Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 7
ARRÊT DU 23 MAI 2019
(n° ,8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/09488 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3YIV
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Janvier 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 16/02527
APPELANTE
Madame [M] [D]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Me Marie-hélène THOMAS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1577
Plaidant Me Ségolène VIAL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1577
INTIMÉE
SARL BCRH & ASSOCIÉS
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représentée par Me Anne-laure BÉNET, avocat au barreau de PARIS, toque : J095
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mars 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Marie-Hélène DELTORT, président
Madame Bérengère DOLBEAU, conseiller
Monsieur François MELIN, Conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Frantz RONOT
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre et par Anna TCHADJA-ADJE, Greffier présent lors de la mise à disposition.
FAITS ET PROCÉDURE :
Par contrat à durée indéterminée en date du 4 septembre 2006, Mme [D] a été engagée en qualité d'assistante comptable par le cabinet d'Expertise-Comptable aux droits duquel est venue la société BCRH & associés et au profit de laquelle le contrat de travail a été transféré à compter du 1er janvier 2012.
Selon avenant en date du 26 février 2013, Mme [D] a bénéficié d'un congé parental d'éducation à temps partiel à concurrence de 121,34 heures de travail par mois réparties sur quatre journées par semaine.
Le 17 juin 2015, Mme [D] a donné sa démission avec effet au 18 juillet 2015.
Mme [D] a saisi le conseil de prud'hommes de [Localité 3] le 7 mars 2016 pour obtenir paiement de diverses sommes notamment au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail, du travail dissimulé et de la réalisation d'heures supplémentaires.
Par jugement en date du 10 janvier 2017, le conseil de prud'hommes a condamné la société BCRH & associés à payer à Mme [D] la somme de 4 400, 47 € à titre de rappel de congés payés et rejeté le surplus des demandes.
Pour statuer ainsi, le conseil a jugé que Mme [D], informée des conditions de réalisation des heures supplémentaires, ne démontrait pas avoir obtenu l'accord de son employeur, que les autres demandes n'étaient pas justifiées à l'exception des congés payés.
Le 6 juillet 2017, Mme [D] a interjeté appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Selon ses conclusions notifiées le 15 septembre 2017, Mme [D] conclut à l'infirmation de la décision déférée en ce qu'il a limité l'indemnité de congés payés à la somme de 4 400,47 € et en ce qu'il a rejeté ses autres demandes, et elle sollicite la condamnation de la société BCRH & associés au paiement des sommes suivantes :
-5 829,77 € au titre des heures supplémentaires et 582, 97 € au titre des congés payés y afférents,
- 2 941,78 € au titre du préjudice résultant du dépassement de la limite des heures légales des heures complémentaires,
- 6 180, 51 € au titre des congés payés,
- 2941,78 € au titre du préjudice pour perte du droit à congés payés,
- 17 650,68 € au titre de l'indemnité pour travail dissimulée,
- 8 825,34 € au titre du préjudice résultant de l'exécution déloyale du contrat de travail.
Elle sollicite également la délivrance, sous astreinte, de bulletins de paie rectificatifs et la régularisation de la situation de ses points de retraite pour les années 2013 à 2015.
Pour étayer la demande formulée au titre des heures supplémentaires, elle précise produire les relevés de temps déclarés quotidiennement dans le logiciel de l'entreprise précisant le temps de travail consacré à chaque client et détaillant les tâches réalisées, ce dont elle déduit que la société BCRH & associés avait connaissance des heures supplémentaires réalisées. Elle fait valoir qu'elle a toujours informé son employeur qu'elle était dans l'obligation de réaliser des heures supplémentaires et que son congé parental avait été accepté en janvier 2013 sans diminution de sa charge de travail, le gérant en ayant été informé dès le 19 février 2013. Elle indique que le retrait de neuf clients est intervenu en avril 2014, et elle en conclut que son employeur avait tacitement donné son accord pour la réalisation d'heures supplémentaires.
Elle conteste le règlement des heures supplémentaires par le biais de la prime exceptionnelle de janvier 2015 au motif que la majoration n'a pas été payée.
Elle sollicite l'indemnisation du préjudice résultant du dépassement à plus de dix reprises de la limite légale du temps de travail alors qu'initialement, elle avait pris un congé parental pour passer du temps avec sa famille.
Elle précise que la somme allouée au titre des congés payés n'a pas été calculée sur la bonne période de référence. Au surplus, elle soutient que tous les congés payés acquis ne lui ont pas été réglés.
Elle précise que les manquements de la société BCRH & associés en terme de charge de travail et de non-respect des congés payés l'ont amenée à donner sa démission, d'où sa demande d'indemnisation en raison du grave préjudice tant du point de vue de sa santé que de son emploi auquel elle a renoncé.
S'agissant de l'indemnité pour travail dissimulé, elle fait valoir que la société BCRH & associés était parfaitement informée et a refusé sciemment de régler les heures supplémentaires et complémentaires, qu'elle a même tenté de les compenser par l'attribution d'une prime exceptionnelle, ce qui démontre le caractère intentionnel de la dissimulation.
Au titre de l'exécution déloyale, elle invoque l'absence de mise en adéquation du portefeuille de clientèle avec son temps de travail, le non-paiement des heures supplémentaires.
Selon ses conclusions notifiées le 16 octobre 2017, la société BCRH & associés conclut à la confirmation du jugement quant au rejet des prétentions de Mme [D] et à l'infirmation quant à la somme allouée au titre des congés payés, subsidiairement au rejet de la demande complémentaire sollicitée à ce titre et elle sollicite une indemnité de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société BCRH & associés soutient que par note de service datant de 2012 et par courrier de 2014, Mme [D] a été informée de la demande de l'entreprise de ne pas réaliser d'heures supplémentaires, d'autant plus que leur réalisation n'était pas nécessaire au regard de sa charge de travail, a fortiori à compter d'avril 2014 puisque quatre clients avaient été retirés de son portefeuille et que neuf clients avaient été externalisés. Elle précise également les conditions dans lesquelles elle a été remplacée durant son congé maternité.
Elle souligne aussi que les relevés de temps produits par l'appelante ne peuvent pas étayer la demande de l'appelante au regard des forfaits appliqués. En outre, elle se fonde sur un courriel du 9 juillet 2015 aux termes duquel Mme [D] a reconnu que le solde dû au titre des heures supplémentaires s'élevait à 106 heures alors qu'elle réclame désormais le paiement de 238 heures. Elle relève l'absence de préjudice invoqué par Mme [D] au sujet du dépassement de la durée légale de travail.
Concernant la demande de rappel de congés payés, elle indique n'avoir pas fait obstacle à la prise de ces congés par la salariée et elle relate la grande liberté avec laquelle elle aménageait elle-même son temps de travail. Elle rappelle qu'en raison du remplacement de la salariée pendant son congé maternité, celle-ci ne peut pas invoquer la lourdeur de sa charge de travail pour justifier du report de ses congés payés. A titre subsidiaire, elle sollicite la confirmation de la décision du conseil des prud'hommes.
S'agissant du préjudice pour la perte du droit à congés, elle rappelle que Mme [D] n'a pas été dans l'impossibilité de les prendre.
Sur le travail dissimulé, elle conteste toute volonté de dissimulation et précise au surplus que le montant réclamé est erroné et s'établit à 14 292,32 €.
Concernant l'exécution déloyale du contrat de travail, elle rappelle les mesures prises pendant le congé maternité de Mme [D] afin de la remplacer et son acceptation quant aux modifications décidées unilatéralement par la salariée pour pallier l'absence de garde de son enfant malade de 2013 à 2015.
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions notifiées par RPVA.
L'instruction a été déclarée close le 27 février 2019.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur les heures supplémentaires
Il résulte de l'article L.3171- 4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires et mettre l'employeur en mesure de discuter la demande.
Pour étayer sa demande, Mme [D] verse aux débats les pièces suivantes :
- les relevés mensuels d'activité pour la période de janvier 2013 à juin 2015 inclus précisant le nom du client, l'exercice concerné, la durée du travail effectué, la nature de la prestation, la durée totale mensuelle de l'activité ;
- un courriel du 19 février 2013 rédigé par Mme [D] à l'attention de son employeur pour faire le point sur la gestion de son portefeuille demeuré identique alors qu'elle travaille maintenant à 80 % ;
- un courriel du 20 mars 2013 adressée par Mme [D] à son employeur afin de solliciter la mise en adéquation de son portefeuille avec la réduction de son temps de travail et de l'informer qu'elle a effectué 180 heures supplémentaires pour rattraper le retard accumulé en son absence durant laquelle seules les urgences avaient été réglées, et en réponse un courriel de l'employeur précisant qu'il va faire le point sur le portefeuille qui lui apparaît adapté au temps de travail de la salariée ;
- un courriel du 3 avril 2014 adressé par la société BCRH & associés à Mme [D] précisant qu'il a procédé à la diminution du portefeuille et à une externalisation de la gestion de certains dossiers, ce que cette dernière reconnaît, à concurrence de neuf clients et rappelant qu'il n'est pas souhaitable qu'elle effectue des heures supplémentaires, comprenant qu'elle a passé beaucoup de temps à remettre ses dossiers en état et ajoutant que la meilleure solution consiste à récupérer les heures supplémentaires effectuées sans que cela ne perturbe la bonne gestion de son portefeuille ;
- un tableau élaboré par l'appelante elle-même précisant le nombre d'heures de travail réalisées pour chaque semaine et le total de ces heures pour la période du 1er janvier 2013 au 30 juin 2015, soit 238,15 heures ;
- un échange de courriels (produit en pièce n°4 par la société intimée) en février 2015 dans le cadre duquel Mme [D] précise que son portefeuille est à jour et qu'elle a noté qu'elle ne devait plus effectuer d'heures supplémentaires, mais que concernant les 90 heures supplémentaires effectuées en janvier, la majoration n'avait pas été payée ; la société BCRH & associés y précise qu'il va régler l'équivalent de 90 heures de travail mais que le reste doit être récupéré et que la salariée ne doit plus effectuer d'heures supplémentaires à compter de ce jour sauf circonstances exceptionnelles ; Mme [D] donne son accord pour la rémunération de la moitié de son compteur d'heures supplémentaires, soit 90 heures sous forme de prime exceptionnelle de 1 564,20 € mais elle réclame la majoration que l'employeur refuse de lui régler au regard des conditions dans lesquelles ces heures ont été effectuées.
La demande de l'appelante est donc étayée.
Pour sa part, l'employeur produit les pièces suivantes :
- un courriel adressé à Mme [D] le 3 avril 2014 listant les dossiers devant être externalisés ;
- une note de service daté du 3 mars 2012 relative aux heures récupérables et indiquant que les salariés ont la possibilité d'avoir un crédit d'heures récupérables de 20 heures maximum;
- le courriel du 2 février 2015 évoqué ci-dessus et adressé à Mme [D] afin de lui demander de ne plus faire d'heures supplémentaires sauf circonstances exceptionnelles;
- des courriels échangés entre les parties fin juin et début juillet 2015 dont il ressort que la société BCRH & associés précise à Mme [D] qu'elle n'était pas autorisée à effectuer des heures supplémentaires, qu'elle a effectué 21 heures supplémentaires qui ont été récupérées ; Mme [D] répond qu'elle prend bonne note que le solde de ses heures supplémentaires, soit 120 heures, seront intégralement rémunérées avec la majoration lors de son solde de tout compte et elle récapitule les sommes qui lui sont dues : la majoration de 25 % sur les 90 heures supplémentaires non payées en janvier 2015, 120 heures supplémentaires avec la majoration, 7,5 jours de congés payés sur la base d'un salaire à temps plein, 76,45 jours de congés payés acquis sur la base d'un salaire à temps partiel ; par courriel du 9 juillet 2015, Mme [D] précise que la société BCRH & associés doit rémunérer 106 heures supplémentaires, étant précisé que 90 heures supplémentaires ont été rémunérées par le biais d'une prime exceptionnelle versée en janvier 2015 ;
- un échange de courriels datant du mois d'avril 2014 dont il ressort que quatre clients ont été retirés du portefeuille de Mme [D] et que neuf clients ont été externalisés ;
- un extrait du livre des entrées et sorties attestant de l'embauche en octobre 2012 d'une assistante confirmée afin, précise l'employeur, de remplacer Mme [D] pendant son congé maternité ;
- un relevé du temps de travail consacré par trois salariés de l'entreprise au traitement des dossiers de Mme [D] durant son congé maternité et le détail des prestations effectuées (comptabilité, révision du bilan, les paies, la fiscalité, les courriers, les entretiens avec les clients) soit au total 576 heures de travail au total réparties entre trois salariés ;
- plusieurs lettres de missions afin de démontrer que les prestations sont facturées de manière forfaitaire et que le relevé de temps produit par Mme [D] ne sert pas, selon l'entreprise, à la facturation.
Au regard des éléments produits par les parties de part et d'autre, il est établi qu'à compter du 26 février 2013, début du congé parental d'éducation à 80 %, représentant 121,34 heures de travail par mois, la charge de travail de Mme [D] est demeurée identique à celle effectuée précédemment dans le cadre d'un temps plein jusqu'au mois d'avril 2014. A compter de cette date, l'employeur a procédé à la réduction du nombre de clients affectés au portefeuille de la salariée par ré attribution et externalisation. Il s'en déduit que de février 2013 à avril 2014, la réalisation par la salariée d'heures complémentaires était nécessaire pour lui permettre d'assumer la charge de travail qui correspondait à celle d'un salarié travaillant à temps plein.
Par ailleurs, il ressort des courriels échangés entre les parties qu'en janvier 2015, la société BCRH & associés a admis que Mme [D] avait réalisé 90 heures complémentaires et les a rémunérées par le biais d'une prime exceptionnelle. Ce mode de rémunération n'étant pas prévue par la loi, la société BCRH & associés demeure redevable du paiement des heures complémentaires et de la majoration.
Pour la période postérieure au mois de janvier 2015, les courriels échangés ultérieurement entre les parties démontrent que l'employeur a reconnu que Mme [D] avait effectué des heures complémentaires. En effet, la société BCRH & associés précise dans ses écritures que la somme maximale due à Mme [D], déduction faite de la somme de 1 564,20 € réglée en janvier 2015, ne saurait excéder 2 219,34 €.
La société BCRH & associés est donc redevable de la somme de 4 174,59 € bruts au titre des heures complémentaires réalisées, majoration comprise, outre 417,45 € bruts au titre des congés payés afférents (addition des sommes suivantes : 2.219,34 € et de 1.955,25 €, cette dernière somme intégrant la majoration applicable aux heures complémentaires réalisées à concurrence de 1 564,20 €).
Sur le préjudice résultant du dépassement de la limite légale en matière d'heures complémentaires
Si Mme [D] soutient qu'elle a incontestablement subi un préjudice résultant du dépassement à dix reprises sur la période de février 2013 à juillet 2015 de la durée des heures complémentaires, elle n'explicite pas son préjudice de sorte que cette demande est rejetée.
Sur le rappel de congés payés
Contrairement à ce que soutient l'employeur, il lui incombe de justifier de l'accomplissement des diligences afin de permettre au salarié d'exercer son droit à congé en temps et en heure. Or, la société BCRH & associés ne verse aucune pièce aux débats démontant qu'il a tout mis en oeuvre pour permettre à Mme [D] de prendre ses congés payés.
En l'espèce, le bulletin de paie du mois de juin 2015 mentionne l'existence de 82,5 jours de congés payés. La société BCRH & associés a versé en juillet 2015 une somme de 2 992,32 € destinée à rémunérer 34 jours de congés payés de sorte qu'elle demeure redevable de la somme de 4 400,47 € bruts au titre des congés payés non pris, soit 50,5 jours, en ce inclus 2,5 jours de congés payés au titre du mois de juillet 2015.
Sur le préjudice résultant de la perte du droit à congés payés,
A ce titre, Mme [D] précise qu'elle a subi un préjudice grave du point de vue de sa santé et professionnellement puisqu'elle a renoncé à son emploi. Or, elle ne produit aucune pièce attestant de la dégradation de son état de santé et la lettre de démission qu'elle a rédigée ne comporte aucun motif. En conséquence, cette demande est rejetée.
Sur l'indemnité pour travail dissimulé
L'article L. 8221-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Il est constant que la dissimulation d'emploi salarié est constituée pour un employeur dès lors qu'il se soustrait intentionnellement à la déclaration préalable d'embauche ou à la remise de bulletins de salaire ou encore lorsqu'il omet sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.
La dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est donc caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.
En l'espèce, Mme [D] a travaillé à temps partiel à compter de février 2013 et a effectué de nombreuses heures complémentaires. Les courriels échangés entre les parties démontrent que l'employeur était informé de la réalisation par la salariée d'heures complémentaires et qu'en janvier 2015, il a sciemment rémunéré ces heures par le biais d'une prime exceptionnelle et refusé de régler la majoration afférente aux heures supplémentaires réalisées. Il est donc démontré que l'intention de dissimulation de l'employeur est établie. Dès lors, la société BCRH & associés est redevable de la somme de 15 416,10 € (6 x 2 569,35€ bruts après intégration de la somme allouée au titre des heures complémentaires).
Sur le préjudice résultant de l'exécution déloyale du contrat de travail
Mme [D] invoque l'absence d'adéquation entre son portefeuille et la durée de son temps de travail, l'absence de paiement des heures complémentaires et donc le non-respect de sa vie privée en ce qu'elle n'a pas pu bénéficier pleinement de son congé parental d'éducation.
Ces manquements sont établis ainsi que cela ressort des éléments examinés ci-dessus et n'ont effectivement pas permis à Mme [D] de bénéficier de la réduction du temps de travail légalement induite par le congé parental d'éducation. Le préjudice subi est évalué à la somme de 1 500 € au regard de la durée des manquements et des nombreux courriels adressés par la salariée à son employeur afin de solliciter une réduction de sa charge de travail en adéquation avec son temps de travail.
Sur la demande de régularisation des points de retraite au titre des années 2013 à 2015
Pour prétendre à la régularisation des points de retraite, Mme [D] se fonde sur une lettre ministérielle du 29 mars 1961 du Ministre du Travail. En réponse à une question sur les conditions dans lesquelles devrait être déterminé le montant des cotisations dues, lorsque des rappels de salaires sont versés par un employeur à un salarié en exécution de décisions rendues par les Conseils de Prud'hommes, celui-ci précise qu'à son avis, et sous réserve de l'appréciation souveraine des tribunaux, le caractère réparatoire d'une telle décision impose que les rappels de salaires en question, soient rapportés sur les périodes de travail auxquelles ils s'appliquent de façon que le travailleur soit rétabli, vis-à-vis de la Sécurité Sociale, dans la situation qui aurait été normalement la sienne si son employeur avait régulièrement observé, à son égard, la réglementation relative aux salaires.
Si cette lettre vise la situation du salarié vis à vis des cotisations sociales et non la régularisation des points de retraite, le salarié, dont les heures de travail ont été dissimulées, ce qui est le cas de Mme [D], peut légitimement prétendre au rétablissement de ses droits à retraite qui ont été éludés par l'employeur et donc à l'accomplissement des formalités auprès des organismes concernés ainsi qu'au versement des cotisations afférentes. Dès lors, la demande formée par Mme [D] est bien fondée et l'employeur devra y satisfaire dans un délai de quatre mois à compter de l'arrêt.
Une somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile est allouée à Mme [D].
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement en ce qu'il a alloué à Mme [D] la somme de 4 400, 47 € à titre de rappel de congés payés et rejeté ses demandes au titre du préjudice résultant du dépassement de la limite des heures légales et du préjudice pour perte du droit à congés payés ;
Infirme le jugement pour le surplus ;
Et statuant à nouveau,
Condamne la société BCRH & associés à payer à Mme [D] les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur par le conseil de prud'hommes pour les sommes à caractère salarial et à compter du prononcé de l'arrêt pour celles à caractère indemnitaire :
- 4 174,59 € bruts au titre des heures complémentaires et 417,45 € bruts au titre des congés payés afférents,
- 15 416,10 € au titre de l'indemnité pour travail dissimulée,
- 1 500 € au titre du préjudice pour exécution déloyale du contrat de travail,
- 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Ordonne à la société BCRH & associés de procéder à la régularisation de la situation de Mme [D] quant à ses points de retraite au titre des années 2013 à 2015 auprès de l'organisme concerné dans un délai de quatre mois à compter de l'arrêt ;
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne la société BCRH & associés au paiement des dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT