Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 05 AVRIL 2019
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/19351 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4JFT
Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Septembre 2017 -Tribunal de Grande Instance de Sens - RG n° 12/00924
APPELANTS
Monsieur [M] [N]
né le [Date naissance 1] 1945 à [Localité 1] (51)
Et
Madame [O] [F] épouse [N]
née le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 2] (89)
demeurant ensemble [Adresse 1]
[Localité 3]
Représentés tous deux par Me Michel LIET de la SELEURL CABINET ML Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : A0601
INTIMÉE
Madame [J] [Q]
née le [Date naissance 3] 1932 à [Localité 4] (92)
demeurant [Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Mars 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant M. Claude CRETON, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Claude CRETON, Président
Mme Christine BARBEROT, Conseillère
M. Dominique GILLES, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Thi Bich Lien PHAM
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Claude CRETON, Président et par Mme Thi Bich Lien PHAM, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [Q] est propriétaire d'une maison d'habitation située à [Adresse 2], parcelle cadastrée section AI n° [Cadastre 1], contigüe de la maison appartenant à M. et Mme [N], située sur la parcelle cadastrée section AI n° [Cadastre 2]. Ces deux parcelles sont issues d'une parcelle unique ayant fait l'objet d'une donation-partage du 28 février 1945.
Mme [Q] a assigné M. et Mme [N] aux fins de voir reconnaître la propriété d'un grenier situé à l'étage d'une dépendance.
Par jugement du 24 août 2015, le tribunal a ordonné une expertise.
M. et Mme [N] ont formé une demande reconventionnelle. Soutenant que la dépendance litigieuse dont l'accès au rez-de-chaussée s'effectue par la cour de la parcelle AI n° [Cadastre 1] a été incluse à tort dans cette parcelle et fait partie de la parcelle AI n° [Cadastre 2], ils ont demandé au tribunal de dire qu'ils en sont les uniques propriétaires en vertu de l'acte du 28 février 1945 par lequel leur auteur, [D] [T], a acquis le hangar et la vinée comprenant la dépendance litigieuse. A titre subsidiaire, ils ont soutenu avoir acquis par prescription acquisitive le grenier aménagé en cage d'escalier et salle de bains au-dessus de l'ancienne vinée de la maison d'habitation figurant dans l'article 2 de l'acte de partage du 27 février 1945, leur appartenant actuellement, et au-dessus de la 'petite vinée' désignée dans l'article 3 de cet acte.
Par jugement du 1er septembre 2017, le tribunal de grande instance de Sens a :
- dit que Mme [Q] est propriétaire de l'intégralité de la dépendance comprise dans la parcelle cadastrée section AI n° [Cadastre 1], comprenant à la fois le rez-de-chaussée et un grenier à l'étage ;
- ordonné l'expulsion de M. et Mme [N] de cette parcelle sous astreinte ;
- condamné M. et Mme [N] à payer à Mme [Q] la somme de 500 euros en réparation de son préjudice de jouissance ;
- condamné M. et Mme [N] à payer à Mme [Q] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour statuer ainsi, le tribunal a d'abord expliqué que la présomption de propriété du dessus au profit du propriétaire du sol, en l'espèce la partie du grenier au-dessus de la parcelle AI n° [Cadastre 1], n'est susceptible d'être combattue que par la preuve contraire résultant d'un titre ou de la prescription acquisitive trentenaire.
Il a ensuite constaté qu'aucun titre ne fait mention d'un grenier au-dessus des vinées, l'acte de partage du 28 février 1945 ne dissociant pas la propriété du rez-de-chaussée et la propriété de l'étage et les titres de propriétés des parties ne mentionnant pas la transmission de droits sur la parcelle AI n° [Cadastre 1] au profit de la parcelle AI n° [Cadastre 2].
Il a ajouté que M. et Mme [N] ne justifiant pas d'acte de possession antérieur à la création d'une salle de bains dans le grenier litigieux en 2012, la prescription acquisitive n'est pas démontrée.
M. et Mme [N] ont interjeté appel de ce jugement.
Ils font valoir que l'acte de donation-partage attribue à [D] [T], mère de Mme [N], en même temps que la parcelle AI n° [Cadastre 2] comprenant une maison d'habitation, une 'petite cour, avec water closet, une vinée et un petit hangar' (article deuxième de l'acte) tandis qu'ont été attribuées à [V] [T], auteur de Mme [Q], outre une maison, une 'cour avec water closet et une petite vinée'. Ils précisent que ces biens ont été vendus par acte du 21 mars 1967 à M. et Mme [W] qui les ont revendus par acte du 29 août 1987 à Mme [Q] mais que cet acte ne précise pas que cette parcelle comprend une dépendance et ne mentionne qu'une 'petite vinée' que Mme [Q] considère à tort comme étant devenue la dépendance litigieuse puisqu'elle est située sur le fonds leur appartenant. Ils en concluent que la dépendance litigieuse se trouve sur la parcelle AI n° [Cadastre 2] qui est leur propriété.
Ils expliquent que la vinée mitoyenne au hangar, bien que se trouvant sur la parcelle AI n° [Cadastre 2], a été utilisée par [D] et [V] [T] après l'acte de donation-partage. Ils indiquent que cet usage de commodité n'a pu opérer un transfert de propriété. Ils ajoutent que cet usage s'est ensuite poursuivi, M. et Mme [F], devenus propriétaires de la parcelle AI n° [Cadastre 2], laissant les propriétaires de la parcelle AI n° [Cadastre 1] utiliser le rez-de-chaussée du bâtiment litigieux et que lorsqu'eux-mêmes sont devenus propriétaires de la parcelle AI n° [Cadastre 2], ils ont cru que la vinée constituait une partie commune aux deux parcelles et qu'ils jouissaient du grenier tandis que Mme [Q] jouissait du rez-de-chaussée.
A titre subsidiaire, M. et Mme [N] revendiquent l'acquisition de la propriété du grenier sur le fondement de la prescription acquisitive trentenaire.
Ils sollicitent en outre la condamnation de Mme [Q] à leur payer la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme [Q] fait valoir que par acte du 29 août 1987 elle a acquis la parcelle section AI n° [Cadastre 1] et qu'en application de l'article 552 du code civil elle est présumée propriétaire du dessus de cette parcelle et, par conséquent, du grenier litigieux. Elle conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qu'il condamne M. et Mme [N] à lui payer une somme de 500 euros en réparation de son préjudice de jouissance et la déboute de la demande de condamnation de M. et Mme [N] à lui payer la somme de 2 949,78 euros correspondant au coût des travaux de réfection. Elle sollicite en conséquence la condamnation de ces derniers à lui payer cette somme ainsi que celle de 6 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance. Elle réclame en outre une somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE :
Attendu qu'il résulte de l'acte de donation-partage du 28 février 1945 que le donateur, [S] [T] a fait donation à ses quatre enfants, à titre de partage anticipé, des biens lui appartenant en propre ou indivisément avec ces derniers ;
Attendu que, spécialement, ont été attribués :
- à [V] [T] le premier lot constitué par :
* une maison située à [Adresse 3], composée d'un rez-de-chaussée comprenant un atelier et une cuisine et un premier étage divisé en trois chambres avec grenier au-dessus
* une cour avec water closet et une petite vinée
* un toit à porc séparé de la maison
* une petite écurie de l'autre côté de la rue ;
- à [D] [T] le quatrième lot composé de :
* une maison située à [Adresse 3], composée d'un rez-de-chaussée divisé en un vestibule, une cuisine et une chambre, un premier étage divisé en deux chambres, un cabinet de débarras, grenier au-dessus
* une petite cour avec water closet, une vinée et un petit hangar
* de l'autre côté de la rue une petite écurie avec grenier au-dessus ;
Attendu qu'il résulte de l'examen du plan cadastral napoléonien que le bâtiment litigieux se trouve au fond de la parcelle anciennement n° [Cadastre 3] qui a été cédée à [D] [T] par l'acte de donation-partage du 28 février 1945 désignant ce bâtiment comme étant 'une vinée et un petit hangar' ; qu'en effet, sur ce plan une flèche indiquait que cette partie du fonds était rattachée à la parcelle n° [Cadastre 3] ; que si sur le plan cadastral de 1960 comme sur le plan cadastral actuel une flèche rattache le bâtiment litigieux à la parcelle n° [Cadastre 1] appartenant à Mme [Q], il apparaît que, lors de la révision du plan cadastral, ce rattachement a été effectué par erreur dès lors qu'il n'est justifié d'aucun transfert de propriété de ce fond de parcelle comportant le bâtiment litigieux au profit de Mme [Q] ou de ses auteurs ; que, pareillement, c'est de manière erronée que l'acte de vente du 30 juillet 1982 de M. et Mme [I] à M. [S] et Mme [D] et l'acte de vente du 29 août 1987 de ces derniers à Mme [Q] mentionnent dans la désignation des biens vendus une 'petite dépendance' ;
Attendu qu'il apparaît ainsi que M. et Mme [N] sont propriétaires de la dépendance litigieuse qui a été incluse par erreur dans la parcelle section AI n° [Cadastre 1] ; qu'elle fait partie de la parcelle numéro [Cadastre 2] qui comprend, outre une maison d'habitation, une cour sur laquelle se trouve le bâtiment litigieux, anciennement composé d'une vinée et d'un petit hangar selon la désignation de l'acte de donation-partage du 28 février 1945 ;
Attendu qu'il convient en conséquence de débouter Mme [Q] de ses demandes et de la condamner à payer à M. et Mme [N] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement,
Infirme le jugement sauf en ce qu'il déboute Mme [Q] de sa demande en paiement de la somme de 2 949,78 euros ;
Statuant à nouveau :
Constate que la dépendance litigieuse, dont l'accès au rez-de-chaussée s'effectue par la cour de la parcelle section AI n° [Cadastre 1], incluse par erreur dans la cette parcelle, fait partie de la parcelle section AI n° [Cadastre 2] ;
Constate que M. et Mme [N] sont propriétaires de la dépendance litigieuse ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme [Q] et la condamne à payer à M. et Mme [N] la somme de 2 000 euros ;
La condamne aux dépens de première instance et d'appel comprenant les frais de l'expertise judiciaire qui seront partagés par Mme [Q] et M. et Mme [N].
La Greffière Le Président