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11/04/2019 | FRANCE | N°18/20932

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 11 avril 2019, 18/20932


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 11 AVRIL 2019



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/20932 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6MMW



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Septembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/57002





APPELANT

Syndicat CFE-CGC-BTP

[Adresse 1]

[

Adresse 2]

Représenté par Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, avocat postulant et par Me Eve [D], avocat au barreau de PARIS, toque : E1814, avocat plaidant



INTI...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRÊT DU 11 AVRIL 2019

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/20932 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6MMW

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Septembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/57002

APPELANT

Syndicat CFE-CGC-BTP

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représenté par Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, avocat postulant et par Me Eve [D], avocat au barreau de PARIS, toque : E1814, avocat plaidant

INTIMÉE

Association APNAB (Association Paritaire Nationale pour le développement de la Négociation collective dans l'Artisanat du Bâtiment)

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentée par Me Jérôme ARTZ, avocat au barreau de PARIS, toque : L0097

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 février 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Mariella LUXARDO, Présidente, chargée du rapport et Madame Monique CHAULET, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Mariella LUXARDO, Présidente

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

Mme Monique CHAULET, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Clémence UEHLI

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Mariella LUXARDO, présidente et par Madame Clémence UEHLI, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'ordonnance rendue le 12 septembre 2018 par le président du tribunal de grande instance de Paris statuant en référé qui a :

- rejeté l'exception d'incompétence d'attribution de la juridiction des référés de l'ordre judiciaire formée par l'APNAB,

- rejeté l'exception de nullité de l'assignation du 7 septembre 2018 formée par l'APNAB,

- rejeté l'ensemble des demandes formées par le syndicat CFE-CGC-BTP,

- condamné le syndicat CFE-CGC-BTP à payer à l'APNAB une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Vu l'appel interjeté contre cette décision le 17 septembre 2018 par le syndicat CFE-CGC-BTP ;

Vu ses conclusions du 19 décembre 2018 par lesquelles il demande à la cour de :

Confirmer l'ordonnance de référé du 12 septembre 2018 en ce qu'elle a :

- rejeté l'exception d'incompétence d'attribution de la juridiction des référés de l'ordre judiciaire formée par l'APNAB,

- rejeté l'exception de nullité de l'assignation formée par l'APNAB,

Infirmer l'ordonnance de référé rendue le 12 septembre 2018 en ce qu'elle a débouté le syndicat CFE-CGC-BTP de sa demande principale au motif que la décision de l'APNAB de tirer les conséquences de la perte légale de représentativité de la CFE-CGC-BTP en s'abstenant de la convoquer à son assemblée générale extraordinaire et à son conseil d'administration, n'apparaît pas constitutive d'un trouble manifestement illicite,

Et statuant à nouveau

Constater que le syndicat CFE-CGC-BTP est représentatif dans le champ d'application de l'accord du 25 janvier 1994 et de ses avenants,

Dire que l'exclusion du CFE-CGC-BTP de l'assemblée générale extraordinaire et à son conseil d'administration organisés par l'APNAB le 13 septembre 2018 est illégitime et constitue un trouble manifestement illicite au regard des règles du dialogue sociale et du paritarisme des négociations,

Suspendre l'application des statuts de l'APNAB du 13 septembre 2018 et de toutes autres décisions ou actes pris à l'occasion de l'assemblée générale extraordinaire et du conseil d'administration du 13 septembre 2018,

Condamner l'APNAB à verser au syndicat CFE-CGC-BTP la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Vu les conclusions signifiées le 22 novembre 2018 par lesquelles l'APNAB demande à la cour de :

1- In limine litis,

Vu l'article R.311-2 du code de justice administrative,

Vu l'arrêté du 20 juillet 2017,

Vu l'absence de représentativité du syndicat CFE-CGC-BTP dans la branche des employés ouvriers des entreprises du bâtiment jusqu'à 10 salariés,

Plaise à la cour de se déclarer matériellement incompétent au profit de la cour administrative d'appel sur toute question relative à la représentativité du syndicat CFE-CGC-BTP,

2- Vu les articles 564 et suivants du code de procédure civile,

Constater que les demandes concernant la reconnaissance de représentativité et la suspension des statuts et de toute autre décision sont des demandes nouvelles,

Constater qu'il n'existe aucun lien entre les demandes initiales résultant de l'assignation du 7 septembre 2018 et les demandes en appel,

Déclarer en conséquence irrecevables les demandes relatives à la constatation de la représentativité et à toute demande de suspension de la décision du conseil d'administration et de l'assemblée générale extraordinaire de l'APNAB du 13 septembre 2018,

3-Vu l'article 117 du code de procédure civile,

Vu les statuts de la CFE-CGC du bâtiment,

Vu le procès-verbal du conseil syndical national du 26 juin 2018,

Dire et juger que le président du syndicat n'a pas de pouvoir pour interjeter appel,

Annuler en conséquence l'acte d'appel du syndicat CFE-CGC BTP,

Dire et juger que le pouvoir n'est pas une décision du conseil syndical d'assigner l'APNAB,

Dire et juger que le syndicat CFE-CGC-BTP ne démontre pas que la décision est valable en raison de l'absence de démonstration que la moitié des membres aient été présents ou représentés lors de la réunion,

Annuler en conséquence l'assignation,

Vu les articles 808 et 809 du code de procédure civile,

Vu les contestations sérieuses opposées par l'APNAB,

Vu l'absence de trouble manifestement illicite,

Vu l'absence d'urgence,

Vu l'absence de dommage imminent,

Qu'il plaise au tribunal statuant en matière de référé de :

Se déclarer incompétent et renvoyer le syndicat CFE-CGC-BTP à mieux se pourvoir,

Débouter en conséquence le syndicat CFE-CGC-BTP de l'ensemble de ses demandes,

Rejeter toute demande de convocation à l'assemblée générale extraordinaire du 13 septembre 2018 ainsi qu'au conseil d'administration du 13 septembre 2018,

Reconventionnellement,

Condamner le syndicat CFE-CGC-BTP à verser à l'APNAB la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 18 janvier 2019 à 9h30 ;

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la révocation de la clôture sollicitée par le syndicat CFE-CGC-BTP et la recevabilité des conclusions et pièces des parties

Par conclusions du 21 janvier 2019, le syndicat CFE-CGC-BTP sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture du 18 janvier 2019 et répond aux conclusions signifiées le 17 janvier 2019 par l'APNAB.

Par conclusions du 21 février 2019, l'APNAB s'oppose à la révocation de la clôture au motif que les conclusions du 21 janvier 2019 du syndicat CFE-CGC-BTP avaient pour objet de communiquer une nouvelle pièce.

L'avis de fixation du 26 septembre 2018 a fixé la clôture au 18 janvier 2019 à 9h.

Me Artz qui s'est constitué pour l'APNAB a conclu le 22 novembre 2018 puis le 17 janvier 2019 à 17h06.

Me [D] a conclu pour le syndicat CFE-CGC-BTP les 23 octobre 2018 et 19 décembre 2018 puis le 21 janvier 2019 pour communiquer une nouvelle pièce n°15, à savoir un arrêt rendu par la chambre le 10 janvier 2019.

La communication de conclusions et d'une nouvelle pièce par l'appelant après la clôture est manifestement irrecevable, le prononcé d'un arrêt ne saurait constituer une cause grave dès lors que cette décision qui concerne des parties distinctes, n'a pas d'incidences sur l'instance.

En outre les dernières conclusions communiquées par l'APNAB la veille de la clôture à 17h06 sont également tardives en ce qu'elle ne permettent pas à l'appelant d'y répondre, aucun motif n'étant d'ailleurs invoqué à l'appui de cette communication qui doit être écartée.

L'affaire est en état d'être jugée au vu des conclusions signifiées par l'appelant le 19 décembre 2018 et par l'intimée le 22 novembre 2018, sans qu'il y ait lieu d'ordonner la révocation de l'ordonnance de clôture du 18 janvier 2019.

Sur la régularité de l'appel et de la procédure engagée par le syndicat CFE-CGC-BTP

A titre liminaire, l'APNAB fait valoir que le syndicat CFE-CGC-BTP ne justifie pas d'un pouvoir spécial donné à son président pour faire appel et agir en justice ; que le syndicat n'établit pas que la moitié des membres étaient présents lors du conseil syndical du 28 juin 2018 ; que le pouvoir ne vise pas expressément une action en interprétation des statuts de l'APNAB ni l'action portant sur la reconnaissance de la représentativité du syndicat ; que la nullité de l'assignation ne peut pas être couverte en appel.

Le syndicat CFE-CGC-BTP soutient que son président dispose d'un pouvoir suffisant pour engager l'action en application de l'article 24 de ses statuts ; qu'il a reçu délégation du conseil syndical lors d'une délibération du 26 juin 2018 qui intègre également la faculté d'interjeter appel d'une décision de justice.

Il résulte de l'article 24 des statuts du syndicat CFE-CGC-BTP que 'le Conseil Syndical oriente et contrôle l'action du Bureau Syndical. Il détient et peut déléguer le pouvoir de représentation du Syndicat. Il décide des actions en justice et peut déléguer, dans ce cas, ce pouvoir au Président du Syndicat, avec faculté pour lui, de subdélégation à un membre du bureau Syndical.'

Le syndicat CFE-CGC-BTP produit un extrait du procès-verbal de réunion de son conseil syndical du 26 juin 2018, dont il ressort que le président, M. [E], a été investi des pouvoirs les plus larges pour agir en justice dans le litige l'opposant à l'APNAB, tant en ce qui concerne 'la représentativité du syndicat que sur la répartition des fonds issus de la collecte en vue du dialogue social, comme sur la vocation du syndicat à négocier, siéger à l'APNAB et bénéficier de la collecte'.

Ces dispositions donnent sans ambiguïté au président du syndicat CFE-CGC-BTP, le pouvoir d'ester en justice dans le cadre de l'assignation délivrée le 7 septembre 2018 et d'exercer les voies de recours.

Comme l'a justement relevé le premier juge, le procès-verbal du 26 juin 2018 énonce que cette résolution est adoptée par le conseil syndical à l'unanimité de ses membres présents ou représentés.

Il s'ensuit que les moyens de nullité développés par l'APNAB sont dépourvus de fondement.

L'ordonnance du 12 septembre 2018 mérite d'être confirmée en ce qu'elle a rejeté ce moyen pour l'assignation du 7 septembre 2018 et pour les mêmes motifs, le moyen de nullité concernant la déclaration d'appel, doit être rejeté.

Sur la compétence du juge judiciaire

L'APNAB fait valoir que l'action du syndicat CFE-CGC-BTP a pour objet de faire reconnaître sa représentativité dans le champ d'application de l'accord du 25 janvier 1994 et par suite de contester l'arrêté du 20 juillet 2017 du ministère du travail qui a constaté la perte de sa représentativité au sein de la branche des ouvriers du bâtiment jusqu'à 10 salariés. Elle estime que seule la juridiction administrative est compétente pour examiner les demandes.

Le syndicat CFE-CGC-BTP expose que son action n'a pas pour objet de contester l'arrêté du 20 juillet 2017 du ministère du travail qui intéresse la branche des ouvriers du bâtiment employés dans les entreprises jusqu'à 10 salariés, mais vise à faire reconnaître que cet arrêté n'a pas vocation à s'appliquer dans le litige l'opposant à l'APNAB concernant les petites entreprises du bâtiment.

Il résulte en effet des termes des conclusions des parties et de l'ordonnance du 12 septembre 2018, que l'action du syndicat CFE-CGC-BTP a pour objet de faire constater le trouble manifestement illicite résultant de l'organisation d'une assemblée générale et d'un conseil d'administration de l'APNAB, le 13 septembre 2018, sans sa présence alors que le syndicat est signataire de l'accord du 25 janvier 1994 et de ses avenants.

Le juge judiciaire a donc compétence pour statuer en référé sur les demandes du syndicat CFE-CGC-BTP, ce qui intègre l'examen des champs d'application respectifs de l'accord du 25 janvier 1994 et de l'arrêté du 20 juillet 2017, l'APNAB invoquant cet arrêté pour soutenir que le syndicat a perdu sa qualité de membre des instances paritaires prévues par l'accord du 25 janvier 1994, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la validité de l'arrêté du 20 juillet 2017.

L'ordonnance du 12 septembre 2018 sera également confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence du juge judiciaire.

Sur le bien-fondé des demandes du syndicat CFE-CGC-BTP

Le syndicat CFE-CGC-BTP considère que l'APNAB a décidé à tort d'organiser une assemblée générale et un conseil d'administration le 13 septembre 2018, sans sa présence, ce qui constitue une entrave aux règles du paritarisme des négociations et une atteinte à ses intérêts, dès lors que le syndicat est signataire de l'accord du 25 janvier 1994 et de son avenant du 4 mai 1995 ; qu'il est représentatif dans le champ d'application de l'accord qui concerne les entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés, ces entreprises n'employant pas seulement des ouvriers ; qu'il est un syndicat catégoriel affilié à une confédération catégorielle, dont la représentativité est reconnue chez les techniciens, les agents de maîtrise et les cadres, par les arrêtés des 22 juin 2017 et 20 juillet 2017 et que l'arrêté du 22 décembre 2017 reconnaît sa représentativité dans le champ professionnel des conventions collectives du bâtiment ; qu'il est signataire de l'accord du 25 janvier 1994 et membre fondateur de l'APNAB qui conteste sa participation aux réunions de révision de l'accord sur le fondement de l'arrêté du 20 juillet 2017 qui ne concerne que la catégorie des ouvriers des entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés ; que l'accord du 25 janvier 1994 concerne l'ensemble des catégories professionnelles des petites entreprises du bâtiment et que l'APNAB entend limiter le champ de cet accord aux seuls ouvriers.

L'APNAB fait valoir en premier lieu que les demandes de constat de la représentativité dans le champ d'application de l'accord, de suspension des statuts adoptés le 13 septembre 2018 et de toutes autres décisions prises lors de l'assemblée générale extraordinaire et du conseil d'administration du 13 septembre 2018, sont irrecevables comme étant des demandes nouvelles en appel ; elle ajoute que les demandes du syndicat s'opposent à une contestation sérieuse puisqu'elles visent une interprétation des statuts de l'APNAB ; qu'il est incontestable que la CFE-CGC-BTP n'est plus représentative dans la branche du bâtiment pour les entreprises jusqu'à dix salariés ; que le syndicat n'est pas représentatif dans le champ d'application de l'accord du 25 janvier 1994 et de ses avenants ; que l'arrêté du 12 juin 2013 qui reconnaissait sa représentativité, a été abrogé par l'arrêté du 20 juillet 2017 qui a traduit les résultats des dernières élections et fixé la liste des organisations syndicales représentatives dans le champ de la convention collective nationale des petites entreprises du bâtiment ; que cet arrêté n'a pas été contesté devant la juridiction administrative ; que la CFE-CGC-BTP ne remplit plus les conditions de l'article 5 des statuts de l'APNAB relatifs aux membres de l'association ; que la qualité de signataire de l'avenant du 4 mai 1995 est insuffisante pour être membre de l'association, la participation des syndicats aux négociations et au fonctionnement de l'association, dépendant de leur représentativité déterminée tous les quatre ans au niveau interprofessionnel ; que le syndicat ne peut donc se prévaloir d'aucun dommage imminent ni aucun trouble manifestement illicite.

A titre liminaire, il convient de considérer que les demandes nouvelles présentées en appel par le syndicat CFE-CGC-BTP, sont recevables sur le fondement de l'article 566 du code de procédure civile, dès lors qu'elles constituent l'accessoire des demandes soumises au premier juge et sont consécutives à la tenue de l'assemblée générale extraordinaire et du conseil d'administration de l'APNAB le 13 septembre 2018, hors la présence de la CFE-CGC-BTP, suite au rejet de ses demandes par l'ordonnance du 12 septembre 2018.

Par ailleurs la compétence de la juridiction de référé est fondée sur l'existence d'un trouble manifestement illicite qui résulte de la violation d'un accord collectif en ce que l'une des organisations syndicales représentatives a été écartée des réunions de négociation et de révision de l'accord, contrairement aux dispositions de cet accord comme le soutient la CFE-CGC-BTP, ce qui justifie l'examen en référé des conditions d'application de l'accord.

En l'espèce le litige porte sur l'application de l'accord du 25 janvier 1994 intitulé 'Accord relatif à la protection des salariés d'entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés, appelés à participer aux réunions paritaires et aux réunions des organismes paritaires chargés de gérer des institutions du bâtiment'.

Cet accord a été signé entre la CAPEB Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, et les cinq organisations syndicales représentatives de droit à l'époque de la signature du texte, en vue notamment selon les termes de son préambule de favoriser la négociation collective dans l'artisanat du bâtiment.

Il est notamment prévu d'organiser dans ces entreprises, la participation des salariés aux négociations paritaires de la branche bâtiment et aux réunions des organismes paritaires chargés de gérer des institutions mises en place par le bâtiment.

Un avenant du 4 mai 1995 organise les conditions de la négociation collective et son financement qui sont assurées par un système de remboursement des frais de déplacement des négociateurs paritaires. Est ainsi créée l'APNAB, association paritaire nationale, qui a vocation à informer les négociateurs paritaires et assurer la gestion financière de ces frais, selon les termes du préambule de l'accord.

Le 21 août 2018 l'APNAB a convoqué les organisations syndicales représentatives à une assemblée générale extraordinaire et un conseil d'administration devant se tenir le 13 septembre 2018, dont l'objet portait principalement sur :

- pour l'assemblée générale extraordinaire : la composition des instances de l'APNAB, la modification de ses statuts et de son règlement intérieur, la rotation des postes de ses instances ;

- pour le conseil d'administration : la composition de la collecte au 31 juillet 2018 et le suivi budgétaire au 30 juin 2018.

L'APNAB a décidé de ne pas convoquer le syndicat CFE-CGC-BTP au motif que celui-ci avait perdu sa représentativité par l'effet des dernières élections dans le secteur des petites entreprises du bâtiment et de l'arrêté du 20 juillet 2017.

Or il résulte des éléments de la procédure que l'APNAB a manifestement opéré une confusion entre les accords de branche concernant les entreprises du bâtiment occupant jusqu'à dix salariés et ceux applicables aux ouvriers des entreprises du bâtiment qui emploient jusqu'à dix salariés.

Ainsi l'arrêté du 20 juillet 2017 qui écarte le syndicat CFE-CGC-BTP de la liste des organisations syndicales représentatives, concerne le champ de la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment qui emploient jusqu'à dix salariés.

Au contraire l'accord du 25 janvier 1994 fixe son champ d'application uniquement par rapport à l'activité des entreprises exerçant dans les domaines du bâtiment, avec cette précision qu'elles emploient jusqu'à dix salariés, ce qui signifie qu'il s'applique à toutes ces entreprises qui emploient non seulement des ouvriers, mais également des ETAM et des cadres, lesquels ont vocation a être représentés par un syndicat catégoriel lors de la négociation d'accords de branche.

La CFE-CGC-BTP verse également aux débats les arrêtés des 22 juin 2017 et 20 juillet 2017 qui fixent la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans le champ de la convention collective des ETAM du bâtiment et celles des cadres du bâtiment, intégrant ce syndicat.

Elle verse aux débats l'arrêté du 22 décembre 2017 qui fixe la liste des organisations syndicales reconnues représentatives dans le champ de l'ensemble des conventions collectives du bâtiment, et lui attribue une représentation de 6,93 % parmi ces organisations syndicales.

Aucune disposition de l'accord du 25 janvier 1994 ne fait référence uniquement aux accords concernant les ouvriers des entreprises du bâtiment employant moins de dix salariés, contrairement à ce qui est soutenu par l'APNAB.

Cet accord a fait l'objet d'un arrêté d'extension le 10 juin 1994, qui a pour effet de le rendre obligatoire pour tous les salariés et employeurs compris dans son champ d'application territorial et professionnel, et concerne donc l'essentiel des entreprises du bâtiment qui emploient moins de dix salariés.

Au vu de ces éléments, le syndicat CFE-CGC-BTP n'a pas perdu sa représentativité dans les entreprises du bâtiment et il a vocation à participer aux réunions de négociation dans le champ d'application de l'accord du 25 janvier 1994, concernant les entreprise qui emploient moins de dix salariés.

Il convient par suite de faire droit à ses demandes et de constater l'existence du trouble manifestement illicite résultant de la tenue des instances de décision de l'APNAB le 13 septembre 2018 en l'absence de sa convocation.

L'ordonnance du 12 septembre 2018 qui a rejeté ces demandes sera infirmée à ce titre.

Les décisions prises le 13 septembre 2018, sans sa présence, et notamment les nouveaux statuts adoptés lors de l'assemblée générale extraordinaire, doivent être suspendues, dans l'attente d'une nouvelle convocation de l'ensemble des organisations syndicales représentatives dans le secteur des entreprises du bâtiment employant jusqu'à dix salariés.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Au vu de la solution du litige, l'APNAB devra verser au syndicat CFE-CGC-BTP la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

STATUANT par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Rejette la demande révocation de l'ordonnance de clôture du 18 janvier 2019,

Ecarte des débats comme étant tardives les conclusions du 21 janvier 2019 du syndicat CFE-CGC-BTP et sa pièce n°15, et les conclusions du 17 janvier 2019 de l'APNAB,

Confirme l'ordonnance du 12 septembre 2018 en ce qu'elle a rejeté les exceptions d'incompétence d'attribution de la juridiction judiciaire et de nullité de l'assignation soulevées par l'APNAB,

Rejette le moyen de nullité soulevé par l'APNAB concernant la déclaration d'appel du syndicat CFE-CGC-BTP,

Infirme l'ordonnance du 12 septembre 2018 dans ses autres dispositions,

Statuant à nouveau,

Constate l'existence d'un trouble manifestement illicite résultant de la tenue le 13 septembre 2018 d'une assemblée générale extraordinaire et d'un conseil d'administration de l'APNAB sans invitation du syndicat CFE-CGC-BTP,

Ordonne la suspension des décisions prises lors de ces instances et notamment des nouveaux statuts de l'APNAB,

Rejette les autres demandes des parties,

Condamne l'APNAB aux dépens de l'instance en référé et à payer au syndicat CFE-CGC-BTP la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 18/20932
Date de la décision : 11/04/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°18/20932 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-11;18.20932 ?
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