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14/06/2019 | FRANCE | N°18/01070

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 1, 14 juin 2019, 18/01070


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 1



ARRÊT DU 14 JUIN 2019



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/01070 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B4ZRY



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Décembre 2017 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 17/07399





APPELANTE



CONGRÉGATION DES SOEURS AVEUGLES DE SAINT PAUL<

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[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me David-Raphael BENITAH, avocat postulant et plaidant, avocat au barreau de PARIS, toque : E1503







INTIMÉE



Association HOTEL SOCI...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 14 JUIN 2019

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/01070 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B4ZRY

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Décembre 2017 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 17/07399

APPELANTE

CONGRÉGATION DES SOEURS AVEUGLES DE SAINT PAUL

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me David-Raphael BENITAH, avocat postulant et plaidant, avocat au barreau de PARIS, toque : E1503

INTIMÉE

Association HOTEL SOCIAL 93

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Aude BOURUET AUBERTOT de l'AARPI BGBA, avocat postulant et plaidant, avocat au barreau de PARIS, toque : B0026

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 Mai 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Claude CRETON, Président

Mme Christine BARBEROT, Conseillère

M. Dominique GILLES, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Christine BARBEROT, Conseillère dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Thi Bich Lien PHAM

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Claude CRETON, Président et par Mme Thi Bich Lien PHAM, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant acte authentique du 15 janvier 1997, la congrégation des Soeurs aveugles de Saint-Paul (la congrégation) a, d'une part, donné à bail emphytéotique à l'association Hôtel social 93 (l'association) une maison d'habitation sise [Adresse 3], pour une durée de 55 ans à compter du 15 mars 1997, moyennant un droit d'entrée de 2 000 000 francs (304 898,06 €), d'ores et déjà versé et mis sous séquestre à cette même date, ainsi qu'une redevance annuelle de 100 000 francs indexée pendant les 20 premières années, puis de 5 000 francs à partir de la 21e année, d'autre part, promis de vendre ce bien au preneur qui l'acceptait sans toutefois prendre l'engagement d'acquérir, au prix indexé de 4 000 000 francs (609 796,06 €), payable par échéances mensuelles égales jusqu'au 15 janvier 2017, les paiements au titre du bail s'imputant sur le prix, seules restant dues les échéances à courir jusqu'au 15 janvier 2017. Par lettre recommandée avec avis de réception du 11 janvier 2017, l'association a levé l'option, sollicitant la réalisation de la vente par acte authentique. L'association a exprimé son désaccord, reprochant au preneur de ne pas avoir respecté les obligations du bail relatives à l'entretien et à l'assurance, réclamant le paiement de la somme de 568 014,82 € au titre du solde du prix. Par acte extra judiciaire du 23 juin 2017, l'association a assigné la congrégation en réalisation forcée de la vente.

C'est dans ces conditions que, par jugement du 7 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Bobigny a :

- déclaré la vente parfaite,

- dit que le jugement valait acte authentique de vente et titre de propriété, le transfert de propriété intervenant à la date du jugement,

- ordonné la publication du jugement au service de la publicité foncière compétent aux frais de la congrégation,

- débouté la congrégation de sa demande en paiement,

- rejeté les demandes de dommages-intérêts de l'association,

- rejeté les autres demandes,

- condamné la congrégation à payer à l'association la somme de 3 500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la congrégation aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par conclusions du 3 avril 2018, la congrégation, appelante, demande à la cour de :

- vu les articles 1103, 1104, 1193, 1221, 1231-1, 1582 et suivants, nouveaux (1134, 1142 et suivants, 1147, 1792 et suivants, anciens) du code civil,

- constater que le tribunal, par le jugement entrepris, n'a pas su tirer toutes les conséquences des constatations de droit et de fait de l'espèce,

- constater l'existence d'un prix de vente d'un montant de 4 000 000 francs au 15 janvier 1997, indexé selon l'évolution de l'indice du coût de la construction au jour de la vente, ce faisant au jour du jugement à intervenir, soit la somme de 986 103,64 €,

- constater que la promesse unilatérale de vente prévoyait l'imputation des loyers sur le prix et que les loyers payés s'élèvent à la somme de 407 123,28 €,

- constater la levée d'option de l'association au 11 janvier 2017,

- fixer le montant restant dû par l'association au titre de la vente à la somme de 986 103,64 € - 407 123,28 € = 578 735,46 € et condamner l'association à lui payer cette somme,

- dire que l'acte de vente et le transfert de propriété seront réalisés au jour du paiement de cette somme,

- à titre subsidiaire,

- au cas où l'association entendrait se dédire de son engagement contractuel et de sa levée d'option, la condamner à lui payer 10% du prix de cession, soit la somme de 98 610,40 € à titre de dommages-intérêts,

- constater les manquements de l'association à ses obligations d'entretien au titre du bail et la cessation de ce dernier,

- en tout état de cause, condamner l'association à lui payer la somme de 7 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

Par conclusions du 13 avril 2019, l'association prie la cour de :

- vu les articles 1134, 1589, ancienne rédaction, subsidiairement, 1156 ancien du code civil, 12 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes de dommages-intérêts, et statuant à nouveau :

- condamner la congrégation à lui payer au visa de l'article 1231-1 du code civil (1147 ancienne rédaction), les sommes de 182 374,01 € de dommages-intérêts au titre de son préjudice matériel et de 50 000 € au titre de son préjudice moral,

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

- condamner la congrégation à lui payer la somme de 8 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus.

SUR CE, LA COUR

La clôture ayant été prononcée le 18 avril 2019, les conclusions de procédure de l'association du 25 avril 2019, adressées au conseiller de la mise en état, tendant à la révocation de la clôture, sont irrecevables.

Les conclusions au fond notifiées le 26 avril 2019 par l'association, postérieures à la clôture, sont irrecevables, les dernières conclusions de l'intimée étant celles du 13 avril 2019.

Les conclusions au fond de la congrégation, notifiées le 18 avril 2019, jour de la clôture, qui renferment un moyen nouveau, relatif au calcul de l'indexation du prix et une prétention nouvelle, relative à la capitalisation des intérêts, éléments nouveaux appelant une réplique qui n'a pu être apportée par l'intimée, sont irrecevables, les dernières conclusions de l'appelante étant celles notifiées le 3 avril 2018.

La congrégation ne contestant pas la validité de la levée d'option de l'association par lettre recommandée avec avis de réception du 11 janvier 2017, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a déclaré la vente parfaite.

Sauf dispositions contraires, le paiement par imputation opère extinction de la dette à l'échéance de celle-ci.

Le contrat liant les parties du 15 janvier 1997 renferme, d'une part, un bail emphytéotique, d'autre part et "parallèlement", une promesse unilatérale de vente. Le bail emphytéotique, d'une durée de 55 ans jusqu'au 14 janvier 2052, prévoit une redevance annuelle d'un montant de 100 000 francs pendant les vingt premières années, puis de 5 000 francs à partir de la 21ème année, ce montant étant révisé tous les ans dans la même proportion que l'indice INSEE du coût de la construction, l'indice de référence étant celui du 2ème trimestre 1996, soit 1029, et l'indice de revalorisation le dernier publié à la date de révision. La promesse unilatérale de vente, qui fixe la date de réalisation par acte authentique entre le 1er janvier 2002 et le 15 janvier 2017, renferme la clause de prix suivante :

"Cette Vente, si elle se réalise, aura lieu moyennant le prix principal de quatre millions de francs (4.000.000 F), qui sera payable, par échéances mensuelles égales jusqu'au 15 janvier 2017, sans intérêt. Toutefois, ce prix sera indexé sur l'indice du coût de la construction, l'indice de référence étant le dernier connu lors de la signature de la vente et l'indice de base, celui sus-indiqué, soit 1029. La première échéance aura lieu le jour de la signature de ladite vente.

Il est expressément convenu ce qui suit :

1°/ Tous paiements auront lieu à l'adresse qui sera indiquée par le bailleur.

2°/ Le preneur pourra se libérer par anticipation en totalité ou même par fractions ne pouvant être inférieure à 100 000 francs sans préavis.

Tous paiements par anticipation s'imputeront sur la dernière fraction à échoir du solde du prix.

3°/ En cas de retard dans le paiement d'une fraction du prix, cette somme produira intérêt au taux légal de plein droit, sans mise en demeure ni demande en justice et sans préjudice à l'exigibilité.

4°/ Le solde du prix deviendra immédiatement et de plein droit exigible si bon semble au bailleur :

a) A défaut de paiement à son échéance exacte d'un seul terme et un mois après un commandement resté infructueux ;

b) En cas de liquidation des biens, de règlement judiciaire ou de dissolution du preneur ;

c) En cas de vente ou d'apport à une société des biens immobiliers.

Tous les paiements effectués au titre du bail emphytéotique s'imputeront sur le prix ci-dessus convenu. Seules resteront dues les échéances à courir jusqu'au 15 janvier 2017."

Tant l'imputation des paiements effectués au titre du bail emphytéotique sur le prix de la vente, que le sort de ces deux contrats en cas de résolution du bail pour inexécution de ses obligations par le preneur et l'extinction du bail en cas de vente du bien au preneur, traduisent l'intention des parties de rendre ces deux contrats indivisibles, de sorte que ces actes doivent s'apprécier l'un par rapport à l'autre.

Les parties ont stipulé, aux termes de la clause relative au prix de la vente que "Tous les paiements effectués au titre du bail emphytéotique s'imputeront sur le prix ci-dessus convenu". Or, en exécution de la clause "Droit d'entrée" du bail, le preneur a versé le 15 janvier 1997 la somme de 2 000 000 francs (304 898,06 €). Si cette somme a été, d'abord, séquestrée entre les mains d'un tiers, pour garantir le preneur de son remboursement en cas de non-réalisation de la condition suspensive incluse dans la promesse, relative à l'obtention par ce dernier de l'accord préfectoral exigé en cas d'aliénation consentie par une congrégation religieuse, cependant, il est acquis aux débats que cette condition a été réalisée et que la somme a été versée au bailleur. S'agissant d'un paiement conditionnant le consentement des parties au bail, effectué par le preneur au bailleur, ce versement doit s'imputer sur le prix au sens de la clause précitée.

La vente devait être réalisée entre le 1er janvier 2002 et le 15 janvier 2017 ; le prix indexé était payable par échéances mensuelles égales jusqu'au 15 janvier 2017 ; la première échéance était fixée au jour de la signature de la vente, mais le preneur pouvait "se libérer par anticipation en totalité ou même par fraction ne pouvant être inférieure à 100 000 francs sans préavis" .

L'association qui a levé l'option à la fin de la période de réalisation, soit le 11 janvier 2017, ne pouvait plus bénéficier du paiement du prix par échéances mensuelles ou par anticipation, le prix indexé, soit la somme de 986 103,64 €, étant exigible à cette date.

Dès lors et par application du principe précité, l'imputation du paiement de la somme de 2 000 000 francs (304 898,06 €) s'opère sur la dette échue de 986 103,64 €. Il en est de même de la somme de 407 123,28 € que l'association indique, elle-même, avoir acquittée au titre des redevances du bail. Ainsi, l'association reste à devoir à la congrégation la somme de 986 103,64 € - (304 898,06 € + 407 123,28 €) = 274 082.30 € au paiement de laquelle il y a lieu de la condamner, le jugement entrepris étant infirmé en ce qu'il a débouté la congrégation de sa demande en paiement.

Il convient d'ordonner aux parties de régulariser l'acte authentique de vente par le notaire de leur choix dans les deux mois de la signification du présent arrêt. A défaut de se faire dans ce délai, le présent arrêt vaudra vente et sera publié au service de la publicité foncière compétent à l'initiative de la partie la plus diligente et aux frais de l'acquéreur.

Le refus opposé par la congrégation de réaliser la vente aux conditions de prix fixées par l'association n'est pas fautif. Par suite, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté cette dernière de sa demande de dommages-intérêts.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement,

Vu l'ordonnance de clôture du 18 avril 2019 :

Déclare irrecevables les conclusions de procédure de l'association Hôtel social 93 du 25 avril 2019 ;

Déclare irrecevables les conclusions au fond du 26 avril 2019 de l'association Hôtel social 93 ;

Dit que les dernières conclusions de l'association Hôtel social 93 sont celles du 13 avril 2019 ;

Déclare irrecevables les conclusions au fond de la congrégation des Soeurs aveugles de Saint-Paul notifiées le 18 avril 2019 ;

Dit que les dernières conclusions de la congrégation des Soeurs aveugles de Saint-Paul sont celles du 3 avril 2018 ;

Confirme le jugement entrepris mais seulement en ce qu'il a :

- dit la vente parfaite,

- débouté l'association Hôtel social 93 de sa demande de dommages-intérêts ;

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau :

Condamne l'association Hôtel social 93 à payer à la congrégation des Soeurs aveugles de Saint-Paul la somme de 274 082,30 € au titre du solde du prix ;

Ordonne à l'association Hôtel social 93 et à la congrégation des Soeurs aveugles de Saint-Paul de régulariser l'acte authentique de vente par le notaire de leur choix dans les deux mois de la signification du présent arrêt ;

Dit qu'à défaut de se faire dans ce délai, le présent arrêt vaudra vente et sera publié au service de la publicité foncière compétent à l'initiative de la partie la plus diligente et aux frais de l'association Hôtel social 93 ;

Rejette les autres demandes ;

Condamne l'association Hôtel social 93 aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 18/01070
Date de la décision : 14/06/2019

Références :

Cour d'appel de Paris G1, arrêt n°18/01070 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-14;18.01070 ?
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