La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/05/2019 | FRANCE | N°17/07536

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 22 mai 2019, 17/07536


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 22 MAI 2019



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/07536 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3MXZ



Décision déférée à la Cour : Jugement

Jugement du 27 Avril 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° 14/00891





APPELANT

Maître [E] [R] Ã

¨s qualités de mandataire liquidateur de la société SARL DOMINGOS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Jean PRINGAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : C2539







INTIMÉS

Monsi...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 22 MAI 2019

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/07536 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3MXZ

Décision déférée à la Cour : Jugement

Jugement du 27 Avril 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° 14/00891

APPELANT

Maître [E] [R] ès qualités de mandataire liquidateur de la société SARL DOMINGOS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Jean PRINGAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : C2539

INTIMÉS

Monsieur [W] [K]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1955 à EGYPTE

Représenté par Me Georges-David BENAYOUN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0135, substitué à l'audience par Me Nassima SAFAR, avocat au barreau de PARIS,

Association AGS CGEA ILE DE FRANCE EST

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Frédéric ENSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1350

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 Mars 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Hélène GUILLOU, Présidente de chambre

Mme Anne BERARD, Présidente de chambre

Mme Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Hélène GUILLOU, Présidente dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier : Mme Clémence UEHLI, greffier lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Hélène GUILLOU, présidente et par Madame Pauline MAHEUX, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 1er avril 2014, M. [J], gérant de la société Domingos, a fait une déclaration de cessation de paiement à la date du 31 janvier 2013 faisant mention d'une créance salariale de 27.376,07 € pour M. [K], pour des salaires impayés entre le 1er janvier 2013 et le 28 février 2014, outre les congés payés afférents.

Par jugement du tribunal de commerce d'Evry en date du 7 avril 2014, la société Domingos a été placée en redressement judiciaire et Me [R] nommée mandataire judiciaire.

La conversion en liquidation judiciaire a été prononcée par jugement du 2 mars 2015, Me [R] ayant été désigné comme liquidateur judiciaire.

M. [K] a été convoqué le 4 mars 2015 à un entretien préalable fixé au 13 mars 2015 en vue d'un éventuel licenciement économique et a été licencié pour ce motif par lettre en date du 16 mars 2015.

Il a décliné le 18 mars 2015 la proposition de CSP qui lui avait été faite lors de l'entretien préalable.

M. [K] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Longjumeau le 5 septembre 2014 qui, par jugement du 27 avril 2017, a reconnu sa qualité de salarié, fixé son salaire à la somme de 3144,90€ et fixé sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Domingos, prise en la personne de Me [R], en qualité de mandataire liquidateur, au sommes suivantes :

- 45.282,28 € à titre de rappel de salaire du 10 janvier 2013 au 6 avril 2014 et des mois de février et mars 2015,

-4.528,28 € au titre des congés payés afférents,

- 9.434,70 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 5.333,41 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

- 1.532 € à titre d'indemnité légale de licenciement.

Il a dit que le jugement serait opposable à l'AGS CGEA Ile de France Est.

Il a condamné Me [R], es qualités à verser à M. [K] 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'a débouté du surplus de ses demandes et a débouté Me [R] es qualités de sa demande reconventionnelle.

Le 24 mai 2017, Me [R], es qualités, a régulièrement interjeté appel.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 1er août 2017, auxquelles il est expressément fait référence, Me [R], es qualités demande à la cour d'infirmer le jugement rendu et de:

- débouter M. [K] de sa demande de rappel de salaires pour la période de janvier 2013 au 6 avril 2014,

- dire que la créance de M. [K] s'analyse en un prêt octroyé à son ex-associé qui relève de la compétence du tribunal de grande instance d'Evry ;

- condamner M. [K] à rembourser à Me [R], en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Domingos la somme de 5.500€ en application de l'article L632-1 du code de commerce ;

- condamner M. [K] à payer à Me [R], en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Domingos une somme de 2.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 27 septembre 2017, auxquelles il est expressément fait référence, M. [K] demande de confirmer le jugement rendu en ce qu'il a reconnu sa qualité de salarié et en conséquence, condamner Me [R], en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Domingos à lui verser les sommes suivantes:

- 45.282,28 € à titre de rappel de salaires du 10 Janvier 2013 au 6 Avril 2014 et des mois de Février et Mars 2015,

- 4.528,28 € au titre des congés payés afférents,

- 9.434,70 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 5.333,41 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,

- 1.532 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 18.868,75 € au titre de dommages et intérêts pour préjudices moral et financier,

- Fixer la créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Domingos,

- Condamner Me [R], es qualités au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Me [R], es qualités aux dépens,

- Dire que les sommes porteront intérêt au taux légal à compter du jugement à intervenir,

- Prononcer la capitalisation desdits intérêts en application de l'article 1154 du Code civil,

- Dire que le jugement à intervenir sera opposable au CGEA AGS IDF Est.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 18 août 2017, l'Unedic délégation AGS CGEA d'Ile de France Est demande :

- d'infirmer le jugement entrepris,

- à titre principal de débouter M. [K] de toutes ses demandes et précise en tout état de cause les limites de sa garantie.

MOTIFS

Sur l'existence du contrat de travail

M. [K] produit aux débats un contrat de travail aux termes duquel il a été embauché par la SARL Domingos exploitant le restaurant San-Antonio le 10 janvier 2013 par contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de directeur, statut cadre, niveau 5, échelon1.

Il produit des bulletins de salaire.

Me [R] lui a réglé ses salaires à compter de l'ouverture de la procédure collective, a procédé à son licenciement et lui a remis les documents de fin de contrat.

Pôle emploi lui verse des indemnités.

Il peut donc se prévaloir de l'existence d'un contrat de travail apparent.

En conséquence, pèse sur l'AGS qui en conteste l'existence, la charge de la preuve du caractère fictif du contrat de travail.

Il résulte des pièces produites aux débats :

- que la société Domingos a été constituée le 19 octobre 2012 avec un capital social de 1.000€ divisées en 100 parts réparties entre deux associés :

- M. [K], associé majoritaire avec 52 parts sur 100 (et non 48 comme mentionné dans les écritures) lors de la constitution,

- M. [J], gérant

- qu'à une date non définie, M. [K] a cédé 4 parts à Mme [P],

- que le 27 mars 2014 M. [K] a cédé à Mme [P] le reste de ses parts, faisant d'elle l'associée majoritaire,

- que, de la même façon, M. [K] et Mme [P] s'étaient précédemment relayés à la tête de la société Le Prince de l'Etoile, société au capital de 1000 € exploitant un restaurant,

- que le relevé de carrière de M. [J] établit qu'il n'a aucune expérience dans le domaine de la restauration et qu'il était au chômage, y compris durant la période d'exploitation de l'entreprise,

- que le 3 avril 2014, soit une semaine après le retrait de M. [K] de la société, le gérant de la société Domingos a déclaré la cessation de paiements de la société,

- que de janvier 2013 au 30 avril 2014, M. [K] a reçu des bulletins de salaire mentionnant un règlement par chèque jusqu'au 6 avril 2014, puis un règlement par virement pour la période du 7 au 30 avril 2014,

- que pour autant, M. [K] a écrit plusieurs courriers au gérant de la société portant mention de dates comprises entre avril 2013 et avril 2014, pour se plaindre de n'avoir perçu aucun salaire depuis son engagement, M. [J] lui ayant, à chaque fois, répondu pour reconnaître cette situation et la déplorer,

- que cet échange nourri de correspondances s'est exclusivement fait par remise au destinataire en main propre,

- que ce procédé ne permet pas de conférer date certaine à ces courriers, l'accusé de réception systématiquement effectué par son destinataire sur le courrier d'origine par mention 'j'ai reçu à ce jour' suivie d'une signature sans aucune indication de date de réception, entretenant une ambiguïté sur la date de 'ce jour' en lui donnant l'apparence de se référer à la date mentionnée en tête du courrier, sans l'établir pour autant,

- que le gérant de la société a argué d'un dégâts de eaux pour ne pas déférer à la demande du président du conseil de prud'hommes en date du 7 juillet 2016 de produire les déclarations relatives à M. [K] auprès de l'URSSAF,

- que si le comptable de la société atteste qu'aucune somme n'a été réglée à M. [K] au titre de salaires avant l'ouverture de la procédure collective, il est établi qu'il lui a été réglé des sommes au titre de son compte courant d'associé à concurrence de 14.000€.

- qu'en septembre 2013, c'est encore M. [K] qui a réglé pour le compte de la société une somme de 4000 € au titre du loyer.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que mise en perspective avec la production de bulletins de paie faisant état de règlements, la production des échanges de lettres entre M. [K] et M. [J], loin d'établir un lien de subordination, caractérise une mise en scène destinée à établir, en temps utile, une dette salariale fictive de l'entreprise à son égard.

M. [K], en travaillant pendant plus de 15 mois sans percevoir d'autre somme que des remboursements sur son compte-courant d'associé et en allant même jusqu'à régler 4.000€ de loyer pour le compte de l'entreprise alors même qu'il était en grande difficulté financière, s'est bien comporté comme le véritable dirigeant de la société, dont il ne s'est retiré qu'une semaine avant la cessation de paiement.

La confusion des intérêts de M. [K] avec ceux de l'entreprise s'est manifestée jusque dans le choix, en la présente instance prudhomale, du même avocat que celui pris par la société pour engager la procédure collective et solliciter du mandataire la conversion en liquidation judiciaire, étant surabondamment relevé que M. [W] [K] porte le même prénom que le saint patron de l'enseigne du restaurant exploité par la société.

La preuve du caractère fictif du contrat de travail est ainsi rapportée et M. [K] sera en conséquence débouté de l'ensemble de ses demandes de rappels de salaires pour la période du mois de janvier au 6 avril 2014 et de toutes ses demandes relatives au licenciement.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur la novation

En l'absence de créance salariale, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de Me [R] es qualités qui soutient la novation en prêt à la société Domingos des sommes non perçues à ce titre.

Sur la nullité des remboursements au titre du compte-courant d'associé

L'action en nullité des versements de 5.500 € faits par la société Domingos au profit de M. [K] en remboursement de son compte courant d'associé, postérieurement au 3 octobre 2013, date de la cessation des paiements de la société, ne relève pas de l'article L. 632-1 du code de commerce, comme le soutient le liquidateur, s'agissant, en l'absence de disposition contraire, d'une dette échue.

Aux termes de l'article L632-2 du code de commerce en sa version applicable, 'les paiements pour dettes échues effectués à compter de la date de cessation des paiements et les actes à titre onéreux accomplis à compter de cette même date peuvent être annulés si ceux qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation des paiements'.

Il résulte des développements qui précèdent que M. [K] connaissait parfaitement la situation financière de la société, dont il s'est opportunément retiré une semaine avant la déclaration de cessation des paiements par le gérant de droit, étant également observé qu'un mois avant la date de cessation des paiements finalement retenue par le tribunal de commerce, il injectait 4.000 € dans la trésorerie de l'entreprise pour faire face au loyer.

En conséquence, les versements effectués pour un total de 5.500 € postérieurement au 3 octobre 2013 par la société Domingos sur le compte courant d'associé de M. [K] seront annulés et M. [K] condamné à rembourser à Me [R] la somme correspondante.

Sur les frais irrépétibles

M. [K] qui succombe sera condamné aux dépens de l'instance et conservera la charge de ses frais irrépétibles.

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Me [R], en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Domingos qui se verra allouer la somme de 1.000€ à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau

Déboute M. [K] de l'ensemble de ses demandes,

Y ajoutant

Prononce la nullité des versements d'un total de 5.500 € effectués postérieurement au 3 octobre 2013 par la société Domingos sur le compte-courant d'associé de M. [K];

Condamne en conséquence M. [K] à payer à Me [R], en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Domingos, la somme de 5.500 € en remboursement de cette somme;

Condamne M. [K] aux dépens ;

Condamne M. [K] payer à Me [R], en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Domingos, la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [K] de sa demande présentée au titre des frais irrépétibles.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 17/07536
Date de la décision : 22/05/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°17/07536 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-22;17.07536 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award