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10/04/2019 | FRANCE | N°17/04686

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 10 avril 2019, 17/04686


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 10 AVRIL 2019



(n° 2019/215, 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 17/04686 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B2Y6T



Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Janvier 2017 - Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 13/07188





APPELANT



Monsieur [V] [U]

Né le [Date nai

ssance 1] 1967 à [Localité 1] (YOUGOSLAVIE)

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Régine VANITOU, avocat au barreau de PARIS, toque : C2223





INTIMÉE



SA HSBC FRANCE

Prise en l...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 10 AVRIL 2019

(n° 2019/215, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/04686 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B2Y6T

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Janvier 2017 - Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 13/07188

APPELANT

Monsieur [V] [U]

Né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 1] (YOUGOSLAVIE)

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Régine VANITOU, avocat au barreau de PARIS, toque : C2223

INTIMÉE

SA HSBC FRANCE

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 775 670 284

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Christophe PHAM avocat au barreau de PARIS, toque : P0466, avocat substituant Me Francis MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0466

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 18 Février 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre

Monsieur Marc BAILLY, Conseiller

Madame Pascale GUESDON, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Anaïs CRUZ

ARRÊT :

contradictoire,

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Françoise CHANDELON, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 31 janvier 2017 qui, sur l'assignation délivrée le 7 mai 2013 par la société HSBC à M. [V] [U] en paiement des causes d'un prêt immobilier qu'elle lui a consenti par offre du 28 octobre 2010 et dont elle a prononcé l'exigibilité anticipée le 21 octobre 2011 à raison de la fourniture de faux documents à l'appui de la demande de crédit qui a notamment, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée par M. [U],

substitué l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel motif pris du caractère erroné de l'indication du TEG dans l'offre de prêt,

condamné M. [U] à payer à la société HSBC les sommes de 248 595,21 euros avec intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2011 et capitalisation et 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

débouté les parties de leurs autres demandes ;

Vu la déclaration d'appel de la société HSBC en date du 3 mars 2017 ;

Vu le renvoi de l'examen de l'affaire à l'audience du 4 décembre 2018 aux fins de recueillir les observations des parties sur le caractère abusif de la clause d'exigibilité anticipée ;

Vu les dernières conclusions en date du 10 septembre 2017 de M. [V] [U] qui fait valoir :

que l'action est prescrite en vertu de l'article L137-2 ancien du code de la consommation puisque le délai biennal a commencé à courir à compter de la convention de prêt du 28 août 2010 et non de la déchéance du terme signifiée le 25 octobre 2011 et que l'assignation n'a été délivrée que le 7 mai 2013 et que les relevés de son compte dans les livres d'HSBC du mois de novembre 2010 à septembre 2011 permettaient à cette dernière de s'apercevoir que son salaire de prétendument 6 000 euros n'était pas versé mais seulement des sommes moindres et des loyers tirés de l'exploitation du bien financé, que la banque était à même de se convaincre des faux documents dès la souscription du prêt et qu'il ne saurait être privé de la faculté de soulever cette prescription puisqu'il n'est pas l'auteur des faux qui ont été transmis par un courtier indélicat, la plainte déposée contre lui ayant été classée sans suite, que ses courriers sollicitant des délais pour se refinancer n'ont pas le caractère d'une reconnaissance de dette au sens de l'article 2240 du code civil, que, de même l'accord de la banque n'a porté que sur la suspension des paiements pendant trois mois et n'a pu donc faire courir un nouveau délai,

que les faux documents ne peuvent être à l'origine d'une déloyauté qui lui serait reprochée puisqu'ils sont le fait exclusif d'un courtier qui a outre passé son mandat, la plainte à son endroit ayant d'ailleurs été classée sans suite, que la mention d'un faux employeur dans le contrat d'ouverture de crédit qu'il n'a pas eu le temps de lire est indifférente puisque seul compte le contrat de crédit,

que la banque a été fautive en ne vérifiant pas les éléments et ne peut réclamer, de surcroît, une indemnité contractuelle de 7%, qui doit être diminuée,

subsidiairement, que le jugement doit être confirmé sur le quantum de la condamnation puisque la stipulation conventionnelle d'intérêts est nulle et que doit lui être substitué le taux légal dès lors que le TEG est inexact comme ne tenant pas compte des frais de la caution de la société Crédit Logement comme le montre l'étude du crédit qu'il produit aux débats,

que si la déchéance, en tout ou partie, des intérêts est encourue pour une erreur dans l'offre de prêt, la nullité de la stipulation conventionnelle l'est lorsque le contrat de prêt comporte un TEG erroné comme en l'espèce,

que sa défense et son appel ne sont pas abusifs, que si le refinancement qu'il a proposé s'est révélé faux comme ne provenant pas authentiquement de la BRED, c'était encore le fait d'un courtier et qu'il a déposé plainte de ce chef, de sorte qu'il demande à la cour :

de déclarer l'action de la société HSBC irrecevable comme prescrite,

de débouter la société HSBC de ses demandes,

subsidiairement, de prononcer la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts et d'éventuellement désigner un expert,

en conséquence de confirmer le montant de la condamnation à hauteur de la somme de 232 331,97 euros au titre du capital restant dû après l'échéance du mois d'octobre 2011, déduction faite de la somme de 5184,70 euros correspondant aux intérêts payés entre décembre 2010 et octobre 2011,

de réduire l'indemnité conventionnelle de 7 %,

de condamner la société HSBC à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions en date du 13 juillet 2017 de la société HSBC qui fait valoir :

que son action n'est pas prescrite dès lors que M. [U] ne peut se prévaloir de la fraude dont il est, a minima, complice, que le délai de prescription court à compter du moment ou elle a découvert la fausseté des documents, qu'elle n'a pas à vérifier l'authenticité des documents reconnus comme faux par l'emprunteur, ses fiches de paie et les avis d'imposition, qui étaient parfaitement imités, qu'en tout état de cause la prescription a été interrompue par la reconnaissance par le débiteur de son obligation en vertu de l'article 2240 du code civil par son courrier du 23 janvier 2012 et par la mesure de prise d'hypothèque conservatoire sur requête du 26 mars 2013 en vertu de l'article 2244 du code civil,

que la fraude est patente et ne peut être imputée par M. [U] à un courtier dont l'existence n'est pas objectivée -même son nom n'ayant pas été transmis par l'appelant- d'autant que dès l'ouverture du compte il a lui-même mentionné le faux employeur ADMAP dont il a fait état dans sa demande de prêt et fourni de fausses fiches de paie de 6 000 euros mensuels au lieu des 1 750 euros réellement perçus de la société TDF,

que M. [U] a une nouvelle fois tenté de la tromper en lui remettant une fausse lettre de la BRED faisant état d'un refinancement en cours de procédure,

qu'elle n'a commis aucune faute puisqu'il ne lui était pas illégitime de croire en l'authenticité des documents remis, que l'indemnité contractuelle de 7% est particulièrement justifiée en l'espèce et n'est pas manifestement excessive,

que le jugement doit être réformé du chef des intérêts puisque la preuve n'est pas rapportée par le seul rapport [G] du caractère erroné du TEG puisque les frais de cautionnement de 2 120 euros et les frais de dossier Crédit Logement de 300 euros ont été dûment intégrés au calcul et qu'il n'est nullement justifié de soustraire ces frais prétendument omis du capital emprunté pour opérer un nouveau calcul ainsi nécessairement erroné,

subsidiairement que si une erreur devait être reconnue, seule la déchéance, en tout ou partie serait encourue et non la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts et qu'il serait injustifié que les fonds mobilisés par M. [U] ne soient pas rémunérés d'intérêts,

que l'appel est abusif d'autant qu'il a été émaillé de la transmission d'une fausse proposition de refinancement, de sorte qu'elle demande à la cour :

de débouter M. [U] de ses demandes,

de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu'il a fait droit à la critique du TEG,

de condamner M. [U] à lui payer la somme de 237 517,67 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,70 % depuis le 25 octobre 2011, anatocisme et la somme complémentaire de 5 184,70 euros,

de condamner M. [U] à lui payer les sommes de 10 000 euros de dommages-intérêts et de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu la note de M. [U] en date du 28 novembre 2018 transmise par RPVA qui expose que la clause d'exigibilité doit être réputée non écrite comme abusive en vertu de l'article L212-1 du code de la consommation dès lors qu'elle laisse au préteur la faculté de résilier le contrat à sa discrétion ;

Vu la note de la société HSBC du 11 décembre 2008 transmise par RPVA qui fait valoir que la clause ne créée pas de déséquilibre significatif entre les parties puisqu'elle limite l'exigibilité anticipée aux déclarations et documents inexacts déterminants dans sa décision d'octroi du prêt et qu'elle aurait pu faire valoir le dol ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 16 octobre 2018 ;

MOTIFS

Le contrat litigieux résulte d'une offre de prêt immobilier émise le 15 octobre 2010, reçue le 16 octobre et acceptée le 28 octobre 2010, portant sur la somme de 240 000 euros remboursable en 237 échéances d'amortissement après 3 mois de différé au taux nominal de 3,70 %, le TEG indiqué étant de 4,10 % et le taux de période de 0,342 %.

Par courrier en date du 25 octobre 2011, la banque alléguant la transmission de faux justificatifs de la situation financière de son client a dénoncé la convention de compte courant et a prononcé la déchéance du terme du prêt.

Sur la prescription de l'action

En vertu des articles L137-2 ancien du code de la consommation et 2224 du code civil, l'action des professionnels pour les services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans à compter du jour où ils ont connu ou aurait dû connaître les faits leur permettant d'exercer leur droit.

C'est à M. [U], appelant qui invoque la prescription de l'action, de démontrer le bien fondé de cette fin de non recevoir.

La banque fonde son action sur la clause 8 des conditions générales du contrat de prêt qui stipule notamment que le 'préteur pourra rendre exigible la totalité du prêt huit jours après une mise en demeure par lettre recommandée, restée sans effet, dans les cas suivants : si les renseignements, déclarations et document de toute nature fournis par l'emprunteur viennent à se révéler faux ou inexacts, alors qu'ils étaient déterminants pour l'octroi du prêt' de sorte que le point de départ est la date à laquelle la société HSBC aurait dû connaître le caractère falsifié des documents produits et déclarations faites.

C'est à juste titre que le tribunal a jugé que M. [U] ne démontre pas que la banque avait connaissance des falsifications et fausses déclarations plus de deux années avant l'assignation du 7 mai 2013 dès lors qu'il n'incombe pas à la banque de procéder à la vérification des déclarations qui lui sont faites et des documents produits au moment de la souscription du prêt et que le défaut de crédit porté sur son compte par M. [U] d'un salaire de près de 6 000 euros n'est révélateur que d'une éventuelle inexécution contractuelle - puisqu'il s'y était engagé - mais pas de la fausseté de l'emploi allégué, des sommes étant au demeurant portées sur son compte au moyen de remises de chèques et non de virements.

Il ne résulte d'aucune pièce ni élément que la banque aurait dû avoir connaissance des faits avant la plainte qu'elle a portée le 21 octobre 2011 auprès du Procureur de la République de Paris, en conséquence de quoi il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription.

Sur l'examen du caractère abusif de la clause d'exigibilité anticipée appliquée

L'article 1134 du code civil dispose notamment que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et qu'elles doivent être exécutées de bonne foi.

L'article L132-1 code de la consommation, codifié désormais à l'article L212-1, répute non écrite les clauses ainsi définies 'dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat'.

Il y a lieu de relever, premièrement, que la stipulation rapportée ci-dessus limite expressément la faculté de prononcer l'exigibilité anticipée d'un prêt non à la fourniture de renseignements inexacts sur un élément quelconque de la situation de l'emprunteur mais seulement sur l'un de ceux déterminant du consentement du prêteur dans l'octroi du crédit, ce qui ne peut être à l'origine d'une décision discrétionnaire du prêteur.

Deuxièmement, la faculté que se réserve la banque de prononcer cette exigibilité sans recours préalable au juge ne prive en rien l'emprunteur d'y recourir pour faire juger que l'application de la clause est injustifiée, étant observé qu'en l'espèce c'est d'ailleurs la banque qui a saisi le tribunal pour voir juger bien fondée l'exigibilité anticipée après la prise d'une hypothèque judiciaire provisoire.

En conséquence et compte tenu de ces limites, cette stipulation - qui sanctionne l'obligation de contracter de bonne foi, existante au moment de la souscription du prêt litigieux et désormais expressément prévue à l'article 1112 nouveau du code civil - ne crée pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et ne revêt, in abstracto, pas un caractère abusif au sens de la disposition ci-dessus.

Sur l'application de la clause

M. [U] n'objective par aucune autre pièce que la photographie de la façade d'un commerce à [Localité 4] l'intervention d'un courtier dont il ne connaît d'ailleurs pas le nom, lequel, en outre, aurait outrepassé le mandat qu'il lui aurait donné de négocier le prêt puisqu'il doit, en principe, en répondre dès lors qu'il est son mandataire.

Plus encore et comme le fait valoir la banque et l'a retenu à juste titre le tribunal, M. [U] a en personne exposé être employé d'une société ADMAP lors de l'ouverture de son compte du 5 octobre 2010 - ce qu'il ne conteste pas être faux-, de sorte qu'il ne peut sérieusement prétendre qu'ultérieurement et à l'appui de sa demande de crédit des fiches de paie fausses émanant de cette société ont été transmises à la banque en dehors de sa connaissance.

M. [U] ne conteste pas la fausseté de ces fiches de paies non plus que celle de l'avis d'imposition sur le revenu de 2010 portant sur l'année 2009 - où figure un revenu de 77 301 euros au lieu des 13 183 euros obtenus en 2011 au titre s on emploi réel -, ces éléments étant déterminants du consentement de la banque à lui accorder le crédit, de sorte que c'est à bon droit que la société HSBC a mis en oeuvre la clause d'exigibilité anticipée lui permettant de recevoir le paiement du capital restant dû, des intérêts échus, de l'intérêt conventionnel de retard jusqu'à parfait paiement et d'une indemnité de 7 % du capital restant dû et des intérêts échus non payés.

Sur la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts pour erreur dans l'indication du TEG

M. [U] se plaint d'une erreur dans l'indication du TEG du prêt immobilier qui lui a été consenti en ce que le calcul des frais de garantie de cautionnement et des frais de dossier de la société Crédit Logement pour les sommes de 2 120 et 300 euros, dont l'intégration porterait le TEG à 4,205 % au lieu des 4,1% mentionnés et poursuit exclusivement la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts.

Or, pour parvenir à ce résultat, l'expert mandaté par M. [U] retranche du capital emprunté les sommes correspondant aux frais pour calculer le TEG compte tenu du taux nominal du prêt alors même que le capital emprunté n'est pas diminué et qu'il convenait d'ajouter les frais aux sommes dues pour calculer le nouveau TEG.

En tout état de cause, cette sanction de la nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts n'était pas encourue dès lors que M. [U] se prévaut notamment d'une erreur du TEG figurant dans l'offre de prêt.

En effet, aux termes de l'article L312-33 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 mars 2014, il est énoncé que 'le prêteur (ou le bailleur) qui ne respecte pas l'une des obligations prévues' à l'article L312-8, lequel renvoie, concernant le TEG, aux prescriptions de l'article L313-1 du même code, en définissant le contenu, 'pourra être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge'.

Or, ce texte spécial déroge nécessairement, pour les prêts immobiliers régis par la loi Scrivener, aux dispositions générales posées par l'article 1907 du code civil, lequel sanctionne par la nullité l'absence de prescription d'un taux d'intérêt et, par extension d'un TEG, dont l'irrégularité éventuelle est assimilée à une absence.

Ainsi, l'emprunteur ne saurait, sauf à vider de toute substance les dispositions d'ordre public des articles L312-1 et suivants du code de la consommation, disposer d'une option entre nullité ou déchéance, notamment en distinguant artificiellement la réitération notariée d'un prêt et l'offre alors d'une part qu'aucune disposition légale n'exige qu'un contrat de prêt soit rédigé en la forme authentique - laquelle est essentiellement destinée à rendre les sûretés opposables aux tiers- de sorte qu'il est parfait à la date d'acceptation de l'offre, d'autre part que la sanction de l'article L312-33 du code de la consommation vise le prêteur et non l'émetteur de l'offre, étant encore observé qu'il ne peut exister de contentieux civil en l'absence d'acceptation de l'offre, la transparence de celle-ci ayant, si tel n'a pas été le cas, permis au consommateur d'opérer un meilleur choix.

Une telle option, privant le juge de la possibilité de prévoir une sanction proportionnée à la gravité de l'erreur ne participe pas à l'unique objectif recherché par le législateur, à savoir donner au TEG une fonction comparative.

Il y a donc lieu de réformer le jugement sur ce point et en conséquence et au regard du décompte du 24 janvier 2012, de fixer la créance à la somme de 237 517,67 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,70 % à compter du 25 octobre 2011 outre celle de 16 626,23 euros et d'ordonner la capitalisation des intérêts à compter des conclusions de la société HSBC du 15 janvier 2016.

Il y a lieu de rappeler que M. [U] a été mis en demeure le 25 octobre 2011, soit il y a plus de 7 ans, non sans qu'il ait vainement sollicité du juge de la mise en état la communication de la part de la banque de tout élément sur le courtier qu'il aurait lui-même mandaté, ce dont il a été débouté par ordonnance du 10 mars 2015.

M. [U] n'a jamais contesté la fausseté des pièces produites et déclarations faites mais il a sollicité par courrier du 23 janvier 2012, après avoir offert infructueusement de régler les échéances comme prévu initialement par le contrat de prêt, un délai de trois mois pour trouver une solution de refinancement, ce qui n'a pas été suivi d'effet avant le mois d'octobre 2016 et s'est manifesté par la communication à la société HSBC d'un accord de mise en place d'un financement de la BRED Banque Populaire daté du 31 octobre 2016, qui s'est révélé être un faux document selon le courriel d'un préposé de cette banque du 4 juillet 2017, M. [U] ne justifiant pas avoir porté une plainte de ce chef contre le courtier mais avoir seulement fait enregistrer une main courante après que la société HSBC lui a fait observer l'utilisation de ce faux document.

Enfin s'il est loisible à toute partie de soumettre en appel les mêmes arguments que ceux soutenus en première instance, M. [U] ne peut être de bonne foi en prétendant contre les constatations du premier juge, qu'il n'aurait pas été informé de l'utilisation d'un faux emploi du fait d'un courtier alors qu'il avait lui-même déclaré ce faux employeur lors de l'ouverture de son compte.

En conséquence, l'action de M. [V] [U], qui loue chacun des appartements de 32m2 acquis au moyen du prêt à [Localité 5] pour 700 euros mensuels, revêt un caractère abusif et il y a lieu de le condamner à payer à la société HSBC la somme de 1 000 euros de dommages-intérêts de ce chef.

Il y a lieu de condamner M. [V] [U], qui loue chacun des appartements de 32m2 acquis au moyen du prêt à [Localité 5] pour 700 euros mensuels, à payer à la société HSBC la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement entrepris sauf du chef du caractère erroné du TEG et, statuant à nouveau, dans cette limite,

Déboute M. [V] [U] de sa demande de nullité de la stipulation conventionnelle d'intérêts,

En conséquence, le condamne à payer à la société HSBC les sommes de 237 517,67 euros avec intérêts au taux conventionnel de 3,70 % à compter du 25 octobre 2011 outre celle de 16 626,23 euros ;

Ordonne la capitalisation des intérêts à compter du 15 janvier 2016 ;

Y ajoutant,

Déboute M. [V] [U] de toutes ses demandes ;

Condamne M. [V] [U] à payer à la société HSBC la somme de 1000 euros de dommages-intérêts ;

Condamne M. [V] [U] à payer à la société HSBC la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [V] [U] aux dépens d'appel qui seront recouvrés par Maître Francis Martin en application de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 17/04686
Date de la décision : 10/04/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°17/04686 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-10;17.04686 ?
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