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16/05/2019 | FRANCE | N°17/04012

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 16 mai 2019, 17/04012


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 16 MAI 2019



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04012 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B2XBW



Décision déférée à la cour : jugement du 07 décembre 2016 -tribunal de commerce de LYON - RG n° 2015J2354





APPELANTE



SARL ARMORIC SYSTEM EXPRESS (A.S.E)

Ayant so

n siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 522 552 546

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Matthieu BOCCON ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 16 MAI 2019

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04012 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B2XBW

Décision déférée à la cour : jugement du 07 décembre 2016 -tribunal de commerce de LYON - RG n° 2015J2354

APPELANTE

SARL ARMORIC SYSTEM EXPRESS (A.S.E)

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 522 552 546

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Frédéric LAROQUE-BREZULIER, avocat au barreau de VANNES

INTIMÉE

SAS CIBLEX FRANCE anciennement dénommée GEODIS CIBLEX

Ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : 310 996 178

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Guillaume DAUCHEL de la SELARL Cabinet SEVELLEC, avocat au barreau de PARIS, toque : W09

Ayant pour avocat plaidant Me Bruno PERRACHON, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 mars 2019, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre, chargé du rapport

Madame Christine SOUDRY, Conseillère

Madame Estelle MOREAU, Conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Patrick BIROLLEAU dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Hortense VITELA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre et par Madame Hortense VITELA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Armoric System Express qui exerce dans le domaine de la messagerie, a acquis en 2010 le fonds de commerce de la société Armoric System Plus (ASP) qui comportait en son actif un contrat de sous-traitance de transport régularisé avec la société de transport Ciblex (anciennement Géodis Ciblex).

Le 10 août 2010, les sociétés ASE et Ciblex ont signé un premier contrat par lequel Ciblex confiait à ASE des prestations de livraison / ramassage. Un deuxième contrat a été signé le 4 mars 2011 portant sur les axes nationaux / régionaux. En octobre 2011, Ciblex a confié à ASE de nouvelles prestations entre [Localité 3] et [Localité 4].

Un désaccord est apparu entre les parties à partir de janvier 2012 sur la facturation des prestations.

Par jugement en date du 9 mars 2012, la société ASE a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire.

Le 27 février 2012, la société ASE a décidé de ne plus assurer les livraisons de nuit sur les villes de [Localité 5], [Localité 6], [Localité 7], [Localité 8] et [Localité 9]. ASE a fait savoir qu'à défaut d'augmentation tarifaire, elle mettait un terme à l'exécution de la prestation d'axe [Localité 3]/[Localité 4]. Le 3 avril 2012, ASE a cessé les prestations Forfait Accueil [Localité 10] et Logistique.

Le 25 juillet 2012, Ciblex a résilié l'ensemble des contrats en cours liant les deux sociétés, à effet du 31 juillet 2012.

Se prévalant de ce que les conditions financières de sous-traitance que lui avait imposées la société Ciblex la contraignaient à travailler à perte, de ce que Ciblex n'avait pas honoré une partie des factures relatives aux prestations réalisées, et de ce qu'elle avait rompu brutalement leur relation commerciale, la société ASE a saisi le tribunal de commerce de Lorient pour demander réparation des différents chefs de préjudices qu'elle estime avoir subi.

Le tribunal de commerce de Lorient s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Lyon.

Par jugement contradictoire rendu le 7 décembre 2016, le tribunal de commerce de Lyon a :

- déclaré recevable l'action engagée par la société Armoric System Express envers la société Ciblex, anciennement Géodix Ciblex ;

- déclaré non prescrite et recevable l'action engagée par la société Armoric System Express envers la société Ciblex ;

- rejeté comme non fondées les demandes de la société Armoric System Express envers la société Ciblex ;

- condamné la société Armoric System Express à payer à la société Ciblex la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Vu l'appel interjeté le 22 février 2017 par la société Armoric System Express à l'encontre de cette décision ;

***

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société Armoric System Express, par dernières conclusions notifiées le 7 mars 2018, demande à la cour, au visa de l'article L.626-25, alinéa 3, du code de commerce, du décret n°2003-1295 du 26 décembre 2003, des articles L.442-6 I 5° du code de commerce, 1134 et 1135, 1382 et 1383 anciens du code civil, de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la société ASE a qualité pour agir pour les causes sus-énoncées et déclaré recevables les demandes formulés par la société ASE ;

- infirmer le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Sur le fond,

- condamner la société Ciblex à payer à la société ASE les sommes de :

' 88.800 euros, au titre du travail à perte, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et ce jusqu'à parfait paiement ;

' 16.573,54 euros,à titre des frais de redressement judiciaire induits par le comportement fautif de la société Géodis-Cublex, devenue Ciblex, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et jusqu'à parfait paiement ;

' 57.888,80 euros, à titre des frais de licenciement induits par la rupture brutale des relations commerciales, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et ce jusqu'à parfait paiement ;

'25.508,84 euros, à titre des frais financiers afférents aux véhicules, induits par la rupture sans préavis de l'ensemble des contrats, outre intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et ce jusqu'à parfait paiement ;

En toute hypothèse,

- condamner la société Ciblex à payer à la société ASE la somme de 8.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et 7.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Lexavoue Paris-Versailles.

Elle rappelle que ses demandes sont parfaitement recevables puisque le commissaire à l'exécution du plan de continuation, qui n'a qu'une simple faculté à engager une action nécessaire à l'intérêt collectif des créanciers, n'a pas besoin de réitérer lesdites demandes, l'action ayant été intentée avant le plan de redressement, de sorte qu'elle a qualité pour agir. Elle ajoute que les disposions de l'article L.626-25 alinéa 3 du code de commerce, invoquées par la société intimées au soutien de cette affirmation concernent en réalité le commissaire à l'exécution du plan de cession qui n'existe plus et dont les fonctions ne sont pas transposables au commissaire à l'exécution du plan de continuation.

Elle fait valoir également que ses demandes ne sont pas prescrites. Elle explique, s'agissant de ses demandes fondées sur le manquement aux règles de la sous-traitance, qu'elle n'est pas concernée par le délai de prescription d'un an prévu par l'article L.133-6 du code de commerce relatif à l'action directe en paiement du prix de transport à l'encontre de l'expéditeur ou du distributeur, dans la mesure où elle n'agit pas sur le fondement de l'action directe en paiement de prestation de transport mais entend simplement obtenir l'octroie de dommages et intérêts à l'encontre de la société Ciblex qui n'est ni l'expéditeur ni le destinataire. Elle ajoute s'agissant de ses demandes fondées sur la rupture brutale d'une relation commerciale établie, que non seulement cette action n'est pas soumise au délai de prescription d'une année, prévu par l'article L.133-6 du code de commerce; mais qu'en outre la société Ciblex a renoncé à ce moyen.

La société Armoric System Express fait valoir s'agissant de ses demandes au fond qu'elle est fondée à obtenir de la société Ciblex le paiement de diverses sommes au titre de divers chefs de préjudices subis.

Elle commence par expliquer à ce titre que le comportement de la société Ciblex à son égard a eu pour effet de la forcer à travailler à perte alors qu'elle était en situation de dépendance économique vis-à-vis de la société intimée, et ce en contradiction avec les dispositions impératives d'un décret du 26 décembre 2003, occasionnant à son égard un manque à gagner ainsi qu'une procédure de redressement judiciaire de nature à permettre une réparation à hauteurs respectives de 88.800 euros de 16.573,54 euros. À ce titre, elle commence par contester les arguments de la société Ciblex tendant à démontrer que ce décret ne peut agir sur les prix du marché. Elle fait valoir ensuite que la société Ciblex reconnait expressément que la société appelante a été contrainte de travailler à perte mais conteste en revanche l'explication de cette dernière tendant à affirmer que la société Armoric System Expressv n'était pas viable en elle-même. Elle soutient au contraire qu'au delà d'avoir diminué ses charges, elle a été contrainte, à la demande de la société Ciblex, d'héberger un autre sous-traitants de cette dernière dans ses locaux et d'acquérir de nouvelles camionnettes plus grandes et des chauffeurs supplémentaires, occasionnant des coûts conséquemment plus élevés, seuls responsables de l'état financier précaire que connait la société Armoric System Express.

Elle soutient en outre que la société Ciblex a brutalement rompu les relations commerciales établies au sens de l'article L.442-6, I, 5° du code de commerce, qu'aucun délai de préavis n'a été mis en oeuvre, délai qui aurait dû, selon elle, être de trois mois pour chaque contrat en cours à compter du 31 juillet 2012, et ce alors même que la société Armoric System Express était en procédure de redressement judiciaire et qu'elle réalisait 74% de son chiffre d'affaires avec la société intimée. Elle fait valoir en conséquence qu'elle est fondée à obtenir la réparation de son préjudice, constitué non seulement par la perte de marge brute, même à raison du travail à perte, mais également par les coûts de licenciement et de résiliation des contrats de location des véhicules affectés à ces contrats, faute pour la société Ciblex de pouvoir valablement se prévaloir de prétendus manquements de la part de la société Armoric System Express, afférents à des contrats de surcroit déjà résiliés et jamais invoqués comme motif de résiliation, afin de s'exonérer de sa responsabilité.

La société Ciblex, par dernières conclusions notifiées le 10 juillet 2017, demande à la cour de :

Sur les demandes au titre de la rémunération insuffisante (indemnisation du travail à perte et frais de redressement judiciaire),

A titre principal,

- réformer le jugement entreprise en ce qu'il a déclaré non prescrites les demandes de la société Armoric System Express ;

A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Armoric System Express de ses demandes faute de preuve d'une rémunération insuffisante ;

A titre très subsidiaire,

- débouter la société Armoric System Express de l'ensemble de ses demandes en ce qu'elle est seule à l'origine de son préjudice ;

A titre plus subsidiaire,

- débouter la société Armoric System Express de l'ensemble de ses demandes en ce qu'elle ne prouve pas son préjudice ;

Sur les demandes au titre de la rupture brutale (frais de licenciement et frais financiers liés aux véhicules),

A titre principal,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la osicété Armoric System Express de ses demandes, faute pour elle d'établir la brutalité de la rupture imputable à la société Ciblex France ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Armoric System Express de ses demandes, faute pour elle d'établir un préjudice indemnisable ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Armoric System Express à verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Armoric System Express à verser à la société Ciblex France la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel ainsi qu'en tous les dépens.

Elle faire valoir, sur le fondement de l'article L.133-6 du code de commerce et concernant les demandes de la société appelante tendant à obtenir l'indemnisation des chefs de préjudice résultant du travail à perte et du redressement judiciaire dont elle fait l'objet, que ces demandes sont irrecevables, faute d'avoir été intentées dans le délai d'un an prévu par les dispositions de l'article susvisé, puisque la dernière prestation a eu lieu en date du 31 juillet 2012 et que l'action a été intentée en juillet 2014. Elle ajoute à ce titre que non seulement la demande est fondée sur un contrat de sous-traitance de transport soumise au droit des contrats de transport, de sorte qu'elle entre dans le champ d'application de l'article susvisé, mais qu'en outre, la jurisprudence a toujours appliqué cette prescription annale pour toute action dont la cause est le transport.

À titre subsidiaire, si la cour devait retenir que les demandes formées à ce titre sont recevables, la société Ciblex fait valoir qu'elles sont de toutes les façons mal fondées faute pour la société Armoric System Express de démontrer un quelconque lien de causalité entre ses difficultés financières et la prétendue absence de rémunération suffisante de la part de sa cocontractante, l'audit contractuel réalisé par le nouvel expert comptable de cette dernière, lequel comporte des erreurs et des incohérences, ne suffisant pas à rapporter la preuve du contraire. Elle ajoute à ce titre que non seulement ce sont les décisions de la société Armoric System Express elle-même, telle que l'acquisition d'un local à [Localité 4], la fermeture de son local à [Localité 11], l'hébergement d'un autre prestataire et l'absence de communication des bilans, qui ont conduit cette dernière à un niveau financier aussi précaire; mais qu'en outre elle n'a jamais reconnu avoir fait travaillé cette dernière à perte, les prix pratiqués au bénéfice de la société appelante étant plus importants que les prix du marché.

À titre très subsidiaire, si la cour devait estimer que la rémunération de la société Armoric System Express n'était pas assez élevée, la société Ciblex fait valoir que cette insuffisance de rémunération est en lien de causalité directe avec les prix proposés par la société Armoric System Express et convenus dans le contrat, de sorte qu'elle est exclusivement imputable à la société Armoric System Express, cette dernière ne rapportant pas la preuve d'un comportement déloyal de la société Ciblex tendant à imposer à sa cocontractante, sous la menace d'une résiliation, une rémunération insuffisante.

Enfin, la société Ciblex fait valoir, si la cour devait estimer que la rémunération insuffisance de la société Armoric System Express était imputable à la société intimée, qu'en tout état de cause, les chefs de préjudice allégués par la société Armoric System Express ne sont justifiés dans leur quantum où dans leur principe. Au titre du travail à perte, elle fait remarquer que le montant diffère dans les deux attestations établies par les deux experts comptables de la société Armoric System Express tandis qu'au titre du redressement judiciaire, la société Armoric System Express n'a pas pris le soin de cesser le travail à perte responsable de son redressement judiciaire, de sorte que ce dernier ne peut constituer un chef de préjudice imputable à la société Ciblex.

Dans un second temps, la société Ciblex fait valoir que le jugement de première instance doit être confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de la société Armoric System Express au titre de la prétendue rupture brutale des relations commerciales établies sur le fondement de l'article L.442-6,I, 5° du code de commerce, fondée sur l'absence de respect d'un préavis. Elle expose que, s'il y a eu une rupture brutale de la relation, elle est à l'initiative de la société Armoric System Express dans la mesure où c'est cette dernière qui a procédé, et de façon unilatérale, à la résiliation de nombreuses prestations et dans la mesure où, s'agissant d'autres prestations, une dégradation des qualités dans leur exécution justifie une cessation des relations.

À titre subsidiaire, si la cour devait estimer que la société Ciblex aurait procédé à une rupture brutale des relations commerciales établies avec la société Armoric System Express, que, de toutes les façons, cette dernière ne justifie pas des chefs de préjudice qu'elle allègue : en effet, non seulement elle ne justifie ni des licenciements et des arrêts de contrats de location objets de la demande de remboursement, ni de sa marge brute ; mais en outre, elle ne justifie pas, pour chaque relation, de ce qu'elle aurait facturé et de l'ancienneté qu'elle revendique, au titre de sa prétention.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.

***

MOTIFS :

Sur la demande indemnitaire fondée sur le travail à perte

Considérant que la société Ciblex oppose l'irrecevabilité de cette demande tirée de la prescription annale en application des article L.133-6 du code de commerce ;

Considérant que l'article L.133-6 du code de commerce dispose que 'les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d'un an, sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélité. / Toutes les autres actions auxquelles ce contrat peut donner lieu, tant contre le voiturier ou le commissionnaire que contre l'expéditeur ou le destinataire, aussi bien que celles qui naissent des dispositions de l'article 1269 du code de procédure civile, sont prescrites dans le délai d'un an.' ;

Considérant que l'action intentée par la société ASE est une action indemnitaire visant à réparer le préjudice résultant du travail à perte que lui aurait imposé Geodis-Ciblex ; qu'elle ne tend pas à sanctionner l'inexécution du contrat de transport ; qu'en conséquence, la prescription annale de l'article L.133-6 du code de commerce qui gouverne les litiges découlant du contrat de transport est en l'espèce inapplicable ; que, l'action en responsabilité se prescrivant selon les règles de droit commun, et la dernière prestation ayant été réalisée le 31 juillet 2012, la prescription n'était pas acquise au 7 juillet 2014, date de l'acte introductif d'instance ; que la décision déférée sera confirmée sur ce point ;

Considérant, sur le fond, que, conformément à l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 16 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faîtes ;

Qu'en l'espèce, il est constant que les tarifs pratiqués sont ceux qui ont été proposés par ASE le 25 novembre 2011 et que Ciblex a acceptés le même jour (pièce Ciblex n°8) ; qu'ASE ne démontre ni que Ciblex lui aurait imposé ces tarifs, ni qu'ils ne correspondaient pas aux prix du marché ; que, si, le 12 décembre 2011, ASE a réclamé une revalorisation du forfait journalier de 570 à 590 euros - montant que Ciblex a refusé - cette seule demande de revalorisation est insuffisante à établir que les tarifs proposés quelques jours plus tôt par la société ASE elle-même étaient propres à faire travailler ASE à perte ; que l'appelante ne justifie pas que les grilles de tarifs proposées par elle et acceptées par la société Ciblex seraient le résultat de négociations au cours desquelles cette dernière lui aurait imposé des prix abusivement bas ; que, de même, ainsi que l'a justement retenu le jugement entrepris dont la cour adopte sur ce point les motifs, les analyses d'experts comptables versées aux débats (pièces ASE n°7 et 19) n'établissent pas l'origine des pertes d'exploitation d'ASE dont il n'est dès lors nullement démontré qu'elle résulte de sa seule activité avec Ciblex ; qu'enfin, c'est en vain qu'ASE prétend que Ciblex aurait reconnu qu'ASE travaillait à perte ('vous ne pouvez raisonnablement travailler à perte.' - pièce ASE n°6), Ciblex se bornant, dans sa lettre à ASE du 25 juillet 2012, à répondre à une menace de poursuite des conseils d'ASE pour non-respect de l'interdiction de travail à perte (pièce Ciblex n°33) et à contester l'existence d'un quelconque travail à perte ; que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté ASE de sa demande sur ce point ;

Sur la rupture brutale de la relation commerciale établie

Considérant que l'article L.442-6 I 5° du code de commerce dispose qu''engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution, par l'autre partie, de ses obligations ou en cas de force majeure.' ;

Considérant qu'ASE a fait connaître à Ciblex, le 27 février 2012, sa décision de ne plus assurer, à compter du lendemain, les livraisons de nuit sur les villes de [Localité 5], [Localité 6], [Localité 7], [Localité 8] et [Localité 9], décision dont Ciblex a pris acte le 28 février 2012 ; qu'ASE a refusé de poursuivre l'exécution de la prestation d'axe [Localité 3]/[Localité 4] ; que, le 3 avril 2012, ASE a unilatéralement cessé les prestations Forfait Accueil [Localité 10] et Logistique ;

Que, par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 25 juillet 2012, Ciblex a résilié l'ensemble des contrats en cours liant les deux sociétés, à effet du 31 juillet 2012 ;

Considérant qu'ASE a, à plusieurs reprises, mis en cause son donneur d'ordre comme étant à l'origine de ses difficultés économiques ; que, par ailleurs, Ciblex a invoqué la dégradation des prestations d'ASE tenant à l'abandon de services sans préavis, à des défaillances dans l'exécution des transports telles qu'énumérées par Ciblex dans sa lettre en date du 25 mai 2012 et auxquelles ASE n'oppose aucun élément (taux de service insuffisant, non-respect des délais de livraison et des livraisons avant 9 heures - pièce Ciblex n°32) et à la violation de dispositions légales (non-respect de l'obligation de double équipage pour les livraisons de nuit sur le Morbihan Est) ; que, compte tenu de ces manquements, et de l'altération de la relation de confiance entre les parties qu'ils ont nécessairement occasionnée, la société Ciblex était autorisée à interrompre la relation sans préavis ; que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté ASE de ses demandes fondées sur l'article L 442-6 I 5° ;

Considérant que l'équité commande de condamner ASE à payer à Ciblex la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris ;

CONDAMNE la société Armoric System Express à payer à la société Ciblex France la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

CONDAMNE la société Armoric System Express aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière Le Président

Hortense VITELA Patrick BIROLLEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 17/04012
Date de la décision : 16/05/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°17/04012 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-16;17.04012 ?
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