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29/05/2019 | FRANCE | N°17/04111

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 29 mai 2019, 17/04111


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRET DU 29 MAI 2019

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04111 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B26FD



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Février 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MELUN - RG n° F15/00434





APPELANT



Monsieur [L] [F]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Philippe BRUN, avocat au barreau de REIMS, substituant à l'audience Me Julie GONIDEC, avocat au barreau de PARIS, D1520







INTIMÉE



SA PEUGEOT CIT...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRET DU 29 MAI 2019

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04111 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B26FD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Février 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MELUN - RG n° F15/00434

APPELANT

Monsieur [L] [F]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Philippe BRUN, avocat au barreau de REIMS, substituant à l'audience Me Julie GONIDEC, avocat au barreau de PARIS, D1520

INTIMÉE

SA PEUGEOT CITROEN AUTOMOBILES

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Cédric JACQUELET, substituant à l'audience Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Mars 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sandra ORUS, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Sandra ORUS, Présidente de chambre

Mme Carole CHEGARAY, Conseillère

Mme Séverine TECHER, vice-présidente placée

Greffier, lors des débats : Mme Catherine CHARLES

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Sandra ORUS, Présidente et par Anouk ESTAVIANNE, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [L] [F] a été engagé par la société SA Peugeot Citroën automobiles (PCA), par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 9 janvier 1989, en qualité d'opérateur polyvalent UEP préparateur de commandes, et il a travaillé au sein de l'établissement de [Localité 4].

Au dernier état de la relation contractuelle, M. [F] bénéficiait de la protection contre le licenciement en qualité de représentant syndical au comité d'établissement et au CHSCT.

A la suite d'un accord GPEC signé le 6 avril 2007, avec cinq organisations syndicales, un premier plan de départs volontaires dit 'PREC 1" a été mis en place par la société à compter du 4 janvier 2009 et jusqu'au 31 mars 2010, puis un second, dit 'PREC 2", à compter du 16 juillet 2010.

Dans le cadre de ce plan de départs , M. [F] s'est porté volontaire pour bénéficier de ce dispositif le 2 avril 2012.

Après autorisation de l'inspection du travail du 13 juin 2012, une convention de rupture amiable pour motif économique a été signée entre M. [F] et la société PCA le 19 juin 2012.

Son contrat de travail a pris fin le 30 juin 2012, et le salarié a bénéficié des mesures applicables au dispositif et perçu une indemnité de rupture de son contrat.

Contestant notamment le bien-fondé de la rupture de son contrat de travail et estimant ne pas avoir été rempli de l'intégralité de ses droits, M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Melun qui, par jugement rendu en sa formation de départage le 10 février 2017, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail, et au titre de la rupture d'égalité de traitement, et l'a condamné aux dépens.

M. [F] a formé appel du jugement le 21 mars 2017.

Par conclusions transmises le 20 juin 2017 par voie électronique, auxquelles il est expressément fait référence, M. [F] demande à la cour d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions, de juger abusive et nulle la rupture de son contrat de travail et de condamner la société PCA à lui payer les sommes de :

- 86 086,80 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

- 114 782,40 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité de la rupture du contrat de travail,

- 57 391,20 euros pour violation de l'ordre de départ,

- 14 347,80 euros pour méconnaissance de la procédure de licenciement économique collectif,

- 75 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination salariale et non-respect du principe ' à travail égal, salaire égal';

- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [F] demande en outre que les sommes portent intérêt légal à compter de l'arrêt à intervenir, jusuqu'à complet paiement, et d'ordonner la rectification de l'attestation pôle emploi sous astreinte de 1000 euros par jour de retard, passé un délai de 7 jours à compter de la notification du jugement à intervenir.

Par conclusions transmises le 16 août 2017 par voie électronique, auxquelles il est expressément fait référence, la société PCA sollicite la confirmation du jugement, subsidiairement de débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes, et en tout état de cause de le débouter du surplus de ses demandes et de le condamner aux dépens.

La clôture de l'instruction est intervenue le 13 février 2019 et l'affaire a été plaidée le 13 mars 2019.

Sur le fondement de l'article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens .

MOTIFS

Sur l'exécution du contrat

Sur la violation du principe 'à travail égal, salaire égal'

L'article L. 3221-2 du code du travail énonce que tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre les femmes et les hommes.

Sont considérés comme ayant une valeur égale par l'article L. 3221-4 du code du travail les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, ainsi que de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.

S'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe 'à travail égal, salaire égal' de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant cette différence.

En l'espèce, M. [F] reproche à son employeur une stagnation dans l'évolution de sa carrière et une absence d'entretiens annuels professionnels pour certaines années, et ce malgré la mise en place, à compter du 1er janvier 2006, d'un accord d'entreprise sur le développement et l'évolution professionnels des ouvriers de production, signé le 8 mars 2005.

Il produit ses entretiens professionnels annuels des 30 août 2005, 29 juin 2007 et 17 juin 2009 desquels il ressort notamment qu'il a signalé à son employeur n'avoir bénéficié que de deux augmentations individuelles de salaire en 18 ans.

M. [F] verse également des bulletins de salaire et une attestation de M. [M] [R] , qui exerçait les mêmes fonctions d'opérateur UEP préparateur de commandes, et avait une ancienneté similaire à la sienne, démontrant une évolution de coefficient de 190 à 195, sans passage en entretien professionnel lors de l'année 2010.

L'appelant produit encore les bulletins de salaire du mois de mars 2012 de quatre de ses collègues salariées, exerçant les mêmes fonctions et possédant une ancienneté proche de la sienne, mais toutes affectées d'un coefficient hiérarchique supérieur au sien (195, 200 et 215 pour elles contre 190 pour lui). Ces quatre salariées ont également des salaires de base supérieurs à celui de M [F].

Par ces éléments, M. [F] établit des faits susceptibles de caractériser une inégalité de traitement et de rémunération.

Ces éléments sont contestés par l'employeur qui fait valoir que l'évolution du coefficient hiérarchique de M. [F] ne présente aucune anomalie, car la société PCA utilise une méthode objective pour l'évolution des salariés, basée sur leur performance et garantie par une vitesse minimale d'évolution, conformément à l'accord d'entreprise du 8 mars 2005.

La société ajoute que l'évolution de la rémunération de M. [F] ne présente pas d'anomalie non plus, car le salarié, dont la rémunération a toujours été supérieure aux minima conventionnels, ne peut valablement se comparer à ses collègues, dont le niveau de performance et le coefficient hiérarchique sont plus élevés, alors que sa rémunération s'inscrit dans la moyenne de celles de ses anciens collègues placés dans la même situation que lui.

Il ressort de l'analyse des pièces produites par les parties que M [F] a été embauché en 1989 en qualité d'agent polyvalent UEP préparateur de commandes, affecté du coefficient 165, puis 170 en juin 1990. Il est ensuite passé au coefficient 180 en décembre 1998, puis au coefficient 190 à compter de mars 2009 et jusqu'à la rupture de son contrat de travail.

L'accord d'entreprise sur le développement et l'évolution professionnels des ouvriers de production a vocation à s'appliquer ici et prévoit des critères objectifs d'évolution professionnelle qui reposent sur le comportement professionnel (avec notamment une prise en compte du présenteisme et de la ponctualité), les compétences requises pour chaque coefficient, et enfin la performance au poste.

Cet accord applicable au 1er janvier 2006 met également en jeu une garantie de vitesse minimale d'évolution pour les opérateurs polyvalents UEP, dans les proportions suivantes:

- promotion du coefficient 170 à 180 après 8 années d'ancienneté,

- promotion du coefficient 180 à 190 après 12 années d'ancienneté.

Comme l'a relevé à bon droit le premier juge, s'il est constant que M. [F] n'a pas bénéficié d'entretien professionnel chaque année, cet élément n'est pas déterminant pour établir qu'il aurait connu une évolution de carrière plus favorable ou que cet absence d'entretien aurait entraîné une évolution moins favorable que celles des salariés exerçant dans les mêmes conditions.

Mais il est relevé que M. [F] n'a pas atteint tous ses objectifs de compétence, dont la pondération ne lui a pas permis de franchir un coefficient supérieur lors de son évaluation du 17 juin 2009. Cette évaluation professionnelle, comme les précédentes, montre qu'il n'a jamais rempli les compétences requises pour atteindre un coefficient supérieur à 190.

L'étude de leurs entretiens professionnels démontre au contraire que les quatre collègues de M. [F] ( M. [R], Mme [T], Mme [J] et Mme [S]), exerçant les mêmes fonctions que lui et ayant une ancienneté similaire, ont pu, grâce à leurs résultats suffisants et à l'accomplissement de tous leurs objectifs par coefficient, évoluer plus rapidement, sans bénéfice de la garantie de vitesse minimale d'évolution.

L'employeur démontre ainsi que M. [F] a connu une évolution certes minimale de son coefficient hiérarchique, mais qui s'analyse en une évolution normale, compte tenu de ses performances, et conforme aux règles établies dans l'entreprise.

De même, l'évolution de son salaire, dont l'employeur est seul juge de l'opportunité de la promotion individuelle des salariés, sous réserve de respecter les minima légaux et conventionnels et le principe d'égalité de traitement, ne semble pas plus anormale en ce que M. [F] a connu une augmentation constante due à son ancienneté, ainsi que quelques promotions individuelles, que son salaire s'inscrit dans la moyenne des salaires de ses collègues placés dans la même situation que lui, et qu'il a toujours perçu un salaire supérieur aux minima légaux et conventionnels.

C'est donc a bon droit que le juge départiteur a estimé que M. [F] ne démontrait pas l'existence d'une discrimination salariale, ni d'une rupture d'égalité de traitement, et a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts à ce titre.

Le jugement du conseil de prud'homme de Melun sera donc confirmé sur ce point.

Sur la rupture du contrat de travail

La société PCA soulève à titre principal l'irrecevabilité des demandes du salarié en invoquant en premier lieu le principe de séparation des pouvoirs, en vertu duquel le juge judiciaire ne peut valablement statuer sur les questions ayant donné lieu à un contrôle de l'administration, dans le cadre de la demande d'autorisation du licenciement, sauf pour lui à méconnaître le principe susvisé.

Elle invoque en second lieu un moyen d'irrecevabilité des demandes, tiré de la conclusion d'une convention de rupture du contrat de travail d'un commun accord pour motif économique, laquelle exclut toute contestation ultérieure de la cause de la rupture, sauf démonstration de l'existence d'une fraude, qui ne peut découler du seul recours à un plan de départ volontaire , quand bien même celui-ci est mis en oeuvre dans le contexte d'une fermeture de site, ni de la non-application des critères d'ordre des licenciements, dont la société PCA était en effet dispensée en recourant à un plan de départ volontaire.

La société PCA précise encore que la rupture du contrat de travail de M. [F] est intervenue dans le cadre du plan de départs volontaires PREC 2 et après autorisation de l'inspection du travail, c'est à dire dans un cadre conventionnel régulier et exempt de toute fraude.

Elle souligne que son obligation de reclassement a été respectée, et détaille les propositions qui ont été faites à M. [F] aussi bien en matière de reclassement interne qu'externe.

M. [F] fait valoir que la rupture de son contrat de travail s'analyse en un licenciement abusif et nul, en ce que la société a utilisé l'accord GPEC du 6 avril 2007 pour opérer une réduction de ses effectifs, alors qu'elle aurait dû mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi.

Il soutient que la société PCA a manqué à son obligation, à la fois collective, individuelle et conventionnelle de reclassement, puisqu' aucune offre personnalisée, individuelle et sérieuse ne lui a été proposée.

M. [F] précise encore que son employeur ne lui a pas fait bénéficier de la procédure de licenciement pour motif économique, ne lui a pas adressé de lettre de licenciement motivée, pas plus qu'il n'a respecté l'ordre des licenciements, rendant ainsi frauduleux le processus de rupture de son contrat de travail.

Par des motifs pertinents que la cour adopte , le premier juge a rappelé que lorsqu'elle intervient dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation du comité d'entreprise et qu'elle a été autorisée par l'inspecteur du travail, la rupture du contrat de travail pour motif économique d'un salarié investi d'un mandat représentatif, dit protégé, peut faire l'objet d'une convention de résiliation amiable; que lorsque la résiliation du contrat de travail résulte de la conclusion d'un accord de rupture amiable conforme aux prévisions d'un accord collectif ou d'un plan de sauvegarde de l'emploi, soumis aux représentants du personnel, la cause de la rupture ne peut être contestée sauf fraude ou vice du consentement.

Le jugement déféré a également souligné, à juste titre, que dès lors qu'il est admis que le salarié protégé dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail peut, sans remettre en cause le bien-fondé de la décision administrative et porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, contester devant le juge judiciaire le caractère suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi, dont la nullité, lorsqu'elle est encourue, s'étend à la rupture du contrat de travail consécutive à un départ volontaire ayant une cause économique et s'inscrivant dans un processus de réduction des effectifs, il doit également être admis que le salarié protégé ayant quitté son emploi après signature d'une convention de rupture amiable pour motif économique, préalablement autorisée par l'inspecteur du travail, peut, sans porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs, contester la cause de la rupture en invoquant la fraude résultant d'un contournement par l'employeur des règles d'ordre public du licenciement économique, résultant de l'absence de mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Il appartient toutefois au salarié de rapporter la preuve de la fraude qu'il invoque.

En l'espèce , il est relevé que la convention de rupture amiable signée par le salarié s'inscrit, non pas dans le cadre de l'accord de GPEC du 6 avril 2007 et de son avenant du 11 septembre suivant, mais dans celui d'un plan de départ volontaire établi pour un motif économique soumis, en application de l'article L. 1233-3 du code du travail, aux dispositions relatives à l'information et à la consultation des institutions représentatives du personnel, à l'information de l'autorité administrative et à l'élaboration d'un plan de reclassement comprenant des mesures de nature à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre conformément aux dispositions de l'article L. 1233-61 du même code, et cela alors même que le projet de réduction des effectifs repose sur le volontariat.

Il a été de même relevé à bon droit par le premier juge que ni le motif économique de la rupture du contrat de travail, ni la régularité de la mise en ouvre du plan de départ volontaire, lequel a bien été précédé d'une information-consultation des représentants du personnel et d'une information de l'autorité administrative, dans le cadre duquel le salarié a quitté l'entreprise, ne sont remis en cause par ce dernier.

Le fait pour l'employeur d'avoir recours à un plan de départ volontaire pour motif économique avec pour objectif la réduction, puis la suppression des effectifs d'un établissement dans la perspective de la fermeture de celui-ci, ne peut être considéré comme étant en soi un procédé déloyal constitutif d'une fraude, le recours à un dispositif reposant sur le volontariat, hors plan de sauvegarde de l'emploi prévoyant des licenciements, étant parfaitement licite.

En outre, il ne ressort pas de l'examen des documents versés aux débats relatifs à la première phase du PREC 1, soit du 4 janvier au 14 mai 2009, que l'employeur ait entendu supprimer dès cette date des emplois sur le site de [Localité 4].

En effet, ce premier plan de départ volontaire mentionne qu'il s'applique à l'ensemble des établissements de la société PCA et vise les personnels 'de structures' ne relevant pas des emplois de production, dont 'l'excédent des effectifs' était évalué à 2 700 salariés en 2009, précision étant faite dans sa seconde partie intitulée 'Dispositif d'adaptation des effectifs et d'accompagnement social', paragraphe 1 c 'Ventilation des départs par établissement', que 'Mis à part le site de [Localité 5] pour lequel il existe un objectif de résorption du sureffectif, une ventilation du nombre de départs par établissement n'est pas nécessaire car le dispositif repose sur un projet important de mobilité [...]' et 'des mesures de volontariat'.

Le jugement déféré a également relevé que la direction de la société PCA avait confirmé, lors de la séance du comité d'établissement du centre des pièces de rechange de [Localité 1]-Sénart du 4 décembre 2008, sur une question d'un élu lui demandant combien de personnes seraient concernées par le PREC 1 à [Localité 1] (établissement de [Localité 4]), qu'aucun chiffre ne pouvait être donné 'car les mesures reposent sur le volontariat des salariés et il n'y a pas de quota par site'.

Il a justement conclu que ce n'était qu'à compter de mai 2009, après que la décision fut prise par la société PCA de recentrer l'activité logistique et pièces de rechange sur son site de [Localité 7], comme il ressort du projet 'd'optimisation de la logistique pièces de rechange' présenté au comité central d'entreprise du 14 mai 2009, que la réduction des effectifs de l'établissement de [Localité 4] a été mise en oeuvre au moyen de l'extension du PREC 1 à tous les salariés de cet établissement, cet objectif ayant ensuite été poursuivi et amplifié avec le projet de 'réorganisation de la logistique pièces de rechange' présenté au comité central d'entreprise lors de sa réunion extraordinaire du 20 avril 2010, ce projet précisant qu'étaient alors envisagés '170 à 200 départs pour un effectif de 398 personnes' à [Localité 4] (page 41, 'Principes généraux guidant le projet'), ayant conduit au PREC 2; que la stratégie alléguée d'une fermeture programmée mais non annoncée de l'établissement de [Localité 4] et de la suppression corrélative des emplois dès l'origine du premier plan de départ volontaire n'est donc nullement établie.

Par ailleurs il est constant que ne s'appliquent pas au plan de départ volontaire les règles portant sur la rupture du contrat de travail elle-même, et ainsi, la notification de la lettre de licenciement et l'ordre des licenciements. La fraude ne peut donc résulter de l'inapplication en elle-même des critères d'ordre par l'employeur mettant en oeuvre régulièrement un plan de départ volontaire.

Le salarié soutient que la société PCA aurait contourné l'application des critères d'ordre afin d'obtenir le départ de l'entreprise des salariés les plus âgés en privilégiant le reclassement en son sein des plus jeunes.

Or le premier juge a estimé avec raison que la stratégie alléguée, dont l'existence ne peut être établie par les seules déclarations du directeur des ressources humaines lors d'une réunion du 9 mai 2007, par lesquelles il livrait son analyse en tant que représentant de la direction de la société PCA des conséquences de l'application des critères d'ordre, est démentie, à tout le moins dans ses effets prétendument recherchés, par les données extraites du bilan social de Melun (Moissy-Cramayel) pour l'année 2010, produites par la société PCA, qui montrent que s'agissant des anciens salariés de l'établissement de Moissy-Cramayel ayant fait l'objet d'un reclassement au sein de l'entreprise, leur âge moyen était de 43 ans et leur ancienneté moyenne de 14,5 ans, ces mêmes paramètres étant, pour les salariés ayant quitté l'établissement de Moissy-Cramayel à la suite d'une convention de rupture amiable et ayant engagé une procédure prud'homale à l'encontre de la société PCA, selon les chiffres avancés par le salarié et retenus par le conseil de prud'hommes, de 48 ans pour l'âge moyen et de 15 ans pour l'ancienneté moyenne, ce qui ne fait nullement ressortir une différence déterminante. Il ressort au surplus de ce même bilan social que parmi les salariés reclassés, les deux tranches d'âge les plus représentées sont celles des 35-44 ans (36,18%) et celle des 45-54 ans (36,68 %). La stratégie alléguée de l'employeur n'est donc pas démontrée.

Enfin, la fraude ne peut davantage résulter d'une appréciation inexacte par l'employeur de l'étendue de son obligation de reclassement.

Par conséquent la fraude alléguée n'est pas établie et c'est à bon droit que le premier juge a déclaré le salarié irrecevable à contester la cause de la convention de rupture amiable.

Sur l'obligation de reclassement

Lorsque la convention de résiliation amiable pour motif économique du contrat de travail d'un salarié protégé a été autorisée par l'inspecteur du travail, ce salarié ne peut, sans méconnaître le principe de la séparation des pouvoirs, demander au juge judiciaire des dommages et intérêts au titre du non-respect par l'employeur de son obligation légale ou conventionnelle de reclassement.

L'employeur justifie effectivement de la décision administrative autorisant à procéder à la rupture du contrat de travail d'un commun accord, pour raison économique, qui vise explicitement l'enquête contradictoire, le dispositif collectif donnant lieu aux mesures individuelles de rupture amiable ( PREC) déployé dans l'établissement, l'accord d'entreprise sur la GPEC, l'information consultation du comité d'entreprise, le motif économique justifiant la mise en place du dispositif pour la sauvegarde de la compétitivité, la volonté claire exprimée par le salarié pour adhérer au dispositif,

Il en résulte que M. [F] ne peut invoquer le manquement de la société PCA à son obligation de reclassement.

Il s'en suit que les demandes de M. [F] formées à l'encontre de la société PCA sont irrecevables, conformément à ce qu'a retenu le conseil de prud'hommes dont la décision sera confirmée en cette disposition.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

L'appelant qui succombe en son appel sera condamné aux dépens ; pour des raisons tirées de la situation économique des parties, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société PCA.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement de départage prononcé par le conseil de prud'hommes de Melun du 10 février 2017 en toutes ses dispositions ;

Ajoutant,

Condamne M.[L] [F] aux dépens d'appel ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 17/04111
Date de la décision : 29/05/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°17/04111 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-29;17.04111 ?
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