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18/06/2019 | FRANCE | N°16/11054

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 18 juin 2019, 16/11054


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 18 JUIN 2019



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/11054 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BY262



Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Décembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 14/03309





APPELANTE



Madame [U] [L] née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité

1](Algérie)



[Adresse 1]

[Localité 2] - ALGÉRIE



représentée par Me Nadir HACENE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298







INTIME



LE MINISTÈRE PUBLIC agissant en...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 18 JUIN 2019

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/11054 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BY262

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Décembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 14/03309

APPELANTE

Madame [U] [L] née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1](Algérie)

[Adresse 1]

[Localité 2] - ALGÉRIE

représentée par Me Nadir HACENE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298

INTIME

LE MINISTÈRE PUBLIC agissant en la personne de MADAME LE PROCUREUR GENERAL - SERVICE CIVIL

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté à l'audience par Mme Anne BOUCHET, substitut général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 mai 2019, en audience publique, l'avocat de l'appelante et le ministère public ne s'y étant pas opposé, devant Mme Anne BEAUVOIS, présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Dominique GUIHAL, présidente

Mme Anne BEAUVOIS, présidente

M. Jean LECAROZ, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Dominique GUIHAL, présidente et par Mélanie PATE, greffière.

Vu le jugement rendu le 11 décembre 2015 par le tribunal de grande instance de Paris qui a dit que Mme [U] [L], née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1](Algérie) n'est pas de nationalité française, ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil et l'a condamnée aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel de Mme [U] [L] en date du 16 mai 2016;

Vu les conclusions notifiées le 26 mars 2019 par Mme [U] [L] qui demande à la cour d'infirmer le jugement, de dire qu'elle est de nationalité française, d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil et de condamner le Trésor public aux dépens et à lui payer une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 7 juin 2017 par le ministère public qui demande à la cour de constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile n'a pas été délivré, de constater la caducité de la déclaration d'appel, subsidiairement de confirmer le jugement et constater l'extranéité de l'intéressée, d'ordonner la mention prévue par l'article 28 du code civil ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 26 mars 2019 ;

Vu les conclusions récapitulatives notifiées le 16 mai 2019 par Mme [U] [L] sollicitant avant dire droit la révocation de l'ordonnance de clôture et l'acceptation de la communication des pièces n°1 à 15 et maintenant au fond les demandes figurant dans ses conclusions notifiées le 26 mars 2019 ;

SUR QUOI :

Il est justifié de l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile par la production du récépissé délivré le 2 juin 2017. La déclaration d'appel de Mme [U] [L] n'est donc pas caduque.

Sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture

Mme [U] [L] sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture par conclusions du 16 mai 2019 pour lui permettre de produire de nouvelles pièces qu'elle aurait reçues postérieurement à cette ordonnance.

Cependant, l'appelante ne démontre pas qu'il se serait révélé depuis qu'a été rendue l'ordonnance de clôture, une cause grave au sens de l'article 784 du code de procédure civile, qui justifierait la révocation sollicitée et l'admission de nouvelles pièces, Mme [U] [L] ayant disposé d'un temps suffisant pour répondre aux moyens développés par le ministère public dans ses dernières écritures et aux pièces qu'il a communiquées.

Il ne sera donc pas fait droit à cette demande. Les conclusions du 16 mai 2019 seront déclarées irrecevables en application de l'article 783 du même code.

La cour statuera donc au vu des dernières conclusions du 26 mars 2019 et des pièces communiquées par Mme [U] [L] avant la clôture.

Sur le fond

Mme [U] [L], née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 1](Algérie) revendique une chaîne ininterrompue de filiation à l'égard de M. [O] [X] [O], né en 1829 à [Localité 3] (Algérie), admis à la qualité de citoyen français par décret du 6 août 1867 et se prévaut de l'arrêt de la Cour de cassation du 5 novembre 2014 qui a déclaré non admis le pourvoi formé par le procureur général près de la cour d'appel de Nancy, contre l'arrêt de cette même cour rendu le 28 mai 2013 qui a confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Nancy qui a dit que son frère, M. [J] [L], était le descendant de [O] [X] [O].

Mme [U] [L] n'étant pas personnellement titulaire d'un certificat de nationalité française, il lui appartient en application de l'article 30 du code civil de rapporter la preuve qu'elle réunit les conditions requises par la loi pour l'établissement de sa nationalité française.

Le certificat de nationalité française délivré à son frère n'a pas d'effet quant à la charge de la preuve qui repose sur l'intéressée.

Conformément à l'article 47 du code civil, « Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ». Nul ne peut donc se voir reconnaître la nationalité française s'il ne justifie pas d'une identité certaine, attestée par des actes d'état civil fiables au sens de cet article.

La qualité d'admis à la qualité de citoyen français de [O] [X] [O], né en 1829 à [Localité 3] (Algérie) par décret du 6 août 1867 n'est pas contestée.

Il incombe donc à Mme [U] [L] d'apporter la preuve de la chaîne de filiation ininterrompue à l'égard de l'ascendant admis à la citoyenneté française.

Contrairement à ce que soutient l'intéressée, la détermination par un Etat de ses nationaux par application de la loi sur la nationalité ne peut constituer une discrimination même au sens de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, dans la mesure où le droit à une nationalité est assurée, et les articles 8 et 14 de ladite Convention ne peuvent pas faire échec au droit de chaque Etat de déterminer les conditions d'accès à sa nationalité. Une telle discrimination ne saurait résulter en toute hypothèse de la carence de Mme [U] [L] dans l'administration de la preuve qui lui incombe.

Par ailleurs, si dans les rapports entre la France et l'Algérie, les actes, revêtus de la signature et du sceau officiel de l'autorité ayant qualité pour le délivrer dans l'un des deux pays, sont dispensés de légalisation par l'article 36 du protocole judiciaire signé le 28 août 1962, publié par décret du 29 août 1962, cet article n'a pas pour effet d'écarter l'application de l'article 47 du code civil aux actes d'état civil établis en Algérie.

Les juridictions françaises sont également tenues de vérifier la régularité internationale des décisions de justice rendues lorsqu'elles ont vocation à suppléer l'absence d'actes d'état civil ou à les rectifier, lesquelles doivent être produites pour permettre ce contrôle.

En outre, l'article 37 du même protocole dispose que « Les officiers de l'état civil des deux Parties contractantes se donneront mutuellement et directement avis de tous les actes de l'état civil dressés par eux et qui doivent être mentionnées en marge d'actes dressés sur le territoire de l'autre Partie.

Les autorités compétentes de l'une des Parties contractantes délivreront aux autorités diplomatiques ou consulaires de l'autre partie les expéditions des actes de l'état civil concernant leurs ressortissants lorsque ces autorités en feront la demande ».

Il ne résulte de ce texte, contrairement à ce que prétend l'appelante, ni une interdiction faite aux autorités de l'un des Etats d'apprécier la force probante d'un acte émanant de l'autre Etat au regard en ce qui concerne la France des dispositions de l'article 47 du code civil, ni une obligation de procéder à une levée d'acte pour consulter les autorités algériennes quant à la régularité des pièces versées aux débats par Mme [U] [L].

Mme [U] [L] invoque encore à l'appui de ses prétentions les articles 480 du code de procédure civile et 29-5 du code civil, ce dernier disposant que « Les jugements et arrêts rendus en matière de nationalité française par le juge de droit commun ont effet même à l'égard de ceux qui n'y ont été ni parties, ni représentés.

Tout intéressé est recevable cependant à les attaquer par la tierce opposition à la condition de mettre en cause le procureur de la République ».

Mais d'une part, aucun jugement ayant autorité de la chose jugée n'a dit dans son dispositif que Mme [U] [L] était française, d'autre part, l'autorité de chose jugée attachée aux décisions qui ont dit que son frère, M. [J] [L], est français, s'impose certes à l'égard de ceux qui n'y ont été ni parties, ni représentés, mais n'a pas pour effet d'établir la nationalité française de Mme [U] [L].

C'est ainsi par des motifs exacts et pertinents, que la cour adopte, que le tribunal a retenu que Mme [U] [L] échouait à démontrer une chaîne de filiation à l'égard de l'admis en retenant en particulier que la demanderesse versait aux débats deux actes contradictoires concernant la naissance de son arrière-grand-mère, Mme [U] [V] [I], à la fois une copie d'extrait matrice n°669 relatant une naissance survenue en 1885 et une copie d'acte de naissance n°523 délivrée par l'officier d'état civil d'[Localité 2] centre dont il ressort qu'elle serait née le [Date naissance 2] 1884 à [Localité 2], ce qui ôte toute force probante à ces actes, qu'au surplus les actes de mariage produits pour M. [Y] [L] et Mme [F] [B] [Z], parents de l'appelante, ainsi que pour M. [B] [L] et Mme [R] [K] [O], grands-parents de l'appelante, ont été transcrits en vertu de jugements qui ne sont pas produits, ce qui ne permet pas au juge d'en apprécier la régularité internationale, les pièces produites par l'appelante émanant d'autorités administratives et non des juridictions qui les ont rendus ne pouvant pallier cette absence.

Il peut être ajouté, comme le soutient le ministère public, que les actes d'individualité et certificats de conformité sont dénués de valeur au regard du droit algérien, que les divergences entre les pièces n°60 et 62 produites par l'appelante qui sont présentées comme étant toutes les deux, une copie du registre sur lequel figure l'acte de mariage n°5084 de [D] [X] [O] et [U] [V] [I] dressé le 26 décembre 1950, différent notablement en ce que la première comporte en marge la mention d'une décision du procureur de la République de [V] mhamed du 20 janvier 2016, n°415/16, portant rectification de la date de naissance de l'épouse, mention ne figurant pas sur la pièce n°62, mais surtout que ces deux pièces qui se présentent comme des photocopies de la page du registre, ne sont manifestement pas écrites de la même main et que la seconde comporte une signature supplémentaire, de sorte que ces actes sont également dénués de valeur probante.

Le jugement qui a débouté Mme [U] [L] de son action déclaratoire et dit qu'elle n'est pas de nationalité française est donc confirmé.

Les dépens seront supportés par Mme [U] [L] qui succombe en ses prétentions et aucune circonstance tirée de l'équité ne justifie de lui accorder le bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Constate que le récépissé prévu par l'article 1043 du code de procédure civile a été délivré.

Dit que la déclaration d'appel de Mme [U] [L] n'est pas caduque et que ses conclusions du 26 mars 2019 sont recevables.

Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 26 mars 2019.

Déclare irrecevables les conclusions de Mme [U] [L] notifiées le 16 mai 2019 après la clôture.

Confirme le jugement.

Rejette la demande de Mme [U] [L] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ordonne la mention prévue par l'article 28 du code civil.

Condamne Mme [U] [L] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 16/11054
Date de la décision : 18/06/2019

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°16/11054 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-18;16.11054 ?
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