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10/04/2019 | FRANCE | N°17/08469

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 10 avril 2019, 17/08469


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 10 AVRIL 2019



(n° 2019/226, 26 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 17/08469 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3FZH



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mars 2017 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 201700011





APPELANTS



Monsieur [B] [J]

Né le [Date naissance 1]

1967 à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 2]





SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droit de la société REALIM

Immatriculée au Registre du Commerce et d...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 10 AVRIL 2019

(n° 2019/226, 26 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/08469 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3FZH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mars 2017 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 201700011

APPELANTS

Monsieur [B] [J]

Né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité française

[Adresse 1]

[Adresse 2]

SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droit de la société REALIM

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 527 839 141

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentés par Me Matthieu PUYBOURDIN de l'AARPI MPMCT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1328

INTIMÉE

SA CRÉDIT DU NORD

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LILLE sous le numéro 456.504.851

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 6]

Représentée par Me Denis-Clotaire LAURENT de l'AARPI TARDIEU GALTIER LAURENT DARMON associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R010

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Février 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre

Madame Pascale GUESDON, Conseillère

Madame Pascale LIEGEOIS, Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Anaïs CRUZ

ARRÊT :

contradictoire,

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Françoise CHANDELON, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire .

***

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par déclaration en date du 24 avril 2017 monsieur [B] [J] et la SCI PARIS CAPITAL PIERRE ont interjeté appel du jugement en date du 20 mars 2017 du tribunal de commerce de Paris qui a :

condamné solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE, et monsieur [B] [J] dans la limite de 104 000 euros, à payer à la SA CREDIT DU NORD la somme de 136 647,94 euros outre intérêts au taux de 11,25 % à compter du 28 avril 2014, avec anatocisme à compter du 7 octobre 2014,

condamné solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE, et monsieur [B] [J] dans la limite de 234 000 euros, à payer à la SA CREDIT DU NORD la somme de 122 374,59 euros outre intérêts au taux de 7,38% sur le principal de 119 340,82 euros à compter du 2 septembre 2014 avec anatocisme à compter du 7 octobre 2014,

condamné solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE et monsieur [B] [J] à payer à la SA CREDIT DU NORD la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

ordonné l'exécution provisoire ;

condamné solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE et monsieur [B] [J] aux entiers dépens.

En première instance la banque, demanderesse, a soutenu que le compte de la société REALIM ne fonctionnait pas de façon satisfaisante car les encours étaient régulièrement largement au dessus des plafonds autorisés, de sorte qu'elle était bien fondée à dénoncer les concours consentis ; le rappel des facilités et la clôture du compte ont été réalisés dans les normes, avec en particulier le respect d'un préavis de 60 jours. Le CREDIT DU NORD a soutenu aussi que le litige abondamment développé par monsieur [J] dans ses écritures concernait en réalité ses comptes personnels et n'a aucun lien avec la présente instance : le fait que monsieur [J] ait pu faire l'objet de fichage au titre de ses encours personnels n'a aucune vocation à être apprécié dans le cadre du présent litige. Enfin, le CREDIT DU NORD estimait que le préjudice évalué par les défendeurs à 350 000 euros et 300 000 euros, n'est fondé ni dans son principe, ni dans son quantum.

Monsieur [J] et la SCI répondaient que Ie CREDIT DU NORD a procédé à une rupture abusive de ses relations, et a fait preuve de mauvaise foi, en dénonçant sans raison apparente les conventions de comptes et en inscrivant monsieur [J] au fichier de la Banque de France sans l'en informer. Monsieur [J] soutient que cette inscription, réalisée sans respecter les obligations légales de la banque d'information et de préavis envers son client, a provoqué l'impossibilíté pour lui de trouver un autre partenaire bancaire et un crédit pour rembourser les sommes sollicitées par le CREDIT DU NORD dans le cadre de la facilité de trésorerie et du prêt professionnel accordés initialement à REALIM. Les défendeurs considéraient que le fait que le CREDIT DU NORD, qui avait accordé des facilités de caisse jusqu'à 150 000 euros par le passé, ait rejeté des prélèvements sans préavis alors que le compte n'était débiteur que de 109 527, euros justifie l'octroi de dommages et intérêts à PARIS CAPITAL PIERRE par voie de compensation avec la dette résultant de la convention de compte courant et du contrat de prêt professionnel non remboursé. Enfin, monsieur [J] estimait que la mise en 'uvre de son engagement de caution est injustifiée et abusive, la déchéance du terme ayant été causée par la seule faute du CREDIT DU NORD et le rejet des opérations ayant été réalisé sans préavis.

Au terme de la procédure d'appel clôturée le 15 janvier 2019 les moyens et prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.

Par dernières conclusions notifiées par la voie du RPVA le 3 décembre 2018 les appelants

rappellent quant aux faits que la société REALIM, immatriculée au RCS le 11 juin 2001, avait pour activité la rénovation, la réhabilitation, l'achat, la vente et la location de biens immobiliers. Cette société qui était gérée par monsieur [B] [J], fera l'objet d'une radiation du registre du commerce et des sociétés de Paris en raison de l'apport de son patrimoine dans le cadre d'une fusion avec la SCI PARIS CAPITAL PIERRE, société absorbante, dont monsieur [J] est associé-gérant.

La société REALIM était cliente du CREDIT DU NORD pour y avoir ouvert un compte sous le numéro 300076 02058 18977 00 200, le 27 avril 2009. Le 16 juin 2009, monsieur [J] a versé la somme de 945 992,01 euros sur un compte ouvert auprès du CREDIT DU NORD au bénéfice de la société REALIM. Parallèlement, monsieur [J] a ouvert d'autres comptes au sein d'une des agences de la banque pour l'ensemble de ses activités professionnelles (y compris celles de la SCI PARIS CAPITAL PIERRE), et personnelles. La banque CREDIT DU NORD a alors octroyé sans aucune difficulté à la SCI PARIS CAPITAL PIERRE un prêt de 1 000 000 d'euros remboursable sur 20 ans. En 2011, la SCI PARIS CAPITAL PIERRE bénéficia également d'un prêt de 170 000 euros pour une durée de 180 mois, à taux révisable. Ces crédits ont fait l'objet d'un remboursement régulier par la société emprunteuse.

Dès l'année 2009, la société REALIM disposait d'une facilité de caisse conventionnelle. Par deux actes du 17 mars 2011, le CREDIT DU NORD a d'une part consenti à la société REALIM l'augmentation de cette facilité de trésorerie à concurrence de 80 000 euros et d'autre part consenti un prêt professionnel de 180 000 euros au taux d'intérêt annuel de 4,38 % remboursable en 84 mensualités. Ce même jour monsieur [J] s'est porté caution de la société selon engagement de portée générale à hauteur de 104 000 euros au titre de la facilité de trésorerie et à hauteur de 234 000 euros au titre du prêt. Pour autant le CREDIT DU NORD autorisait de façon habituelle et sans aucune difficulté jusqu'en 2014, des dépassements du seuil pour des montants excédant le double du montant conventionnellement fixé. Néanmoins, au début de l'année 2014, le CREDIT DU NORD a changé brutalement de comportement et à partir du 17 janvier 2014, alors que le compte de la société REALIM était débiteur de 109 527 euros, soit bien en-deça des facilités de trésorerie accordées depuis cinq ans, le CREDIT DU NORD rejeta, pour la première fois et ce, sans le moindre avertissement préalable, les prélèvements sur le compte courant de la société. Monsieur [J] a pris attache avec le CREDIT DU NORD pour expliquer l'état de son dernier projet et, en gage de bonne foi, a restitué le 26 février 2014 sa carte bancaire personnelle 'Visa Infinite'. Monsieur [J] a opéré, dans un premier temps, différents virements pour solder les découverts de ses comptes personnels. Mais depuis le 5 février 2014, CREDIT DU NORD avait inscrit monsieur [J] au Fichier Central des Chèques de la BANQUE DE FRANCE, sans même en aviser monsieur [J]. Ce dernier n'en sera informé qu'au mois de juin 2014. Au mois de mars 2014, monsieur [J] adressait les différents éléments sollicités par la banque de manière pressante alors que cette dernière n'ignorait pas que son client se trouvait à ce moment-là aux Etats-Unis, pays où résident ses enfants. Le 18 mars 2014, monsieur [J] indiquait expressément au CREDIT DU NORD qu'il démarchait activement d'autres établissements bancaires et qu'il pensait pouvoir s'acquitter de ses prêts et rembourser les découverts à la fin du mois d'avril 2014. Le 2 avril 2014, le CREDIT DU NORD dénonçait simultanément par lettre recommandée avec accusé de réception les comptes de la SCI PARIS CAPITAL PIERRE et de la SARL REALIM. Parallèlement, monsieur [J] recevait des réponses négatives des autres banques. Monsieur [J] a ignoré son inscription au Fichier Central des Chèques de la BANQUE DE FRANCE jusqu'à ce que la CAISSE D'EPARGNE lui révèle en juin 2014 l'existence de ce fichage. La CAISSE D'EPARGNE, qui était disposée à accueillir ce nouveau client, ne sollicitait que la levée du fichage pour compléter son dossier. Monsieur [J] sollicitait immédiatement du CREDIT DU NORD la levée du fichage 'carte bancaire' au FCC, tout en poursuivant sa recherche de financements. Le 8 juillet 2014, monsieur [J] effectuait un virement de 9 700 euros sur un de ses comptes ouverts auprès du CREDIT DU NORD. Le 9 juillet 2014, le CREDIT DU NORD demandait à monsieur [J] d'effectuer un nouveau versement de 2 350 euros pour 'éviter le contentieux'. Le jour même, monsieur [J] s'est exécuté et a opéré un virement de 2 500 euros. Néanmoins, le CREDIT DU NORD levait le fichage 'carte bancaire' et réinscrivait quasi-simultanément son client au Fichier des Incidents de Paiements (FICP) de la BANQUE DE FRANCE dès le 8 juillet 2014, soit 24 heures avant que les comptes personnels de monsieur [J] soient à nouveau créditeurs par le virement du 9 juillet 2014 et, en informant son client par un courrier qui n'arrivera qu'après plusieurs jours. Ce courrier daté du 8 juillet 2014, informant monsieur [J] du fichage au FICP, ne mentionnait aucunement l'application du préavis avant inscription ni le droit de monsieur [J] de présenter des observations et de régulariser pendant ce délai l'incident de paiement à l'origine du fichage. Ce second fichage au FICP a été maintenu jusqu'au 8 août 2014 (et non 'fin juillet' comme l'indique la banque). Ayant anéanti toute perspective pour monsieur [J] de trouver des financements en raison de ce nouveau fichage FICP, le CREDIT DU NORD prononçait, au moyen d'une lettre recommandée du 20 août 2014, la déchéance du terme du prêt accordé à la société REALIM. Ensuite, le CREDIT DU NORD adressait des mises en demeure le 28 août, puis le 15 septembre 2014 à la SARL REALIM ainsi que des mises en demeures transmises à la SCI PARIS CAPITAL PIERRE avec une chronologie quasi-identique à celles adressées à la société REALIM et dans des termes similaires, c'est-à-dire en dénonçant les soldes débiteurs de comptes courants et en prononçant l'exigibilité anticipée des prêts.

Par exploit d'huissier du 22 septembre 2014, la banque a assigné la SCI PARIS CAPITAL PIERRE devant le tribunal de grande instance de Paris.

Placé dans l'impossibilité de retrouver un partenaire bancaire à cause des fichages à la BANQUE DE FRANCE et acculé financièrement par la dénonciation de ses comptes et les déchéances des prêts simultanées, monsieur [J] n'avait d'autre choix que de transiger avec le CREDIT DU NORD pour sauver la SCI PARIS CAPITAL PIERRE en se pliant à toutes les demandes de la banque. Il proposait un échéancier qui sur son principe même avait toujours été refusé par la banque avant la phase contentieuse et l'intervention de son Conseil mais était désormais accepté.

Par assignations en date des 7 et 28 octobre 2014, la banque CREDIT DU NORD a attrait la société REALIM et monsieur [B] [J] en sa qualité de caution de la société, sollicitant du tribunal de commerce de Paris :

la condamnation solidaire des défendeurs au titre d'un prêt au paiement de la somme de 122 374,59 euros outre intérêts de retard au taux de 7,38 % sur le principal de 119 340,82 euros à compter du 20 août 2014 jusqu'à parfait paiement,

la condamnation de la société REALIM au titre du solde débiteur du compte bancaire au paiement de la somme de 136 647,94 euros outre intérêts au taux de 11,25 % à compter du 28 août 2014,

la condamnation de monsieur [B] [J] avec la société REALIM au titre du solde débiteur du compte bancaire dans la limite de son engagement de caution, soit la somme de 104 000 euros outre intérêts au taux de 11,25 % à compter du 28 août 2014,

que soit ordonnée la capitalisation des intérêts dus sur ces sommes pour une année en vertu de l'article 1154 du code civil,

que soit ordonnée l'exécution provisoire de la décision à venir nonobstant appel et ce, sans caution,

que la condamnation des défendeurs au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile qu'aux dépens.

Monsieur [J] et la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM, sollicitaient de la juridiction de première instance de :

recevoir la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM et monsieur [B] [J] en leurs demandes et les y déclarer bien fondés,

condamner le CREDIT DU NORD à verser à la SCI PARIS CAPITAL PIERRE des dommages et intérêts à hauteur d'une somme qui ne saurait être inférieure à 350 000 euros outre les intérêts au taux légal à compter du jour de la régularisation des présentes,

condamner le CREDIT DU NORD à verser à monsieur [B] [J] la somme de 300 000 euros outre les intérêts au taux légal à compter du jour de la régularisation des présentes,

ordonner la compensation entre les dommages et intérêts prononcés et toute éventuelle condamnation de la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM et de monsieur [B] [J],

débouter le CREDIT DU NORD de ses autres demandes, fins et prétentions, notamment au titre de la capitalisation des intérêts, cette demande n'étant pas conforme aux exigences de l'article 1154 du code civil le délai de l'année entière n'étant écoulé,

condamner le CREDIT DU NORD à payer la somme de 5 000 euros à la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de SARL REALIM, et de 3 000 euros à monsieur [B] [J], au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

dire et juger au vu des circonstances n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire,

condamner le CREDIT DU NORD aux dépens.

Par jugement en date du 20 mars 2017, dont appel, le tribunal a :

* condamné solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE, et monsieur [B] [J] dans la limite de 104 000 euros, à payer à la SA CREDIT DU NORD la somme de 136 647,94 euros outre intérêts au taux de 11,25 % à compter du 28 avril 2014, avec anatocisme à compter du 7 octobre 2014,

* condamné solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE, et monsieur [B] [J] dans la limite de 234 000 euros, à payer à la SA CREDIT DU NORD la somme de 122 374,59 euros outre intérêts au taux de 7,38 % sur le principal de 119 340,82 euros à compter du 2 septembre 2014 avec anatocisme à compter du 7 octobre 2014,

* condamné solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE et monsieur [B] [J] à payer à la SA CREDIT DU NORD la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

* ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,

* condamné solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE et monsieur [B] [J] aux entiers dépens.

Il est demandé à la cour l'infirmation du jugement déféré. Seront discutés successivement les points portant :

sur les agissements fautifs du CREDIT DU NORD dans les fichages successifs de son client et sur le maintien abusif de ses inscriptions (A),

sur la rupture fautive de la dénonciation par la banque de la convention de compte courant et ses conséquences sur la déchéance du prêt (B),

sur les conséquences indemnitaires (C),

sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile (D).

A. Sur les agissements fautifs du CREDIT DU NORD dans les fichages à la BANQUE DE FRANCE de monsieur [J] et sur le maintien abusif de ses inscriptions :

Le jugement de première instance a rejeté les prétentions de la SCI PARIS CAPITAL PIERRE, venant aux droits de la SARL REALIM, et de monsieur [B] [J] s'agissant des caractères irréguliers et abusifs des fichages dont monsieur [J] a fait l'objet et l'impossibilité qui en résultait pour lui de trouver une quelconque solution avec un autre établissement bancaire.

Le premier juge a manifestement commis une erreur d'appréciation en motivant sa décision

comme suit : ' Le CREDIT DU NORD, en octroyant des financements professionnels à REALIM n'escomptait pas que ces facilités seraient remboursées par des recours à d'autres prêteurs, mais plutôt par le fruit de l'activité de l'entreprise'. L'analyse retenue par le tribunal de commerce de Paris ne pourra qu'être infirmée par la Cour de céans En effet, la recherche par monsieur [J] d'autres concours bancaires était conditionné par l'étude de ses demandes de délai et par la levée du fichage par le CREDIT DU NORD avant la dénonciation des comptes et l'exigibilité anticipée du prêt. De plus, la société concluante et monsieur [J] démontrent que le CREDIT DU NORD avait l'intention de voir ces derniers rembourser le solde débiteur du compte par le recours à d'autres prêteurs.

Ainsi, dès le mois de mars 2014 soit avant même la dénonciation des comptes, la banque écrivait : 'Où en êtes-vous du crédit au niveau du CREDIT COOPERATIF' (e-mail du 12 mars 2014 à monsieur [J]), 'Afin de pouvoir étudier votre demande, merci de me faire parvenir les conditions suspensives qui vous sont imposées par les banques et les justificatifs de vos demandes de concours' (e-mail du 11 juin 2014 de monsieur [L] [R], Chargé d'affaires spéciales du CREDIT DU NORD). Dès lors, le CREDIT DU NORD qui attendait de son client qu'il trouve une autre banque mais dans le même temps, le plaçait dans une situation rendant impossible l'octroi d'un concours par une autre banque, a manifestement commis une faute. Le comportement de la banque n'avait qu'un seul but : entraîner la cessation des activités professionnelles de la société concluante et de monsieur [J].

Pour les raisons ci-après exposées, la Cour ne pourra que, contrairement au juge de première instance, dire et juger que les fichages successifs aux fichiers de la BANQUE DE

FRANCE par le CREDIT DU NORD sont irréguliers en ce que le CREDIT DU NORD n'a pas respecté les procédures applicables à de tels fichages, d'une part, et les a maintenus de manière abusive, d'autre part, et sont fautifs en ce que le CREDIT DU NORD a volontairement privé son client de trouver d'autres concours bancaires.

En l'espèce, deux fichages sont intervenus :

1) Le premier fichage, sur le Fichier Central des Chèques (FCC) :

La banque considère dans ses écritures qu'elle n'a commis aucune faute. Ces prétentions ne résisteront pas à l'examen.

En vertu de la convention entre la BANQUE DE FRANCE et le Groupement des Cartes Bancaires (CB) du 1er avril 2010, l'établissement qui décide déclarer au Fichier une décision de retrait d'une carte bancaire doit en informer le titulaire du compte en précisant notamment le montant des incidents, le délai à l'expiration duquel faute de régularisation, la décision de retrait de la carte bleue sera déclarée au FCC et la possibilité de faire des observations ou de saisir ensuite un médiateur pour demander le réexamen de sa situation. Après régularisation, la banque ayant procédé à l'inscription est tenue de demander la radiation dans les deux jours ouvrés à compter du constat de la régularisation de la situation.

En l'espèce, l'inscription a eu lieu le 5 février 2014. Or, à aucun moment le CREDIT DU NORD n'a informé monsieur [J] de son inscription au FCC. Bien au contraire, monsieur [J] a eu connaissance de cette inscription le 11 juin 2014, lors de ses démarches auprès de la CAISSE D'EPARGNE visant à obtenir des financements. Monsieur [J] demandait alors immédiatement au CREDIT DU NORD des explications sur l'existence d'un tel fichage et sollicitait qu'il soit levé. Ce fichage FCC n'a été levé que le 25 juin 2014 et alors même que monsieur [J] avait rendu sa carte bancaire le 26 février 2014. La date de l'inscription au FCC de monsieur [J], soit le 5 février 2014, a marqué le point de départ à partir duquel le CREDIT DU NORD a cessé de prêter son concours bancaire à la SARL REALIM, ainsi que le démontre le relevé de compte de la SARL. Tous les prélèvements ont été rejetés à partir du 5 février 2014. Ce fichage a donc eu pour conséquence d'empêcher monsieur [J] d'obtenir des financements bancaires, lesquels lui auraient permis de poursuivre ses activités professionnelles via ses sociétés et de solder les sommes dues au CREDIT DU NORD. La situation financière de la société concluante et de monsieur [J] était inextricable en raison des agissements du CREDIT DU NORD.

En effet, le CREDIT DU NORD a commis des fautes :

en incitant monsieur [J] à trouver un autre partenaire financier tout en inscrivant celui-ci à son insu au FCC, sans respecter ni le délai de préavis, ni son obligation d'information en violation de la convention susvisée, la charge de la preuve en incombant à la banque ; le CREDIT DU NORD est défaillant à établir qu'il a respecté ses obligations ;

en plaçant de facto monsieur [J] dans l'impossibilité de trouver d'autres concours bancaires ;

en maintenant le fichage au FCC alors que monsieur [J] avait restitué sa carte bancaire le 26 février 2014, soit presque quatre mois auparavant.

2) Le second fichage au Fichier des Incidents de remboursement de Crédits aux Particuliers (FICP)

L'arrêté du 26 octobre 2010 relatif au FICP fixe les modalités de collecte, de conservation et de consultation des informations (articles L751-1 à 752-3 du code de la consommation, L313-6 du code monétaire et financier). Dès qu'un incident de paiement caractérisé est constaté, l'établissement de crédit informe le débiteur défaillant que l'incident sera déclaré au FICP à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date d'envoi de cette information. L'article 5 de l'arrêté du 26 octobre 2010 prévoit que :

I. ' Dès qu'un incident de paiement caractérisé est constaté, l'établissement ou organisme mentionné à l'article 1er informe le débiteur défaillant que l'incident sera déclaré à la Banque de France à l'issue d'un délai de 30 jours calendaires révolus courant à compter de la date de l'envoi du courrier d'information, le cachet de la poste faisant foi. Ce délai permet notamment à la personne concernée de régulariser sa situation ou de contester auprès de l'établissement ou de l'organisme le constat d'incident caractérisé. Ce courrier d'information doit mentionner les caractéristiques de l'incident pouvant donner lieu à inscription au FICP, notamment le montant des sommes dues au titre de l'impayé, la référence et le montant du crédit, ainsi que les modalités de régularisation de l'incident avant le délai susmentionné. (')

II. ' Au terme du délai d'un mois mentionné ci-dessus, sauf si les sommes dues ont été réglées ou si une solution amiable a été trouvée, l'incident devient déclarable et l'établissement ou l'organisme mentionné à l'article 1er informe par courrier le débiteur défaillant des informations qu'il transmet à la Banque de France.

Sur ce second fichage, le CREDIT DU NORD rédigeait un avis de déclaration FICP daté du 8 juillet 2014 et envoyé quelques jours plus tard à monsieur [J]. Or, aucune information préalable ne lui avait été délivrée sur ce fichage, ni aucun préavis de 30 jours pour régulariser l'incident. Ce courrier fait référence à tort à une prétendue information que monsieur [J] aurait reçue préalablement. En tout état de cause, il appartient au CREDIT DU NORD de rapporter la preuve qu'il aurait délivré cette information à son client. Or, tel n'est actuellement pas le cas. Il s'ensuit que la banque n'a pas respecté les obligations légales applicables en la matière. L'examen des correspondances transmises par le CRÉDIT DU NORD à monsieur [J] ne fait nullement mention : d'un risque de fichage au FICP, du droit de monsieur [J] de disposer d'un délai de 30 jours pour régulariser à peine d'inscription audit fichier et du fait que l'incident de paiement ne peut être déclaré qu'au terme de ce délai d'un mois.

La mauvaise foi et le caractère abusif des agissements de la banque CREDIT DU NORD sont démontrés, et ce d'autant plus (comme il l'a été précédemment exposé), que le prêteur n'a pas hésité à procéder à l'inscription de monsieur [J] au FICP dès le 8 juillet 2014, soit 24 heures avant la régularisation du solde débiteur du compte personnel de monsieur [J]. De surcroît, la banque savait pertinemment qu'en mettant monsieur [J] dans cette situation, qui consiste à l'inciter à négocier des financements avec d'autres banques tout en le privant de son droit à l'information (qui résulte notamment de l'arrêté précité) et en maintenant le fichage jusqu'au 4 août 2014, ce dernier ainsi que la société concluante n'avaient aucune chance d'obtenir des crédits bancaires et/ou l'ouverture de compte. Les pièces versées aux débats corroborent ces affirmations. La banque ne craint pas d'affirmer dans ses écritures qu'elle a oublié de lever le fichage FICP de monsieur [J]. Il est donc démontré que les fautes du CREDIT DU NORD sont à l'origine des préjudices subis par la société REALIM et par monsieur [J].

B. Sur la rupture fautive de la dénonciation par la banque de la convention de compte courant et ses conséquences sur la déchéance du prêt :

La banque considère que la dénonciation de la convention de compte courant est régulière et qu'elle a parfaitement respecté les dispositions légales applicables en la matière. Ces prétentions ne sauraient prospérer. Pour condamner les appelants au paiement des sommes précitées, le juge de première instance s'est borné à constater l'existence d'une convention et d'un prêt, des mises en demeures envoyées et des soldes impayés. Le juge de première instance retenait la régularité de la dénonciation des comptes et de la déchéance du prêt prononcées au motif du 'fonctionnement non satisfaisant' des comptes professionnels. L'analyse retenue par le tribunal de commerce de Paris ne pourra qu'être infirmée par la Cour de céans au regard des développements ci-après.

1°/ En droit, l'article L 313-12 du code monétaire et financier prévoit que : 'Tout concours à durée indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit ou une société de financement consent à une entreprise, ne peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis fixé lors de l'octroi du concours. Ce délai ne peut, sous peine de nullité de la rupture du concours, être inférieur à soixante jours.' Il ajoute que 'le non-respect de ces dispositions peut entraîner la responsabilité pécuniaire de l'établissement de crédit.'

Le banquier qui interrompt brusquement le crédit ouvert à un client sans que les conditions

légales soient réunies commet un abus de droit l'obligeant à réparer le dommage causé à

son client. L'utilisation d'un écrit pour dénoncer des concours bancaires est une exigence d'ordre public. L'établissement bancaire doit fournir les raisons de cette réduction ou interruption. Le banquier qui ne répond pas à l'emprunteur peut alors voir sa responsabilité engagée.

Au cas particulier, le CRÉDIT DU NORD a adressé un courrier recommandé daté du 2 avril 2014 à la société REALIM SARL, qui était rédigé de la manière suivante :

' Nous vous rappelons qu'aux termes des conventions intervenues entre nous, nous avons la faculté de dénoncer le découvert et la convention de compte courant qui régit nos relations, moyennant un préavis de 60 jours à compter de la réception de la notification qui vous serait faite. Nous vous faisons connaître par la présente que nous entendons faire jouer cette clause de dénonciation. En conséquence, la faculté de découvert, ainsi que la convention de compte courant prendront fin à l'issue du préavis de 60 jours à compter de la réception de la présente. Nous procéderons à l'expiration du délai à la clôture de votre compte courant sur nos livres, et reprendrons contact avec vous pour vous indiquer la somme que vous resterez nous devoir au titre du solde débiteur dudit compte (')'.

Contrairement à la position adoptée en première instance, la dénonciation du compte intervenue le 2 avril 2014 n'est pas régulière. Tout d'abord, cette correspondance a été transmise à la société REALIM SARL à l'adresse suivante : [Adresse 4]. Or, le siège social de cette société au 2 avril 2014 n'est pas à cette date à l'adresse susvisée mais au [Adresse 3]. La lettre de dénonciation de la banque est donc irrégulière en ce qu'elle aurait dû être transmise à l'adresse de son siège social. Compte tenu de l'importance de ce courrier, la banque aurait dû faire preuve d'une vigilance accrue. Tel n'a pas été le cas. Il s'ensuit que le CRÉDIT DU NORD n'a pas respecté les conditions posées par l'article L313-12 du code monétaire et financier.

Si par extraordinaire, la Cour de céans venait à considérer que la lettre de dénonciation est régulière, force est de constater que la banque n'a pas communiqué les raisons de cette dénonciation dans sa correspondance du 2 avril 2014. La dénonciation est dénuée de toute précision. Or, les motifs de la dénonciation n'ont jamais été communiqués à la société concluante et à monsieur [J]. Au cas particulier, la banque ne pouvait se dispenser de faire mention d'éléments précis dès lors où elle a brusquement changé d'attitude en rejetant des prélèvements pour un solde débiteur de 109 527 euros alors qu'auparavant elle ne voyait aucun inconvénient à ce que le compte soit débiteur d'un montant bien supérieur. Il lui appartenait donc de faire mention des raisons de la dénonciation de la convention de compte étant donné que les diligences de la banque étaient susceptibles de placer la société concluante et monsieur [J] dans une situation d'une particulière gravité. La rupture de concours bancaires par des banques entraîne le plus souvent la procédure collective de l'entreprise concernée. En omettant de faire mention des raisons de la dénonciation dans son courrier, le CREDIT DU NORD n'a pas respecté le formalisme légal de l'article L313-12 du code monétaire et financier.

2°/ Par ailleurs, le jugement de première instance a omis d'examiner au regard de la jurisprudence si le défaut de remboursement ne provenait pas du seul comportement de la banque.

Or, justement, la jurisprudence admet que cette déchéance est injustifiée lorsque le défaut de remboursement allégué ne provient que du seul comportement de l'établissement bancaire qui a rejeté ces prélèvements du fait de sa décision unilatérale et dépourvue de préavis de réduire son concours bancaire accordé sous forme de facilité de trésorerie.

En l'espèce, l'examen des relevés de comptes de la SARL REALIM produits par le CREDIT DU NORD en première instance révèle que la SARL REALIM a ouvert le compte le 31 mars 2009. En 2009 ce compte était débiteur pour la première fois dès le mois d'août 2009 (solde à - 5 002,72 euros puis à - 10 777,69 euros en septembre 2009). Les crédits étaient irréguliers mais importants, permettant de couvrir les soldes débiteurs des mois précédents (par exemple : un virement de 500 000 euros en octobre 2009, un autre de 46 715,74 euros en novembre 2009 ou encore deux virements de 30 000 euros chacun en février 2010). En 2010 le solde était constamment débiteur 10 mois sur 12. Les découverts du compte oscillaient entre - 16 925,26 euros et - 69 492,34 euros. Plusieurs crédits importants de plusieurs dizaines de milliers d'euros, jusqu'à 134 270 euros par un chèque du 22 septembre 2010, venaient alimenter ce compte. Pour ces deux premières années, le CREDIT DU NORD n'a jamais questionné sa cliente et n'a jamais remis en cause le concours bancaire accordé à la SARL et monsieur [J]. Il n'était pas non plus question du moindre fichage. Au contraire, en 2011 le CREDIT DU NORD augmentera son concours bancaire. En janvier 2011, le solde du compte était débiteur à - 44 905,62 euros ; en février 2011, à - 53 961,55 euros. Cela n'empêchait pas le CREDIT DU NORD d'octroyer par l'avenant sur la facilité temporaire de caisse, jusqu'à 80 000 euros, et un prêt de 180 000 euros, tous deux signés le 17 mars 2011. Le premier prélèvement pour remboursement de l'emprunt était fixé au 15 mai 2011. En avril 2011, le compte était débiteur à 136 918,34 euros. Malgré un crédit de 60 000 euros le 9 mai, le compte était toujours débiteur bien au-delà de la facilité de trésorerie conventionnelle au moment du prélèvement de la première échéance du prêt en mai 2011.

Pendant les deux ans et demi qui suivent, le CREDIT DU NORD aura néanmoins prêté son concours bancaire, autorisant tacitement et sans aucune difficulté une facilité temporaire de trésorerie bien au-delà du montant de 80 000 euros fixé conventionnellement. Ces montants de dépassement étaient conséquents et ils excédaient régulièrement le double du montant conventionnel. Par exemple, le compte a pu présenter les débits ci-après :

148 872 euros en octobre 2011,

152 975 euros en novembre 2011,

157 869 euros en avril 2012,

133 517 euros en septembre 2012,

129 000 euros en mai 2013,

130 000 euros en Juin 2013,

122 385 euros en septembre 2013,

de sorte qu'il existait une facilité de caisse tacite et habituelle au-delà du seuil conventionnel et jusqu'à a minima 130 000 euros. Le compte a toujours été débiteur entre le 15 mai 2011 (premier prélèvement de remboursement du prêt) et le mois de février 2014 (premier rejet de prélèvement) :

au-delà du seuil de 80 000 euros fixé par l'avenant : en 2011 aux mois de mai, juillet, août, octobre, novembre, en 2012 aux mois de janvier, février, avril, mai, juin, juillet, septembre, décembre, en 2013 aux mois de janvier, février, mars, avril, mai, juin, juillet, août, septembre, décembre et enfin en 2014, en janvier et en février, soit 25 mois sur 34;

en-deçà du seuil de 80 000 euros fixé par l'avenant : en 2011 aux mois de juin, septembre, décembre, en 2012 aux mois de mars, août, octobre, novembre, et en 2013 aux mois d'octobre et de novembre, soit 9 mois sur 34.

Ce fonctionnement accepté par la banque qui continuait de prélever les échéances et autoriser les paiements a donc perduré pendant plusieurs années. Ce n'est qu'à la trente quatrième échéance du prêt que brutalement, alors que rien ne permettait de considérer que la situation du compte aurait changé, que la banque a soudainement rejeté tous les paiements et prélèvements à compter du 5 février 2014 au prétexte justement, que le fonctionnement du compte n'était pas satisfaisant. Cette date correspond, ainsi que le comprendra bien plus tard monsieur [J], à son inscription au FCC pour l'utilisation de sa carte bancaire personnelle. Le CREDIT DU NORD dans un amalgame flagrant et abusif, répercutait les effets d'une animosité soudaine et personnelle à l'encontre de monsieur [J] sur sa société REALIM, mais également la SCI PARIS CAPITAL PIERRE dont les comptes subiront le même sort. La résiliation du prêt est donc imputable au CREDIT DU NORD qui, ayant accordé des facilités de caisses implicites jusqu'à 130 000 euros (et parfois même jusqu'à 159 000 euros) depuis le début de la relation avec la SARL REALIM et monsieur [J], a subitement changé de position.

Au regard de la jurisprudence le CREDIT DU NORD a donc, en refusant son concours bancaire en février 2014 et en prononçant la déchéance du prêt en août 2014, commis une faute qui justifie l'octroi de dommages et intérêts à la SARL REALIM par voie de compensation avec la dette résultant de la convention de compte-courant et du contrat de prêt professionnel non remboursés. La juridiction de première instance a commis une erreur d'appréciation en n'ayant pas constaté ces fautes, ni tiré leurs conséquences.

En conséquence, il est demandé à la Cour de céans de :

dire et juger que le CREDIT DU NORD a commis des fautes en inscrivant successivement et irrégulièrement monsieur [B] [J] aux fichiers de la BANQUE DE FRANCE dits FCC et FICP, en dénonçant la convention de compte et en prononçant la déchéance du prêt ;

dire et juger que la dénonciation intervenue le 2 avril 2014 du compte courant par le CREDIT DU NORD est irrégulière,

dire et juger que la dénonciation intervenue le 2 avril 2014 du compte courant par le CREDIT DU NORD est irrégulière faute de mention des raisons de ladite dénonciation,

dire et juger que la facilité de caisse tacite et habituelle au regard de l'intention commune des parties à travers l'analyse de la variation du solde débiteur du compte litigieux était de 130 000 euros,

dire et juger que les inscriptions prises de monsieur [B] [J] par le CREDIT DU NORD aux fichiers de la BANQUE DE FRANCE dits FCC et FICP ne sont pas conformes aux dispositions légales et réglementaires applicables en la matière,

dire et juger que le maintien par le CREDIT DU NORD de ces inscriptions est irrégulier et/ou abusif.

C. Sur les conséquences indemnitaires

La banque soutient que la société concluante et monsieur [J] ne démontrent aucun préjudice. Ces prétentions ne résisteront pas à l'examen. Il a été jugé qu'une banque peut voir sa responsabilité civile engagée si elle vient à faire inscrire de manière injustifiée un emprunteur au FICP (Montpellier 3 juin 2003, 1ère civ, 26 janvier 2012). En cas de rupture abusive de concours bancaires, l'engagement de la responsabilité civile du prêteur implique la démonstration d'un préjudice. Or, ce dernier peut prendre des formes très diverses : la diminution d'actif ou la diminution du passif de l'entreprise ayant fait l'objet d'une procédure collective, la perte de chance de négocier avec succès un concours extérieur ou encore un préjudice moral 'en raison du tracas nécessairement causé par la rupture brutale de l'autorisation tacite de découvert'.

1) Sur le préjudice subi par la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM

Les fautes du CREDIT DU NORD ont entraîné un préjudice direct et certain de la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM. En effet, les agissements de la banque ont eu pour conséquence : d'empêcher la SARL REALIM de fonctionner, de développer de nouveaux projets, de contracter avec des fournisseurs et de poursuivre ses activités, de priver la SARL REALIM de négocier avec succès des concours extérieurs d'autres partenaires financiers, tels que la CAISSE D'EPARGNE et le CRÉDIT COOPÉRATIF qui étaient disposés à octroyer des concours bancaires à la société concluante, de nuire à la réputation de la SARL REALIM dès lors que l'ensemble des fournisseurs de la SARL REALIM a eu connaissance de ces différentes inscriptions par la société Française de l'assurance-crédit (anciennement SFAC). Autrement dit, la SARL REALIM ne s'est vue confier aucun chantier à la suite des fichages de monsieur [J], soit dès février 2014 ; le secteur de la rénovation, la réhabilitation, l'achat, la vente et la location de biens immobiliers avait perdu toute confiance envers la SARL REALIM. Pire encore, les fournisseurs ont cessé d'accorder des lignes de crédit à la société concluante de sorte que cette dernière n'a plus été en mesure de terminer les chantiers en cours. De surcroît, cette perte de confiance est toujours présente ; la SCI PARIS CAPITAL PIERRE éprouve les plus grandes difficultés à obtenir de nouveaux contrats, ce qui n'était pas le cas avant les agissements du CREDIT DU NORD . Un préjudice futur, qui est certain, devra également être pris en considération. A partir de 2014, la situation financière de la SARL REALIM était obérée de telle sorte que monsieur [J] n'a eu d'autres choix que de la faire absorber par la SCI PARIS CAPITAL PIERRE pour ramener les coûts de l'activité au strict minimum, et de radier la SARL REALIM.

Compte tenu de l'ensemble des éléments précités, le préjudice de la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la société REALIM a pu être évalué en première instance à 350 000 euros en prévision de la compensation de la somme requise au titre du prêt et de la facilité de trésorerie par le CREDIT DU NORD. Ce montant, qui a été actualisé, se décompose désormais de la manière suivante :

136 647,94 euros outre intérêts au taux de 11,25% à compter du 28 avril 2014, avec anatocisme à compter du 7 octobre 2014, correspondant aux sommes sollicitées par la banque au titre du solde débiteur du compte, augmenté des intérêts de 85 451,17 euros au 21 juillet 2017, soit un total de 222 099,11 euros ;

122 374,59 euros outre intérêts au taux de 7,38 % sur le principal de 119 340,82 euros à compter du 2 septembre 2014 avec anatocisme à compter du 7 octobre 2014, correspondant aux sommes sollicitées par la banque au titre du prêt professionnel de 180 000 euros, augmenté des intérêts de 48698,15 euros au 21 juillet 2017, soit un total de 171,072,74 euros ;

100 000 euros à titre de préjudice moral.

En conséquence, le préjudice de la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM est évalué à la somme de 493 170 euros.

2) Sur le préjudice personnel de monsieur [J]

La jurisprudence admet que la responsabilité d'un établissement de crédit puisse être engagée pour rupture abusive de crédit envers une caution avertie dès lors que cette dernière peut se prévaloir d'un préjudice personnel. Ce préjudice peut résulter des conditions dans lesquelles une banque a retiré des moyens de financement au débiteur principal provoquant ainsi son recours contre la caution.

En l'espèce, il est constant que :

monsieur [J] a subi un préjudice personnel du fait de ses inscriptions par le CREDIT DU NORD aux fichiers de la BANQUE DE FRANCE sans en être informé ;

le CREDIT DU NORD a incité monsieur [J] à se diriger vers un autre partenaire financier alors même que, parallèlement, la banque procédait aux fichages FCC et FICP (outre un maintien abusif au FICP de monsieur [J]), ce qui avait inéluctablement pour conséquence de rendre infructueuses les nombreuses démarches initiées par monsieur [J] et notamment auprès du CRÉDIT COOPÉRATIF, et de LA CAISSE D'EPARGNE. Comme il l'a été précédemment exposé, l'inscription au FCC n'a été levée qu'en juin 2014 et ce, nonobstant le fait que monsieur [J] avait restitué sa carte de paiement le 26 février 2014, puis avait effectué les virements nécessaires pour solder les découverts constatés sur ses comptes personnels ;

les agissements de la banque ont dégradé de manière certaine la réputation de monsieur [J] en tant que gérant de société ; ce dernier a notamment été privé des lignes de crédits dont il bénéficiait auprès des fournisseurs de matériaux pour la société REALIM ; autrement dit, la société REALIM n'était plus en mesure de poursuivre les chantiers en cours ;

la déchéance du terme causée par la seule faute du CREDIT DU NORD et le rejet des opérations sans préavis (régulier) ont eu pour conséquence la mise en 'uvre injustifiée et abusive de son engagement de caution ;

monsieur [J] a subi un préjudice moral en raison notamment du tracas nécessairement causé par la rupture brutale de l'autorisation tacite de découvert.

La portée de ces préjudices dépasse la simple qualité de gérant de la SARL REALIM et le seul engagement de caution de monsieur [J] pour le prêt de 180 000 euros. En effet, les fichages bancaires ont eu les mêmes effets en cascade sur la SCI PARIS CAPITAL PIERRE également gérée par monsieur [J], laquelle n'a pas été en mesure de trouver de nouveaux partenaires bancaires. Le comportement de la banque à l'égard de la société concluante et de monsieur [J] révèle une intention malveillante de 'couler' monsieur [J] en portant atteinte gravement à l'ensemble de ses activités professionnelles. Ce dernier a dû cesser de verser sa rémunération pour tenter de sauver son activité depuis février 2014. Pour les années précédentes et depuis la création de la société REALIM, monsieur [J] percevait un revenu (base brut cumulé) :

en 2008 : 30 000 euros ;

en 2009 : 120 000 euros (moyenne de 10 000 euros/mois) ;

en 2010 : 120 000 euros (moyenne de 10 000 euros/mois) ;

en 2011 : 123 190 euros (moyenne de 10 265 euros/mois);

en 2012 : 93 806 euros (moyenne de 7 817 euros/mois);

en 2013 : 68 742 euros (moyenne de 5 728 euros/mois) et,

au début de l'année 2014, un total de 12 540 euros pour l'année.

Pendant les 25 mois qui ont suivi, de février 2014 jusqu'à la radiation de la société REALIM en mars 2016, monsieur [J] ne s'est plus versé aucun salaire. Il a considérablement puisé dans son épargne pour subvenir à ses besoins et celui de ses enfants. Compte tenu des éléments précités, le préjudice de monsieur [J] est évalué à 300 000 euros. Il est donc demandé à la Cour de condamner le CREDIT DU NORD à payer à la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM, la somme de 493 170 euros, à monsieur [B] [J], la somme de 300 000 euros, et d'opérer, en toutes hypothèses, une compensation des sommes dues.

Il est en conséquence demandé à la Cour de bien vouloir:

dire l'appel de monsieur [B] [J] et la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM recevable et bien fondé ;

infirmer le jugement prononcé par le tribunal de commerce de Paris le 20 mars 2017 en toutes ses dispositions ;

et statuant de nouveau,

A titre principal

débouter le CREDIT DU NORD de toutes ses demandes, fins et prétentions en ce qu'elles sont non fondées tant à l'encontre de la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM qu'à l'encontre de monsieur [B] [J] ;

dire et juger que le CREDIT DU NORD a commis des fautes en inscrivant successivement et irrégulièrement monsieur [B] [J] aux fichiers de la BANQUE DE FRANCE dits FCC et FICP, en dénonçant la convention de compte et en prononçant la déchéance du prêt ;

dire et juger que la dénonciation intervenue le 2 avril 2014 du compte courant par le CREDIT DU NORD est irrégulière,

dire et juger que la dénonciation intervenue le 2 avril 2014 du compte courant par le CREDIT DU NORD est irrégulière faute de mention des raisons de ladite dénonciation,

dire et juger que la facilité de caisse tacite et habituelle au regard de l'intention commune des parties à travers l'analyse de la variation du solde débiteur du compte litigieux était de 130 000 euros,

dire et juger que les inscriptions prises de monsieur [B] [J] par le CREDIT DU NORD aux fichiers de la BANQUE DE FRANCE dits FCC et FICP ne sont pas conformes aux dispositions légales et réglementaires applicables en la matière,

dire et juger que le maintien par le CREDIT DU NORD de ces inscriptions est irrégulier et/ou abusif,

En conséquence, condamner le CREDIT DU NORD à payer :

à la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM : la somme de 493 170 euros,

à monsieur [B] [J], la somme de 300 000 euros.

En tout état de cause,

- ordonner la compensation entre toute éventuelle condamnation de la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM et toute condamnation du CREDIT DU NORD,

- ordonner la compensation entre toute éventuelle condamnation de monsieur [B] [J] et toute condamnation du CREDIT DU NORD,

- condamner le CREDIT DU NORD à payer la somme de 8 000 euros à la SCI PARIS

CAPITAL PIERRE venant aux droits de SARL REALIM, et de 5 000 euros à monsieur [B]

[J] au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu'elle a d'exposer tant en première instance qu'en cause d'appel ;

- condamner la société CREDIT DU NORD aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions notifiées par la voie du RPVA le 10 décembre 2018 la SA CREDIT DU NORD, intimé

demande à la Cour de :

dire et juger CREDIT DU NORD recevable et bien fondée en son appel incident,

rectifier en conséquence le dispositif de la décision entreprise, en ce qu'il a condamné solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE et monsieur [J] dans la limite de 104 000 euros au titre du solde débiteur et dans la limite de 234 000 euros au titre du prêt,

et, statuant à nouveau,

condamner la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la société REALIM et monsieur [B] [J], au titre du prêt, au paiement d'une somme de 122 374,59 euros outre intérêts de retard au taux de 7,38 % sur le principal de 119 340,82 euros à compter du 20 août 2014 jusqu'à parfait paiement,

condamner la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la société REALIM,

au titre du solde débiteur de compte, au paiement d'une somme de 136 647,94 euros outre intérêts au taux de 11,25 % à compter du 28 août 2014,

condamner monsieur [B] [J] au titre du même solde débiteur du compte et ce, dans la limite de 104 000 euros outre intérêts au taux de 11,25 % à compter du 28 août 2014,

confirmer pour le reste le jugement entrepris rendu le 20 mars 2017 par le tribunal de commerce de Paris,

débouter les appelants de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

condamner solidairement la SCI PARIS CAPITAL PIERRE et monsieur [B] [J] à payer au CREDIT DU NORD la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner les mêmes aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Denis-Clotaire LAURENT, avocat aux offres de droit, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions l'intimé développe les moyens suivants.

La société REALIM était cliente du CREDIT DU NORD pour y avoir ouvert un compte sous le numéro 300076 02058 18977 00 200 le 27 avril 2009. Le CREDIT DU NORD lui a consenti une facilité temporaire de trésorerie de 80 000 euros selon avenant du 17 mars 2011, au taux de base bancaire du CREDIT DU NORD, soit 7,25 % majoré de quatre points, soit 11,25 %. Monsieur [B] [J], gérant de la société REALIM qui exerce son activité professionnelle dans le domaine de l'immobilier, s'est porté caution de la société selon engagement de portée générale du 17 mars 2011 et ce, à hauteur de 104 000 euros.

Par acte sous seing privé du 17 mars 2011, le CREDIT DU NORD a accordé à la société REALIM un prêt professionnel de 180 000 euros, au taux d'intérêt annuel de 4,38 %, remboursable en 84 mensualités de 2 555 euros du 15 mai 2011 au 15 avril 2018. Il était expressément prévu une majoration de trois points en cas de non-paiement à l'échéance, outre une indemnité d'exigibilité anticipée de 3 % du capital restant dû. Monsieur [J] s'est porté caution personnelle et solidaire au titre du prêt et ce, dans la limite de 234 000 euros selon acte sous seing privé du 17 mars 2011.

Le compte ne fonctionnant pas de façon satisfaisante, le CREDIT DU NORD a dénoncé la facilité temporaire de trésorerie et a clôturé le compte et ce, à l'expiration d'un préavis de soixante jours par lettre recommandée du 2 avril 2014, avec copie à la caution et a prononcé la déchéance du terme du prêt par lettre recommandée du 20 août 2014, également avec copie à la caution. Puis le CREDIT DU NORD a mis en demeure la société le 28 août 2014 toujours avec copie à la caution, et a réitéré les mises en demeure à la société et à la caution par lettres recommandées du 15 septembre 2014, qui resteront vaines.

C'est dans ces circonstances que le CREDIT DU NORD s'est adressé à justice afin d'obtenir un titre exécutoire à l'encontre de ses débiteurs selon assignations des 7 et 8 octobre 2014. La société REALIM a fait l'objet d'une radiation du registre du commerce et des sociétés de Paris en raison de l'apport de son patrimoine dans le cadre d'une fusion avec la SCI PARIS CAPITAL PIERRE, société absorbante. Au cours de la procédure de première instance, le CREDIT DU NORD a appelé en intervention forcée la SCI PARIS CAPITAL PIERRE selon exploit du 15 mars 2016.

C'est dans ce contexte factuel qu'est intervenue la décision entreprise qu'il conviendra de confirmer en toutes ses dispositions.

Pour condamner la SCI PARIS CAPITAL PIERRE et monsieur [B] [J] et les débouter de l'intégralité de leurs prétentions, les premiers juges ont retenu :

Sur la facilité de caisse :

que la créance du CREDIT DU NORD au titre de la facilité temporaire de trésorerie était certaine, liquide et exigible ;

que le CREDIT DU NORD était en tant qu'établissement bancaire, libre sans avoir à justifier sa décision, de dénoncer la facilité temporaire de trésorerie et ne pas laisser s'accroître le solde débiteur au-delà du montant autorisé ;

que le CREDIT DU NORD n'avait par conséquent, commis aucune faute en dénonçant la facilité de caisse et en demandant le remboursement ;

que la SCI PARIS CAPITAL PIERRE ne contestait ni le solde dû au titre de la facilité de caisse, ni le mode de calcul des intérêts majorés ;

Sur le prêt professionnel :

que le CREDIT DU NORD a prononcé à bon droit la déchéance du terme du prêt et ce, conformément aux stipulations contractuelles ;

que la SCI PARIS CAPITAL PIERRE ne contestait ni le solde dû au titre du prêt, ni le mode de calcul des intérêts majorés ;

que la créance du CREDIT DU NORD au titre du prêt professionnel, était certaine, liquide et exigible ;

Sur les cautions de monsieur [J] :

- que conformément à la jurisprudence constante, en cas de dissolution d'une société par voie de fusion absorption par une autre société, l'engagement de caution garantissant la première, demeure pour les obligations nées avant la dissolution de celle-ci, sans qu'il soit nécessaire que la caution réitère son engagement ;

- que le moyen de monsieur [J] développé en première instance selon lequel il n'aurait pas entendu renouveler son engagement au profit de la société absorbante était inopérant;

Sur la demande de dommages et intérêts

- que monsieur [J] n'apporte aucune preuve que le conflit personnel qu'il expose avoir eu avec la banque, ait été la cause du fonctionnement non satisfaisant des comptes professionnels de la société REALIM (absorbée par la société PCP) ;

- que les conflits personnels de monsieur [J] ne pouvaient en aucun cas être appréciés dans le cadre de l'instance ;

- qu'aucun abus de la part du CREDIT DU NORD dans les relations avec monsieur [J] en tant que client professionnel ou particulier, n'était caractérisé.

La décision attaquée devra être confirmée en toutes ses dispositions, les premiers juges ayant à bon droit retenu que l'intégralité des créances du CREDIT DU NORD étaient certaines, liquides et exigibles, que les cautionnements souscrits étaient valables et que la responsabilité de la banque ne saurait être engagée, celle-ci n'ayant commis aucune faute.

A- sur l'absence de faute commise par le CREDIT DU NORD :

1- sur les prétendus agissements fautifs de la banque au titre des encours personnels de monsieur [J] :

En cause d'appel les appelants persistent à invoquer les fichages de monsieur [J] au titre de ses encours personnels pour tenter de faire peser sur la banque une faute susceptible d'engager sa responsabilité au titre des encours professionnels dont il est sollicité le recouvrement. Or, tels que l'ont rappelé les premiers juges, ce qui a trait aux encours personnels de la caution, gérant de la société débitrice cautionnée n'a aucune vocation à être apprécié dans le cadre du présent litige. Monsieur [J] ne démontre pas l'existence d'un lien suffisant entre les difficultés qu'il aurait rencontrées à titre personnel et l'objet du présent litige, au sens de l'article 4 du code de procédure civile. Le CREDIT DU NORD apportera néanmoins les précisions qui vont suivre afin d'être tout à fait complet sur le litige abondamment développé, encore en cause d'appel, par monsieur [J], alors qu'il concerne uniquement ses comptes personnels.

a) sur le fichage 'carte bancaire' :

Monsieur [J] reproche tout d'abord à la banque de ne pas avoir été informé du fichage 'carte bancaire' dont il a fait l'objet. Sa carte a effectivement été mise en opposition pour utilisation abusive (cf. prélèvement de 43 euros à ce titre sur son compte le 7 février 2014). Monsieur [J] a restitué sa carte au CREDIT DU NORD le 26 février 2014 . Il ne peut valablement prétendre qu'il n'était pas au courant dudit fichage. La mainlevée du fichage n'a en revanche été effectuée que le 25 juin 2014, mais il ne démontre pas de préjudice au titre de cet oubli. Monsieur [J] ne peut prétendre que le CREDIT DU NORD aurait indiqué au mois de juin 2014 que la mainlevée serait intervenue de façon mensongère. Il suffit de se référer à la chronologie des courriels pour s'en convaincre. Monsieur [J] sollicitait l'annulation de l'inscription le 11 juin 2014. Le CREDIT DU NORD confirmait avoir fait le nécessaire le 25 juin 2014. Monsieur [J] n'effectuait de toute façon plus d'opération par carte du fait de sa

remise à l'agence.

b) sur le fichage au FICP

Il convient de rappeler que le fichage au titre de sa carte bancaire est totalement indépendant de l'inscription au fichier des incidents de paiement, monsieur [J] semblant faire une confusion. Monsieur [J] était informé le 5 juin 2014 d'incidents de paiement rencontrés sur son compte (cf. 26,50 euros de frais de mise en garde prélevés sur son compte le 5 juin 2014 ' pièce n°19 ' le CREDIT DU NORD n'ayant pas conservé de double du courrier). Il recevait la notification de son inscription au fichier des incidents de paiement le 8 juillet 2014, fichage dont il n'est pas inutile de rappeler qu'il est une obligation des banques vis-à-vis des autres établissements bancaires. Ladite notification versée aux débats par monsieur [J] correspond à l'étape II de l'article 5 de l'arrêté du 26 octobre 2010 cité par les appelants (pièces adverses n°10 bis et 13). Il en avait également été informé par courriel. A la suite de la régularisation du solde débiteur de compte puis des échéances impayées de ses prêts personnels, grâce à des virements en provenance de la société REALIM, monsieur [J] n'était plus fiché à ce titre fin juillet 2014. Cela lui était confirmé par courriel du 8 août 2014. Force est de constater que tous ces éléments ne sauraient, en tout état de cause, être appréciés dans le cadre de la présente instance, tout comme l'ont confirmé les juges consulaires et ce, d'autant que monsieur [J] n'apporte pas la preuve que les difficultés qu'il aurait rencontrées avec le CREDIT DU NORD seraient la cause du fonctionnement non satisfaisant des comptes professionnels de la société REALIM, objet des présents débats.

Il y aura lieu dès lors de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a écarté des débats tous les éléments ayant trait aux fichages.

2- sur la prétendue rupture abusive du CREDIT DU NORD :

Encore en cause d'appel, les appelants reprochent au CREDIT DU NORD le caractère prétendument brutal de la clôture du compte et de la déchéance du terme. A ce titre, ils font état du contexte dans lequel le prêt aurait été octroyé sans difficulté à la société REALIM, compte tenu d'un placement au sein de la banque. Il convient de rappeler que la société REALIM a pour objet l'acquisition et la gestion immobilière, ce qui explique la perception de la somme de 945 000 euros en 2009 en raison d'une précédente vente immobilière, le prêt dont il est fait état ayant été octroyé à une société également animée par monsieur [J]. Par conséquent, le fait que la clôture des comptes soit intervenue concomitamment, la SCI CAPITAL PIERRE ayant également été assignée devant le tribunal de grande instance de Paris au titre du solde débiteur de son compte n'a rien de surprenant et ne caractérise aucunement une faute de la banque. La clôture du compte est intervenue le 2 avril 2014 à l'issue d'un préavis de soixante jours. La déchéance du terme a été prononcée le 20 août 2014 conformément aux stipulations contractuelles ainsi que l'ont rappelé les premiers juges. La jurisprudence retient de manière constante que 'toute partie à un contrat à durée indéterminée peut, sans avoir à motiver sa décision, mettre fin unilatéralement à celui-ci, sauf à engager sa responsabilité en cas d'abus'. En l'espèce, aucun abus n'est caractérisé, contrairement à ce que prétendent la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la société REALIM et sa caution dirigeante.

Dans leurs dernières conclusions les appelants soutiennent que la dénonciation effectuée par la banque serait irrégulière sur le fondement de l'article L313-12 du code monétaire et financier dans la mesure où elle n'aurait pas été adressée à l'adresse du siège social, elle ne serait pas motivée. Là encore leur moyen n'est pas fondé.

' concernant l'adresse à laquelle la lettre de dénonciation a été envoyée, sis [Adresse 4], il s'agit de l'ancien siège social de la société REALIM, jusqu'au 28 février 2014. C'est selon procès-verbal du même jour que la modification du siège social a été votée. C'est la raison pour laquelle la dénonciation a été envoyée à cette adresse, le CREDIT DU NORD n'ayant pas encore connaissance du changement de siège social. En tout état de cause la lettre de dénonciation du 2 avril 2014 adressée au 22 avenue Victoria a été retournée avec la mention 'pli avisé non réclamé', la société REALIM a accusé réception de la lettre de déchéance du terme du prêt du 20 août 2014 adressée au 22 avenue Victoria et la réception des courriers ultérieurs montre qu'il y a bien eu un transfert postal. En outre, ce moyen est soulevé pour la première fois, en cause d'appel, et dans les secondes conclusions des appelants, cela démontre à tout le moins leur mauvaise foi ;

' concernant le défaut de motivation de la lettre de dénonciation, les appelants font une lecture erronée de l'article L313-12 précité. Selon l'alinéa 1 de cet article : 'Dans le respect des dispositions légales applicables, l'établissement de crédit ou la société de financement fournit, sur demande de l'entreprise concernée, les raisons de cette réduction ou interruption, qui ne peuvent être demandées par un tiers, ni lui être communiquées. L'établissement de crédit ou la société de financement ne peut être tenu pour responsable des préjudices financiers éventuellement subis par d'autres créanciers du fait du maintien de son engagement durant ce délai.'

Ainsi, la banque n'a-t-elle à fournir les raisons de la dénonciation que si la demande lui en a été faite par l'entreprise. Le CREDIT DU NORD n'avait donc aucune obligation d'expliciter les raisons de sa décision dans la lettre de dénonciation. Le principe selon lequel la banque n'est pas tenue d'indiquer les motifs de sa décision de rupture ' même immédiate, est d'ailleurs rappelé par la jurisprudence. La dénonciation de la banque est donc parfaitement régulière. Dans ces conditions, la Cour d'appel ne pourra que débouter les appelants de leurs demandes à ce titre.

S'agissant du fonctionnement du compte domiciliataire sur lequel étaient prélevées les échéances du prêt, la société REALIM disposait d'une facilité temporaire de trésorerie expresse de 80 000 euros. Les échéances du prêt ont commencé à être rejetées le 15 février 2014, le solde débiteur étant de plus de 120 000 euros. La société REALIM prétend qu'elle disposait d'une autorisation de découvert tacite de 130 000 euros. Or, ce n'est pas parce que la banque a accepté ponctuellement des dépassements qu'elle s'est engagée à renouveler cette facilité et ce, en vertu du principe général selon lequel le banquier toujours libre, sans avoir à justifier sa décision qui est discrétionnaire, de proposer ou de consentir un crédit quelle qu'en soit la forme, de s'abstenir ou de refuser de le faire. Notamment, une banque, qui est libre de ne pas laisser s'aggraver le déficit du compte au-delà du montant autorisé, n'a, en rejetant les ordres de virement litigieux, commis aucune faute. La décision dont appel a été motivée dans l'exacte lignée de cette jurisprudence dans la mesure où les juges consulaires ont expressément rappelé que le CREDIT DU NORD : 'en tant qu'établissement bancaire, est libre, sans avoir à justifier sa décision qui est discrétionnaire, de ne pas laisser s'accroître le solde débiteur au-delà du montant autorisé.' Contrairement à ce que tentent de faire croire les appelants, au simple examen des relevés de compte, on relève que les dépassements étaient systématiquement régularisés dans le ou les deux mois suivants. A titre d'exemple, le compte était resté dans les limites de l'autorisation en août 2013 pour enregistrer un nouveau dépassement en septembre 2013, suivi d'une nouvelle régularisation en octobre et novembre 2013. Les rejets sont intervenus en février 2014 à la suite d'un maintien du solde débiteur de compte à compter de décembre 2013 à 109 000 euros puis plus de 120 000 euros, sans régularisation subséquente. C'est dès lors à bon droit, tels que l'ont retenu les premiers juges que le CREDIT DU NORD a dénoncé les concours consentis. Il conviendra de confirmer la décision.

B- sur le quantum des créances du CREDIT DU NORD :

Ainsi que l'ont confirmé les premiers juges, le quantum des créances du CREDIT

DU NORD n'est pas contesté et se décompose de la manière suivante :

- au titre du solde débiteur de compte : 136 647,94 euros outre intérêts au taux de 11,25 % à compter du 28 août 2014, la caution étant plafonnée à 104 000 euros ;

- au titre du prêt : 122 374,59 euros se décomposant comme suit :

capital restant dû 101 125,83 euros

échéances impayées 18 214,99 euros

indemnité d'exigibilité anticipée 3 033,77 euros

outre intérêts de retard au taux contractuel majoré soit 7,38 % sur le principal de 119 340,82 euros (capital restant dû + échéances impayées) à compter du 20 août 2014 jusqu'à parfait paiement.

Il conviendra là encore de confirmer la décision dont appel.

C- Sur la demande indemnitaire des appelants :

Le préjudice évalué à 350 000 euros et 300 000 euros et ce, de manière tout à fait

fantaisiste par les appelants n'est fondé ni dans son principe, ni dans son quantum. Il convient de rappeler que la seule réparation qui pourrait être allouée doit se mesurer à la perte de chance laquelle ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée et ce, que le fondement soit contractuel ou délictuel. En d'autres termes, la réparation de la perte de chance ne peut jamais représenter 100 % de la chance perdue. La perte de chance n'est pas un ' pis-aller' qui permettrait d''accorder une indemnisation sans que l'on sache quel est l'événement favorable escompté et l'importance de l'avantage espéré : la Cour de cassation ayant à cet égard sanctionné la carence du demandeur dans l'administration de la preuve de son préjudice. La Cour de cassation impose donc aux juges du fond une méthodologie en trois étapes : détermination de la nature et de la valeur de l'avantage escompté, détermination de la probabilité de réalisation de la chance perdue, calcul du préjudice subi. Il convient également de justifier du lien direct de causalité avec le préjudice subi.

En l'espèce, il n'est pas inutile de rappeler que ni la société REALIM, ni monsieur [J] ne démontrent l'existence d'une faute en lien de causalité avec leur prétendu préjudice. Il en est d'autant plus vrai que les prétendus agissements longuement décrits par monsieur [J] concernent ses comptes personnels, sans lien avec le présent litige. Les juges consulaires ont d'ailleurs expressément relevé que monsieur [J] n'apportait 'pas la preuve que son conflit personnel avec sa banque ait été la cause du fonctionnement non satisfaisant aux yeux du CREDIT DU NORD, des comptes professionnels de REALIM, et que, en tout état de cause, ceux-ci ne sauraient être appréciés dans le cadre de la présente instance'. Au surplus, il est retenu 'qu'aucun abus de la part du CREDIT DU NORD dans ses relations avec monsieur [J], en tant que client professionnel ou particulier, n'est caractérisé'. A supposer qu'une faute puisse être caractérisée, celle-ci n'a en tout état de cause aucun lien de causalité avec le prétendu préjudice résultant du présent litige. A titre superfétatoire, monsieur [J] ne démontre pas la perte de chance de se voir consentir un crédit afin de rembourser ses dettes personnelles qui sont toujours en cours de remboursement dans les livres du CREDIT DU NORD. Ses demandes de prêt concernaient ses prêts personnels et aucunement les engagements faisant l'objet de la présente procédure. Il ne saurait prétendre que son fichage à titre personnel aurait entraîné une 'dégradation de sa réputation en tant que gérant de société', ce qui aurait entraîné 'la caducité des lignes de crédits pourtant indispensables auprès des fournisseurs de matériaux pour la société REALIM'. La confusion dans les débats que les appelants tentent d'insuffler n'échappera pas à la Cour qui retiendra la motivation des premiers juges et confirmera là encore sur ce point la décision entreprise.

D- APPEL INCIDENT : sur la rectification du dispositif du jugement entrepris :

CREDIT DU NORD entend voir rectifier l'intitulé des condamnations prononcées aux termes du dispositif de première instance. La Cour devra en effet rectifier la formulation des premiers juges et prononcer dans son arrêt la condamnation solidaire de :

la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la société REALIM et monsieur [B] [J], au titre du prêt, au paiement d'une somme de 122 374,59 euros outre intérêts de retard au taux de 7,38 % sur le principal de 119 340,82 euros à compter du 20 août 2014 jusqu'à parfait paiement ;

la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la société REALIM, au titre du solde débiteur de compte, au paiement d'une somme de 136 647,94 euros outre intérêts au taux de 11,25 % à compter du 28 août 2014 et monsieur [B] [J] au titre du solde débiteur du compte et ce, dans la limite de 104 000 euros outre intérêts au taux de 11,25 % à compter du 28 août 2014.

En conclusion, il ressort de tout ce qui précède que :

les créances du CREDIT DU NORD dont le quantum n'est pas contesté par les appelants présentent les caractères d'exigibilité ;

la responsabilité de la banque ne saurait être engagée en ce qu'elle n'a commis aucune faute de sorte que les prétentions invoquées par les appelants seront écartées,

les prétendus agissements fautifs dont fait état monsieur [J] au titre de ses encours personnels n'ont pas trait à la présente procédure au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

Par conséquent, les appelants seront déboutés de l'intégralité de leurs demandes et la décision dont appel sera confirmée en tous points.

Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions précitées.

SUR CE

Considérant que pour entrer en voie de condamnation le tribunal en premier lieu a retenu, à bon droit, ce qui suit :

'Attendu que le CREDIT DU NORD, estimant que le compte ne fonctionnait pas de façon

satisfaisante, a décidé de dénoncer cette facilité [de trésorerie] le 2 avril 2014 avec un préavis de 2 mois ;

Attendu que la clause 10 des conditions générales de l'avenant à la convention de compte

courant du CREDIT DU NORD dûment paraphées par le défendeur, précise que la banque

peut, sans avoir à motiver sa décision, résilier à tout moment la présente ouverture de crédit en respectant un délai de préavis de 60 jours' ;

Considérant que le courrier daté du 2 avril 2014 a bel et bien été expédié ; que sa non distribution à la société REALIM n'est que la conséquence du comportement de son gérant qui soit n'a pas complètement anticipé sur les éventuelles incidences du déménagement de siège social, soit a tout bonnement été négligeant dans le suivi des courriers en s'abstenant d'aller retirer celui-ci ; que le grief fait à la banque de ne pas avoir prêté plus d'attention à la distribution de ce courrier, est totalement dépourvu de fondement ;

Considérant que le pli recommandé contenant ce courrier daté du 2 avril 2014 n'ayant pas été réclamé par son destinataire bien qu'envoyé à l'adresse alors valable selon les éléments connus de la banque, le délai de 60 jours a commencé à courir au jour de sa présentation, soit le 4 avril 2014 ;

Qu'il sera souligné que copie de ce courrier a été adressée à monsieur [J] en sa qualité de caution, qui en a accusé réception, et que ni monsieur [J] en sa qualité de caution ni la société REALIM ne contesteront la régularité du préavis alors que la mise en demeure du 28 août 2014 de régler les sommes dues au titre du prêt et du solde débiteur du compte courant, rappelait expressément que la décision de dénonciation de la facilité commerciale de trésorerie est intervenue après préavis ;

Considérant que ce délai de 60 jours prévu conventionnellement ' ce qui est rappelé expressément dans le courrier du 2 avril 2014 ' n'est que l'application de l'article L313-12 du code monétaire et financier qui prévoit que : 'Tout concours à durée indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit ou une société de financement consent à une entreprise, ne peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis fixé lors de l'octroi du concours. Ce délai ne peut, sous peine de nullité de la rupture du concours, être inférieur à soixante jours.' ' cet article ajoutant que le non-respect de ces dispositions peut entraîner la responsabilité pécuniaire de l'établissement de crédit ;

Considérant que le tribunal, s'agissant des circonstances dans lesquelles il a été mis fin au concours bancaire, a exactement motivé sa décision en écrivant :

'Attendu que le CREDIT DU NORD, en tant qu'établissement bancaire, est libre, sans avoir à justifier sa décision qui est discrétionnaire, de ne pas laisser s'accroitre le solde débiteur au delà du montant autorisé' ;

Qu'on pourra ajouter à cela, que le fait que dans un passé récent la banque avait fait confiance à la société REALIM et lui avait consenti des concours de montant important (prêt de 1 million d'euros le 16 juin 2009, puis de 170 000 euros seulement 6 mois plus tard), est eu égard au principe ainsi rappelé, totalement inopérant ;

Considérant que le premier juge a donc pu exactement en conclure :

'Attendu que le CREDIT DU NORD n'a par conséquent pas commis de faute en dénonçant la

facilité de caisse et en en demandant le remboursement' pour relever ensuite 'Attendu que ie défendeur ne conteste ni le solde dû au titre de la facilité de caisse, ni le mode de calcul des intérêts majorés' ;

Considérant qu'il convient de souligner que contrairement à ce que soutiennent les appelants il ne ressort pas des pièces versées au débat, et notamment des relevés de compte, qu'il y ait eu volonté commune et univoque des parties pour un découvert autorisé supérieur à celui qui a été expressément fixé le 17 mars 2011 à hauteur de la somme de 80 000 euros, et dont les appelants chiffrent arbitrairement le montant à 130 000 euros ;

Considérant que le tribunal poursuit donc sa motivation en retenant exactement et à juste titre :

'Attendu que les échéances de remboursement du prêt ont été rejetées par le CREDIT DU

NORD car elles auraient provoqué un accroissement du solde débiteur de la facilité de caisse

déjà largement au dessus de sa limite autorisée et que le CREDIT DU NORD a prononcé la

déchéance du terme du prêt, conformément aux stipulations de I'article 10.2 des conditions

générales du contrat de prêt, par lettre recommandée du 20 août 2014, avec copie à la

caution' ;

Considérant que le tribunal a relevé à juste titre que le défendeur ne conteste ni le solde dû au titre du prêt, ni le mode de calcul des intérêts majorés ' pas plus que n'a été discuté le montant de la somme due au titre du solde débiteur du compte ' et que la créance du CREDIT DU NORD est certaine, liquide et exigible ;

Que pas davantage à hauteur d'appel il n'est contesté le montant de la dette, les appelants axant leurs prétentions sur la question de la responsabilité de la banque ;

Considérant qu'à ce sujet le premier juge a écrit :

'Attendu que Monsieur [J] introduit dans l'instance un litige qui I'opposerait au CREDIT DU NORD pour ses comptes personnels, reprochant à la banque un retrait abusif de carte bancaire personnelle et une inscription au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers ;

Attendu que Monsieur [J] prétend que ce sont ces actions menées par la banque contre lui personnellement en tant que client particulier qui ont compromis sa réputation, rendant impossible pour lui le recours à d'autres préteurs pour refinancer ses dettes professionnelles vis à vis du CREDIT DU NORD ;

Attendu cependant que Monsieur [J] n'apporte pas la preuve que son conflit personnel avec sa banque ait été la cause du fonctionnement non satisfaisant aux yeux du CREDIT DU NORD des comptes professionnels de REALIM et que, en tout état de cause, ceux ci ne sauraient être appréciés dans le cadre de la présente instance' ;

Considérant que lorsque monsieur [J] écrit que les conséquences dommageables ont dépassé le cadre de la société REALIM pour affecter la SCI PARIS CAPITAL PIERRE dont il est le gérant, lui créant ainsi un préjudice personnel, il n'en demeure pas moins que ces griefs ne concernent que la sphère professionnelle ;

Considérant qu'il doit être rappelé que c'est bien la carte personnelle de monsieur [J], et non celle de la société, qui a été retirée, ensuite d'un solde de compte débiteur [de 5 384,34 euros au 28 février 2014] et que ses doléances relativement aux circonstances dans lesquelles il a été procédé à ses 'fichages' ne concerne que ses comptes personnels ; qu'à cet égard il sera fait observer,

que le fichage 'carte bancaire', légitime compte tenu du fonctionnement débiteur du compte, dont la banque justifie, au vu des pièces produites a nécessairement été porté à la connaissance de monsieur [J], lequel ne peut se plaindre que du retard apporté par la banque à effectuer la mainlevée du dit fichage (ce qu'elle admet) mais qui faute de fournir des pièces assez précises pour être convaincantes (cf. pièce 12), ne parvient pas à démontrer que le fichage maintenu plus longtemps que nécessaire aurait été le seul obstacle à l'obtention d'un nouveau crédit ;

que les 'frais de mise en garde' de 26,50 débités du compte le 5 juin 2014 ' pièce 19 de la banque ' peuvent correspondre, comme le soutient le CREDIT DU NORD, à l'annonce du fichage FICP ;

Considérant que contrairement à ce que soutient monsieur [J] il n'est pas possible de mettre en relation le retrait de sa carte bancaire personnelle et les réclamations de la banque à l'encontre de la société REALIM ; qu'on ne voit pas en quoi le fichage du gérant à titre exclusivement personnel pourrait avoir une quelconque influence sur les concours à accorder ou non à une société dont l'intéressé est le gérant lorsque ces événements s'expliquent logiquement par la situation tendue des finances de monsieur [J] d'une part, et de la société d'autre part ; qu'il n'est absolument pas prouvé que la banque a agi par malveillance la concordance des dates que monsieur [J] trouve suspecte n'étant pas probante ; que le fait que la banque s'intéresse à ce que deviennent les démarches de son (ex) client auprès d'autres établissements de crédit ne caractérise pas de manoeuvres fautives, et encore moins une volonté d'agir pour anéantir les démarches que monsieur [J] disait effectuer pour le compte de la société REALIM ;

Considérant qu'ainsi le tribunal a pu légitimement conclure :

'Attendu qu'aucun abus de la part du CREDIT DU NORD dans ses relations avec Monsieur

[J], en tant que client professionnel ou particulier, n'est caractérisé ; le tribunal déboutera PARIS CAPITAL PIERRE de sa demande de condamnation duCREDIT DU NORD à lui verser des dommages et intéréts à hauteur d'une somme de 350 000 euros outre les intérêts au taux légal à compter du jour de la régularisation des présentes ; Ie tribunal déboutera PARIS CAPITAL PIERRE de sa demande de condamnation du CREDIT DU NORD à verser à Monsieur [J] la somme de 300 000 euros outre les intérêts au taux légal à compter du jour de la régularisation des présentes' ;

Considérant surabondamment qu'il n'est fait aucune démonstration de ce que la société REALIM aurait subi un préjudice tels que ceux indemnisables et dont elle cite des exemples dans ses écritures, ni ne caractérise concrètement et précisément quelle gêne aurait été occasionnée en lien avec cette rupture de concours bancaire prétendument abusive ; qu'ainsi en particulier il n'est aucunement démontré que l'absorption, le 22 décembre 2015, de la société REALIM par la société PARIS CAPITAL PIERRE elle aussi gérée par monsieur [J], serait la conséquence des décisions de la banque que monsieur [J] considère comme des mauvais traitements infligés dans l'intention perverse de précipiter la perte de la société REALIM ; qu'il en est de même en ce qui concerne le protocole transactionnel signé le 15 juillet 2015 entre le CREDIT DU NORD et la société PARIS CAPITAL PIERRE qu'il aurait été 'contraint ' de signer, relatif à l'apurement du solde débiteur du compte courant de cette dernière, sans rapport démontré avec la dette de la société REALIM ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que monsieur [J] et la SCI PARIS CAPITAL PIERRE doivent être déboutés de l'intégralité de leurs prétentions et le jugement déféré confirmé en toutes ses dispositions, sans qu'il y ait lieu de re- formuler le libellé de la condamnation sauf en ce qui concerne la précision selon laquelle la SCI PARIS CAPITAL PIERRE vient aux droits de la SARL REALIM ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Considérant que les appelants qui échouent dans leurs demandes, doivent supporter la charge des dépens et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Considérant qu'en revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de l'intimé formulée sur ce même fondement dans la limite de la somme de 2 500 euros ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant,

précise que la SCI PARIS CAPITAL PIERRE vient aux droits de la SARL REALIM,

condamne in solidum la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM, et monsieur [B] [J] à payer à la SA CREDIT DU NORD la somme de 2500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

et déboute la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM, et monsieur [B] [J], de leur demande formulée sur ce même fondement ;

condamne in solidum la SCI PARIS CAPITAL PIERRE venant aux droits de la SARL REALIM, et monsieur [B] [J] aux entiers dépens d'appel et admet Maître Denis-Clotaire LAURENT avocat au Barreau de Paris au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 17/08469
Date de la décision : 10/04/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°17/08469 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-10;17.08469 ?
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