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06/06/2019 | FRANCE | N°16/14556

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9, 06 juin 2019, 16/14556


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9



ARRÊT DU 06 JUIN 2019



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/14556 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZFSW



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 mai 2016 -Tribunal d'Instance de PARIS (2ème) - RG n° 11-14-318





APPELANTE



BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE société anonyme agissant poursuit

es et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège venant aux droits de la SA BANQUE SOLFEA aux termes d'une cession de créance en...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9

ARRÊT DU 06 JUIN 2019

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/14556 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZFSW

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 mai 2016 -Tribunal d'Instance de PARIS (2ème) - RG n° 11-14-318

APPELANTE

BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE société anonyme agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège venant aux droits de la SA BANQUE SOLFEA aux termes d'une cession de créance en date du 28 février 2017

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assisté de Me Edgard VINCENSINI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0496

Substitué à l'audience par Me Laurent BONIN avocat au barreau de PARIS, toque : B0496

INTIMÉS

Monsieur [B] [D]

né le [Date anniversaire 1] 1976 à DIJON

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représenté par Me Grégory ROULAND de la SELARL EQUITY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1002

Madame [L] [D]

née le [Date anniversaire 1] 1981 à [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentée par Me Grégory ROULAND de la SELARL EQUITY AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1002

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 mars 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Agnès BISCH, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Philippe DAVID, Président

Mme Fabienne TROUILLER, Conseiller

Mme Agnès BISCH, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Léna ETIENNE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Philippe DAVID, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 3 janvier 2013, M. [D] concluait un contrat d'achat auprès de la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE, portant sur l'acquisition d'un système de production d'électricité d'origine photovoltaïque, avec installation d'un ballon thermodynamique, pour le prix de 22 900 euros.

La société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE faisait signer le même jour à M. et Mme [D] un contrat de crédit auprès de la société BANQUE SOLFEA, dont il aurait été dit qu'il serait autofinancé grâce à la revente à la société EDF de l'énergie produite par les panneaux.

Le 17 janvier 2013, la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE commençait les travaux et l'attestation de fin de travaux était signée le même jour.

Le 21 janvier suivant, la société BANQUE SOLFEA informait M. [D] qu'elle débloquait le crédit au profit de la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE, alors que la prestation n'était pas encore achevée.

En effet, le 28 février 2013, la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE adressait à M. et Mme [D] la copie de l'attestation du CONSUEL, et le 14 mai suivant, elle signait une attestation sur l'honneur laissant entendre que les négociations auprès de la société EDF en vue de l'obtention d'un contrat de rachat de l'énergie solaire, avaient été effectuées.

Le 8 août 2013, l'installation était raccordée et mise en service.

Par actes en date des 28 et 29 octobre 2014, M. et Mme [D] assignaient la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE et la société BANQUE SOLFEA devant le tribunal d'instance du 2ème arrondissement de PARIS aux fins de voir :

- prononcer la nullité du contrat de vente et constater la nullité du contrat de crédit affecté,

- ordonner à la société BANQUE SOLFEA de leur restituer toutes les sommes déjà versées au titre du prêt,

- prendre acte qu'ils tiennent à la disposition de la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE l'ensemble des matériels vendus dans un délai de 2 mois à compter de la signification du jugement, et que passé ce délai, ils seraient autorisés à en disposer comme bon leur semblerait et notamment à le porter dans un centre de tri,

- condamner la société BANQUE SOLFEA au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire.

Les demandeurs faisaient grief à la société BANQUE SOLFEA d'avoir délivré les fonds sans aucune prudence. Ils faisaient valoir qu'ils entendaient renoncer à leur action en nullité du contrat de vente pour solliciter uniquement la résolution du contrat de crédit pour faute du prêteur, tout en s'engageant à restituer à la société BANQUE SOLFEA les matériels.

M. et Mme [D] demandaient la condamnation de la société BANQUE SOLFEA à leur restituer la somme de 6 036,94 euros au titre des échéances déjà versées, ainsi que toutes autres prélèvements à ce titre.

La société BANQUE SOLFEA concluait à l'irrecevabilité et au débouté de la demande de résolution du contrat de crédit et s'opposait à l'ensemble des réclamations de M. et Mme [D], faisant valoir qu'elle n'avait commis aucune faute engageant sa responsabilité et que les requérants ne rapportaient pas la preuve d'un préjudice et d'un lien de causalité.

La société BANQUE SOLFEA entendait obtenir la condamnation solidaire de M. et Mme [D] à lui restituer la somme de 22 900 euros, au titre du capital restant dû, déduction faite des échéances déjà payées.

A titre reconventionnel, la société BANQUE SOLFEA demandait la condamnation de M. et Mme [D] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Régulièrement assignée, la société NOUVELLE RÉGIE DES JONCTIONS DES ÉNERGIES DE FRANCE, exerçant sous l'enseigne « GROUPE SOLAIRE DE FRANCE »', représentée par Maître [J] [C] en qualité d'administrateur judiciaire, ne comparaissait pas et ne mandatait personne pour la représenter.

Par jugement réputé contradictoire en date du 17 mai 2016, le tribunal d'instance du 2ème arrondissement de PARIS :

- prononçait la résolution du contrat de crédit,

- ordonnait à la société BANQUE SOLFEA de restituer à M. et Mme [D] la somme de 6 036,94 euros, arrêtée au 10 mars 2016, ainsi que tous les autres prélèvements sur leur compte bancaire au titre du crédit affecté jusqu'au jugement,

- constatait l'engagement de M. et Mme [D] à livrer au siège social de la société BANQUE SOLFEA l'ensemble des matériels posés à leur domicile, dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement étant précisé que passé ce délai, ils pourraient en disposer comme bon leur semblerait,

- déboutait la société BANQUE SOLFEA de l'intégralité de ses demandes et la condamnait à payer à M. et Mme [D] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- ordonnait l'exécution provisoire.

Le tribunal retenait que la société BANQUE SOLFEA avait méconnu ses obligations contractuelles à l'égard des emprunteurs, en ce qu'elle n'avait pas fait preuve de diligences suffisantes dans la vérification préalable au déblocage des fonds, ce qui induisait la résolution du contrat de crédit sur le fondement notamment des dispositions de l'article L. 311-31 du code de la consommation.

Par déclaration en date du 1er juillet 2016, la société BANQUE SOLFEA interjetait appel du jugement.

Le 28 février 2017, la société BANQUE SOLFEA cédait sa créance à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 20 décembre 2018, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la société BANQUE SOLFEA demande à la cour :

- l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions,

- de déclarer irrecevable la demande de résolution du contrat de crédit en raison de la signature d'une attestation de fin de travaux,

- de débouter M. et Mme [D] de leur demande de résolution du contrat de crédit et de leur demande d'exonération de remboursement du crédit sur le fondement de l'article 1184 du code civil,

- en toute hypothèse, de juger que le déblocage anticipé des fonds allégués par les M. et Mme [D] ne peut justifier la résolution du contrat de crédit, ni dispenser des emprunteurs de rembourser leur prêt dès lors que les biens acquis ont été livrés et installés et que l'installation photovoltaïque est raccordée et fonctionne,

- par conséquent, de dire que l'exécution du contrat de crédit doit être poursuivie jusqu'à son complet remboursement,

- de juger que M. et Mme [D] seront tenus de rembourser à la banque les échéances de prêt restituées en exécution du jugement, soit la somme de 6 965,70 euros,

- de juger que les échéances de prêt suspendues à compter du jugement, du fait de la résolution du contrat de crédit avec exécution provisoire, seront reportées en fin de prêt,

- plus subsidiairement pour le cas où le contrat de crédit serait résolu, de juger que la société BANQUE SOLFEA n'a commis aucune faute,

- de juger que la preuve n'est pas rapportée d'un préjudice équivalent au capital emprunté, ni la preuve de son lien avec la faute alléguée à l'encontre de la société BANQUE SOLFEA,

- de condamner solidairement M. et Mme [D] à restituer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, l'intégralité du capital restant dû à la date du jugement, soit la somme de 22 900 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la remise des fonds,

- de donner acte à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE que les échéances de prêt réglées par M. et Mme [D], soit la somme de 6 965,70 euros, ont été remboursées en exécution du jugement,

- très subsidiairement, si une faute de la société BANQUE SOLFEA était retenue,

- de juger que le montant du préjudice de M. et Mme [D] ne peut être égal au montant du capital prêté et le réduire à de plus justes proportions,

en tout état de cause, de condamner solidairement M. et Mme [D] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE fait valoir que l'article L. 311-31 du code de la consommation ne peut fonder une résolution du contrat de crédit comme l'a jugé le tribunal, que les obligations de M. et Mme [D] pouvaient prendre effet à la date du 5 février 2014, date de la première échéance due, dès lors que la mise en service de l'installation, prestation que le tribunal considère comme constituant l'exécution complète du contrat, était intervenue 6 mois plus tôt, le 8 août 2013, les autorisations administratives ayant été obtenues.

L'appelante soutient que le raccordement au réseau relève de la prérogative exclusive de la société ERDF, qui dispose en la matière d'un monopole légal et qu'ainsi il ne peut être reproché à la banque d'avoir exclu de l'attestation de fin de travaux, une prestation qui ne relevait pas de la compétence de la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE, et ne pouvait donc pas être à sa charge.

L'appelante fait valoir que la preuve d'une cause de résolution du prêt tendant à exonérer les emprunteurs du remboursement du crédit n'est pas rapportée, et qu'elle n'a pas commis de faute en débloquant les fonds sur instruction des emprunteurs après réception de l'attestation signée sans réserve par l'emprunteur.

Elle observe que l'installation des panneaux photovoltaïques de M. et Mme [D], est raccordée et produit de l'électricité.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 18 décembre 2018, M. et Mme [D] demandent à la cour :

- de débouter la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de ses demandes et de confirmer le jugement,

- de constater pour le surplus la faute de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE dans le déblocage prématuré du crédit,

- de déclarer que M. et Mme [D] ne sont pas tenus de rembourser à la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 22 900 euros avec intérêts,

- de déclarer que M. et Mme [D] tiennent à la disposition de la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE l'ensemble des matériels posés à leur domicile par la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE, voire les lui apporteront directement au lieu de son siège social durant le délai de deux mois à compter de la signification de la décision et que passé ce délai, si la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n'a pas émis le souhait de prendre possession des matériels, M. et Mme [D] pourront en disposer comme bon leur semblera, et notamment les porter dans un Centre de Tri,

- de condamner la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens au profit de M. et Mme [D].

Au soutien de leurs prétentions, M. et Mme [D] font valoir que l'invocation de l'article L. 311-31 du code de la consommation sans demander l'annulation ou la résolution du contrat principal, est possible. Les intimés font grief à la société BANQUE SOLFEA d'avoir débloqué les fonds le 21 janvier 2013 alors que la prestation de services n'était pas achevée. Ils font encore valoir que la violation par le prêteur de l'article L. 311-31 (devenu L. 312-48) du code de la consommation n'engage pas sa responsabilité civile pour faute mais le prive du remboursement du crédit.

M. et Mme [D] indiquent également que l'attestation de fin de travaux est intitulée « photovoltaïque », sans référence au ballon thermodynamique qui pourtant faisait aussi l'objet du contrat principal, et sans référence au paiement du raccordement, à la négociation d'un contrat de rachat d'électricité avec la société d'EDF et à l'obtention du CONSUEL.

L'attestation de surcroît n'indiquerait pas si le ballon était livré et posé et le délai de 14 jours séparant le bon de commande le 3 janvier 2013, à l'attestation de fin de travaux du 17 janvier 2013, n'aurait pas permis à la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE d'achever ses devoirs en installant les panneaux solaires, le ballon, en effectuant toutes les démarches administratives auprès de la société d'EDF, d' ERDF et du CONSUEL.

Les intimés ajoutent que l'attestation de fin de travaux indique que l'emprunteur sollicite une réduction du délai de rétractation, ce qui ne serait pas conforme aux dispositions de l'article L. 311-35 du code de la consommation, puisque la demande de livraison immédiate n'était possible que si le client en effectuait la demande expresse rédigée, datée et signée de sa main.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le'8 janvier 2019.

SUR CE,

À titre liminaire, il sera donné acte à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE qu'elle vient aux droits de la société BANQUE SOLFEA.

Sur la demande en résolution du contrat de crédit affecté

1- Aux termes de l'article L. 311-31 du code de la consommation, sur le fondement duquel le tribunal a prononcé la résolution du contrat de crédit : « les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci. Le vendeur ou le prestataire de services doit conserver une copie du contrat de crédit et le présenter sur leurs demandes aux agents chargés du contrôle ».

Contrairement à ce que soutient l'appelante, l'article L. 311-31 peut être invoqué indépendamment des demandes d'annulation ou de résolution du contrat principal, car si il concerne la prise d'effet des obligations mises à la charge de l'emprunteur, il concerne aussi et indirectement le rôle du prêteur au regard de l'interdépendance du contrat principal et du contrat de crédit affecté.

Cependant, la résolution suppose l'existence d'une violation manifeste et caractérisée de la réglementation instaurée pour protéger le consommateur, et la démonstration d'un préjudice en lien avec ce manquement.

2- M. et Mme [D] font ainsi grief à la société BANQUE SOLFEA d'avoir commis une faute dans la délivrance des fonds le 21 janvier 2013, soit 18 jours après la signature du bon de commande le 3 janvier précédent, et trois jours après de l'attestation de fin de travaux en date du 17 janvier 2013, sans s'assurer de la réalisation totale des travaux incluant le fonctionnement de l'installation, ce qui dans le délai de 14 jours séparant la date de la signature du bon de commande, de celle du déblocage des fonds, était de toute façon impossible.

M. et Mme [D] affirment que la société BANQUE SOLFEA a débloqué les fonds non seulement trop tôt mais sur le fondement d'une attestation de fin de travaux imprécise et ne correspondant pas à l'achèvement des prestations contractuelles.

En ce sens, ils soutiennent que la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE s'était engagée à livrer et à installer une centrale photovoltaïque, un ballon thermodynamique, à exécuter des démarches administratives consistant à faire raccorder l'onduleur au compteur de production, à obtenir le contrat de l'électricité produite auprès de la société EDF et à effectuer les démarches auprès du CONSUEL.

Ils ajoutent que les démarches administratives et le financement supposaient que la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE s'engageait à régler les frais de raccordement, les frais de CONSUEL, et les frais liés à la rédaction du contrat avec la société EDF.

L'attestation de fin de travaux du 17 janvier 2013 indique que l'objet du contrat de crédit concerne des travaux relatifs à l'installation photovoltaïque, sans référence particulière au ballon thermodynamique.

L'absence d'indication du ballon thermodynamique n'a toutefois pas empêché M. [D] d'attester par sa signature que les travaux, objets du financement « visé ci-dessus (qui ne couvrent pas le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles) sont terminés et conformes au devis. Je demande en conséquence à la BANQUE SOLFEA de payer la somme de 22 900 euros représentant le montant du crédit à l'ordre de l'entreprise ...», de sorte que M. et Mme [D] ne peuvent raisonnablement arguer que cette omission, concernant un élément de l'installation, altère la validité du document et leur a fait grief.

En effet, M. [D] a coché la case correspondant à sa demande de réduction du délai de rétractation, étant précisé dans ce document que : « le délai de rétractation expire à la date de la livraison du bien, sans pouvoir être inférieur à trois jours ni excéder 14 jours (si le client par une demande expresse, rédigée et signée de sa main, demande la livraison immédiate du bien). ».

Aucun grief ne peut donc être tiré de cette mention puisque l'attestation a été signée plus de sept jours après la conclusion du contrat principal, le délai de rétractation de l'article L. 121-25 du code de la consommation prévoyant que dans les sept jours, jours fériés compris, à compter de la commande ou de l'engagement d'achat, le client a la faculté de renoncer par lettre recommandée, ayant été respecté, et que le déblocage des fonds est intervenu 14 jours après la conclusion du contrat de crédit, l'article L. 311-12 du même code prévoyant que l'emprunteur peut se rétracter sans motif dans un délai de 14 jours calendaires révolus à compter du jour de l'acceptation de l'offre de contrat de crédit, étant également respecté.

En outre, en application de l'article L. 311-35 du code de la consommation, si la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE avait exécuté les travaux financés à crédit dans le délai de rétractation y afférent, elle aurait pris le risque de conserver à sa charge les frais engagés en cas de rétractation de M. et Mme [D], ce qui n'a pas été le cas, de sorte que le moyen invoqué est inopérant.

3- M. et Mme [D] relèvent également une discordance entre l'attestation de fin de travaux et le bon de commande puisque l'attestation excluait expressément le raccordement au réseau éventuel et les autorisations administratives éventuelles, auxquels la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE se serait portée fort de les obtenir, concluant ainsi que ces démarches étaient incluses dans les prestations visées par le contrat principal, qu'elles étaient financées et ne pouvaient donc être exclues de l'attestation de fin de travaux.

Compte tenu des mois qui étaient nécessaires à ces démarches, le déblocage des fonds moins d'un mois après la signature du contrat aurait donc été prématuré et fautif.

Cependant, étant rappelé que le prêteur n'était pas compte tenu à un contrôle du bon achèvement de l'installation, il apparaît que le bon de commande versé au dossier énumère les démarches administratives et le financement incombant à la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE, ayant consisté au raccordement de l'onduleur au compteur de production, à l'obtention du contrat de rachat de l'électricité produite et à la démarche auprès du CONSUEL pour obtenir l'attestation de conformité.

Le raccordement de l'installation photovoltaïque au réseau public relevant de la prérogative exclusive de la société ERDF (ENEDIS) qui dispose en la matière d'un monopole, la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE ne s'engageait nécessairement qu'aux démarches administratives, à l'obtention d'un contrat pour la revente de l'électricité produite à la société EDF et à la prise en charge des frais y afférents.

La société BANQUE SOLFEA ne peut donc pas se voir reprocher d'avoir débloqué les fonds sur le fondement d'une attestation conforme aux prestations prévues et relevant de la compétence de la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE, et non pas à ce qui ne relevait pas de sa compétence.

Contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, l'attestation de fin de travaux était suffisamment claire et précise pour que la société BANQUE SOLFEA défère à l'ordre qui lui était donné de débloquer les fonds, puisque les autorisations administratives nécessaires au raccordement n'étaient pas à la charge ni de la compétence de la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE. De surcroît, le coût du raccordement impliquait le décaissement des fonds.

Il n'incombait donc pas à la société BANQUE SOLFEA de s'assurer de la mise en service de l'installation, alors que l'emprunteur la déterminait à verser les fonds à la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE au vu de sa signature de l'attestation de fin de travaux, de sorte que M. et Mme [D] ne sont pas recevables à soutenir ensuite, au détriment de la banque, que la prestation de services n'a pas été totalement exécutée.

4- Il est également constaté que les premières échéances étaient dues à la société BANQUE SOLFEA à compter du 5 février 2014, soit six mois après l'installation effective des panneaux photovoltaïques, comprenant leur raccordement.

M. et Mme [D] ne peuvent exciper d'aucun grief.

En effet, le 28 février 2013, la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE adressait à M. et Mme [D] la copie de l'attestation du CONSUEL, et le 14 mai suivant, elle signait une attestation sur l'honneur laissant entendre que les négociations auprès de la société EDF en vue de l'obtention d'un contrat de rachat de l'énergie solaire, avaient été effectuées.

Le 8 août 2013, l'installation, raccordée au réseau ERDF, fonctionnait et le même mois M. [D] concluait un contrat d'achat avec la société EDF afin de vendre l'électricité produite par l'installation, ainsi qu'il est justifié par les pièces produites aux débats.

Il est également justifié par l'avis d'impôt 2014 que M. et Mme [D] ont bénéficié d'un crédit d'impôt en ayant perçu la somme de 3 069 euros, et qu'ils ont facturé leur production à la société ERDF au prix de 947 euros pour la période du 8 août 2013 au 7 août 2014, et au prix de 823,32 euros, pour la période du 8 août 2014 au 7 août 2015.

En conséquence, les obligations de M. et Mme [D] pouvaient prendre effet à compter du 5 février 2014, en toute conformité avec les dispositions de l'article L. 311-31 du code de la consommation.

En réalité M. et Mme [D] soutiennent un préjudice indéterminé puisqu'ils déclarent que ça n'est que tardivement qu'ils ont pris conscience : « qu'ils avaient été victimes d'une société sans scrupule, car poursuivie par de nombreux consommateurs lui reprochant majoritairement de leur avoir fait faussement croire un autofinancement de leurs installations et avec un matériel aux qualités douteuses ».

Cependant, l'autofinancement de leur crédit faisait partie des engagements contractuels de leur co-contractant.

5- En définitive, la société BANQUE SOLFEA n'avait pas à vérifier la réalité des déclarations de M. et de Mme [D], ni à s'assurer personnellement du parfait achèvement de l'installation, qui ne dépendait pas de la société GROUPE SOLAIRE DE FRANCE dont elle finançait les strictes prestations.

Ainsi ne pouvait-elle pas refuser de débloquer le prêt et s'opposer aux instructions formelles données par ses clients pour y procéder, ces derniers étant libres de se prévaloir ou non des nullités édictées en leur faveur.

Les moyens développés au soutien d'une demande en résolution du contrat de crédit sont donc infondés.

M. et Mme [D] apparaissent défaillants dans la preuve d'un manquement contractuel imputable à la société BANQUE SOLFEA.

Dans ces conditions, le jugement doit être infirmé en toutes ses dispositions, et le contrat de crédit continuera à produire ses effets.

Par conséquent, M. et Mme [D] seront condamnés à rembourser à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 6 965,70 euros, correspondant aux échéances de prêt restituées en exécution du jugement assorti de l'exécution provisoire, et les échéances de prêt suspendues à compter du jugement, du fait de la résolution du contrat de crédit avec exécution provisoire, seront reportées en fin de prêt.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

M. et Mme [D], succombant en cause d'appel, seront condamnés en tous les dépens de première instance et d'appel.

Eu égard aux circonstances de la cause, il convient d'allouer une somme de 1 500 euros à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe :

- Donne acte à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de ce qu'elle vient aux droits et obligations de la société BANQUE SOLFEA,

- Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- Déboute M. et Mme [D] de toutes leurs demandes en résolution du contrat de crédit affecté conclu avec la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, qui continuera en conséquence à produire ses effets,

- Condamne M. et Mme [D] à rembourser à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 6 965,70 euros, correspondant aux échéances de prêt restituées en exécution du jugement assorti de l'exécution provisoire,

- Dit que les échéances de prêt suspendues à compter du jugement, du fait de la résolution du contrat de crédit avec exécution provisoire, seront reportées enfin de prêt,

- Condamne in solidum M. et Mme [D] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Rejette toutes les autres demandes,

- Condamne in solidum M. et Mme [D] aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés directement par la SCP d'avocats GRAPPOTTE BENETREAU, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 16/14556
Date de la décision : 06/06/2019

Références :

Cour d'appel de Paris G9, arrêt n°16/14556 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-06;16.14556 ?
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