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03/04/2019 | FRANCE | N°17/06649

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 03 avril 2019, 17/06649


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 4



ARRÊT DU 03 AVRIL 2019



(n° , 17 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 17/06649 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B26QX



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Février 2017 - Tribunal de Commerce de MARSEILLE - RG n° 2015F03520





APPELANTS



- Monsieur [Y] [G]

né le [Date naissance

1] 1978 à [Localité 1] (38)

Demeurant : [Adresse 1]

[Localité 2]



- Monsieur [N] [A]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 3] (38)

Demeurant : [Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]


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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRÊT DU 03 AVRIL 2019

(n° , 17 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/06649 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B26QX

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Février 2017 - Tribunal de Commerce de MARSEILLE - RG n° 2015F03520

APPELANTS

- Monsieur [Y] [G]

né le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 1] (38)

Demeurant : [Adresse 1]

[Localité 2]

- Monsieur [N] [A]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 3] (38)

Demeurant : [Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

- SARL MENPHIS-NARBONNE

Ayant son siège social : [Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 5]

N° SIRET : 791 670 144 (NARBONNE)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

- SARL L3C

Ayant son siège social : [Adresse 4]

[Localité 6]

N° SIRET : 752 917 575 (AJACCIO)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

- SELARL [P], prise en la personne de Me [Q] [P], ès qualités d'administrateur judiciaire de la SARL MENPHIS-NARBONNE, désigné à cette fonction par un jugement prononcé le 15 mars 2017 par le Tribunal de commerce de NARBONNE

Exerçant ses fonctions : [Adresse 5]

[Localité 7]

N° SIRET : [P] (ALBI)

Représentés par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Ayant pour avocat plaidant : Me Sébastien VIDAL, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉS

- Me [A] [D], ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL MENPHIS-NARBONNE, désigné à cette fonction par jugement en date du 04 octobre 2016 par le Tribunal de commerce de NARBONNE

Exerçant ses fonctions : [Adresse 6]

[Localité 5]

Représenté par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Ayant pour avocat plaidant : Me Sébastien VIDAL, avocat au barreau de MONTPELLIER

- SAS KING MEMPHIS

Ayant son siège social : [Adresse 7]

[Localité 8]

N° SIRET : 523 520 161 (PARIS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER - MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240

Ayant pour avocat plaidant : Me Lionel LEFEBVRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A262

- SARL CONCEPT AGENCY

Ayant son siège social : [Adresse 8]

[Localité 9]

N° SIRET : 534 022 322 (NIMES)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER - MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240

Ayant pour avocat plaidant : Me Lionel LEFEBVRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A262

- SARL MEMPHIS PRODUCT

Ayant son siège social : [Adresse 8]

[Localité 9]

N° SIRET : 751 248 840 (NIMES)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Jean-Didier MEYNARD de la SCP BRODU - CICUREL - MEYNARD - GAUTHIER - MARIE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0240

Ayant pour avocat plaidant : Me Lionel LEFEBVRE, avocat au barreau de PARIS, toque : A262

PARTIES INTERVENANTES

- SELARL [P], prise en la personne de Me [Q] [P], ès qualités de liquidateur de la SARL MENPHIS-NARBONNE, désigné à cette fonction par un jugement prononcé le 16 mai 2017 par le Tribunal de commerce de NARBONNE

Exerçant ses fonctions : [Adresse 5]

[Localité 7]

- Me [A] [D], ès qualités de liquidateur de la SARL MENPHIS-NARBONNE, désigné à cette fonction par jugement en date du 16 mai 2017 par le Tribunal de commerce de NARBONNE

Exerçant ses fonctions : [Adresse 6]

[Localité 5]

- Me [A] [D], ès qualités de mandataire ad hoc de la SARL MENPHIS-NARBONNE, désigné à cette fonction par jugement en date du 19 juin 2018 par le Tribunal de commerce de NARBONNE

Exerçant ses fonctions : [Adresse 6]

[Localité 5]

Représentés par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Ayant pour avocat plaidant : Me Sébastien VIDAL, avocat au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Février 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Irène LUC, Présidente de chambre, rédacteur,

Monsieur Laurent BEDOUET, Conseiller,

Madame Laure COMTE, Vice-Présidente Placée,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Irène LUC dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame Cécile PENG

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Irène LUC, président et par Madame Cécile PENG, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Vu le contrat de franchise signé le 15 février 2013 entre la société King Memphis et la société Menphis Narbonne, représentée par M. [G] et M. [A] en leur qualité de co-gérants de cette société ;

Vu la saisine du tribunal de commerce de Marseille le 25 novembre 2015 par la société Menphis Narbonne, la société L3C, M. [G] et M. [A] ;

Vu l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Menphis Narbonne le 4 octobre 2016, Me [D] étant désigné en qualité de mandataire judiciaire ;

Vu le jugement assorti de l'exécution provisoire rendu le 28 février 2017 par le tribunal de commerce de Marseille qui a :

- pris acte de l'intervention volontaire de Me [D] en qualité de mandataire judiciaire de la société Menphis Narbonne et l'a reçu en son intervention volontaire,

- rejeté des débats les notes et pièces communiquées par les parties après la clôture des débats,

- écarté la pièce n° 97 communiquée par les demandeurs et leurs arguments fondés sur cette pièce,

- déclaré la société L3C, M. [G] et M. [A] irrecevables en leurs demandes,

- débouté la société Menphis Narbonne et Me [D], ès-qualités, de toutes leurs demandes,

- condamné la société L3C, M. [G] et M. [A], par application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer chacun :

* la somme de 3.000 euros à la société King Memphis,

* la somme de 3.000 euros à la société Memphis product,

* la somme de 3.000 euros à la société Concept agency,

- rejeté toutes autres demandes,

- condamné la société L3C, M. [G] et M. [A] aux dépens ;

Vu la désignation de la Selarl [P], prise en la personne de Me [P] le 15 mars 2017, en qualité d'administrateur judiciaire de la société Menphis Narbonne ;

Vu l'appel relevé le 28 mars 2017 par la société Menphis Narbonne, Me [P] en sa qualité d'administrateur judiciaire de cette société, la société L3C, M. [G] et M. [A] à l'encontre de Me [D] en sa qualité de mandataire judiciaire de la société Menphis Narbonne, de la société King Memphis, de la société Memphis product et de la société Concept agency ;

Vu la liquidation judiciaire de la société Menphis Narbonne prononcée le 16 mai 2017, Me [D] étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire ;

Vu la clôture des opérations de liquidation judiciaire de la société Menphis Narbonne pour insuffisance d'actif le19 juin 2018, Me [D] étant désigné comme mandataire ad hoc pour suivre les instances en cours ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 21 janvier 2019 par les appelants et par Me [D], intervenant en qualité de mandataire ad hoc pour poursuivre les instances en cours et le cas échéant répartir les sommes perçues à l'issue de celles-ci, qui demandent à la cour, au visa des articles 1134, 1135, 1110, 1116, 1147, 1382 et suivants, 1386 du code civil dans leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016 applicable en l'espèce ainsi que des articles L 233-3, L 330-3 et suivants, L 442-5, L 442-6 et D 442-3 du code de commerce, de :

- dire leur appel régulier et recevable,

- déclarer leurs demandes recevables,

- dire Me [D], intimé en qualité de mandataire des créanciers au stade du redressement judiciaire de la société Menphis Narbonne, fondé à intervenir volontairement une fois désigné comme liquidateur judiciaire, puis mandataire ad hoc pour mener à terme les procédures en cours, le dépôt de conclusions valant constitution autant que nécessaire,

- dire que l'admission des créances des intimées dans le cadre de la liquidation de la société Menphis ne fait pas obstacle à la demande de nullité du contrat qui les a fondées,

- réformer le jugement en toutes ses dispositions et :

1) annuler le contrat de franchise du 15 février 2013 pour dol, subsidiairement pour erreur ou absence de cause,

- le déclarer nul du seul fait de l'imposition des prix de revente, d'une marge bénéficiaire et d'une marge commerciale ainsi que d'un approvisionnement exclusif injustifié,

- subsidiairement, constater que le contrat de franchise a été signé avec une société ne disposant pas de la personnalité juridique, l'acte n'ayant jamais fait l'objet d'une reprise d'engagement,

2) dire que le dol demeure à l'égard des signataires du contrat,

- dire 'qu'il existe néanmoins un second contrat de franchise, de fait, conclu et exécuté entre les parties après que Menphis Narbonne ait acquis la personnalité juridique, qu'il ne s'agit pas d'une reprise du contrat signé mais d'un second contrat de franchise identique, cette identité étant de facto reconnue par King qui prétend que le premier contrat lierait Menphis Narbonne qui dès lors ne saurait le nier sans se contredire',

- dire que le dol personnel dont ont été victimes les associés en signant le premier contrat nul demeure concernant le second contrat liant King Memphis à Menphis Narbonne, dont ils étaient les mandataires sociaux,

- dire que, même dans l'hypothèse d'un unique contrat, Menphis Narbonne l'aurait alors exécuté au nom et pour le compte des signataires, mais sans pour autant que la nullité ce cet acte non repris soit couverte,

- dire que dans cette hypothèse, Menphis Narbonne subit le préjudice par ricochet du dol initial, ce qui justifie son action en responsabilité délictuelle si d'aventure la responsabilité contractuelle était écartée,

3) à titre infiniment subsidiaire :

- constater l'inexécution fautive par le franchiseur de ses obligations de transmettre un savoir-faire et d'assurer une assistance technique,

- dire que le contrat de franchise étant résilié du fait de la liquidation judiciaire, les inexécutions qui auraient justifié sa résolution aux torts du franchiseur par application de l'article 1184 du code civil demeurent et que la responsabilité du franchiseur est engagée, ses fautes étant patentes,

4) par ailleurs , dire que les sociétés Memphis King, Concept agency, et Memphis Product ont engagé leur responsabilité, au titre de l'article L 442-6 du code de commerce, et doivent être considérées comme solidaires,

5) en conséquence, condamner in solidum les sociétés King Memphis, Concept agency et Memphis product à payer :

- à titre de dommages-intérêts découlant de la nullité du contrat et des fautes y afférentes, les sommes de :

* 1.380.209,72 euros à la société Menphis Narbonne ou, à défaut aux cocontractants du franchiseur, M. [G] et M. [A], à parts égales si la cour estimait qu'il y a lieu de les considérer comme tels,

* 222.250 euros à M. [G],

* 222.197 euros à M. [A],

* 221.706 euros à la société L3C,

- à titre de dommages-intérêts pour 'réticence abusive', la somme de 15.000 euros chacun à la société Menphis Narbonne, M. [G], M. [A] et la société L3C,

- au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes de :

* 9.000 euros à chacun de la société Menphis Narbonne, de M. [G], de M. [A] et de la société L3C,

* 3.000 euros à chacun de Me [P] et de Me [D],

6) dire que les intimées ne justifient pas d'un préjudice et les débouter de toute demande contraire,

7) condamner in solidum les société Memphis Narbonne, Concept agency et Memphis product aux dépens en ce compris les sommes prévues par les articles R 444-3 et ses annexes et A 444-31 du code de commerce, portant fixation du tarif des huissiers en matière civile et commerciale ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 15 janvier 2019 par la société King Memphis, la société Concept agency et la société Memphis product qui demandent à la cour, au visa des articles 32, 32-1, 122 et 559 du code de procédure civile, des anciens articles 1116, 1134, 1147, 1149 et 1184 du code civil ainsi que des articles L 441-4, L 442-5 et L 641-9 du code de commerce de :

1) confirmer le jugement sauf en ce qu'il les a déboutées de leurs demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et, statuant à nouveau sur ce point, condamner :

- la société L3C à payer à chacune d'elles la somme de 50.000 euros,

- M. [G] à payer à chacune d'elles la somme de 50.000 euros,

- M. [A] à payer à chacune d'elles la somme de 50.000 euros,

- Me [D], ès-qualités de liquidateur judiciaire puis de mandataire ad hoc de la société Menphis Narbonne, à payer à chacune d'elles la somme de 50.000 euros,

2) en toute hypothèse :

- constater que les demandes de nullité du contrat de franchise et de résolution formées par les appelants sont sans objet au regard de l'admission définitive au passif de la société Menphis Narbonne des créances de la société King Memphis déclarées au titre de l'exécution du contrat et de sa résiliation,

- constater l'irrecevabilité des demandes de condamnation formées pour le compte de la société Menphis Narbonne, cette dernière étant dessaisie de l'administration et de la disposition de ses biens depuis sa mise en liquidation judiciaire le 16 mai 2017,

- constater l'irrecevabilité des demandes de condamnation formées pour le compte de la selarl [Q] [P] et associés, prise en la personne de Me [P], sa mission d'administrateur judiciaire de la société Menphis Narbonne ayant pris fin le 16 mai 2017,

- déclarer irrecevable la demande nouvelle formée en appel par les appelants en nullité d'un prétendu second contrat de franchise tacite conclu entre Menphis Narbonne et King Memphis,

- constater l'irrecevabilité des demandes de condamnation in solidum des intimées,

- débouter de toutes leurs demandes la société L3C, M. [G], M. [A], Me [D], ès-qualités, et en tant que de besoin la selarl [Q] [P] et associés , prise en la personne de Me [P],

- par application de l'article 700 du code de procédure civile, condamner :

* Me [D], es qualités, à payer à chacune des intimées la somme de 15.000 euros,

* la société L3C à payer à chacune d'elles la somme de 15.000 euros,

* M. [G] à payer à chacune d'elles la somme de 15.000 euros,

* M. [A] à payer à chacune d'elles la somme de 15.000 euros,

- condamner aux dépens de première instance et d'appel la société L3C, M. [G], M. [A], Me [D], ès-qualités et, en tant que de besoin, la selarl [Q] [P] et associés, prise en la personne de Me [P] ;

SUR CE LA COUR

Le jugement du 16 mai 2017, qui a prononcé la liquidation judiciaire de la société Menphis Narbonne a mis fin à la mission d'administrateur qui avait été confiée à la selarl [Q] [P] et associés, prise en la personne de Me [P] ; cette dernière doit donc être mise hors de cause.

L'article L 641-9 du code de commerce dispose que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée, les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine étant exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ; en l'espèce, la clôture des opérations de sa liquidation judiciaire ayant été prononcée pour insuffisance d'actif le 19 juin 2018, la société Menphis Narbonne a retrouvé son droit d'agir.

Me [D], ayant été désigné en qualité de mandataire ad hoc pour suivre les instances en cours, son intervention régularisée par conclusions du 21 janvier 2019 est recevable.

Sur les demandes de la société Menphis Narbonne

Au soutien de ses demandes de dommages-intérêts, la société Menphis Narbonne conclut à la nullité du contrat de franchise ou à sa résolution en raison de manquements fautifs du franchiseur.

Les intimées objectent que ses demandes sont à ce jour sans objet ; elles exposent en ce sens :

- que l'inscription des créances de la société King Memphis déclarées au passif du débiteur au titre de ses factures impayées nées de l'exécution du contrat de franchise et de son préjudice résultant de la résiliation du contrat par le liquidateur traduit, d'une part la parfaite validité du contrat, d'autre part, sa parfaite exécution,

- que cette admission constitue un obstacle à la recevabilité des demandes adverses.

Il ressort des pièces versées aux débats les éléments suivants :

- le 26 octobre 2016, dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de la société Menphis Narbonne, la société Menphis King a déclaré une créance de 8.510,13 euros au titre de factures de redevance d'enseigne impayées émises antérieurement à l'ouverture de la procédure collective et la société Memphis product une créance de 7.085,70 euros au titre de factures de marchandises livrées impayées émises antérieurement à l'ouverture de la procédure collective,

- par lettre du 22 mai 2017, Me [D], agissant alors en qualité de liquidateur judiciaire de la société Menphis Narbonne, a informé la société King Memphis de ce qu'il n'entendait pas poursuivre les contrats en cours et l'a invitée à procéder à la résiliation immédiate du contrat de franchise,

- le 20 juin 2017, la société King Memphis a déclaré une créance de 116.267,49 euros en réparation de son préjudice né de la résiliation du contrat de franchise,

- aucune de ces créances déclarées n'ayant été contestées, leur admission au passif de la société Menphis Narbonne a été prononcée, à titre chirographaire, selon certificats d'admission du 27 mars 2018,

- aucun recours n'a été exercé contre la décision d'admission des créances.

Cependant, il convient de rappeler que la procédure de vérification et d'admission des créances ne tend qu'à la détermination de l'existence, du montant et de la nature des créances ; la décision définitive admettant la créance de la société King Memphis au titre de l'indemnité de résiliation du contrat de franchise fixe les droits du créancier dans la procédure collective, mais ne fait pas obstacle à l'action en nullité et dommages-intérêts qui n'a pas le même objet et qui n'est pas fondée sur la même cause.

Sur la demande en nullité et/ou résolution du contrat de franchise

Les pièces versées aux débats établissent que :

- début septembre 2011, M. [G] et M. [A] se sont renseignés sur la franchise Memphis Coffee et M. [T], chargé du développement de cette franchise, leur a alors transmis une plaquette d'information,

- par courriel du 27 septembre 2011, M. [G] a été avisé qu'un document d'information précontractuelle lui était envoyé,

- M. [G] et [A] se sont montrés intéressés par la reprise d'un restaurant exploité à [Localité 10] sous la franchise Memphis Coffee, mais ce projet n'a pas abouti,

- le 16 mai 2012, la société King Memphis a obtenu l'autorisation du propriétaire d'un local commercial situé à Narbonne- ZI Croix sud en vue de son aménagement pour réaliser un restaurant sous son enseigne,

- le 6 juin 2012, la société King Memphis a signé avec M.[G], désigné comme 'candidat franchisé', un contrat de réservation de territoire, lui concédant pendant six mois un droit de réservation exclusif pour l'ouverture et l'exploitation d'un restaurant sur l'emplacement situé à Narbonne ZI-Croix sud, en contrepartie du versement de la somme de 9.000 euros HT qui s'imputerait sur le droit d'entrée ou serait remboursée notamment si le candidat franchisé n'obtenait pas de financement bancaire pour le projet,

- le 5 juillet 2012, le franchiseur a transmis à M. [G] un document établi par la société MC2, intitulé 'enquête flash' et, le 13 juillet 2012, une promesse de bail à compléter,

- le 15 juillet 2012, la société d'expertise comptable Avenir plus a rédigé un prévisionnel d'exploitation relatif à la création du restaurant à Narbonne,

- le contrat de franchise a été signé le 15 février 2013 entre la société King Memphis et la société Menphis Narbonne, représentée par M. [G] et M. [A] en leur qualité de co-gérants de cette société en cours de formation,

- la société Menphis Narbonne a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 11 mars 2013,

- le 27 juin 2013, elle a signé le contrat de bail portant sur le local situé à [Localité 11],

- la société King Memphis a transmis à la société Menphis Narbonne les factures libellées les 18 juin et 14 août 2013 par la société Menphis concept pour la conception et la réalisation du restaurant,

- en octobre/novembre 2013, M. [G] et M. [A] ont suivi une formation de 4 semaines au sein d'un établissement Menphis Coffee et du 10 au 24 novembre 2013, la société King Memphis a délégué deux formateurs de réseau pour suivre l'ouverture du restaurant,

- le 21 octobre 2014, la société Menphis Narbonne a fait part à la société King Menphis de ses difficultés et de son souhait de vendre son établissement, le franchiseur lui répondant qu'il se rendrait disponible pour trouver des axes de développement et ferait son possible pour rendre la cession réalisable,

- par lettre de son conseil du 18 août 2015, la société Menphis Narbonne a reproché à la société King Memphis son manquement à ses obligations d'information et d'assistance ainsi que des pratiques commerciales déséquilibrées, lui demandant ses propositions sous quinzaine, faute de quoi elle engagerait toute procédure utile,

- le 4 septembre 2015, la société King Menphis lui a répondu pour dénier tous les griefs qui étaient formulés à son encontre, précisant qu'elle ne donnerait pas suite à sa demande de rachat d'actifs et qu'elle se tenait prête à l'assister dans le respect du contrat de franchise,

- le 25 novembre 2015, la société Menphis Narbonne a saisi le tribunal de commerce de Marseille.

La société Menphis Narbonne invoque les dispositions du nouvel article 1112-1 du code civil instaurant un devoir d'information renforcée, d'ordre public, applicables immédiatement aux contrats en cours, et demande à la cour d'analyser le vice du consentement pour dol au regard de ce nouveau texte, si la jurisprudence antérieure se révélait insuffisante ; elle fait valoir qu'elle n'a jamais signé le document d'information précontractuelle et qu'elle ne l'a jamais reçu (page 27 de ses conclusions).

Pour caractériser le dol qu'elle prétend avoir subi, la société Menphis fait valoir, successivement que :

- le franchiseur ne lui a pas présenté le marché local et lui a fourni un prévisionnel trompeur exagérément optimiste,

- le franchiseur a choisi l'emplacement et le lui a imposé,

- il s'est écoulé un délai de 17 mois entre le 26 septembre 2011, date de signature du document d'information précontractuelle, et le 15 février 2013, date de signature du contrat de franchise de sorte que le franchisé ne disposait alors que d'informations obsolètes,

- les informations concernant le réseau étaient délibérément faussées, le franchiseur se comportant en véritable centrale d'achat occulte, et ayant mis en oeuvre des procédés destinés à tromper les futurs franchisés en leur présentant des comptes de référence enjolivés,

- le contrat de réservation participe aussi de la tromperie,

- le franchiseur lui a dissimulé que l'étude de l'implantation d'un restaurant à Narbonne avait été réalisée dans le cadre d'une candidature antérieure, celle de M. [X], et ne lui a jamais fait part des raisons de l'échec de cette candidature,

- le franchiseur admet qu'il a 'délibérément manqué à son obligation de conseil (article 1135 C.Civ) et a trompé ses cocontractants : aveu judiciaire du dol, au sens de l'article 1356 du Code Civil!',

- le franchiseur, qui devait garantir la jouissance paisible de la marque, lui a caché les risques tenant à une procédure en cours à son encontre portant sur l'originalité de son concept, la contrefaçon et l'activité parasitaire, notamment le risque pour le franchisé d'être reconnu coupable à son tour de contrefaçon.

Mais il apparaît que le document d'information précontractuelle du 26 septembre 2011 (pièce 4 de la société Menphis Narbonne) est signé par M. [G] et par M. [A], en leur qualité de cogérants de 'la société en cours de constitution', désignant ainsi la société Menphis Narbonne qui sera constituée ultérieurement le 1er février 2013, et porte sur toutes ses pages leurs paraphes 'LL' et 'AA'.

Ce document précise à l'annexe 4 intitulé 'Présentation du marché local' que l'état du marché local sera remis ultérieurement par un document séparé, une fois l'emplacement sélectionné ; l'étude flash de la société que le franchiseur a envoyée à M. [G] le 5 juillet 2012, qui présente l'implantation d'un restaurant Memphis coffee à Narbonne dans la zone commerciale ZI Croix sud, en ce compris ses inconvénients, décrit les zones de chalandise et analyse les générateurs de flux ainsi que l'intensité concurrentielle et constitue une étude du marché local ; si cette étude de marché, basée pour partie sur des statistiques de 2008, n'a pas été actualisée avant la signature du contrat de franchise, la société Menphis Narbonne, qui avait pu en vérifier les éléments avant de s'engager, ne démontre en aucune façon que des modifications importantes et défavorables seraient survenues postérieurement et que son consentement en aurait été vicié lors de la signature du contrat.

Le document d'information précontractuelle stipule en page 20 que les comptes d'exploitation prévisionnels seront élaborés par le franchisé qui pourra faire appel à tout expert et conseil de son choix, avec l'assistance du franchiseur et qu'en aucun cas la responsabilité du franchiseur ne pourra être recherchée, ni engagée, en cas de non réalisation des prévisions ; c'est donc en vain que la société Menphis Narbonne expose que la société King Menphis aurait dicté ses hypothèses à la société MC2 dont l'étude a servi de base au prévisionnel établi par la société Avenir plus qui aurait demandé des instructions à King Memphis et non au franchisé ; de plus, la société King Menphis fait justement observer :

* qu'en 2014, le chiffre d'affaires du franchisé a été de 979.924 euros avec un résultat négatif de 32.854 euros, qu'en intégrant le mois et demi de l'exercice 2013, le chiffre d'affaires sur 13 mois est de 1.226.518 euros - ce qui ramené à 12 mois - donne 1.090.238 euros pour la première année d'exploitation, en retrait seulement de 20 % par rapport à celui annoncé dans le prévisionnel qui était de 1.362.600 euros,

* que le compte prévisionnel a été établi sur la base d'un salaire de 1.500 euros par mois pour chacun des deux cogérants mais qu'en 2014, chacun d'eux a perçu 2.375 euros par mois et que, de surcroît , Mme [G] a été employée comme cadre à compter du 17 octobre 2013 pour un salaire mensuel de 2.428 euros.

La société Menphis Narbonne est ainsi mal fondée à invoquer le caractère trompeur du compte prévisionnel.

Contrairement à ce qui est prétendu, le contrat de réservation mentionne bien la zone concernée par l'exclusivité ; en effet, ' le territoire ' y est précisément défini comme étant à Narbonne, sur l'emplacement du cinéma CGR, zone industrielle Croix sud.

Pour soutenir que le franchiseur aurait fourni des informations concernant le réseau, délibérément faussées, la société Menphis Narbonne se fonde sur un courriel adressé par M. [B] à M. [G] le 12 mai 2016 ; mais M. [B] qui était associé avec King Memphis au sein de la société TCB a été révoqué de ses fonctions de gérant le 23 mai 2016 ; par attestation du 17 mai 2017, il a déclaré que, 'sentant le vent tourner concernant son poste de gérant' et étant associé minoritaire de la société TCB, il avait rejoint un groupe de franchisés déçus de leurs investissements dans l'enseigne Memphis Coffee et que ses courriels envoyés à différents franchisés étaient inspirés par un esprit de revanche ; exposant que M. [B] avait subi des pressions de la part de la société King Memphis, M. [G], M. [A] et la société L3C ont déposé plainte pour subornation de témoin le 17 décembre 2017 ; à la suite de cette plainte, les sociétés King Memphis, Concept agency et Memphis product ont fait citer directement M. [G], M. [A] et la société L3C devant le tribunal correctionnel de Marseille le 1er décembre 2017 sous la prévention de dénonciation calomnieuse ; en cet état, le courriel de M. [B] du 12 mai 2016 ne peut être retenu comme élément de preuve ; la société Menphis ne démontre pas que le franchiseur, qui est une centrale de référencement, se serait comportée comme une centrale d'achat occulte et aurait versé des remises de fin d'année à une succursale dans le but d'améliorer ses résultats pour emporter l'adhésion à son réseau.

La société King Memphis n'était pas tenue d'informer la société Menphis Narbonne de l'existence d'un candidat antérieur pour la création et l'exploitation du restaurant sous son enseigne à Narbonne ; par ailleurs, elle n'a jamais reconnu avoir manqué à son obligation de conseil.

Le document d'information précontractuelle mentionne en page 6 que le franchisé reconnaît avoir été informé que l'une des filiales du franchiseur, la société Memphis Nimes, est actuellement engagée dans un litige devant le tribunal de grande instance de Marseille avec la société SPTI exploitant deux restaurants de type 'diners' américains ; il y est précisé que la société SPTI a été autorisée à procéder à une saisie conservatoire dans son restaurant pilote, qu'estimant être en droit d'exploiter un savoir-faire et un concept par elle créé et développé, elle a assigné la société STPI pour voir prononcer la nullité de la saisie-contrefaçon, que la procédure est toujours pendante devant le tribunal de grande instance de Marseille ; contrairement à ce que prétend la société Menphis Narbonne, ces indications l'informaient suffisamment des risques que pouvait lui faire courir cette procédure en sa qualité de franchisé.

Aucun dol n'est ainsi démontré à l'encontre du franchiseur.

La société Menphis Narbonne invoque en deuxième lieu la nullité pour erreur substantielle sur la rentabilité de l'activité entreprise ; mais elle ne démontre pas s'être trompée, lors de la signature du contrat de franchise, sur le calcul des risques qu'elle prenait en ouvrant son restaurant et sur son espérance de gains, étant observé que M. [G], cogérant, était un professionnel de la restauration ; que son moyen doit être écarté.

La société Menphis Narbonne invoque en troisième lieu la nullité pour absence de cause du fait de l'absence de transmission d'un savoir-faire et du défaut d'assistance au franchisé.

Elle soutient que la société King Memphis ne lui a transmis aucun savoir faire propre, original et secret, la bible remise ne contenant aucun savoir faire commercial, les matériel et mobilier étant visibles de tous et les éléments de gestion mis à disposition n'étant que de simples outils d'administration d'un restaurant au demeurant incomplets ; elle souligne que devant la cour d'appel d'Aix en Provence, dans le cadre du litige l'opposant à la société SPTI, la société King Memphis n'a pu prouver l'antériorité de son concept et que dans un article paru dans la revue Franchise et Business numéro 39 janvier/février 2012, son dirigeant a admis s'être inspiré du concept « Annette Diner », ce qui démontre la fausseté des assertions de la plaquette publicitaire selon lesquelles le créateur aurait eu l'idée du concept lors d'un voyage aux Etats Unis.

Mais la société King Memphis réplique à juste raison que le savoir-faire de Memphis Coffee n'était pas l'objet du procès entre elle et la société SPTI, seules étant concernées certaines ressemblances entre les aménagements des deux enseignes et que la cour d'appel d'Aix en Provence, par arrêt du 6 mai 2014, a retenu des différences notables, déboutant la société SPTI de ses demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire. L'intimée justifie effectivement d'un savoir-faire secret, substantiel et identifié, fondé en particulier sur une assistance pour le choix du lieu d'implantation, des plans de construction et/ou aménagement spécifique des points de vente selon une présentation uniforme et un savoir technique portant sur l'élaboration, la réalisation et le service de repas typiquement américains ; concernant ce dernier point, le directeur industriel de la société Socopa atteste avoir développé en partenariat étroit avec Memphis Coffee une viande hachée aromatisée pour burger qui est un produit original par sa formulation aromatique, sa composition, sa forme et son poids, dont l'exclusivité est réservée à Memphis Coffee ; le directeur de la société Bon pain de France atteste quant à lui que les ingrédients et la recette de fabrication des buns fournis aux restaurants Memphis Coffee leur sont exclusifs et que la recette originale est issue d'un long travail de recherche et de développement effectué en collaboration avec Memphis Coffee.

Pour conclure à l'absence d'assistance, la société Menphis Narbonne, se référant à sa pièce n° 2 qui est la plaquette commerciale de Menphis Coffee, expose que les seuls éléments d'assistance promis par le franchiseur sont un suivi régulier de l'exploitation ainsi qu'un accompagnement et un suivi personnalisé à chaque étape du projet et de son développement ; elle fait valoir que le franchiseur ne lui a pas apporté l'assistance personnalisée qu'elle réclamait ; elle lui reproche aussi de n'avoir pas respecté son obligation de moyen stipulée à l'article 9.2.6 du contrat de franchise et ajoute que d'autres franchisés n'ont pas bénéficié d'assistance, dont M. [S] qui relate que King Memphis menaçait de lui enlever la franchise alors qu'il demandait à être accompagné et aidé ; elle allègue que la société King Menphis s'est livrée à un chantage en soumettant l'exonération temporaire de royalties à la signature d'engagements nouveaux par le franchisé.

Mais l'article 8 du contrat de franchise précise les modalités de l'assistance du franchiseur lors de l'ouverture de l'unité Memphis Coffee, tandis que son article 9 détaille son assistance durant le contrat : assistance en matière commerciale, en matière de recherche et développement ainsi qu'en matière d'approvisionnement ; dans ce dernier domaine, l'article 9.2.6 stipule que le franchiseur s'engage à faire bénéficier le franchisé de son expérience et de ses services spécialisés pour la détermination d'un stock minimum de fournitures d'objets nécessaires à la conception des plats, ainsi que l'assortiment en produits spécifiques le mieux adapté au point de vente du franchisé, susceptible de satisfaire à tout moment les besoins et les attentes de la clientèle en fonction des contraintes et critères locaux spécifiques.

L'assistance du franchiseur étant ainsi prévue dans le contrat, la société Menphis Narbonne est mal fondée en son moyen tiré du défaut de cause ; ses griefs ne seraient que de nature à étayer une action en résolution ou résiliation du contrat, s'ils étaient prouvés, ce qui n'est pas le cas ; en effet :

- le 17 avril 2015, le responsable de la communication du franchiseur, son responsable en exploitation et son directeur des opérations se sont déplacés dans les locaux du franchisé,

- le 19 mai 2015 le franchisé a demandé rendez-vous au franchiseur et a été reçu dans ses locaux le 3 juin suivant,

- par lettre du 29 juin 2015, la société King Memphis a indiqué à la société Menphis Narbonne qu'à aucun moment, elle n'avait conditionné son offre financière, qu'elle réitérait sa proposition d'exonération totale de la redevance pendant trois mois et l'invitait à utiliser le plan de communication édité suite à sa visite du 17 avril 2015,

- le 7 juillet 2015, il a été adressé au franchisé un audit de sa présence sur internet avec des préconisations pour améliorer sa communication sur les réseaux sociaux et, le 23 juillet suivant, les outils nécessaires à la création d'un espace sur le site Tripadvisor,

- la société Menphis Narbonne n'a pas assisté à la convention nationale organisée par le franchiseur à [Localité 12] le 8 octobre 2015,

- le 5 novembre 2015, elle a été conviée à une réunion régionale à [Localité 13] du 17 au 19 novembre 2015 mais a répondu au franchiseur qu'elle n'y viendrait pas, sa priorité étant de faire venir et revenir les clients.

Il résulte de ces éléments que la société King Memphis a satisfait à son obligation de moyen au titre de l'assistance due au franchisé.

La société Menphis Narbonne, en quatrième lieu, invoque la nullité du contrat de franchise du fait de l'imposition du prix de vente ; citant l'article 19 du contrat, elle fait état d'une fixation contractuelle d'un prix minimum de revente égal à 80 % du prix conseillé, prohibée par l'article L 442-5 du code de commerce, et qui, revêtant un caractère substantiel, entraîne la nullité du contrat ; elle ajoute qu'en l'espèce :

- les prix sont préenregistrés, le franchiseur a accès aux caisses, les campagnes publicitaires mentionnent les prix et les documents publicitaires sont fournis par le franchiseur ou ses filiales,

- l'article 19 du contrat précise que le réseau Memphis Coffee a adopté un positionnement tarifaire lui permettant d'apparaître le plus attractif et compétitif pour justifier l'imposition d'un prix minimal,

- la modification des prix reste possible, au moment de l'encaissement du client, mais ne peut être pratiquée que sur un nombre limité d'articles, toute mise à jour de la carte en provenance du franchiseur écrasant les modifications ayant pu être enregistrées par exception,

- les quelques attestations de franchisés conciliants, contredites par d'autres franchisés, ne suffisent pas à remettre en cause les faits établis pour le restaurant de Narbonne.

La société King Menphis réplique que les franchisés de son réseau sont libres de pratiquer leur prix et de les modifier à leur guise.

Il apparaît que l'article 19.1 du contrat de franchise est libellé comme suit :

'En sa qualité de commerçant indépendant, le franchisé détermine librement, dans le cadre de la réglementation en vigueur, le prix de revente des produits fournis à la clientèle.

Le franchiseur communiquera régulièrement au franchisé un tarif tenu à jour et directement utilisable dans son restaurant.

Ce tarif comprend des prix de vente conseillés et qui sont simplement indicatifs ; étant ici rappelé que le réseau Memphis Coffee a adopté un positionnement tarifaire lui permettant d'apparaître le plus attractif et compétitif.

En considération de ce qui précède, le franchisé s'engage à respecter ces prix de vente conseillés dans une limite de + ou - 20 %'.

Dans cette clause, qui permet au franchisé d'appliquer d'autres prix que ceux conseillés, seule la fixation d'un prix minimum de revente, soit 80 % du prix conseillé, contraire aux dispositions de l'article L 442-5 du code de commerce qui prohibe le fait pour toute personne d'imposer directement ou indirectement un caractère minimal au prix de revente d'un produit, doit être annulée ou réputée non écrite ; le contrat de franchise n'en est pas pour autant nul, la société Memphis Narbonne ne prouvant pas le vice de son consentement qui en serait résulté.

C'est en vain que la société Menphis Narbonne allègue que la société King Memphis lui imposerait ses prix alors qu'il apparaît :

- qu'elle a elle-même organisé des événements promotionnels au cours desquels elle a proposé le Crazy Burger à 19,90 euros au lieu du prix conseillé de 24,90 euros, soit avec plus de 20 % de différence avec le prix conseillé par le franchiseur et proposé le burger double au prix du simple,

- que de nombreux franchisés du réseau exploitant des restaurants à [Localité 14], [Localité 15], [Localité 16], [Localité 17] attestent qu'ils sont libres de pratiquer leurs propres prix et M. [V], franchisé de trois autres restaurants, déclare que, grâce aux fonctions du logiciel de caisse, il a paramétré les tarifs qu'il a choisi d'appliquer,

- que si, dans un courriel du 21 septembre 2015, M. [Y], qui était salarié de la société Pointex, a affirmé que le franchiseur pouvait à distance 'écraser' les données dont les prix enregistrés par le franchisé dans sa caisse, M. [U], représentant légal de la société Pointex, atteste :

- que sa société a mis en place son système d'encaissement multi sites pour les franchisés Memphis Coffee,

- que M. [Y], qui était chargé de gérer la partie commerciale, ne connaissait pas exactement le fonctionnement du logiciel sur le plan technique,

- que ce logiciel permet, par une action manuelle déclenchée par le franchisé, de modifier les prix arrivant du franchiseur et d'ajouter des plats,

- que le franchiseur n'a pas accès aux programmations locales et tarifications spécifiques que les franchisés ont effectué directement par eux-mêmes.

La société Memphis Narbonne, en cinquième et sixième lieu, invoque la nullité du contrat de franchise du fait du contrôle des marges et des contraintes d'approvisionnement ; elle expose en ce sens :

- que l'article 11 du contrat prévoit que le franchisé doit fournir au franchiseur les informations suivantes : chiffre d'affaires mensuel, montant des frais généraux, montant des frais de personnel, coût des marchandises, état du stock des marchandise et que, dans l'hypothèse où l'audit comptable ferait apparaître une variation de plus de 15 % de ces chiffres par rapport à la moyenne du réseau, le contrat pourrait être résilié aux torts exclusifs du franchisé dans les conditions de l'article 30,

- que le contrôle de la marge, prohibé par l'article L 442-5 du code de commerce, concourt au contrôle du prix de revente et donc à la nullité du contrat,

- que l'article 9.2.1 impose au franchisé de ne s'approvisionner en fournitures qu'auprès des fournisseurs agréés du réseau et l'article 9.2.2 lui impose de ne s'approvisionner en produits spécifiques qu'auprès du franchiseur,

- que ces contraintes d'approvisionnement ne sont pas justifiées par le maintien de l'identité commune ou la réputation du réseau.

Mais c'est à juste titre que la société King Menphis objecte qu'elle n'a jamais contrôlé les marges de son franchisé ni ne s'est ingérée dans la gestion de son restaurant ; quant aux clauses d'approvisionnement exclusifs, elles sont justifiées en ce qui concerne ses produits spécifiques, fabriqués exclusivement pour elle, afin de préserver l'identité de son réseau et, en ce qui concerne les autres produits, pour garantir leur qualité et sécurité alimentaire et préserver ainsi la réputation de son réseau.

A titre subsidiaire, la société Menphis Narbonne soulève la nullité de plein droit du contrat de franchise comme conclu avec une société non dotée de la personnalité morale ; elle souligne n'avoir été immatriculée au registre du commerce et des sociétés que le 11 mars 2013, soit un mois après la signature du contrat de franchise intervenue le 15 février 2013 ; elle fait valoir que ce contrat, signé par les associés et qui n'a pas fait l'objet d'une reprise d'engagement par l'assemblée générale des associés, est frappé d'une nullité absolue de plein droit, non régularisable, mais qu'il a existé un contrat de franchise ' de fait ' entre elle et la société King Memphis.

Les intimées soutiennent que la demande de nullité d'un second contrat de franchise constitue une demande nouvelle en appel, autant irrecevable que mal fondée.

La sarl Memphis Narbonne qui se borne à produire un certificat de dépôt de ses statuts au greffe et de son procès verbal d'assemblée générale du 1er mars 2013 sans verser aux débats la copie de ces documents qui permettraient de vérifier s'il y a eu ou non reprise de l'engagement résultant du contrat de franchise dans les conditions prévues par l'article R 210-5 du code de commerce, ne démontre pas la nullité invoquée ; sa demande tendant à voir constater l'existence d'un contrat de franchise ' de fait ' sera rejetée.

A titre infiniment subsidiaire, la société Menphis Narbonne recherche la responsabilité du franchiseur pour inexécution fautive, lui reprochant la non transmission d'un savoir-faire et un manquement à ses obligations de suivi et d'assistance ; mais ces griefs ont déjà été examinés et écartés plus haut ; sa demande est mal fondée.

Sur la recherche de responsabilité pour violation de l'article L 442-6 du code de commerce

Pour étayer ce moyen, la société Menphis Narbonne reproche au franchiseur d'avoir manqué à son obligation d'assistance, d'avoir établi un compte prévisionnel à partir d'une étude prévisionnelle d'activité non pertinente, d'avoir capté la clientèle en lui imposant un avenant comportant la reprise par la société Pontex du programme de fidélité géré auparavant par la société Fidemaxx, d'avoir accaparé la communication en gérant sa page 'Facebook', de faire reposer son modèle sur l'entrée rapide de redevances et non sur la pérennisation des points de vente ; elle prétend qu'il existe une disproportion manifeste du coût de la franchise au regard du service rendu ; elle soutient encore que le franchiseur a exercé un contrôle excessif notamment :

- en imposant des prix de revente, dont un prix de vente minimum, une marge commerciale, un approvisionnement exclusif et des horaires d'ouverture,

- en contrôlant ses caisses et en disposant des codes d'accès permettant même d'accéder à sa vidéo-surveillance,

- en se comportant comme une centrale d'achat exclusive occulte.

Elle en déduit que le franchiseur a soumis son partenaire commercial à des obligations sans contrepartie, ce qui caractérise un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties au sens de l'article L 442-6, I, 2° du code de commerce ainsi que le fait d'obtenir un avantage ne correspondant à aucun service rendu sans contrepartie proportionnée au sens de l'article L. 442-6-1 1° du code de commerce.

Mais au regard des éléments factuels et pertinents apportés en réponse par la société King Memphis en pages 71 à 74 de ses écritures, la société Menphis Narbonne ne démontre pas d'agissements qui auraient été commis par le franchiseur au cours du contrat en vue de capter sa clientèle, d'accaparer sa communication, de lui imposer des horaires ou encore de lui imposer des prix ; les autres griefs sont mal fondés comme déjà explicité plus haut ; en conséquence, c'est en vain que la société appelante invoque une violation des articles L. 442-6, I, 2° et L. 442-6, I, 1° du code de commerce.

Il résulte de tout ce qui précède que les demandes de la société Menphis Narbonne doivent être rejetées en ce qu'elle sont dirigées contre la société King Memphis comme contre les deux autres intimées, étant observé que contrairement à ce qui est prétendu, la preuve n'est pas rapportée que la société King Menphis aurait 'instrumentalisé Concept et Product pour renforcer son emprise et enfermer ses franchisés dans une véritable nasse'.

Sur les demandes de M. [G], de M. [A] et de la société L3C

Les trois associés au sein de la société Menphis Narbonne soutiennent :

- qu'ils sont recevables à agir sur le fondement de l'article 1382 du code civil, du fait de la nullité du contrat et du comportement fautif des intimées,

- qu'ils justifient d'un préjudice distinct de celui subi par la société Menphis Narbonne, leurs demandes de dommages-intérêts portant sur le remboursement de leur part en capital et de leur compte courant, outre pour chacun d'eux un préjudice moral à hauteur de 150.000 euros et la somme de 15.000 euros pour 'réticence dolosive' ou résistance dolosive (page 99 de leurs écritures).

Mais l'intégralité de leurs demandes ne peuvent être que rejetées, le contrat de franchise n'étant pas déclaré nul et aucun comportement fautif n'étant démontré à l'encontre des sociétés intimées.

Sur les demandes de dommages-intérêts des sociétés intimées pour procédure abusive

Chacune des sociétés intimées demande la somme de 50.000 euros, à titre de dommages-intérêts, pour procédure abusive.

Cependant, aucune d'elles ne démontre avoir subi un préjudice autre que des frais de procédure exposés qui relèvent de l'indemnisation allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; elles seront donc déboutées de ce chef de demande.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, M. [G], M. [A] et la société L3C seront condamnés chacun à payer la somme de 5.000 euros à chacune des sociétés intimées, toutes les autres demandes à ce titre étant rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

MET hors de cause la Selarl [Q] [P] et associés, prise en la personne de Me [P], appelante en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Menphis Narbonne, mais dont la mission a pris fin ;

DECLARE recevable l'intervention de Me [D], désigné en qualité de mandataire ad hoc de la société Menphis Narbonne pour suivre les instances en cours ;

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré M. [G], M. [A] et la société L3C irrecevables en leurs demandes ;

DECLARE la société Menphis Narbonne, M. [G], M. [A] et la société L3C recevables mais mal fondées en toutes leurs demandes à l'encontre des sociétés King Memphis, Concept agency et Memphis product et les en déboute ;

CONDAMNE M. [G], M. [A] et la société L3C à payer chacun, par application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 5.000 euros à chacune des sociétés King Memphis, Concept agency et Memphis product ;

DEBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes ;

CONDAMNE M. [G], M. [A] et la société L3C aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

Cécile PENG Irène LUC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 17/06649
Date de la décision : 03/04/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°17/06649 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-03;17.06649 ?
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