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14/03/2019 | FRANCE | N°17/05462

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 14 mars 2019, 17/05462


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 14 MARS 2019



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/05462 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3C2D



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mars 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SENS (89100) - RG n° F15/00281





APPELANT



Monsieur [Q] [C]

[Adresse 1]

[Adresse 1]





Représenté par Me Morgan JAMET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0739

Plaidée par Me Chaouki GADDADA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0739





INTIMEE



SARL ALI...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 14 MARS 2019

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/05462 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3C2D

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mars 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SENS (89100) - RG n° F15/00281

APPELANT

Monsieur [Q] [C]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Morgan JAMET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0739

Plaidée par Me Chaouki GADDADA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0739

INTIMEE

SARL ALINE TAXIS SARRUBBA

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Carole DURIF, avocat au barreau de SENS

Plaidée par Me Florian GRIGIS, avocat au barreau d'AUXERRE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. François MELIN, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, président

Monsieur François MELIN, conseiller

Madame Berengère DOLBEAU, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Claudia CHRISTOPHE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Brigitte DELAPIERREGROSSE et par Claudia CHRISTOPHE, greffière de la mise à disposition, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire

FAITS ET PROCÉDURE

M. [C] a été engagé le 2 novembre 2011, par un contrat de travail à durée indéterminée et à temps complet, en qualité de chauffeur de taxi par Madame [B] [Z] qui exerçait en nom propre.

Le contrat de travail a ensuite été repris par la société Aline Taxis Sarruba, suite à sa création par Madame [Z].

Par un courrier du 7 mars 2016, la société Aline Taxis Sarruba a notifié à M. [C] un licenciement pour faute grave.

Par un jugement du 30 mars 2017, le conseil de prud'hommes de Sens a :

1) Requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

2) Condamné la société Aline Taxis Sarruba venant aux droits de Madame [B] [Z] à payer à M. [C] les sommes de

493,92 € brut au titre des heures supplémentaires,

294,80 € à titre de rappel d'indemnités de repas,

1656,23 € au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

3 822,08 € (brut) au titre du préavis

382,20 € brut) à titre de congés payés y afférents,

800,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

3) Débouté M. [C] du surplus de ses demandes,

4) Débouté la société Aline Taxis Sarruba de ses demandes reconventionnelles,

5) Ordonné l'exécution provisoire,

6) Condamné la société Aline Taxis Sarruba aux éventuels dépens de l'instance.

M. [C] a formé un appel le 6 avril 2017.

L'affaire a été appelée à l'audience du 30 janvier 2019, au cours de laquelle la société Aline Taxis Sarruba a indiqué se référer à ses conclusions et pièces signifiées le 1er septembre 2017 et non pas aux conclusions et pièces présentées le jour de l'audience.

Par des conclusions du 31 octobre 2017, M. [C] demande à la cour de :

1) confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Sens le 30 mars 2017 en ce qu'il a condamné la société Aline Taxis Sarruba, venant aux droits de Madame [Z], à payer à M. [C] les sommes suivantes :

- 1.656,23 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

- 3.822,08 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 382,20 euros à

titre de congés payés afférents ;

- 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

 2) infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [C] du surplus de ses demandes :

Statuant à nouveau

3) juger que le licenciement pour faute grave de M. [C] ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse ;

4) condamner la société Aline Taxis Sarruba à lui payer la somme de 11.466,24 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

5) condamner la société Aline Taxis Sarruba à payer M. [C] une somme de 18.756,67 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires au titre des années 2013, 2014 et 2015, outre les intérêts aux taux légal sur cette somme à compter de la mise en demeure du 25 août 2015 jusqu'à parfait paiement ;

6) condamner la société Aline Taxis Sarruba à payer à M. [C] une somme de 2.811,40 euros à titre de rappel d'indemnités de repas au titre des années 2013, 2014 et 2015, outre les intérêts au taux légal sur cette somme à compter de la mise en demeure du 25 août 2015 jusqu'à parfait paiement ;

7) condamner la société Aline Taxis Sarruba à payer à M. [C] une somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-paiement des heures supplémentaires ;

8) condamner la société Aline Taxis Sarruba à lui payer une somme de 3.000 euros du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

 9) débouter la société Aline Taxis Sarruba du surplus de ses demandes.

Concernant le licenciement, M. [C] indique que les griefs qui lui sont reprochés sont inconsistants, que l'oubli involontaire de remise d'une facture n'est pas une faute, qu'il n'est pas établi qu'il a évoqué avec des tiers le litige qui l'opposait à son employeur, qu'il n'est pas établi qu'il a dirigé des clients vers un concurrent, que les éléments produits par l'employeur quant à une prétendue conduite inadaptée et un manque de propreté du véhicule sont inexploitables, que l'allégation selon laquelle il aurait oublié un enfant n'est pas établie et est ancienne, que la preuve du fait qu'il n'aurait pas respecté les consignes d'accompagnement des élèves handicapés n'est pas non plus rapportée pas plus que celle tenant au défaut de surveillance d'un élève lors d'un achat de cigarettes, que l'employeur lui reproche à tort la démarche suivie pour demander la prise en charge d'un stage de formation et qui ne prouve pas que deux contrats de transport auraient été perdus en raison de son comportement.

L'appelant demande par ailleurs le paiement de rappel d'heures supplémentaires pour un montant de 18'756 67 €, en faisant valoir qu'il fournit un décompte de ces heures.

Il demande également le paiement d'indemnités de repas car il a été contraint à prendre certains repas à l'extérieur de son domicile compte tenu de ses contraintes professionnelles, sans pourtant que son employeur ne prenne en charge les frais avancés.

Par des conclusions du 1er septembre 2017, la société Aline Taxis Sarruba a demandé à la cour de :

1) Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Aline Taxis Sarruba à payer à M. [C] les sommes qu'elle reconnaissait lui devoir, à savoir : 

- 493, 92 € bruts au titre des heures supplémentaires, 

- 294,80 € à titre de rappel d'indemnités de repas.

2) Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [C] du surplus de ses prétentions au titre des chefs de demande précités et des dommages et intérêts afférents.

3) Infirmer le jugement entrepris pour le surplus, et statuant à nouveau, 

4) Dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [C] était fondé

5) Dire et juger que la société Aline Taxis Sarruba est fondée à solliciter le remboursement, par M. [C], des péages abusivement facturés par ce dernier à l'entreprise, 

6) Dire et juger que M. [C] est redevable à la société Aline Taxis Sarruba du coût annuel des frais kilométriques et d'entretien s'agissant de l'utilisation du véhicule en dehors de son service.

En conséquence, 

7) Débouter M. [C] de l'intégralité de ses demandes, fins, moyens et conclusions.

8) Dire et juger que M. [C] doit à la société Aline Taxis Sarruba, la somme de 564,40 €, au titre des péages qui n'auraient pas dû être facturés par ce dernier, à l'entreprise, se décomposant comme suit :

- pour l'année 2013 : 280,70 €, 

- pour l'année 2014 : 233,70 €, 

- pour l'année 2015 : 50 €.

 9) Dire et juger que M. [C] doit à la société Aline Taxis Sarruba, la somme de 9.116,91 €, au titre du coût annuel des frais kilométriques et entretien s'agissant de l'utilisation du véhicule en  dehors de son service, se décomposant comme suit :

- coût frais kilométriques 2013 : 3.699,57 €

- coût frais kilométriques 2014 : 3.749,34 €

- entretien véhicule 2013 : 556 €

- entretien véhicule 2014 : 556 €

- entretien véhicule 2015 : 556 €

10) Ordonner la compensation des créances respectives des parties.

11) Condamner M. [C] pour le surplus.

 12) Assortir la somme restant due par M. [C] à la société Aline Taxis Sarruba des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir.

13) Condamner M. [C] à la somme de 3.000,00 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

14) Le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

En premier lieu, l'employeur fait valoir que la demande de paiement d'heures supplémentaires repose sur un tableau qui ne fournit aucun détail et qui ne correspond pas à la réalité, qui est quant à elle établie par le décompte fourni en défense.

En deuxième, l'employeur soutient que la demande de paiement d'indemnités de repas n'est pas justifiée car d'une part, le salarié disposait d'une carte bleue au nom de l'entreprise pour payer ses frais, et car d'autre part le tableau récapitulatif fourni par le salarié comprend de nombreuses heures.

En troisième lieu, l'employeur indique que la demande de dommages-intérêts pour non-paiement des heures supplémentaires est infondée, dès lors que la demande de rappel d'heures supplémentaires est elle-même injustifiée.

En quatrième lieu, l'employeur soutient que le licenciement pour faute grave qu'il a notifié au salarié est parfaitement fondé en raison des différents griefs qui sont reprochés à celui-ci. L'employeur fait ainsi état de griefs tenant à l'absence de factures établies par le salarié, au comportement déloyal de celui-ci qui a évoqué avec des tiers le litige qui l'opposait à l'entreprise, au fait que le salarié a orienté un client vers une société concurrente, qu'il avait une conduite inadaptée et n'entretenait pas son véhicule, qu'il a oublié à différentes reprises un enfant qu'il devait pourtant prendre en charge, qu'il n'a pas respecté les consignes concernant la desserte d'une école primaire, qu'il n'a pas correctement surveillé un élève, qu'il n'a pas respecté les consignes concernant la prise en charge stage de formation et que l'entreprise a perdu différents contrats par sa faute.

En cinquième lieu, l'employeur demande la condamnation du salarié à lui rembourser des frais de péage injustifiés.

MOTIFS

1) Sur le licenciement :

La société a notifié à M. [C] un licenciement pour faute grave par un courrier du 7 mars 2016, en faisant état de différents griefs qu'il y a lieu d'examiner afin de déterminer si le licenciement est ou non fondé. Il y a lieu, au préalable, de rappeler que la faute grave est celle qui rend le maintien du salarié impossible dans l'entreprise et que la charge de la preuve de la faute grave pèse sur l'employeur.

Certains de ces griefs ne peuvent pas justifier un licenciement, même appréciés au regard des autres griefs :

le courrier indique que le 8 janvier 2016, M. [C] a transporté une personne pour un montant de 89,70 euros, sans toutefois lui remettre une facture. Ce grief ne peut pas justifier un licenciement, compte tenu de son absence de conséquence alléguée et car il n'est pas établi que M. [C] a volontairement omis d'établir la facture.

le courrier de licenciement fait grief à M. [C] d'avoir, au cours de mois décembre 2015, évoqué ses problèmes rencontrés avec son employeur avec une autre personne. Pour établir ce grief, l'employeur se borne à fournir un courrier de cette personne qui n'est pas daté précisément mais qui a été établi au cours du mois décembre 2015, courrier qui indique simplement que M. [C] a discuté de ses problèmes et que cette discussion était de bon aloi. Il sera retenu que ce grief, qui n'a pas été envisagé par le conseil, ne peut pas être retenu car le courrier est peu précis et car les faits ne sont pas datés.

le courrier de licenciement reproche à M. [C] d'avoir orienté un client qui souhaitait prendre un taxi vers une société concurrente au cours du mois de janvier 2016. La gérante de cette société concurrente a relaté ce fait dans un courrier du 23 janvier 2016, en indiquant que ceci avait eu lieu au début du mois de janvier 2016. Si la réalité des faits peut être tenue pour acquise, le grief ne sera pas retenu dès lors que les circonstances ne sont pas précisément connues.

le courrier licenciement fait grief à M. [C] d'avoir, à différentes reprises (les 5, 6, 8, 11, 13, 19 et 20 janvier 2016), déposé des élèves handicapés devant leur école, sans les accompagner jusqu'à l'entrée de l'établissement et sans les confier à un adulte préalablement identifié appartenant à celui-ci, ainsi que l'exige la convention de transport signée par la sociétés et le département du Loiret le 5 septembre 2015 (pièce numéro 43). La société produit une attestation d'une mère d'enfant, datée du 23 mars 2016 qui indique que M. [C] a laissé les enfants sans surveillance. Toutefois cette attestation est imprécise et ne fournit pas les dates des faits allégués.

le courrier de licenciement fait grief à M. [C] de ne pas avoir respecté les consignes concernant la prise en charge d'un stage de formation puisque M. [C] aurait effectué un stage de formation les 14 et 15 décembre 2015 sans en aviser préalablement son employeur mais en lui adressant par la suite la facture du stage en vue d'un remboursement. Si M. [C] ne conteste pas cette présentation des faits, il ne saurait toutefois être considéré que le grief peut justifier le licenciement.

le courrier fait grief à M. [C] d'être à l'origine de pertes de contrats en raison du fait que soit M. [C] ne passait pas prendre les clients soit il passait en retard. Ce grief ne sera toutefois pas retenu car l'attestation produite à son soutien (pièce n° 40) fait état de faits anciens et peu précisément décrits.

D'autres griefs sont en revanche des manquements avérés de M. [C] :

le courrier de licenciement fait grief à M. [C] d'avoir évoqué avec un client ses problèmes avec son employeur et la possibilité d'un litige prud'homal, ce qui constitue un comportement déloyal. L'employeur ne fournit pas une attestation de ce client afin d'établir la réalité du grief mais produit un courrier du 7 janvier 2016 que lui a adressé une autre salariée, qui relate avoir transporté le client considéré le 7 janvier 2016 et qui indique que ce client lui a dit avoir été transporté par M. [C] et avoir appris à cette occasion que ce dernier avait des difficultés avec son employeur. Au regard de ce courrier, un manquement à son obligation de loyauté peut être imputé à M. [C], sans être constitutif d'une faute grave.

le courrier de licenciement indique que des clients transportés par M. [C] se sont plaints de son comportement, de sa conduite et de la saleté du véhicule. La société fournit sur ce point des attestations (pièces 26,28 et 29) corroborant ce grief, qui peut être retenu, sans être constitutif d'une faute grave.

le courrier licenciement reproche à M. [C] d'avoir oublié d'aller chercher un enfant qui devait se rendre dans un centre médico-psychologique. La société produit un courrier du père de cet enfant (pièce numéro 36), daté du 2 janvier 2016, indiquant que M. [C] a oublié son enfant à trois reprises durant l'année scolaire 2014/2015. Il est vrai que les faits rapportés ne sont pas récents. Toutefois le courrier date du 2 janvier 2016, de sorte qu'il y a lieu de considérer que c'est à compter de cette date que la société Aline Taxis Sarruba a eu connaissance des faits, en l'absence de tout élément du dossier conduisant à retenir que cette connaissance était antérieure au courrier. En conséquence, il y a lieu de considérer que ces faits sont établis, qu'ils ne sont pas prescrits mais qu'ils ne constituent pas des fautes graves, en l'absence de conséquences avérés du manquement de M. [C].

le courrier licenciement fait grief à M. [C] d'avoir, alors qu'il transportait un enfant, laissé celui-ci dans le véhicule seul et sans surveillance pour aller acheter des cigarettes. La société produit une attestation du père de l'enfant datée du 27 janvier 2016 qui relate les faits en les situant le 19 janvier 2016 (pièce numéro 38). Aucun élément du dossier ne permettant de douter de la sincérité de cette attestation, le grief sera tenu pour établi, sans que la qualification de faute grave ne soit retenue.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu que le licenciement litigieux repose non pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné la société Aline Taxis Sarruba à payer à M. [C] les sommes suivantes :

1656,23 € au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

3 822,08 € (brut) au titre du préavis

382,20 € brut) à titre de congés payés y afférents,

800,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

2) Sur les heures supplémentaires :

M. [C] demande la condamnation de la société Aline Taxis Sarruba à payer une somme de 18 756, 67 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires au titre des années 2013, 2014 et 2015, outre les intérêts aux taux légal sur cette somme à compter de la mise en demeure du 25 août 2015 jusqu'à parfait paiement. Il demande par ailleurs une somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-paiement des heures supplémentaires.

Le conseil de prud'hommes a alloué à M. [C] la somme de 493, 92 euros et l'a débouté pour le surplus.

Il sera donc rappelé que l'article L 3171-4 du Code du travail dispose qu'« en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ». En application de ce texte, il y a lieu de considérer que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties mais qu'il appartient cependant au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Il est ainsi nécessaire d'examiner les éléments produits par le salarié.

M. [C] fournit un document, établi par ses soins, constitué d'un tableau pour chacune des années concernées (pièce demandeur n° 11). Chaque tableau indique pour chaque semaine le nombre d'heures supplémentaires travaillées selon M. [C], en distinguant les heures majorées de 25 % et celles majorées de 50 %.

Ce document est particulièrement imprécis puisqu'il fournit un total d'heures supplémentaires pour chaque semaine uniquement mais ne fournit pas un décompte jour par jour, en mentionnant des dates précises et des horaires.

Dès lors, il sera retenu que M. [C] ne fournit pas d'éléments de nature à étayer sa demande, au sens des principes qui viennent d'être énoncés.

La société reconnaissant toutefois devoir la somme de 493, 92 euros au titre des heures supplémentaires, le jugement sera confirmé.

3) Sur la demande d'indemnité de repas :

M. [C] demande la condamnation de la société Aline Taxis Sarruba au paiement d'une somme de 2 811,40 euros à titre de rappel d'indemnités de repas au titre des années 2013, 2014 et 2015, outre les intérêts au taux légal sur cette somme à compter de la mise en demeure du 25 août 2015 jusqu'à parfait paiement.

Le conseil de prud'hommes a partiellement fait droit à cette demande, en allouant à M. [C] la somme de 294, 80 euros à titre de rappel d'indemnités de repas.

Devant la cour, M. [C] fournit, pour chaque année, la liste des jours pour lesquels il demande le paiement de cette prime (pièce demandeur n° 12). La société ne conteste pas le principe de l'indemnité de repas mais fournit un décompte des sommes dues selon elle (pièce intimée n° 10), en considérant que ces sommes sont celles allouées par le jugement.

Au regard de ces éléments, il sera retenu qu'il appartenait à l'employeur de fournir à la cour la liste des jours travaillés par M. [C] au cours de la période, son amplitude horaire permettant d'apprécier si la prise d'un repas était nécessaire sur le temps de travail et de fournir la liste des jours au titre desquels l'indemnité aurait déjà été allouée alors que les bulletins de paie ne mentionnent pas cette indemnité.

Faute de l'avoir fait, la société Aline Taxis Sarruba sera condamnée à payer la somme de 2 811, 40 euros. Le jugement sera donc infirmé quant au montant dû.

4) Sur la demande au titre des péages :

La société demande à la cour de juger que M. [C] lui doit la somme de 564,40 €, au titre des frais de péage qui n'auraient pas dû être facturés à l'employeur par ce dernier, se décomposant comme suit : pour l'année 2013 : 280,70 euros ; pour l'année 2014 : 233,70 euros ; pour l'année 2015 : 50 euros. La société soutient que M. [C] empruntait régulièrement l'autoroute alors même que cela n'était pas nécessaire.

Ainsi que l'a retenu le conseil de prud'hommes, la société Aline Taxis Sarruba ne rapporte toutefois pas la preuve d'une utilisation abusive de l'autoroute. Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

5) Sur la demande au titre des frais kilométriques et d'entretien :

La société demande à la cour de juger que M. [C] lui doit la somme de 9 116, 91 euros, au titre du coût annuel des frais kilométriques et entretien s'agissant de l'utilisation du véhicule en dehors de  son service, se décomposant comme suit : 3 699, 57 euros de frais kilométriques pour l'année 2013 ; 3 749, 34 euros de frais kilométriques pour l'année 2014 ; 556 euros d'entretien du véhicule pour 2013, 2014 et 2015. La société soutient que ces frais ont été générés par l'utilisation du véhicule conduit par M. [C] entre son domicile et l'endroit de sa prise de service.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande. La société admet en effet implicitement que M. [C] pouvait utiliser le véhicule pour rejoindre son domicile en fin de journée et pour reprendre son service le lendemain. Or, le contrat de travail ne prévoit pas l'imputation de frais à ce titre et la société Aline Taxis Sarruba ne se prévaut d'aucun mode de répartition des frais acceptés par M. [C].

6) Sur la compensation :

La demande formée par la société Aline Taxis Sarruba tendant à ce qu'une compensation soit opérée entre les sommes dues sera rejetée, puisque les demandes chiffrées de celle-ci sont rejetées.

7) Sur l'article 700 :

La société succombant partiellement, elle sera condamnée à payer à M. [C] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Sa demande formée au titre de ce même article 700 sera quant à elle rejetée.

8) Sur les dépens :

La société succombant partiellement, elle sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par un arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Sens du 30 mars 2017, sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité de repas ;

Statuant à nouveau,

Condamne la société Aline Taxis Sarruba à payer à M. [C] la somme de 2 811, 40 euros à titre de rappel d'indemnités de repas au titre des années 2013, 2014 et 2015, avec intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur par le conseil de prud'hommes ;

Condamne la société Aline Taxis Sarruba à payer à M. [C] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Aline Taxis Sarruba aux dépens ;

Rejette le surplus des demandes formées par les parties.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 17/05462
Date de la décision : 14/03/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°17/05462 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-14;17.05462 ?
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