rappelée pour le matin.
Ses évaluations pour les années 2010, 2011 et 2012 font toutes état, par ailleurs, de mauvaises notes et de commentaires sur la ponctualité de la salariée qui devait être améliorée et qui ne l'a jamais été.
Les faits reprochés dans la lettre de licenciement sont ainsi démontrés.
Aucune pièce n'est produite sur les difficultés d'accès à son lieu de travail alléguées par l'appelante, la seule circonstance qu'elle devait passer un contrôle sécurisé pour accéder à son lieu de travail n'étant pas, en soi, suffisante pour considérer que les retards susvisés ne lui étaient pas imputables.
Aucun élément ne permet de retenir qu'elle a fait l'objet d'un traitement différencié par rapport à ses collègues sur ce point.
Il n'est pas établi, par ailleurs, que les heures supplémentaires réalisées ne lui ont pas été réglées ou n'ont pas fait l'objet de contreparties, étant observé qu'elle ne produit pas l'intégralité de ses bulletins de paie et qu'elle ne formule aucune demande de rappel de salaire de ce chef.
Enfin, au vu des nombreux rappels et observations dont elle a fait l'objet sur sa ponctualité, il ne peut être considéré que ses revendications sur sa classification sont à l'origine des reproches exprès de l'employeur sur ses retards.
Au vu de l'ensemble des éléments ainsi recueillis, la cour juge que le licenciement litigieux était justifié et proportionné à l'insubordination révélés par les retards susvisés, ce, même si Mme [X] n'a pas 'volé du temps de travail à son employeur' comme elle l'indique dans ses écritures et même si l'intimée ne fait aucune démonstration du préjudice que ces retards lui ont causé.
Le jugement de première instance est donc confirmé en son rejet de la demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur les autres demandes
Compte tenu des développements qui précèdent, Mme [X] doit être déboutée de sa demande de remise d'un bulletin de paie et d'une attestation Pôle emploi sous astreinte, comme l'ont fait à juste titre les premiers juges.
Bien qu'elle ait obtenu gain de cause sur l'annulation des avertissements qui lui ont été notifiés, Mme [X], qui a engagé la présente procédure, succombe principalement à l'instance et doit donc, d'une part, être condamnée aux dépens d'appel, d'autre part, conserver la charge de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement déféré sauf en son rejet de la demande d'annulation des avertissements notifiés les 2 juillet et 4 octobre 2012 ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Annule les avertissements notifiés les 2 juillet et 4 octobre 2012 ;
Ajoutant,
Condamne Mme [X] aux dépens d'appel ;
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE