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05/06/2019 | FRANCE | N°16/03475

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 05 juin 2019, 16/03475


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 2



ARRÊT DU 05 JUIN 2019



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/03475 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYB6D



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Janvier 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/12123





APPELANTS



Monsieur [K] [T]

[Adresse 1]

[Localité 1]



Et



Madame [L] [D] épouse [T]

[Adresse 1]

[Localité 1]



Représentée par Me Stéphane BRIZON, avocat au barreau de PARIS, toque : D2066



Compagnie d'assurances GMF ASSURANCES

[A...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRÊT DU 05 JUIN 2019

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/03475 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYB6D

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Janvier 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/12123

APPELANTS

Monsieur [K] [T]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Et

Madame [L] [D] épouse [T]

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Stéphane BRIZON, avocat au barreau de PARIS, toque : D2066

Compagnie d'assurances GMF ASSURANCES

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentés par Me Stéphane BRIZON, avocat postulant et plaidant , avocat au barreau de PARIS, toque : D2066

INTIMES

Syndicat des copropriétaires SDC [Adresse 3]

représenté par son syndic, la société CARDINAL sise [Adresse 4],

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représenté par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocat plaidant Me Me Laurence GUEGAN, avocat au barreau de PARIS, toque : B0748

La Compagnie ALBINGIA, S.A

SIRET n° 429 369 309 00043,

dont le siège social est [Adresse 6], représentée par ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me William FUMEY, ayant pour avocat plaidant Me Aude KERLEROUX de la SELARL ROINÉ ET ASSOCIES, avocatS au barreau de PARIS, toque : A0002

SA AXA FRANCE IARD agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Représentée par Me Hélène DELAITRE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1907

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Février 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre

M. Frédéric ARBELLOT, Conseiller

Madame Muriel PAGE, Conseillère

qui en ont délibéré, dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Amédée TOUKO-TOMTA

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre et par Amédée TOUKO-TOMTA, Greffier présent lors de la mise à disposition.

***

FAITS & PROCÉDURE

Depuis le 28 août 2006, M. et Mme [T] étaient propriétaires non occupants d'un appartement au rez-de-chaussée dans l'immeuble en copropriété situé [Adresse 9]) qu'ils ont cédé le 19 septembre 2014.

Depuis le 3 décembre 2007, M. et Mme [T] ont subi diverses infiltrations d'eau liées à des infiltrations par façade, fuites sur descente des eaux usées de l'immeuble.

A la demande de M. et Mme [T], par une ordonnance du 10 janvier 2012, le juges des référés du tribunal de grande instance de Paris a ordonné une expertise judiciaire et désigné M. [H] comme expert avec mission habituelle en la matière.

L'expert a déposé son rapport le 10 janvier 2014.

Par actes des 5 et 11 août 2014, M. et Mme [T], ainsi que leur assureur de protection juridique, la société GMF Assurances, ont fait assigner en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Paris le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10], ci après le syndicat des copropriétaires ou le syndicat, ainsi que les assureurs successifs de l'immeuble, à savoir la société Albingia et la société Axa France Iard.

Dans leurs dernières conclusions du 3 février 2015, M. et Mme [T] et la société GMF Assurances demandaient au tribunal de :

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et ses assureurs successifs, les sociétés Albingia et Axa France Iard à régler à la société GMF Assurances les sommes de:

+ 9 000 euros au titre des travaux de réfection de l'appartement sinistré,

+ 166,27 euros au titre des frais de consommation électrique,

+ 722,25 euros au titre des frais de décoffrage,

+ 1 226,97 euros au titre des frais d'assèchement du local ;

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et ses assureurs successifs, les sociétés Albingia et Axa France Iard à régler à M. et Mme [T] les sommes de :

+ 36 725 euros au titre du trouble immatériel,

+ 1 545,47 euros au titre des charges locatives,

+ 658,21 euros au titre des frais de consommation électrique ;

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et ses assureurs successifs, les sociétés Albingia et Axa France Iard à régler à M. et Mme [T] et la société GMF Assurances la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer les dépens ;

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Par jugement du 15 janvier 2016, le tribunal de grande instance de Paris a :

- dit n'y avoir lieu à révoquer l'ordonnance de clôture ;

- écarté les conclusions et pièces produites postérieurement à celle-ci ;

- dit que la société GMF Assurances ne rapporte pas la preuve de sa subrogation dans les droits de M. et Mme [T] ;

- déclaré, en conséquence, irrecevables les demandes de la société GMF Assurances au titre des sommes de 9 000 euros, 166,27 euros, 722,25 euros et 1 226,97 euros ;

- dit que la preuve n'est pas rapportée que M. et Mme [T] ont contribué au dommage dont ils réclament réparation ;

- déclaré le syndicat des copropriétaires entièrement responsable de ce dommage ;

- condamné le syndicat des copropriétaires à payer à M. et Mme [T] la somme de 15 500 euros au titre du préjudice de jouissance et locatif ;

- débouté M. et Mme [T] de leurs demandes indemnitaires plus amples ;

- dit que la société Albingia doit sa garantie au syndicat des copropriétaires, avec application toutefois des franchises et plafonds de garantie prévus à la police ;

- mis hors de cause la société Axa France Iard ;

- ordonné l'exécution provisoire de ce jugement ;

- condamné le syndicat des copropriétaires aux dépens et dit que les avocats qui en ont fait la demande pourront recouvrer contre cette partie ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamné le syndicat des copropriétaires à verser la somme de 1 000 euros à M. et Mme [T] en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande.

Le 5 février 2016, M. et Mme [T] et la société GMF Assurances ont relevé appel de ce jugement.

La procédure devant la cour a été clôturée le 6 février 2019.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions signifiées le 5 février 2019, par lesquelles M. et Mme [T] et la société GMF Assurances, appelants, demandent à la cour de :

Réformant le jugement déféré, s'agissant du quantum des indemnités allouées par les premiers juges,

Retenant la responsabilité du syndicat des copropriétaires quant aux désordres subis par M. et Mme [T],

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et ses assureurs successifs, les sociétés Albingia et Axa France Iard à régler à la société GMF Assurances les sommes de:

+ 9 000 euros au titre des travaux de réfection de l'appartement sinistré,

+ 166,27 euros au titre des frais de consommation électrique,

+ 722,25 euros au titre des frais de décoffrage,

+ 1 226,97 euros au titre des frais d'assèchement du local ;

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et ses assureurs successifs, les sociétés Albingia et Axa France Iard à régler à M. et Mme [T] les sommes de :

+ 36 725 euros au titre du trouble immatériel,

+ 1 545,47 euros au titre des charges locatives,

+ 658,21 euros au titre des frais de consommation électrique ;

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et ses assureurs successifs, les sociétés Albingia et Axa France Iard à régler à M. et Mme [T] et la société GMF Assurances la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles dus en première instance et celle de 3 000 euros complémentaire en application des mêmes dispositions au titre des frais irrépétibles dus dans le cadre de la présente procédure d'appel ;

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et ses assureurs successifs, les sociétés Albingia et Axa France Iard à régler les dépens tant de première instance que d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Brizon, avocat.

Vu les conclusions signifiées le 4 juillet 2016, par lesquelles le syndicat des copropriétaires, intimé ayant formé appel incident, invite la cour à :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu que le préjudice locatif n'est indemnisable qu'à compter du 31 août 2010 ;

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu que M. et Mme [T] ne peuvent arguer que d'une simple perte de chance au titre de leur préjudice immatériel ;

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Albingia à garantir le syndicat des copropriétaires de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre;

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il n'a pas fait droit aux demandes au titre des charges locatives et des frais d'électricité ;

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a mis hors de cause la société Axa France Iard et qu'il a limité la garantie de la société Albingia eu égard aux dispositions de la police d'assurance ;

Statuant à nouveau,

- constater que M. et Mme [T] ont concouru à la survenance du dommage à hauteur de 25 % de responsabilité ;

- ramener les demandes formulées par M. et Mme [T] au titre de leur préjudice locatif à de plus justes proportions ;

- débouter M. et Mme [T] de leur demande au titre du remboursement des charges locatives et M. et Mme [T] et la société GMF Assurances de leur demande au titre des frais d'électricité ;

- ramener le surplus des demandes de la société GMF Assurances à de plus justes proportions ;

- constater que les conditions particulières versées aux débats par les sociétés Albingia et Axa France Iard ne sont pas signées ;

- dire que ni la sociétés Albingia et Axa France Iard ne peuvent se prévaloir d'exclusions contractuelles ou de limites de garanties (plafonds et franchises) ;

- condamner in solidum les compagnies d'assurances de l'immeuble, les sociétés Albingia et Axa France Iard, à le garantir de toutes les condamnations qui seraient mises à sa charge;

- condamner in solidum les compagnies d'assurances de l'immeuble, les sociétés Albingia et Axa France Iard, à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner toute partie succombante aux dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de maître Baechlin.

Vu les conclusions signifiées le 1er juillet 2016, par lesquelles la société Axa France Iard, intimée, demande à la cour de :

- constater que les appelants ne formulent aucun argument tant de droit que de fait à l'appui de leurs demandes telles que dirigées à son encontre ;

- déclarer leurs demandes irrecevables,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé sa mise hors de cause, les désordres étant survenus antérieurement à la prise d'effet de son contrat, le 1er février 2010 ;

A titre superfétatoire,

- constater le défaut d'aléa, lors de la souscription du contrat, les copropriétaires étant parfaitement informés depuis 2008, de l'état de dégradation du ravalement et de la nécessité des travaux de reprise ;

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la mise hors de cause de la société Axa France Iard, les désordres consécutifs au sinistre de 2007 étant apparus antérieurement à la prise d'effet de son contrat ;

- condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens de la présente instance, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Grappotte Bénetreau, avocat.

Vu les conclusions signifiées le 5 février 2019, par lesquelles la société Albingia, intimée ayant formé appel incident, demande à la cour de :

A titre principal,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que les demandes formées par la société GMF Assurances sont irrecevables, en l'absence de preuve de subrogation ;

- débouter la société GMF Assurances de l'intégralité de ses prétentions et déclarer sans objet la demande en garantie du syndicat des copropriétaires ;

A titre subsidiaire,

- réformer le jugement déféré et dire que M. et Mme [T] ont concouru à la réalisation de leur dommage et que la part de responsabilité du syndicat des copropriétaires ne saurait excéder 75% ;

Subsidiairement,

- réformer le jugement déféré et dire que M. et Mme [T] ont concouru à la réalisation de leur dommage et que la part de responsabilité du syndicat des copropriétaires ne saurait excéder 89% ;

A titre infiniment subsidiaire,

- réformer le jugement déféré et dire que les désordres ne sont pas garantis par la police souscrite auprès de la société Albingia ;

- infirmer le jugement déféré et dire que la survenance des désordres ne présente aucun caractère aléatoire ;

- débouter les requérants des demandes formées en ce sens et déclarer sans objet la demande en garantie du syndicat des copropriétaires ;

A titre superfétatoire,

- dire que l'indemnité concernant les frais de réfection de l'appartement ne saurait excéder la somme de 3 759,72 euros ;

- débouter la société GMF Assurances de la demande formée au titre des frais de consommation électrique ;

- réduire à de plus justes proportions l'indemnité concernant les frais de décoffrage et d'assèchement du local ;

- dire que le préjudice locatif ne peut s'analyser qu'en perte de chance ;

- réformer le jugement déféré et dire que la période concernée par cette perte de chance s'étendrait du mois d'août 2010 au mois d'août 2011 ;

- débouter M. et Mme [T] de leur demande au titre des charges locatives ;

- confirmer le jugement et débouter M. et Mme [T] de leur demande au titre des frais de consommation électrique ;

En tout état de cause,

- dire qu'aucune condamnation in solidum ne peut être prononcée à son encontre ;

- dire qu'elle ne sera tenue que dans les limites de son contrat ;

- faire application des plafonds de garantie prévus par la police ;

- débouter la société GMF Assurances, M. et Mme [T] et le syndicat des copropriétaires de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner tout succombant à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de maître Fumey.

SUR CE,

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;

En application de l'article 954, alinéa 2, du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;

Sur les désordres constatés, leur cause et les responsabilités encourues

S'agissant de l'existence des désordres, l'expert judiciaire, M. [H], mentionne (p. 9) dans son rapport d'expertise du 10 janvier 2014 (pièce n° 16 des appelants) que :

'Les infiltrations touchent la pièce principale et la salle de bains.

Dans la pièce principale, dégradations sur le mur de façade et en retour sur le côté gauche, ainsi que sur le mur de droite, au niveau du pan coupé et retour.

Le plafond est également dégradé. Présence d'humidité sur les 3 murs.

Dans la salle d'eau, dégradations au plafond, sur le mur mitoyen de la pièce principale et sur le mur de façade.

A l'extérieur, l'expert et les parties constatent que le ravalement est en mauvais état, comporte des parties où le plâtre est à nu, des fissures d'enduit les tableaux de la fenêtre de la pièce sont dégradés.

Derrière la cloison en pan coupé, il est constaté la présence d'un boisseau de conduit de cheminée et d'une descente ancienne.

Les deux sont coupés à la hauteur du plancher haut du rez-de-chaussée.

Les taches d'infiltrations situées en plafond au fond de la pièce sont sèches' ;

Ces désordres ont eu pour effet de rendre l'appartement appartenant à M. et Mme [T] inhabitable à compter du 1er décembre 2008 (rapport, p. 11) ;

S'agissant de la cause de ces désordres, l'expert mentionne (p. 10) dans son rapport d'expertise du 10 janvier 2014 (pièce n° 16 des appelants) que :

'L'expert estime que les désordres constatés chez M. [T] ont 3 origines :

1. En 2007 fuite sur la descente immeuble et corniche cassée

2. infiltrations à partir de la jardinière et du muret ; [...]

3. Ravalement vétuste et n'assurant pas l'étanchéité de la façade ; le ravalement avait été mis à l'ordre du jour de l'AG de 2008, sans succès.

L'expert estime que ces 3 désordres sont imputables au syndicat des copropriétaires' ;

S'agissant des responsabilités encourues, aux termes de l'article 14, alinéa 4, de la loi du 10 juillet 1965 : 'Il (le syndicat des copropriétaires) a pour objet la conservation de l''immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires' ;

Il résulte des conclusions du rapport d'expertise, comme des pièces produites en appel, que les désordres subis par l'appartement de M. et Mme [T] ont pour cause exclusive le mauvais entretien des parties communes par le syndicat des copropriétaires étant précisé, en outre, que le fait qu'une majorité de copropriétaires, dont M. et Mme [T] (représentant 1.055 tantièmes sur 10.000èmes de tantièmes), aient voté contre l'autorisation de travaux de ravalement de la façade du bâtiment B lors de l'assemblée générale du 4 décembre 2008 (pièce n° 1 du syndicat) ( p. 9-10) n'est pas de nature à constituer une faute de ces derniers qui serait en lien direct avec leur préjudice au titre des présents désordres résultant d'un mauvais entretien des parties communes qui sont apparus dès 2007, soit antérieurement à ce vote ;

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a dit que la preuve n'est pas rapportée que M. et Mme [T] ont contribué aux dommages dont ils réclament réparation et déclaré le syndicat des copropriétaires entièrement responsable de ces dommages ;

Sur la réparation des préjudices subis par M. et Mme [T]

Il est établi que M. et Mme [T] ont mis leur studio à disposition de leur fille, à titre gratuit, par une convention du 13 mai 2007 (pièce n° 13 des appelants) allant du 16 mai 2007 au 31 août 2010 ;

Selon l'expert, l'appartement appartenant à M. et Mme [T] était inhabitable à compter du 1er décembre 2008 (rapport, p. 11) ;

Il en résulte que M. et Mme [T], qui ne justifient pas en appel avoir exposé des frais de relogement de leur fille entre les 1er décembre 2008 et 30 août 2010, n'ont, en réalité, pas subi un préjudice locatif au sens strict avant le 31 août 2010, même s'ils ont subi une atteinte à la propriété de leur studio sur cette période de 19 mois que la cour évalue à la somme de 300 euros par mois ;

S'agissant de leur préjudice locatif, il est établi que M. et Mme [T] ont perdu une chance de percevoir un revenu locatif au titre leur studio sur la période de 38 mois allant du 1er septembre 2010 au 30 octobre 2013, date retenu par l'expert pour la fin des travaux (p. 11), la cour, reprenant la valeur locative du studio retenu par l'expert à concurrence de 565 euros par mois, évaluant cette perte de chance à la somme de 350 euros par mois charges locatives compris ; à l'inverse, il n'est pas justifié que les frais d'électricité d'un montant de 658, 21 euros réclamés par M. et Mme [T] seraient dus aux désordres imputables à la copropriété au titre du présent litige ;

Le jugement doit donc être réformé sur le montant de l'indemnisation du préjudice global subi par M. et Mme [T]

Le syndicat des copropriétaires doit être condamné à payer à M. et Mme [T] la somme totale de 19 000 euros (soit 300 euros x 19 mois et 350 euros x 38 mois), avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt ;

Sur l'indemnisation de la société GMF Assurances en qualité d'assureur subrogé dans les droits de ses assurés, M. et Mme [T]

Aux termes de l'article L. 121-12, alinéa 1er, du code des assurances, 'l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur' ;

La subrogation légale, prévue à l'article précité, par l'assureur dans les droits de l'assuré est fondée sur le paiement réalisé par le premier envers le second, de sorte que le recours subrogatoire n'est valablement exercé par l'assureur que s'il a versé l'indemnité d'assurance au bénéfice de l'assuré ;

Cet article n'exige pas que le paiement ait été fait entre les mains de l'assuré lui-même, de sorte que la subrogation se trouve fondée quand le paiement a été fait pour le compte de l'assuré entre les mains d'un tiers qui a réparé le dommage ;

La preuve du paiement incombe à l'assureur qui se prévaut de la subrogation et peut être rapportée par tout moyen ;

En l'espèce, la société GMF Assurances verse aux débats en appel une quittance subrogative du 30 janvier 2016 à concurrence de 13 002, 37 euros mentionnant que M. [T] reconnait avoir été indemnisé par son assureur au titre de son sinistre du 3 décembre 2007 (pièce n° 20 des appelants), ainsi que les conditions générales et particulières de sa police d'assurance de son logement sinistré (pièces n° 38, 39 et 47 des appelants) ;

En outre, la société GMF Assurances produit en appel une lettre adressée à la société Eger attestant qu'elle lui a versée le 7 mai 2014 la somme de 10 886, 88 euros au titre des travaux de réfection de l'appartement de ses assurés, M. et Mme [T] (pièce n° 22 des appelants), que l'expert a évalué à la somme de 9 000 euros (rapport, p. 11), dont elle demande le remboursement ;

La société GMF Assurances produit une lettre adressée à la société Eger attestant qu'elle lui a versée le 13 juillet 2013 la somme de 722, 25 euros au titre des travaux de démontage du coffrage pour le compte de ses assurés, M. et Mme [T] (pièces n° 15 et 19 des appelants), dont elle demande le remboursement ;

La société GMF Assurances produit une lettre adressée à M. [T] attestant qu'elle a versé à ses assurés le 13 septembre 2010 la somme de 166, 27 euros au titre du remboursement d'une facture EDF afférente à l'appartement assuré ; cependant, faute pour M. et Mme [T] de justifier que les frais d'électricité d'un montant de 658,21 euros seraient dus aux désordres imputables à la copropriété au titre du présent litige, son assureur subrogé dans leurs droits ne saurait obtenir le remboursement cette facture d'électricité ;

La société GMF Assurances produit une lettre adressée à la société AAD Phénix attestant qu'elle lui a versée le 25 août 2010 la somme de 1 226, 97 euros au titre des frais d'assèchement du local pour le compte de ses assurés, M. et Mme [T] (pièces n° 15 et 19 des appelants), dont elle demande le remboursement ;

Le jugement doit donc être réformé en ce qu'il a dit que la société GMF Assurances ne rapporte pas la preuve de sa subrogation dans les droits de M. et Mme [T] et déclaré, en conséquence, irrecevables les demandes de la société GMF Assurances au titre des sommes de 9 000 euros, 166,27 euros, 722,25 euros et 1 226,97 euros ;

Le syndicat des copropriétaires doit être condamné à payer à la société GMF Assurances subrogée dans les droits de ses assurés, M. et Mme [T], la somme totale de 10 949, 22 euros (soit 9 000 euros + 722, 25 euros + 1 226,97 euros) ;

Sur la garantie des assureurs successifs de l'immeuble

Sur la garantie de la société Axa France

M. et Mme [T] et la société GMF Assurances présentent divers demandes en paiement de sommes à l'égard de la société Axa France Iard, prise en sa seule qualité d'assureur de l'immeuble en copropriété, tenue de garantir les condamnations prononcées à l'encontre de son assuré (le syndicat des copropriétaires), de sorte que ce fondement suffit en lui-même à déclarer recevables leurs demandes formées de ce chef ;

Sur le bien fondé de ces demandes, il est établi que la société Axa France est l'assureur de l'immeuble du [Adresse 10], en vertu d'une police 'Multirisque Immeuble' n° 4486600904 (pièces n° 1 et 2 de la société Axa France Iard), depuis le 1er février 2010, soit postérieurement à la survenance du sinistre en 2007, de sorte que les dommages survenus à l'occasion de ce sinistre sont antérieurs à la prise d'effet de cette police et n'ont donc pas à être pris en charge par la société Axa France Iard dans le cadre du présent litige ;

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a mis hors de cause la société Axa France;

Sur la garantie de la société Albingia

Il n'est pas contesté que la société Albingia était l'assureur de l'immeuble en copropriété du [Adresse 11], en vertu d'une police 'Multirisques Immeuble' n° IN0601769 (pièces n° 7 et 8 de la société Albingia), depuis le 1er février 2006 jusqu'au 31 janvier 2010, soit durant les désordres imputables à la copropriété survenus en 2007 ;

La société Albingia oppose à son assuré deux clauses d'exclusion de sa garantie en cas de dégât des eaux (pièce n° 7 de la société Albingia) stipulées (p. 16-17 et 20 des conditions personnelles de la police) dans les termes suivants :

'Sont exclus :

Les infiltrations au travers des façades lorsqu'un sinistre ayant cette origine s'est déjà manifesté ou était connu de l'assuré et que les travaux pour y remédier n'ont pas été effectués [...]

Sont exclus :

Les dommages causés par un défaut de réparation ou d'entretien indispensables incombant à l'assuré, sauf cas de force majeure' ;

Cependant, ni le rapport d'expertise judiciaire, ni le fait qu'une majorité de copropriétaires, dont M. et Mme [T] (représentant 1.055 tantièmes sur 10.000èmes de tantièmes), aient voté contre l'autorisation de travaux de ravalement de la façade du Bâtiment B lors de l'assemblée générale du 4 décembre 2008 (pièce n° 1 du syndicat) ( p. 9-10) ne démontrent que le syndicat des copropriétaires était au courant avant la survenance du sinistre que les façades de l'immeuble assuré n'étaient plus étanches ;

Par ailleurs, la nécessité d'un ravalement de l'immeuble refusé par les copropriétaires lors de l'assemblée générale du 4 décembre 2008 ne suffit pas à établir que les dommages subis par M. et Mme [T] proviendraient d'un défaut de réparation ou d'entretien de l'immeuble par le syndicat des copropriétaires ;

En outre, il est constant que les clauses contractuelles visant à exclure la garantie 'dégâts des eaux' des assureurs multirisque immeuble ou multirisque habitation en cas de défaut d'entretien sont réputées non-écrites, lorsqu'elles ne sont ni formelles ni limitées, ce qui est le cas en l'espèce ;

Il convient d'exclure l'application de ces deux clauses de portée générale qui ne sont ni formelles ni limitées ;

Enfin, il n'est pas établi que le sinistre se rapportant à la vétusté de la façade et de la descente collective des eaux usées ait été dénuée de caractère aléatoire à l'égard du syndicat des copropriétaires ;

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit que la société Albingia doit sa garantie au syndicat des copropriétaires, avec application des franchises et plafonds de garantie prévus à la police et d'ajouter que cette garantie s'appliquera à toutes les sommes auquel le syndicat a été condamné par la cour en appel dans les mêmes conditions de franchises et de plafonds ;

Selon l'article L 124-3 du code des assurance, 'le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable' ; la société Albingia doit donc être condamnée in solidum avec le syndicat des copropriétaires à indemniser M. et Mme [T] et la GMF, le juement devant être réformé sur ce point ;

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le syndicat des copropriétaires et la société Albingia, parties perdantes, doivent être condamnés in solidum aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel les sommes suivantes :

- 3 000 euros à M. et Mme [T] et à la société GMF Assurances ;

- 2 000 euros à la société Axa France Iard ;

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter les demandes par application de l'article 700 du code de procédure civile formulées par le syndicat des copropriétaires et la société Albingia;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement ;

Déclare recevables les demandes présentées en appel par M. et Mme [T] et la société GMF Assurances à l'encontre de la société AXA France ;

Réforme le jugement en ce qu'il a :

- dit que la société GMF Assurances ne rapporte pas la preuve de sa subrogation dans les droits de M. et Mme [T] ;

- déclaré, en conséquence, irrecevables les demandes de la société GMF Assurances au titre des sommes de 9 000 euros, 166,27 euros, 722,25 euros et 1 226,97 euros ;

- condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9]) à payer à M. et Mme [T] la somme de 15 500 euros au titre de leur préjudice de jouissance et locatif ;

- rejeté les demandes de condamnation in solidum formulées par M. et Mme [T] et la GMF contre la société Albingia ;

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9]) et la société Albingia à payer à la société GMF Assurances, subrogée dans les droits de ses assurés (M. et Mme [T]), la somme totale de 10 949, 22 euros ;

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 9]) et la société Albingia à payer à M. et Mme [T] la somme totale de 19 000 euros au titre de leur préjudice de jouissance et locatif, incluant les charges locatives ;

Condamne la société Albingia, in solidum avec le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] aux dépens de première instance, ainsi qu'à payer à M. et Mme [T] la somme de 1 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Confirme le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant,

Dit que la société Albingia doit sa garantie au syndicat des copropriétaires du [Adresse 9]), avec application des franchises et plafonds de garantie prévus à la police, au titre de toutes les sommes auquel il a été condamné dans le cadre de la présente procédure ;

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] et la société Albingia aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer les sommes suivantes par application de l'article 700 du même code en cause d'appel :

- 3 000 euros à M. et Mme [T] et à la société GMF Assurances ;

- 2 000 euros à la société Axa France Iard ;

Rejette toute autre demande ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 16/03475
Date de la décision : 05/06/2019

Références :

Cour d'appel de Paris G2, arrêt n°16/03475 : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-05;16.03475 ?
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