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20/03/2019 | FRANCE | N°17/06768

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 20 mars 2019, 17/06768


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 20 MARS 2019



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/06768 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3JNQ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Avril 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 15/12875





APPELANTE

Madame [H] [X]

[Adresse 1]r>
[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 2]

Représentée par Me Claire DELAFONT, avocat au barreau de PARIS, toque : B1185







INTIMÉE

Société Uniper France Powe, ancie...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 20 MARS 2019

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/06768 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3JNQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Avril 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 15/12875

APPELANTE

Madame [H] [X]

[Adresse 1]

[Localité 1]

née le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 2]

Représentée par Me Claire DELAFONT, avocat au barreau de PARIS, toque : B1185

INTIMÉE

Société Uniper France Powe, anciennement société E.ON France Power

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIREN : B 3 99 361 468

Représentée par Me Aline JACQUET DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : E2080, substituée à l'audience par Me Tiphaine VIBERT, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Février 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente de chambre

Mme Anne BERARD, Présidente de chambre, rédactrice

Mme Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier : Mme Clémence UEHLI, greffier lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, présidente et par Madame Clémence UEHLI, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par contrat de travail à durée indéterminée en date du 16 mars 2011, Mme [X] a été embauchée par la société E.ON France à compter du 21 avril 2011, en qualité de chef de projet RH, rattachée au directeur des ressources humaines avec le statut de cadre.

Le 1er août 2012, son contrat de travail a été transféré à la société E.ON France Management (EFRM) avec maintien de l'ancienneté et application du statut conventionnel régissant l'ensemble du personnel de la société ERFM .

A la suite de la fusion de la société EFRM dans la société nationale d'électricité et de thermique (SNET), son contrat de travail a été transféré à la société SNET à compter du 1er juillet 2014.

Un avenant à son contrat de travail a été établi le 9 juillet 2014 précisant qu'elle exerce le poste de responsable de département projets RH et conduite du changement, statut cadre, le contrat relevant de la convention collective des industries électriques et gazières.

La société emploie plus de onze salariés.

A compter du 23 janvier 2015, Mme [X] a été en arrêt maladie.

Le 12 février 2015, son employeur l'a informée de la suppression de son poste dans le cadre du projet d'adaptation des activités industrielles et des fonctions de direction, d'administration et de vente au sein d'E.ON France Power homologué par la DIRECCTE et lui a proposé le poste de HR Business Partner Ventes.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 avril 2015, son employeur lui a proposé le poste de responsable des ressources humaines pour le siège et souligné que son absence perturbe gravement le fonctionnement de la direction de la transition et des ressources humaines.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 juillet 2015, son employeur lui a proposé le poste de responsables talents, compétences et formation et l'a convoquée pour un entretien individuel le 30 juillet, soit pour répondre favorablement à cette proposition, soit pour envisager un départ dans le cadre du plan de départs volontaires ou une rupture conventionnelle.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 août 2015, Mme [X] a décliné l'offre et imputé au comportement de son employeur son état de santé.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 octobre 2015, l'employeur a invité Mme [X] à bénéficier d'un congé de reclassement dans le cadre du plan de départs volontaires, la dernière commission de validation se tenant le 17 novembre 2015.

Mme [X] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris le 9 novembre 2015 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur.

Mme [X] a fait l'objet d'une visite médicale de reprise le 5 octobre 2016, l'étude de poste a été réalisée le 19 octobre 2016 et à l'issue d'une seconde visite, le 25 octobre 2016, le médecin l'a déclarée inapte au poste de responsable projets RH et conduite du changement et précisé qu'elle pourrait occuper un emploi dans un environnement différent, notamment dans un autre contexte relationnel et organisationnel.

Mme [X] a été convoquée par son employeur le 3 janvier 2017 à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement pour inaptitude, le 16 janvier 2017. Elle a été licenciée pour ce motif par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 janvier 2017.

Par jugement du 13 avril 2017, le conseil de prud'hommes a débouté Mme [X] de sa demande de résiliation judiciaire, a estimé que son licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse, a pris acte de l'accord de l'employeur, la société E.On France Power devenue Uniper France Power, pour lui verser un complément d'indemnité de licenciement et un rappel de salaire au titre de la prime d'objectifs 2014, l'a déboutée de sa demande au titre des heures supplémentaires ainsi que de sa demande indemnitaire pour travail dissimulé et débouté l'employeur de sa demande reconventionnelle.

Le 3 mai 2017, Mme [X] a régulièrement interjeté appel.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 13 juillet 2017, auxquelles il est expressément fait référence, Mme [X] demande à la cour d'infirmer le jugement rendu et :

A titre principal de :

- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [X] aux torts de la société Uniper France Power ;

A titre subsidiaire ,

- Dire et juger sans cause réelle ni sérieuse le licenciement pour inaptitude de Mme [X] ;

En tout état de cause,

- Condamner la société Uniper France Power au paiement des sommes suivantes :

- Indemnité compensatrice de préavis (3 mois) 1 21.912 € bruts ;

- Congés payés y afférents : 2.191,20 € bruts ;

- Reliquat de l'indemnité de licenciement : 419,48 €

- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (15 mois) : 109.560 € nets ;

- Dommages et intérêts pour préjudice distinct (6 mois) : 43.824 € nets ;

- Rappel de salaire d'heures supplémentaires du 21 avril 2011 au 22 janvier 2015 :56.655,91 € bruts

- Congés payés afférents : 5.665,59€ bruts ;

- Indemnité forfaitaire pour travail dissimulé (article L 8223 1) : 43.824€

- Prime sur objectifs 2014 : 9.377€ bruts

- Congés payés afférents ; 937,70€ bruts

- Article 700 : 3.000 € ;

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 13 janvier 2019, auxquelles il est expressément fait référence, la société Uniper France Power demande de confirmer le jugement rendu et demande de

- de débouter Mme [X] :

- de sa demande principale de résiliation judiciaire de son contrat de travail,

- de sa demande subsidiaire de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de ses demandes afférentes à la rupture de son contrat de travail et à des rappels d'heures supplémentaires,

- de limiter à 4.738,29 € le montant de sa prime d'objectifs pour 2014, et à 473,83 € les congés payés afférents,

en tout état de cause,

- de condamner Mme [X] à lui verser 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux éventuels dépens.

MOTIFS

Sur la résiliation judiciaire

Lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée. Ce n'est que si le juge estime la demande de résiliation infondée qu'il statuera sur le bien-fondé du licenciement.

Faisant grief à son employeur d'avoir gravement manqué à plusieurs de ses obligations et mis tout en 'uvre pour l'évincer, Mme [X] soutient qu'il a procédé à des modifications unilatérales de son contrat de travail et violé les obligations de reclassement visées au sein du plan de départ volontaire pour la pousser au départ, ces agissements ayant eu des conséquences néfastes sur son état de santé.

Elle soutient également avoir subi des pressions et des violences morales qu'elle qualifie de harcèlement et estime que l'entreprise a manqué à ses obligations en matière de préservation de la santé de ses salariés.

Par ailleurs, elle soutient la violation par la société de ses obligations en matière d'employabilité de ses salariés et d'obligation de recherche de reclassement dans le cadre d'un départ volontaire.

Enfin, à l'appui de sa demande, elle fait aussi grief à son employeur d'un défaut d'information en temps utile de son classement en longue maladie par la CPAM.

Modifications unilatérales du contrat de travail et violation des obligations de reclassement

S'agissant de l'évolution de ses missions, elle justifie :

- qu'elle était en charge à 90% de son temps du projet 'decommissionning' ainsi qu'il résulte de son évaluation établie en juin 2012,

- que ce projet à durée déterminée de 5 ans, consistait en la réorganisation majeure des sites industriels et des fonctions du siège,

- que la coordination de ce projet 'decommissionning' a été confiée à l'été 2012 à un cabinet de consultants Cardinale Sud,

- que dans de nombreux échanges de mails, elle a exprimé le sentiment de ne pas être suffisamment tenue informée de l'évolution des projets ou que son opinion n'était pas prise en considération,

- qu'elle a été en arrête maladie d'octobre 2012 à décembre 2012, puis en arrêt maladie, en congé maternité et en congé parental du 23 mars 2013 au 30 septembre 2013,

- qu'en octobre 2013, elle s'est vu confier le projet HR TOM, mise en place du SIRH et adaptation des processus RH ainsi qu'il résulte de son entretien du 14 mars 2014,

- que ce poste était voué à une suppression dans le cadre de la réorganisation de la fonction RH à venir.

Le départ du DRH qui l'avait recrutée à l'été 2012, puis son remplacement par l'ancien DRH adjoint avec lequel elle avait une moindre affinité et le choix de l'employeur de recourir à un cabinet de consultants en ressources humaines pour accompagner cette réorganisation d'ampleur, ont été manifestement mal vécus par Mme [X], ainsi qu'il résulte notamment de l'attestation de M. [T], mais aussi de ses propres écrits, notamment ses mails, dont elle a pris soin de transférer une partie sur sa messagerie personnelle à partir de l'automne 2012.

Si elle n'a pas appréciée de travailler dans ces nouvelles conditions, elle n'a pour autant nullement été évincée du projet, qui justifiait une importante mobilisation collective. Son arrêt de travail de deux mois entre octobre et décembre 2012 a naturellement justifié une répartition des tâches qui étaient les siennes à d'autres, mais son échange de mails avec son N+2 à son retour montre qu'elle a été accueillie avec plaisir, qu'il lui a donné rendez-vous dans la semaine pour faire le point et l'a conviée à la réunion de pilotage RH.

Absente de l'entreprise à partir de mars 2013, il est constant que le projet de réorganisation avait très notablement avancé à son retour de congé parental en septembre 2013, ce qui légitime que de nouvelles missions lui aient été confiées, dans le cadre d'un plan d'action pour la nouvelle direction de la transition et des ressources humaines diffusé le 28 octobre 2013. L'un des objectifs étant de réorganiser les processus RH et permettre une bonne transition vers le nouveau modèle d'organisation proposé par le groupe ( HR TOM).Elle a précisément été intégrée au projet RH TOM.

Cette nouvelle mission ne saurait être assimilée à un changement de poste comme elle le soutient, ni à des fonctions sans rapport avec ses responsabilités et compétences, dès lors qu'elles s'inscrivaient parfaitement dans le cadre de sa fonction de responsable de projets RH.

L'évolutivité constituait au demeurant la nature même de son poste, les termes de son contrat disposant que ses fonctions de chef de projet 'sont par nature évolutives et pourront être modifiées par la société en fonction des nécessités d'administration et de gestion sans que cela emporte modification du présent contrat, à condition toutefois que ces adaptations demeurent compatibles avec sa qualification. La société se réserve ainsi le droit de nommer Mme [X] à un autre poste au sein de la société, de lui confier une activité différente ou supplémentaire correspondant à sa formation et à ses compétences.'

De façon générale enfin, son poste de chef de projet RH, créé pour engager et accompagner le vaste projet de réorganisation du groupe avait vocation à avoir pour terme nécessaire celui de la réorganisation elle-même et elle ne saurait en tirer la preuve d'une volonté de sa direction de la pousser à la démission, dès lors que son employeur a cherché à la reclasser sur un emploi pérenne.

S'agissant de l'obligation de reclassement de son employeur liée au plan de départs volontaires, Mme [X] justifie :

- que son contrat de travail a été transféré à la SNET au 30 juin 2014 et l'intitulé de son poste reformulé,

- qu'elle s'est émue auprès du directeur de la transition et des ressources humaines en juillet 2014, du recrutement d'une personne comme responsable des relations sociales et droit social, poste non identifié dans l'organigramme cible et lui a exprimé, en octobre 2014, son regret que ce poste ne lui ait pas été proposé,

- qu'en novembre 2014, un poste de HR business partner ventes et efficacité énergétique lui a été proposé, qu'elle a assuré en avance de phase la mission HR BP vente et développement à compter du 2 décembre, mais que la reconfiguration de ce poste à sa seule dimension HR BP ventes l'a conduite à le refuser le 19 décembre,

- que le 31 décembre 2014, le directeur de la transition et des ressources humaines a pris acte de son refus mais lui a demandé de continuer à assurer provisoirement le suivi jusqu'à l'identification d'une personne pour reprendre cette mission,

- qu'elle a été en arrêt de travail ininterrompu à compter du 25 janvier 2015.

Son employeur justifie cependant qu'elle a refusé une proposition de juriste social senior dont la fiche de poste pouvait correspondre à ses compétences et son niveau de qualification et qui incluait le management d'un collaborateur junior.

Postérieurement à ce refus, cette offre a été acceptée par une autre personne qui, travaillant par ailleurs depuis un an et demi comme consultante extérieure sur le plan de départs volontaires, a de ce fait cumulé les deux missions au travers un poste redimensionné, d'une classification supérieure à celle de son prédécesseur.

Mme [X] ne saurait dans ce contexte faire grief à son employeur de ne pas lui avoir proposé ce poste en promotion.

Il apparaît qu'au 28 octobre 2014 quatre postes potentiels avaient été identifiés pour elle dont elle avait dit à son responsable qu'aucun ne répondait à ses attentes, qu'elle n'avait pas candidaté sur le poste de' responsable droit social, relations sociales' qui avait été publié, et que c'est dans ce contexte qu'avait été envisagé la création d'un poste de HR business partner ventes et efficacité énergétique devenu HR business partner ventes, qu'elle a refusé.

Au 31 décembre 2014, le directeur de la transition et des ressources humaines avait pris acte de ce refus mais n'avait nullement fermé le dialogue, en lui proposant un rendez-vous.

La preuve est rapportée que l'employeur remplissait son obligation de reclassement envers Mme [X] dans le cadre de la réorganisation et que cette démarche s'est poursuivie après l'arrêt de travail de celle-ci [X] à compter du 23 janvier 2015.

Au fur et à mesure de leur publication, lui ont ainsi été successivement proposés :

- le poste HR Business partner ventes, le 12 février 2015,

- le poste de responsable des ressources humaines du siège, le 22 avril 2015,

- le poste responsable talents, compétences et formation, le 22 juillet 2015.

Dans son dernier courrier, l'employeur l'invitait à un entretien le 30 juillet 2015, soit pour accepter ce poste, soit pour envisager un départ dans le cadre du plan de départs volontaires assorti d'un congé de reclassement en appelant son attention sur son échéance, la dernière commission de validation étant prévue à la mi-novembre 2015, soit pour envisager une rupture conventionnelle. Le 26 octobre 2015, elle a été une dernière fois invitée à bénéficier du plan de départ volontaires.

Par lettre du 13 août 2015, Mme [X] a décliné cette offre de reclassement, en imputant à son employeur des manquements graves et persistants à son encontre rendant difficile la possibilité d'une reprise et d'une collaboration saine et ayant des conséquences directes sur son état de santé.

Si Mme [X] verse aux débats des pièces établissant le lien entre son état de santé dégradé et son activité professionnelle, elle n'établit pas pour autant que la dégradation de sa santé soit imputable à des manquements de son employeur, qui a respecté les termes de son contrat de travail, lui a confié des missions avec des responsabilités comparables au fur et à mesure de l'avancée de la réorganisation et s'est loyalement employé à remplir son obligation de reclassement liée à la réorganisation.

Harcèlement moral et manquement à l'obligation de sécurité

Pour soutenir l'existence d'un harcèlement moral de l'employeur et d'un manquement à son obligation de sécurité Mme [X] reprend l'ensemble des faits précédemment évoqués.

De façon générale, il a déjà été constaté que la nature de son poste, tel que défini à son contrat de travail, était par nature évolutive et que son recrutement dans le cadre d'une réorganisation de grande ampleur conduisait par ailleurs à sa disparition annoncée.

Dans ce contexte, tant les changements de mission que les nécessités de son reclassement ne caractérisent pas une volonté de déstabilisation répétée de la part de son employeur.

Si elle soutient tout à la fois avoir été sollicitée durant ses arrêts de travail et avoir été mise à l'écart à leur issue, force est de constater que c'est elle qui a fait par mail des offres de 'back up' durant son arrêt de travail d'octobre à décembre 2012 et qu'elle était en demande de 'rester dans la boucle'. Au demeurant, elle n'établit pas avoir finalement concrétisé ses intentions durant cette période.

Elle soutient que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité en ne la convoquant pas à une visite médicale de reprise à l'issue de sa grossesse, en mars 2013. Son employeur justifie au contraire avoir satisfait à son obligation dès lors qu'elle a été convoquée à deux reprises et n'a répondu à aucune de ces convocations.

Mme [X] ne peut soutenir que les propositions de reclassement qui lui ont été successivement faites, y compris durant son arrêt de travail, caractériseraient des pressions, dès lors que l'absence de propositions de la part de l'employeur, y compris durant son arrêt de travail, auraient au contraire caractérisé un manquement à ses obligations.

Elle ne peut davantage lui faire grief d'avoir ensuite insisté pour qu'elle saisisse l'opportunité du PDV, dès lors que l'échéance du 15 novembre 2015 ne pouvait que rendre urgent son positionnement, quel que soit son état de santé. Sa prolongation au 31 mai 2016 explique que l'entreprise lui ait adressé des documents actualisés le 7 mars 2016.

Mme [X] ne caractérise aucune pression ou chantage au départ de son employeur pour avoir subordonné le financement d'un MBA à son départ de l'entreprise, dès lors que cette possibilité résultait précisément du PDV.

Si elle a été manifestement déstabilisée par la promotion de Mme [A], ancienne consultante du cabinet Cardinale Sud, précédemment évoquée, elle ne saurait davantage caractériser de volonté malveillante de son employeur à son endroit de ce fait.

Elle ne caractérise ainsi aucun harcèlement ni manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Il résulte des attestations et échanges de mails produits aux débats que depuis son entrée dans l'entreprise, Mme [X] n'a jamais été satisfaite de son poste. Elle a vécu comme de nouvelles causes d'amertume l'évolution de ses missions au fur et à mesure de l'avancement des projets, auxquels elle ne se considérait jamais suffisamment associée, malgré les retours qui lui étaient faits et a renvoyé à ses interlocuteurs le sentiment que rien de ce qui lui était proposé n'était à la hauteur de ses compétences et de ses attentes. Si ces frustrations successives ont incontestablement généré du mal-être et de la souffrance, dans un contexte où son désir de quitter l'entreprise dès mars 2013, établi par une lettre de recommandation de son ancien DRH, ne s'est pas concrétisé, où dès l'origine, elle a mal accepté l'intervention du cabinet de consultants Cardinale sud dans la réorganisation, qui portait d'autres choix que ceux de son premier DRH, où elle a particulièrement mal vécu à l'été 2014 l'annonce de la promotion d'une autre, qui plus est ancienne consultante du cabinet Cardinale Sud et n'a pas supporté, en décembre 2014 l'annonce qu'elle allait devoir travailler de nouveau avec le cabinet Cardinale Sud, son arrêt de travail de janvier 2015 ne constitue nullement la preuve ou le résultat de manquements graves ou répétés de l'employeur ayant rendu impossible la poursuite de la relation de travail.

Autres manquements

S'il est établi que l'employeur n'a pas versé à Mme [X] de prime au titre de l'année 2014, ce manquement ne saurait suffire à lui seul à justifier une résiliation judiciaire dans un contexte où son arrêt de travail en début d'année 2015 a nécessairement compromis l'organisation de son entretien d'évaluation et où, par ailleurs, un débat existait sur sa performance effectivement accomplie durant l'année.

Si Mme [X] excipe de la violation par la société de ses obligations en matière d'employabilité de ses salariés et d'obligation de recherche de reclassement dans le cadre d'un départ volontaire, il a déjà été constaté que ses changements de mission ont toujours relevé de son niveau de compétence et qu'elle a pu exprimer, lors de son évaluation 2013 ses besoins de formation.

S'agissant de son reclassement interne, dans le cadre du PDV, force est de constater qu'il lui a été proposé de nombreux postes qu'elle était parfaitement apte à exercer et que son absence de reclassement résulte de ses refus successifs jusqu'à ce que son inaptitude conduise à l'engagement de la procédure de licenciement.

Enfin, si Mme [X] reproche à son employeur d'avoir omis de l'informer de son classement en longue maladie par la CPAM dans un délai lui permettant d'exercer un recours, ce grief n'est pas de nature à fonder à lui seul la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur.

Elle sera déboutée de sa demande de résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur le licenciement

Si Mme [X] soutient que son inaptitude a pour origine les graves manquements de son employeur, il a été précédemment constaté qu'elle ne rapportait pas la preuve de ces manquements et ne caractérise nullement les conditions de travail 'anormales qu'elle subissait du fait de son supérieur hiérarchique'.

Sur l'obligation de reclassement

L'article L1226-2 modifié par l'article 102 V de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 est entré en vigueur le 1er janvier 2017, soit postérieurement à la déclaration d'inaptitude par le médecin du travail le 25 octobre 2016. Contrairement à ce que soutient Mme [X], la consultation des délégués du personnel n'était donc pas nécessaire.

L'article L1226-2 du code du travail, en sa version applicable à l'espèce, dispose :

« Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. »

Dans son avis du 25 octobre 2016 le médecin du travail a conclu à une inaptitude de Mme [X] à son poste, mais l'avis a précisé que la salariée pourrait occuper un emploi dans un environnement différent, notamment dans un autre contexte relationnel et organisationnel.

Il appartient à l'employeur d'établir qu'il a procédé à une recherche sérieuse de reclassement du salarié déclaré inapte.

Mme [X] fait observer qu'Uniper France, dont les activités s'articulent autour de la production d'électricité, la fourniture d'électricité et de gaz et la fourniture de services énergétiques est la filiale française du groupe Uniper E.ON, dont le siège social est en Allemagne, la filiale employant 573 personnes en France et le groupe, présent dans 40 pays, comptant 14.000 salariés.

Si l'entreprise appartient à un groupe, le reclassement du salarié déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment doit être recherché à l'intérieur du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

Il résulte des pièces produites que l'employeur a engagé ses recherches sur le territoire français dès le 25 octobre 2016.

Par lettre du 23 novembre 2016, il a adressé à Mme [X] un courrier l'informant qu'il souhaitait étendre ses recherches à l'ensemble du groupe Uniper à l'étranger. Mme [X] a retourné le 2 décembre 2016 un questionnaire précisant qu'elle acceptait des postes en Belgique et en Allemagne, sous condition de maintien de son niveau de vie, sans baisse de salaire et dans un lieu disposant d'écoles et d'un aéroport.

Dans la convocation à l'entretien préalable du 3 janvier 2017, l'employeur a informé Mme [X] que les recherches entreprises au sein de l'entreprise et du groupe, tant en France qu'en Allemagne et en Belgique n'ont pas abouti. Il lui a apporté des précisions sur les lieux prospectés en France dans la lettre de licenciement, en précisant que seuls des postes d'exploitation étaient disponibles, ne correspondant pas à son haut niveau de qualification et d'expérience dans les ressources humaines.

Pour justifier des diligences accomplies en vue du reclassement, il verse aux débats :

- 3 mails envoyés le 25 octobre 2016 à des unités de la société en France ( centrale thermique de Provence, centrale Emile Huchet et Société Uniper France Energy solutions),intitulés 'démarche de reclassement de Mme [H] [X]', particulièrement synthétique quant aux compétences et au parcours de l'intéressée et se contentant d'une personnalisation minimale.

- 2 mails envoyés le 7 décembre 2016, l'un au directeur Bénélux d'Uniper energy, l'autre au responsable des ressources humaines d'Uniper energy en Allemagne formalisant la démarche de reclassement à l'étranger, tout aussi synthétiques que les mails nationaux et ne transmettant même pas en pièce jointe le cv en langue anglaise pourtant demandé à Mme [X].

Des réponses négatives ont été faites à ces sollicitations.

Outre que le sérieux des démarches accomplies en vue du reclassement de la salariée est insuffisamment caractérisé par la production de ces cinq mails compte tenu de la taille du groupe, Mme [X] verse aux débats deux offres de poste en recrutement au sein du groupe E.ON en Allemagne (HR Business Partner et global mobility service coordinator) qui auraient pu correspondre à son niveau de compétence et d'expérience.

L'employeur soutient que ces offres n'avaient pas lieu de lui être transmises, en faisant valoir qu'au moment du reclassement la société Uniper ne faisait plus partie du groupe E.ON depuis plusieurs mois et produit pour en justifier un article publié sur Internet dont il résulte que le groupe E.ON, pour recentrer ses activités autour des énergies renouvelables, des réseaux et des services, a réuni ses activités conventionnelles d'électricité, de négoce d'énergie et d'exploration dans une société distincte, Uniper.

La cour observe cependant que cette scission des activités ne suffit nullement à exclure l'existence d'un groupe au sein duquel les recherches de reclassement auraient dues être effectuées, d'autant qu'en l'espèce, la référence à E.ON figurait encore dans la signature de Mme [Z] [O], senior vice president HR Uniper energy à laquelle M. [Z] a adressé le 7 décembre 2016 un mail aux fins de prospection d'un poste de reclassement en Allemagne, établissant que les deux entités avaient leur siège social au même endroit ( E.ON Platz).

L'employeur n'établit pas ainsi avoir procédé à une recherche loyale et complète et avoir satisfait à son obligation de reclassement .

Le licenciement prononcé en méconnaissance de l'obligation de reclassement est sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur les demandes financières subséquentes

Sur l'indemnité de préavis

Si un salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité d'exécuter en raison de son inaptitude physique à son emploi, cette indemnité est due en cas de rupture du contrat de travail imputable à l'employeur en raison du manquement à son obligation de reclassement.

Dans un contexte où Mme [X] était en arrêt de travail depuis le mois de janvier 2015, c'est à juste titre qu'elle se réfère au salaire brut de l'année 2014 où elle travaillait effectivement, soit 7.304€, pour évaluer le montant de l'indemnité qui lui est due.

La durée du préavis fixée au contrat étant de trois mois, son employeur sera condamné à lui verser une somme de 21.912 euros, outre 2.191€ au titre des congés payés afférents.

Sur l'indemnité légale de licenciement

Le conseil de prud'hommes avait pris acte de l'accord de l'employeur pour verser un complément d'indemnité de licenciement à hauteur de 419,48€.

Mme [X] demande l'allocation de cette somme en complément d'indemnité.

L'employeur ne propose plus aucun complément dans ses dernières écritures, en évaluant à la somme de 7.980,12€ l'indemnité de licenciement, sur la base de 6 ans d'ancienneté et d'un salaire de référence des douze derniers mois, soit de l'année 2016.

Mme [X] est cependant fondée à faire sa demande sur la base d'un salaire de référence de 7.304€ calculé sur la base de la moyenne des douze derniers mois de travail effectif, quand bien même elle la forme sur la base d'une ancienneté de 5 ans et 9 mois.

Il sera fait donc droit à sa demande de confirmation du jugement du conseil de prud'hommes qui lui a alloué une somme de 419,48€ de complément d'indemnité.

Sur l'indemnité pour absence de cause réelle et sérieuse

Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail en sa version applicable à l'espèce, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Mme [X] demande une somme de 109.560€ à ce titre représentant 15 mois de salaire.

Etant rappelé que le manquement de l'employeur résulte exclusivement de l'inobservation de son obligation de reclassement, elle ne peut fonder sa demande sur la réparation d'un préjudice lié à la dégradation de son état psychologique et à son long arrêt de travail subséquent, dès lors qu'elle n'a pas rapporté la preuve qu'ils soient issus de prétendus manquements de l'employeur durant la relation contractuelle.

Elle ne peut davantage arguer d'une perte de chance de 80% liée à l'impossibilité dans laquelle elle se serait trouvée, du fait de l'employeur, de souscrire à un PDV, alors qu'il est établi qu'elle a été invité à y souscrire à plusieurs reprises.

Compte tenu de l'âge de Mme [X], de son ancienneté et des circonstances de l'espèce, La société Uniper France Power sera condamné à lui verser une somme de 44.000€.

Sur le remboursement au Pôle Emploi :

En application de l'article L.1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner à l'employeur fautif le remboursement au Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Mme [X], du jour de son licenciement au jour du prononcé du jugement dans la limite de six mois des indemnités versées.

Sur le préjudice distinct

Mme [X] ne justifie pas que la détérioration de son état de santé et son inaptitude physique soient imputables à un comportement fautif de son employeur et ne justifie d'aucun autre préjudice distinct de celui lié à son licenciement que le fait d'avoir perdu son droit à recours contre son placement en longue maladie.

Sur ce dernier point, il est constant que Mme [X] a été placée position de longue maladie à compter du 23 janvier 2015, par décision du médecin conseil en date du 16 août 2016, cette décision ayant été adressée à l'employeur par courrier daté du même jour, en l'invitant, au visa de l'article 22 du statut national du personnel des IEG, à notifier à l'agent cette décision médicale et à lui indiquer les voies de recours.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 septembre reçue le 24 septembre 2016, l'employeur l'a notifiée à Mme [X], en lui indiquant qu'elle avait "un mois à compter de la date de la décision contestée" pour saisir le service de contrôle médical placé auprès de la CPAM de son lieu de résidence d'une demande d'expertise, au visa de l'article R141-2 du code de la sécurité sociale.

Si l'employeur fait valoir qu'une partie des délais ne lui est pas imputable, dès lors que le rapport signé par le médecin conseil le 16 août 2016, ne lui aurait été adressé que le 30 août, il n'en justifie pas. En tout état de cause, par son manque de diligence, il a adressé son courrier après expiration du délai d'un mois qu'il indiquait lui-même être celui imparti pour faire un recours.

Pour autant, Mme [X] ne justifie d'aucun préjudice, dès lors qu'un délai pour contester une telle décision ne commence à courir qu'à compter de sa notification régulière.

Elle sera dès lors déboutée de sa demande.

Sur les rappels de salaire

Au titre de la prime sur objectifs

Le conseil de prud'hommes a 'pris acte' de l'accord de l'employeur pour verser une prime sur objectif de 4.738,29€, outre les congés payés afférents.

Il résulte de l'article 2 du contrat de travail de Mme [X] qu'à sa rémunération fixe s'ajoute 'une prime annuelle sur objectifs fixés, correspondant à 11,11% de la rémunération brute annuelle si les conditions d'attribution déterminées parla Direction ont été remplies à 100% en fonction de la réalisation d'objectifs définis en commun accord entre le salarié et son supérieur hiérarchique'.

Ses objectifs 2014 lui ont été fixés lors de l'entretien annuel qu'elle a émargé le15 mars 2014, avec des pourcentages détaillés pour chacun d'eux.

L'employeur justifie par les pièces qu'il verse aux débats de la juste évaluation du degré d'atteinte de ses objectifs à 55%.

Sa rémunération brute annuelle 2014 étant de 87.654,81€, il convient de fixer à la somme de 5.356,14€ la somme qui sera allouée à Mme [X] à ce titre, outre 535,61€ au titre des congés payés afférents .

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef

Au titre d'heures supplémentaires

La durée légale du travail effectif prévue à l'article L. 3121-10 du code du travail, soit 35 heures par semaine civile, constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l'article L. 3121-22 du même code alors applicable, soit 25% pour chacune des huit premières heures supplémentaires, les heures suivantes donnant lieu à une majoration de 50 %.

En application de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

Mme [X] demande l'allocation d'une somme de 56.655,91 euros, outre 5.665,59 euros au titre de congés payés afférents pour des heures supplémentaires qu'elle aurait réalisées entre le 21 avril 2011 et le 22 janvier 2015.

Il n'est pas discuté que la convention de forfait de 218 jours figurant au contrat de travail initial de Mme [X] est illicite, en l'absence d'accord de branche ou d'entreprise.

Elle est dès lors soumise à une durée légale de 35 heures.

Pour établir sa créance, elle verse au débat un tableau récapitulatif faisant mention d'horaires de travail journaliers depuis le 21 avril 2011 jusqu'au 20 janvier 2015 ainsi que des mails.

Il en résulte une journée type avec des horaires de travail de 9H40 à 12H00, 45 minutes de pause puis reprise de 12H45 à 18H13.

Certains jours font apparaître des débuts plus matinaux ou des fins plus tardives.

Pour la période du 21 avril 2011 au 31 juillet 2012, elle soutient avoir été soumise à un horaire effectif de 39H, avec attribution en compensation de jours de RTT et fait état de 657,46 heures supplémentaires.

Pour la période du 1er août 2012 au 30 juin 2014, suite au transfert de son contrat de travail à E.ON France Management, il n'est pas discuté qu'elle n'a pas davantage été soumise à une convention de forfait jours.

Elle fait état d'un horaire effectif de 39H par semaine et de nombreux dépassements aboutissant à un total de 285 heures supplémentaires.

Pour la période du 1er juillet 2014 au 23 janvier 2015, suite au transfert de son contrat à la SNET, elle évalue le dépassement de son temps de travail à 94,18 heures supplémentaires.

Elle fournit ainsi des éléments préalables précis sur son rythme de travail qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande.

Son employeur observe qu'étant cadre, Mme [X] n'était nullement astreinte aux horaires de travail dont elle fait état, étant au contraire libre d'organiser son temps et qu'elle bénéficiait de RTT pour compenser les heures hebdomadaires comprises entre 35 et 39 heures.

Il verse par ailleurs aux débats plusieurs attestations circonstanciées d'anciens collègues dont il résulte qu'elle n'arrivait généralement pas avant 10h et ne partait qu'exceptionnellement après 18H.

En l'absence du moindre témoignage contredisant ces affirmations, la preuve des horaires dont elle fait état dans son tableau récapitulatif n'est donc pas rapportée. Cependant, il résulte de l'examen des pièces qu'elle produit aux débats qu'elle a travaillé à de nombreuses reprises avant 9H et entre 18H et 20 H, ainsi qu'il résulte des heures auxquelles elle a envoyés certains mails, mais aussi des réunions auxquelles elle a participé, dont certaines commençaient à 9H ou 9H30 et d'autres s'achevaient à 18H30 ou 19H30.

De façon plus anecdotique, elle a pu envoyer des mails après 20H et 21H, et très exceptionnellement après 22H. Tout aussi exceptionnellement, elle a pu envoyer quelques mails le week-end, dont la lecture ne révèle au demeurant ni un impératif, ni d'une demande de son supérieur hiérarchique. Ainsi, l'envoi le samedi 11 août 2012 à 0h50 d'un compte-rendu de réunion du vendredi 10 août ne révélant rien d'urgent ou l'acceptation, le dimanche 23 septembre 2012 à 0H27, d'une réunion qu'elle organise elle-même.

Ainsi, si l'accomplissement d'heures supplémentaires est certain, il est très notablement moindre que le nombre revendiqué.

Au regard des éléments produits de part et d'autre, la cour retient la réalisation de 214 heures supplémentaires pour l'ensemble de la période considérée.

Selon l'article L. 3121-22 du code du travail, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.

L'article 16 du statut national du personnel des industries électriques et gazières applicable au contrat de travail de Mme [X] pour la période du 1er juillet 2014 au 23 janvier 2015 dispose en outre que les heures supplémentaires sont majorées de 50% en heures de jour de semaine, de 75% en heures de jour les dimanches et jours fériés, de 100% en heures de nuit de semaine et de 125% en heures de nuit les dimanches et jours fériés.

Compte tenu des pièces produites et des développements qui précèdent, il est alloué à Mme [X] les sommes de 10.693,59 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires et 1.069,35 euros au titre des congés payés afférents.

Le jugement déféré est donc infirmé en son rejet de ce chef.

Sur le travail dissimulé

Le travail dissimulé tel que défini à l'article L8221-5 du code du travail suppose que soit rapportée la preuve que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

En l'espèce, bien que des heures supplémentaires aient été retenues en faveur de Mme [X] et que ces heures n'aient pas été mentionnées sur les bulletins de paie de l'intéressée, il n'est pas démontré que son employeur avait l'intention de contourner les règles applicables ni de dissimuler l'emploi de son salarié.

Le jugement déféré est donc confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes

Sur la remise des bulletins de paie

La remise de bulletins de paie et de fin de contrat rectifiés sera ordonnée dans le délai d'un mois suivant la signification de la décision.

Sur les intérêts

Conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales sont assorties d'intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes soit le 17 novembre 2015, et les dommages et intérêts alloués à compter de la présente décision.

Sur les frais irrépétibles

La société Uniper France Power qui succombe sera condamné aux dépens de l'instance et conservera la charge de ses frais irrépétibles.

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Mme [X] qui se verra allouer la somme de 3.000 euros à ce titre

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme [X] de sa demande de résiliation judiciaire, de ses demandes indemnitaires au titre du travail dissimulé et au titre du préjudice distinct et lui a alloué à titre de complément d'indemnité légale de licenciement une somme de 419,48€ ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de Mme [X] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Uniper France Power SAS à payer à Mme [X] :

- 21.912 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 2.191,20 euros au titre des congés payés afférents,

- 44.000 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 5.356,14 euros au titre de rappels de salaires sur objectif 2014 et 535,61 euros au titre des congés payés afférents,

- 10.693,59 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires et 1.69,35 euros au titre des congés payés afférents,

Dit que les créances salariales sont assorties d'intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2015 et les dommages et intérêts alloués à compter de la présente décision ;

Ordonne la remise de bulletins de paie et de fin de contrat rectifiés dans le délai d'un mois;

Ordonne à la société Uniper France Power SAS de rembourser au Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Mme [X], du jour de son licenciement au jour du prononcé du jugement dans la limite de six mois des indemnités versées ;

Y ajoutant,

Condamne la société Uniper France Power SAS aux dépens ;

Condamne la société Uniper France Power SAS à payer à M. [Y] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société Uniper France Power SAS de sa demande présentée au titre des frais irrépétibles.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 17/06768
Date de la décision : 20/03/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°17/06768 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-20;17.06768 ?
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