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14/03/2019 | FRANCE | N°18/02639

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 14 mars 2019, 18/02639


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRÊT DU 14 MARS 2019



AUDIENCE SOLENNELLE



(n° 122 , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02639 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B46XU



Décision déférée à la Cour : Décision du 06 Novembre 2017 -Conseil de l'ordre des avocats de PARIS



DEMANDERESSE AU RECOURS



Madame [L] [L]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Comparante



Assistée de Me Jean-Louis LE JOUAN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : NAN 338



DÉFENDEUR AU RECOURS



LE CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DE PARIS

[A...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRÊT DU 14 MARS 2019

AUDIENCE SOLENNELLE

(n° 122 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02639 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B46XU

Décision déférée à la Cour : Décision du 06 Novembre 2017 -Conseil de l'ordre des avocats de PARIS

DEMANDERESSE AU RECOURS

Madame [L] [L]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Comparante

Assistée de Me Jean-Louis LE JOUAN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : NAN 338

DÉFENDEUR AU RECOURS

LE CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DE PARIS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté et plaidant par Me Hervé ROBERT de la SCP Hervé ROBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0277

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 Janvier 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

- M. Christian HOURS, Président de chambre

- Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

- Madame Anne de LACAUSSADE, Conseillère

- Monsieur Gilles GUIGUESSON, Conseiller

- M. Frédéric ARBELLOT, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

MINISTERE PUBLIC :

L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur Michel LERNOUT, Premier Avocat Général, qui a fait connaître son avis et qui n'a pas déposé de conclusions écrites antérieures à l'audience.

Par ordonnance en date du 14 Décembre 2018, le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Paris a été invité à présenter ses observations.

Le Conseil de l'Ordre a déposé des écritures préalablement à l'audience qui ont été communiquées à Madame [L] [L].

DÉBATS : à l'audience tenue le 24 Janvier 2019, on été entendus :

- Madame de LACAUSSADE, en son rapport

- Maître LE JOUAN,

- Madame [L],

- Maître ROBERT,

en leurs observations,

- Maître LE JOUAN a eu la parole en dernier.

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Christian HOURS, Président de chambre et par Lydie SUEUR, Greffière présent lors du prononcé.

* * *

Mme [L] [L], de nationalité française, née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1], est titulaire d'un master juriste de droit social délivré en 2014.

Par arrêté du 06 novembre 2017, la formation administrative du conseil de l'ordre des avocats du barreau de Paris a rejeté sa demande d'inscription au barreau de Paris formée sur le fondement de l'article 98-5 °du décret du 27 novembre 1991, après avoir relevé qu'elle ne justifiait pas d'un travail à temps plein au bénéfice d'un syndicat en qualité de juriste.

Les 06 et 08 décembre 2017, Mme [L] a formé un recours contre cette décision.

Dans ses conclusions déposées et soutenues à l'audience, elle sollicite l'infirmation de la décision, de voir juger que les conditions du décret 91-1197 du 27 novembre1991 pris en son article 98-5° sont remplies et juger en conséquence qu'elle pourra être inscrite au barreau de Paris en application dudit décret.

Le conseil de l'ordre dans ses écritures déposées et soutenues à l'audience, a sollicité la confirmation de la décision et le rejet de la demande d'inscription.

Le parquet général n'a pas présenté d'observations, pas plus que le bâtonnier de l'ordre des avocats, invité à le faire.

SUR CE,

Mme [L] indique remplir le critère d'appartenance à une organisation syndicale, exposant avoir été déléguée syndicale et déléguée syndicale centrale et donc désignée par une organisation syndicale représentative pour représenter le syndicat au sein de la société Sopra Stéria depuis 2004. Elle ajoute être déléguée du personnel et donc élue en qualité de représentante Fieci-Snepssi, syndicat affilié à la Cfe-Cgc depuis son adhésion en 2003, l'ensemble de ces mandats étant exercé dans le cadre d'une organisation syndicale et se complétant.

Elle estime qu'il n'est pas exigé que l'activité de juriste attachée à une organisation syndicale soit exercée à titre exclusif, mais à temps complet et de façon continue. Elle précise que son parcours syndical s'exerçait à 100 % dans l'entreprise jusqu'en 2008 et à compter de cette date, à mi-temps en externe et à mi-temps en interne. Elle expose que la mention d'ingénieur portée sur ses bulletins de paie ne suffit pas à qualifier la fonction réellement exercée dans l'entreprise alors qu'il est nécessaire d'examiner les conditions réelles du travail. Elle observe que ces mêmes bulletins mentionnent une activité en forfait jours ce qui signifie qu'elle n'est soumise à aucun horaire collectif et bénéficie d'une réelle autonomie. Elle indique avoir bénéficié de toutes ses heures de délégation qui, pris en cumul, représentent plus de 151,67 h de pratique juridique, soulignant que l'activité juridique d'une société cotée en bourse de 40 000 salariés dans le monde dont 50 % en France, est considérable.

Elle fait état d'un cumul d'activités juridiques tant au sein de l'entreprise qu'au profit de l'organisation syndicale à laquelle elle appartient. Elle précise avoir été chargée au sein de l'entreprise, des contentieux collectifs et individuels, avoir participé à la rédaction des assignations, rédigé des protocoles transactionnels, traité des dossiers prud'homaux, tenu un rôle d'information juridique auprès des adhérents, été en lien avec les avocats. Elle expose avoir, pour l'organisation syndicale, exercé une fonction juridique bénévole, l'avoir représentée auprès du comité d'entreprise européen de l'entreprise, avoir tenu des permanences juridiques, été chargée de l'étude du document unique, des risques psychosociaux, du contentieux des élections professionnelles, avoir participé à la commission paritaire de validation des accords d'entreprise.

Mme [L] indique justifier également du contrôle d'un professeur de droit et de deux avocats sur son travail relatif au contentieux devant les juridictions.

Le conseil de l'ordre indique qu'une première demande de Mme [L] déposée en 2015 avait donné lieu à un avis défavorable de la commission de l'exercice, au motif qu'elle ne justifiait pas d'un travail juridique à temps complet.

Rappelant que les textes dérogatoires à l'accès à une profession juridique réglementée sont d'interprétation stricte, le conseil de l'ordre indique que Mme [L] n'établit pas avoir été attachée pendant huit ans au moins de façon permanente et continue et à temps complet à l'activité juridique d'une organisation syndicale. Il expose que l'attachement à l'organisation syndicale doit être exclusif alors que l'entreprise fait état d'une occupation au titre de ses mandats à plus de 70 % selon les périodes et d'une activité d'ingénieur à temps complet. Il conclut que l'exercice d'une autre activité concomitamment aux mandats syndicaux exclut le temps complet exigé par les textes et la jurisprudence. Il ajoute que le curriculum vitae de Mme [L] établit par lui-même que ses fonctions de juriste n'étaient ni continues, ni à plein temps, ni exclusives, étant ajouté que les fonctions d'assesseur de tribunal ou de conseiller du salarié ne sont pas considérées comme des missions exécutées au service d'une organisation syndicale.

L'article 98-5°du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 dispose que 'sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat :

- les juristes attachés pendant huit ans au moins à l'activité juridique d'une organisation syndicale.

Les personnes mentionnées aux 3°, 4°, 5°, 6° et 8° peuvent avoir exercé leurs activités dans plusieurs des fonctions visées dans ces dispositions dès lors que la durée totale de ces activités est au moins égale à huit ans.'

Les textes dérogatoires à l'accès à une profession juridique réglementée sont d'interprétation stricte et il appartient à Mme [L] d'établir qu'elle a été attachée de manière exclusive, pendant huit ans au moins, de façon permanente et continue, à temps complet à l'activité juridique d'une organisation syndicale.

En l'espèce, si Mme [L] possède les diplômes requis, ses mérites n'étant pas ailleurs pas discutés et si l'organisation syndicale dont elle se prévaut permet l'application du texte susvisé, force est de constater qu'elle ne remplit pas la condition précédemment rappelée.

En effet, si le président du syndicat FIECI atteste le 27 septembre 2017 que Mme [L] intervient depuis 2005 comme soutien juridique pour la section syndicale Steria mais aussi pour la fédération, ses compétences juridiques ayant permis de lui attribuer diverses fonctions de haut niveau, en reconnaissance desquelles elle a été élue déléguée nationale, le directeur des ressources humaines de la société Steria qui l'emploie, Mme [B], aux termes d'un écrit non daté, précise, en citant les missions précédemment décrites par le syndicat, que le parcours syndical de Mme [L] s'est réalisé à 100 % dans l'entreprise jusqu'en 2008 et, depuis 2009, à mi-temps dans l'entreprise et mi-temps hors de l'entreprise. Dans un second écrit, elle précise encore que 'soumise dans le cadre de l'exécution de ses fonctions professionnelles à un forfait-jours, [elle] a exercé les mandats électifs et désignatifs dont elle était investie en totale liberté et autonomie ... L'importance des mandats qui lui étaient conférés [depuis 2003] occupait une partie substantielle de son temps de travail allant jusqu'à plus de 70 % selon les périodes'.

Il est établi au dossier que Mme [L] occupe, selon les bulletins de salaire qu'elle verse aux débats, un poste d'ingénieur principal à temps complet au sein de l'entreprise de conseils et de services informatiques Steria et son curriculum vitae fait ressortir sur les années considérées, des activités effectives pour l'entreprise, notamment d'auditeur opérations qualité et environnement et de directeur relation client.

Il résulte de ce qui précède que Mme [L], qui ne satisfait pas à l'ensemble des conditions posées, ne peut voir sa demande d'inscription accueillie, de sorte que l'arrêté du 06 novembre 2017 du conseil de l'ordre des avocats, sera confirmé.

Les dépens d'appel doivent être supportés par Mme [L].

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme l'arrêté du 06 novembre 2017 du conseil de l'ordre des avocats du barreau de Paris en toutes ses dispositions ;

Dit que Mme [L] [L] devra supporter les dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 18/02639
Date de la décision : 14/03/2019

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°18/02639 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-14;18.02639 ?
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