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09/05/2019 | FRANCE | N°18/24272

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 09 mai 2019, 18/24272


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 09 MAI 2019



(n°243, 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/24272 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6XWC



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 31 Octobre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/58084



APPELANTE



Madame [S] [F] épouse [H]

[Adresse 1]

[Localité 1]

n

ée le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 2] (MAROC)



Représentée et assistée par Me Marc-Alexandre MYRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0118



INTIME



Maître [D] [W]

[Ad...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 09 MAI 2019

(n°243, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/24272 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6XWC

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 31 Octobre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/58084

APPELANTE

Madame [S] [F] épouse [H]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 2] (MAROC)

Représentée et assistée par Me Marc-Alexandre MYRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0118

INTIME

Maître [D] [W]

[Adresse 2]

[Localité 3]

né le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 4]

Représenté par Me Thomas RONZEAU de la SCP RONZEAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Assisté par Me Marie-José GONZALEZ RIOS de la SCP RONZEAU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Mars 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Véronique DELLELIS, Présidente, chargée du rapport et Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Bernard CHEVALIER, Président

Mme Véronique DELLELIS, Présidente

Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Aymeric PINTIAU

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Bernard CHEVALIER, Président et par Aymeric PINTIAU, Greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE

[W] [F] et son épouse [Z] [Z], mariés depuis 1948, ont eu ensemble six enfants : [Y], [M], [S], [N], [O] et [V].

Les époux [F] sont respectivement décédés les [Date décès 1] 2009 et [Date décès 2] 2006, laissant pour seuls héritiers leurs enfants.

La SCI La Famille a été constituée en 1988 par [W] alors gérant et ses six enfants avec pour finalité de gérer un appartement sis à [Adresse 3] dans lequel ce dernier habitait.

Dans le cadre de la succession de [W] [F], les associés de la SCI La Famille, à l'occasion d'une assemblée générale en date du 29 octobre2014, ont approuvé la vente de cet appartement inclus dans l'actif social.

Par acte du 2 Août 2018, Mme [S] [F] épouse [H] a fait assigner Maître [D] [W] devant le président du tribunal de grande instance de Paris aux fins de :

-voir ordonner la désignation de tel huissier de justice avec mission de se faire remettre par Maître [W], notaire à [Localité 3], exerçant [Adresse 2], les éléments suivants :

- l'acte de Promesse de vente de l'appartement situé [Adresse 3] du 7 juin 2014;

- l'acte de vente du 7 août 2014 de l'appartement situé [Adresse 3] ;

- une copie du livret de famille des époux [F] /[Z];

- une copie du chèque du versement du paiement de la vente de l'appartement de l'appartement situé [Adresse 3] ;

- ou une copie du virement de cette vente.

Elle faisait valoir :

- qu'elle n'avait pas été régulièrement convoquée à la réunion des associés du 29 avril 2014 ayant décidé de la vente ;

- que par ailleurs, trois associés ayant été révoqués à partir du 22 mai 2013, leurs héritiers n'auraient pas dû voter à leur place le 29 avril 2014 ;

- qu'elle avait aussi appris qu'une vente '[Q]' avait eu lieu sans qu'elle en soit mise au courant ;

- que s'estimant exclue de ces décisions contrairement à ses droits, elle était fondée à demander la communication de documents détenus par Maître [W] concernant ces deux ventes.

Par ordonnance contradictoire rendue le 31 octobre 2018, la juridiction saisie a :

- dit n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes en principal ;

- condamné [S] [F] épouse [H] à payer à Maître [D] [W] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire ;

- condamné [S] [F] épouse [H] aux dépens.

Le premier juge a fondé essentiellement sa décision notamment sur les motifs suivants :

- Mme [F] épouse [H] ne précise quel procès futur elle entend réaliser, il n'y a donc pas lieu à référé.

Par déclaration en date du 16 novembre 2018, Mme [F] épouse [H] a relevé appel de cette ordonnance critiquant les chefs de dispositif ayant dit n'y avoir lieu à référé et l'ayant condamnée au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au terme de ses conclusions communiquées par voie électronique le 18 décembre 2018, Mme [H] à la cour, de :

- dire recevable et bien fondé l'appel interjeté par Mme [S] [H] ;

- infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

- dire qu'il résulte des éléments du dossier que la production de :

- l'acte de Promesse de vente de l'appartement situé [Adresse 3] du 7 juin 2014;

- l'acte de vente du 7 août 2014 de l'appartement situé [Adresse 3] ;

- une copie du livret de famille des époux [F] /[Z];

- une copie du chèque du versement du paiement de la vente de l'appartement de l'appartement situé [Adresse 3] ;

- ou une copie du virement de cette vente.

- tous éléments concernant la vente [Q] de 2016 ;

- est nécessaire à la protection des droits de Mme [H], et qu'en conséquence, cette production procède d'un motif légitime et que, eu égard aux circonstances de l'espèce, Maître [W] n'est pas fondé à invoquer le secret professionnel pour s'opposer à cette production ;

- ordonner la désignation de tel huissier de justice qu'il vous plaira de désigner, avec mission de se faire remettre par Maître [W], notaire à [Localité 3], exerçant [Adresse 2], les éléments listés plus avant et dont la production est nécessaire à la protection des intérêts légitimes de Mme [H], et de dresser constat de leur contenu.

- condamner Maître [W] au paiement d'une indemnité de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

- condamner Maître [W] au paiement des entiers dépens ;

Mme [H] fait valoir en substance les éléments suivants :

- Mme [H] a été écartée de toutes les décisions concernant cette SCI par sa famille proche et elle n'a jamais donné son accord à la vente de l'appartement de [Localité 5] ;

- Mme [H] a appris du mandataire de la succession de son père la vente '[Q]';

- Mme [H] n'avait pas à expliciter le procès qu'elle entend intenter pour établir un motif légitime ;

- la SCI La Famille gérait aussi d'autres biens immobiliers situés à la Plaine Saint Denis, ce que Mme [H] ignorait ;

- Mme [H], allemande, a été frauduleusement domiciliée au domicile d'un des associés, ce qui a contribué à son défaut d'information ;

- elle doute sérieusement de la validité des pouvoirs donnés par M. [W] [F] ;

- elle souhaite donc pouvoir accéder à ses documents pour vérifier les pouvoirs et leurs signatures, pour vérifier sous quel nom elle apparaît dans le livret de famille ;

- elle a donc un motif légitime à avoir accès à ces documents pour faire respecter ses droits patrimoniaux.

Maître [W], par conclusions transmises par voie électronique le 4 janvier 2019, demande à la cour, sur le fondement de l'article 23 de la loi du 25 Ventôse an XI et l'article 145 du code de procédure civile, de :

- confirmer l'ordonnance de référé du 31 octobre 2018 en toutes ses dispositions ;

En tout état de cause :

- débouter Mme [S] [F] épouse [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- dire et juger que Maître [W] est bien fondé à opposer le secret professionnel absolu auquel il est tenu, à Mme [I] [H] ;

- dire et juger que, même en présence d'un motif légitime, le notaire ne peut judiciairement être autorisé qu'à communiquer la copie d'actes reçus par lui, à l'exclusion de tout autre document ou information ;

- dire et juger que Mme [I] [H] ne justifie pas d'un intérêt légitime à obtenir la communication des pièces réclamées ;

- la débouter de toutes ses demandes ;

- condamner Mme [S] [F] épouse [H] à payer à la SCP [D] [W] et Eric Dubost la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [S] [F] épouse [H] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Thomas Ronzeau qui pourra les recouvrer directement en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Maître [W] expose en résumé ce qui suit :

- le secret professionnel auquel est tenu le notaire est absolu et c'est la loi du 25 Ventôse an IX qui le dispose ;

- seul le juge peut délier le notaire de ce secret s'il y a un intérêt légitime ;

- Mme [H] n'a pas d'intérêt légitime, de motif légitime;

- en effet Mme [H] était parfaitement informée de la convocation, elle conteste uniquement la forme de cette convocation ;

- les actes demandés par Mme [H] sont soit déjà en sa possession (convocation), soit publiquement accessibles (acte de vente) ou la propriété d'autres personnes et non du notaire (livret de famille, copie du chèques) ou encore couvert par le secret professionnel ;

- par conséquent il n'y a pas de motif légitime à accorder la communication de ces documents.

SUR CE LA COUR

Aux termes des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Le demandeur à la mesure d'instruction in futurum, s'il n'a pas à démontrer la réalité des faits qu'il allègue, doit justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions, ne relevant pas de la simple hypothèse, en lien avec un litige potentiel futur dont l'objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction, la mesure demandée devant être pertinente et utile.

Mme [H] estime que des irrégularités ont affecté l'assemblée générale du 29 avril 2014 au cours de laquelle il a été décidé de la vente du bien immobilier sis à [Localité 5] [Adresse 3], faisant valoir notamment que certains associés en la personne de [W], [Y] et [O] [F], qui avaient été radiés de la société depuis le 22 mai 2013, ont en réalité continué à être convoqués aux diverses assemblées générales et qu'il a été voté au nom des enfants du défunt [Y] [F] sur la base d'une procuration douteuse.

Force est d'observer en l'espèce que Mme [H] a déjà introduit deux procédures conservatoires concernant la vente litigieuse, demandant dans le cadre d'une première procédure de référé, la consignation du prix devant provenir de la vente litigieuse, demande dont elle a été déboutée aux termes d'une ordonnance en date du 10 octobre 2014, et demandant à nouveau une telle consignation dans le cadre d'une seconde procédure de référé, procédure qui s'est soldée par une ordonnance de désistement en date du 9 janvier 2015.

Si Mme [H] indique dans ses conclusions d'appelante qu'elle a l'intention d'agir contre la SCI La Famille, les contours d'une telle action apparaissent particulièrement flous, étant précisé tout de même que la demande en nullité d'une assemble générale se prescrit normalement en trois ans.

Il sera précisé tout de même qu'en l'état des pièces produites, il apparaît que l'assemblée générale litigieuse s'est tenue en présence de Maître [M] et dans les locaux de cette dernière, l'administrateur judiciaire représentant [W] [F].

Surtout, la cour ne parvient pas à déterminer en quoi la production du compromis de vente et de l'acte authentique de vente qui ont été établis à la suite de cette décision seraient de nature à apporter à la requérante des informations complémentaires qui seraient indispensables à l'exercice d'une éventuelle action. En effet, il résulte des termes de la décision prise par l'assemblée générale que l'immeuble en cause devait être vendu la SCI La Famille représentée par M. [V] [F] qui exerçait les fonctions de gérant de la SARL depuis le 22 mai 2013 et qui a été confirmé dans ses fonctions dans le cadre de l'assemblée litigieuse et que cette vente devait être conclue pour le prix de 320 000 euros pris net vendeur.

Par ailleurs, comme le fait justement observer la partie intimée, toute personne peut obtenir copie d'un acte soumis à publicité foncière, même si elle n'est pas concernée par l'acte

Il suffit à cet égard d'adresser une demande écrite au service de la publicité foncière où l'acte a été publié, en précisant les données cadastrales de l'immeuble.

De la même façon, il est particulièrement difficile de comprendre en quoi la production du chèque ou du virement établi dans le cadre de l'achat pourrait être utile à l'appelante, dès lors que le prix de vente est connu et que le nom de l'acquéreur figurera sur l'acte de vente qu'elle aura demandé au service de la publicité foncière.

En conséquence, la partie appelante est parfaitement en mesure d'obtenir l'acte litigieux par des voies tout à fait ordinaires.

S'agissant de la prétendue vente [Q], il n'existe aucun élément du dossier de l'appelante permettant ne serait-ce que de suspecter l'existence d'une telle vente, les conclusions de la partie appelante renvoyant sur ce point à la pièce 9 de son dossier qui n'est que sa propre assignation en référé, et qui ne contient donc aucun élément objectif.

Il ne saurait par conséquent être question d'enjoindre au notaire intimé de produire une pièce dont l'existence est en l'état des pièces produites purement hypothétique.

Enfin, la cour ne voit pas à quel titre il pourrait être demandé à Maître [W] de produire le livret de famille des parents de l'appelante sans autre explication sur l'utilité de cette pièce dans le cadre d'un litige futur dont il est impossible de cerner les moindres contours.

Il convient dès lors, par ces motifs et ceux non contraires du premier juge, de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté la demande.

Sur les dépens et sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

Le sort des dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ont été exactement réglés par le premier juge.

Il convient de confirmer l'ordonnance entreprise de ces chefs.

Mme [H] succombant dans son appel en supportera les dépens.

Elle sera par ailleurs condamnée à payer à Maître [W] une indemnité procédurale dont le montant est repris au présent dispositif.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Condamne Mme [S] [F] épouse [H] aux dépens d'appel, dont distraction au profit de Maître Ronzeau ;

La condamne à payer à Maître [D] [W] une indemnité de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 18/24272
Date de la décision : 09/05/2019

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°18/24272 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-09;18.24272 ?
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